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Critiques de Gabrielle Tuloup (111)
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Sauf que c'étaient des enfants

Aborder un sujet aussi difficile en si peu de page, il fallait oser, et GabrielleTuloup y est parvenu avec brio.

Quand la police débarque au collège André Breton pour y arrêter 8 élèves accusé de viol en réunion, c'est le choc pour toute l'équipe pédagogique.

Chacun réagit à sa façon, depuis ceux qui sont incrédules jusqu'à ceux qui déclarent froidement que quand on commet un crime d'adulte on doit être jugé comme un adulte, en passant par toutes les nuances de ce qu'ils disent ok ils ont commis un crime, mais ce sont des enfants.

Du côté des élèves, l'opinion est bien plus tranchée, mais pas dans le bon sens. Il y a ceux qui pensent que leurs copains sont purement et simplement innocents, mais il y en a beaucoup qui déclarent qu'ils sont peut-être coupables mais que la fille, qui a une "réputation", l'a bien cherché. Ils sont plus choqués par le fait qu'elle ait osé briser la loi du silence en portant plainte que par l'horreur de ce qui lui est arrivé.

D'ailleurs, moi, j'ai été choquée par le fait que les filles, plus que les garçons, blâment la victime..

J"ai un peu regretté qu'une grande part soit consacrée à Emma la prof de français et à sa propre histoire concernant la violence faites aux femmes.

Si je compatis à ce qu'elle a subi et pense que ce doit être porté au grand jour, j'ai trouvé dommage que le livre ne se concentre pas plus sur la signification de son titre. J'aurais préféré une alternance entre les réactions de l'entourage des agresseurs, et la réalité de la vie de la jeune fille une fois qu'elle avait passé le cap de la plainte.

La manière dont l'histoire se centre soudain sur Emma m'a donné l'impression que l'histoire du viol collectif n'était qu'un prétexte à raconter son histoire.

J'ai trouvé ça dommage car tout l'intérêt du livre résidait en l'opposition de l'âge des coupables et de la nature de leurs actes.

Le livre est trop court pour traiter 2 sujets aussi similaires soit-il, j'ai donc une impression d'inachevé dans les 2 histoires: il m'a manqué une conclusion à la 1ère, et plus de développement dans la 2nd.

Pour autant, la plume de l'auteur est agréable et, bien que le sujet soit difficile, j'ai passé un excellent moment.
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Sauf que c'étaient des enfants

Un jour, la police entre dans un collège de Stains et des élèves sont arrêtés. Ils sont très jeunes et sont suspectés d'avoir participé à un viol en réunion dans la cité sensible dont dépend le collège. La victime du viol a osé parler, encouragée par sa mère et la déflagration est terrible. Car la victime, Fatima est menacée, accusée d'être une moins que rien. Que ce soit le directeur Lusnel, les enseignants, les élèves, tous sont obligés de regarder en face une réalité qui dérange : des garçons très jeunes qui considèrent le viol comme une évidence, un rite de passage. Cet évènement renvoie à son passé d'Emma, une enseignante qui l'avait soigneusement enfoui pour s'obliger à avancer.

Le silence, les non-dits, la violence, les a-priori : l'auteur nous parle d'un sujet très difficile avec une grande délicatesse et en même temps, nous donne la sensation de prendre un coup de poing dans la figure. Pas de sensationnalisme, un état des lieux terrible et juste.
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Sauf que c'étaient des enfants

Une matinée comme chaque autre au collège André-Breton de Stains. Les élèves sont dans les classes, les professeurs devant eux, les surveillants, le principal, la CPE, sont dans leurs bureaux respectifs. Oui, ce mardi 27 janvier 2015 avait commencé ni mieux, ni plus mal que les autres jours pour l'équipe et les élèves de cet établissement situé au milieu des "cités". Le déroulement ordinaire de la journée est perturbé par la visite au principal de la capitaine Marnin et de Fatima, une jeune fille de 15 ans, qui accuse huit élèves du collège de viol en réunion. Quelques jours après, les huit garçons sont sortis de leurs classes par les surveillants, interpellés par la brigade de protection de la famille et conduits en garde à vue.

Dès lors, l'univers du collège éclate et se recompose différemment : brutalement confrontés à leur cécité, les adultes vacillent entre sentiment de culpabilité, honte, incrédulité, questionnement et conflit avec le principal alors que les collégiens prennent fait et cause pour les suspects. Chacun se satellise plus ou moins autour de ce fait monstrueux : le viol d'une gamine de 15 ans par huit élèves que chacun côtoie quotidiennement. Emma Servin, la professeure de français, semble la plus atteinte par les évènements. Jusqu'à perdre le contrôle face à une élève qui accuse Fatima de l'avoir "bien cherché".

