Citations de Friedrich Nietzsche (3495)
Les livres pour tout le monde sentent toujours mauvais, une odeur de petites gens s’élève de leurs pages. Là où le peuple mange et boit, même là où il adore, l’air s’empuantit. N’entrez pas dans les églises si vous voulez respirer un air pur.
Tout bon livre est écrit pour un lecteur déterminé et ceux de son espèce, et c’est justement pourquoi il est mal vu de tous les autres lecteurs, la grande majorité : raison pour laquelle sa renommée est assise sur une base étroite, et ne peut s’édifier qu’avec lenteur. Le livre médiocre et mauvais l’est justement parce qu’il cherche à plaire et plaît en effet à beaucoup.
L’égoïsme n’est pas méchant, parce que l’idée du "prochain" (le mot est d’origine chrétienne et ne répond pas à la vérité) est très faible en nous ; et que nous nous sentons presque aussi libres et irresponsables envers lui qu’envers plantes et pierres. Que l’autre souffre, c’est chose qui doit s’apprendre : et qui jamais ne peut s’apprendre tout à fait.
Encore un siècle de lecteurs et l’esprit même sera puant.
Où cesse la solitude commence la place publique, et où commence la place publique commence aussi le vacarme des grands comédiens, le bourdonnement des mouches venimeuses.
Être cultive dorénavant signifie : ne pas laisser remarquer à quel point on est misérable et mauvais, féroce dans l’ambition, insatiable dans l’accumulation, égoïste et éhonté dans la jouissance.
Il est aussi facile de prêcher la morale que difficile d’en fonder une.
L’époque n’a plus besoin de génies, parce que ce serait jeter des perles aux cochons.
Certaines mères ont besoin d'enfants malheureux, faute de quoi leur bonté de mère ne pourrait se montrer.
Seule la grandeur de la pensée confère de la grandeur à une action ou à une cause
La grandeur d’un esprit se mesure à la quantité de réalité qu’il peut supporter.
Là où cesse le royaume des mots cesse également le royaume de l’être.
Le travail consume une extraordinaire quantité de force nerveuse et la soustrait à la réflexion, à la médiation, à la rêverie, aux soucis, à l'amour et à la haine, il présente constamment à la vue un but mesquin et assure des satisfactions faciles et régulières.
Que signifie le nihilisme ? Que les valeurs supérieures se déprécient, les fins manquent ; il n'est pas de réponse à cette question "A quoi bon ?" .
Le Dieu ancien, tout à fait « esprit », tout à fait grand prêtre, perfection tout entière, se promène dans son jardin : cependant il s’ennuie. Contre l’ennui, les Dieux mêmes luttent en vain. Que fait-il ? Il invente l’homme, — l’homme est divertissant… Mais voici, l’homme aussi s’ennuie. La pitié de Dieu pour la seule peine qui est le propre de tous les paradis ne connut pas de bornes : alors il créa encore d’autres animaux. Première méprise de Dieu : l’homme ne sut pas se divertir non plus des animaux. — il régna sur eux, il ne voulut même pas être « animal ». — Donc Dieu créa la femme. Et en effet l’ennui cessa, — et bien d’autres choses encore ! La femme fut la seconde méprise de Dieu. — « Par essence toute femme est un serpent, Hera » - c’est ce que sait chaque prêtre : « par la femme vient tout le mal dans le monde » — c’est ce que sait également chaque prêtre. « Donc la science aussi vient d’elle »… La femme a fait manger à l’homme le fruit de l’arbre de la connaissance. — Que se passa-t-il ? Le Dieu ancien fut pris d’une panique. L’homme lui-même était devenu sa plus grande méprise, il s’était créé un rival, la science rend égal à Dieu, c’en est fini des prêtres et des Dieux, si l’homme devient scientifique ! — Morale : la science est la chose défendue en soi, — elle seule est défendue. La science est le premier péché, le germe de tout péché, le péché originel.
284 - Présenter une nouvelle comme si elle était ancienne. — Beaucoup de gens paraissent irrités lorsqu’on leur apprend une nouvelle, ils ressentent l'ascendant que donne la nouvelle à celui qui la sait avant eux.
178 - Ceux qui s’usent quotidiennement. — Ces jeunes gens ne manquent ni de caractère, ni de dispositions, ni de zèle : mais on ne leur a jamais laissé le temps de se donner une direction à eux-mêmes, les habituant, au contraire, dès leur plus jeune âge, à recevoir une direction. Autrefois, lorsqu’ils étaient mûrs pour être « envoyés dans le désert », on en agissait autrement avec eux, — on les utilisait, on les dérobait à eux-mêmes, on les élevait à être usés quotidiennement, on leur faisait de cela un devoir et un principe — et maintenant ils ne peuvent plus s’en passer, ils ne veulent pas qu’il en soit autrement. Mais, à ces pauvres bêtes de trait, il ne faut pas refuser leurs « vacances » — ainsi nomme-t-on cet idéal forcé d’un siècle surmené : des vacances où l’on peut une fois paresser à cœur joie, être stupide et enfantin.
Il faut porter encore en soi un chaos, pour pouvoir mettre au monde une étoile dansante
Fuis, mon ami, dans ta solitude ! Je te vois étourdi par le bruit des grands hommes et meurtri par les aiguillons des petit.
Avec dignité, la forêt et le rocher savent se taire en ta compagnie. Ressemble de nouveau à l’arbre que tu aimes, à l’arbre aux larges branches : il écoute silencieux, suspendu sur la mer.
Où cesse la solitude, commence la place publique ; et où commence la place publique, commence aussi le bruit des grands comédiens et le bourdonnement des mouches venimeuses.
Dans le monde les meilleures choses ne valent rien sans quelqu’un qui les représente : le peuple appelle ces représentants des grands hommes.
Le peuple comprend mal ce qui est grand, c’est-à-dire ce qui crée. Mais il a un sens pour tous les représentants, pour tous les comédiens des grandes choses.
Le monde tourne autour des inventeurs de valeurs nouvelles : — il tourne invisiblement. Mais autour des comédiens tourne le peuple et la gloire : ainsi « va le monde ».
Ceux qui veulent rendre l’humanité « meilleure ».
1. Le jugement moral a cela en commun avec le jugement religieux de croire à des réalités qui n’en sont pas.