Concentrée sur les répercussions du drame, la première partie m'a saisie à la gorge jusqu'à m'en faire perdre le souffle. L'auteure n'occulte rien de l'onde de choc qui fracasse le collège, mais aussi les familles et la cité entière. L'écriture rend compte des faits, de l'imbrication du privé et du professionnel, de l'intime et du public, d'une manière précise, factuelle. Une écriture qui m'a sauté à la figure comme un poing.

La seconde partie, en revanche, m'a laissé un goût amer sans que je puisse précisément mettre le doigt sur ce qui m'a mise vraiment mal à l'aise. Les vacances servent de transition entre les deux et la focalisation se centre sur Emma Servin. Le courage de Fatima qui a osé dénoncer le viol dont elle a été la victime constitue une sorte d'électrochoc pour l'enseignante et la marche qu'elle effectue est aussi bien physique que psychologique.

Je crois que ma réserve vient de cette construction narrative et de la variation de l'écriture qui l'accompagne. Il m'a semblé assister à l'instrumentalisation romanesque du viol de Fatima dont la situation est plus ou moins occultée dans cette seconde partie. Tout se passe, pour moi, comme si l'auteure avait voulu faire "tenir" deux romans en un seul et que ses choix narratifs ne permettaient pas une parfaite homogénéité. Si bien qu'au lieu de gagner en puissance, la narration désunit le propos et en fragmente la portée.

Mais probablement aussi que l'intensité de la première partie, cette écriture concentrée, dense, sans compromis, a construit un horizon d'attente exigeant qui a été déçu par la suite. Il n'empêche que je regrette beaucoup que l'ensemble du roman n'ait pas été, en ce qui me concerne, de la même veine que ce que son début laissait entrevoir.



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Sauf que c'étaient des enfants

"Je souffre de ma vie intacte dedans ma vie ruinée" Christian Bobin la vie souterraine. l'auteure a mis en exergue cette phrase de son roman. En effet, elle va nous parler de vie ruinée, mais intacte. Un sujet terrible, impitoyable et si difficile à appréhender. Un jour, des policiers vont venir interpeller des élèves d'un collège, après la courageuse dénonciation d'une jeune fille. Comment peuvent réagir les personnes, adultes et enfants, face à cet acte impitoyable qui est un "viol en réunion", terme judiciaire. Les garçons arrêtés sont encore des enfants, des enfants pour leurs parents, pour leurs enseignants, pour le personnel administratif du collège (le principal, la CPE, les surveillants). Par la voix de plusieurs personnages, l'auteure va réussir à parler de ce sujet si délicat. Des pages terribles, des constats difficiles et des hommes et des femmes qui vont se questionner sur ce fait terrible. Chacun va essayer d'appréhender ces faits avec son ressenti, son histoire. De très belles pages sur une professeure qui affronte ce fait mais qui fait remonter aussi des maux passés. Un texte éprouvant mais qui nous interpelle chacun et qui nous questionne sur notre propre ressenti : comment réagir face à de tels actes, que l'on soit victime, que l'on soit complice, que l'on soit témoin. Merci aux 68premiéresfois de continuer à suivre des auteurs et de nous fait lire de tels textes.
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Sauf que c'étaient des enfants

Dans un collège, une jeune fille de 15 vient identifier les quinze adolescents qui l’ont violée ou s’en sont rendus complices. Les collégiens prennent fait et cause pour les agresseurs. La jeune fille « l’a bien cherché » et de toute façon « elle aurait dû se taire ». Emma, prof de français, est horrifiée par l’acte commis par certains de ses élèves et par la réaction des autres. Un texte qui pose les bonnes questions sur les violences, le sexisme et le viol en milieu scolaire, la loi du silence et la misogynie dans les quartiers. Quelle est la responsabilité de ces enfants dans leurs actes ? Celle des adultes ?
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Sauf que c'étaient des enfants

Le quotidien d’un collège de Stains se trouve bousculé par l’accusation d’une jeune fille de la cité voisine. Fatima affirme à la police avoir été violé par des adolescents fréquentant cet établissement. Huit enfants de treize à quinze ans sont désignés comme ayant participé ou été présents. Le principal, la CPE, les professeurs, les surveillants et les élèves réagissent différemment à ce drame. Mais Emma Servin, professeur de français, n’arrive pas à se contenir face à la réaction d’une de ses élèves et loin du collège essaie de se retrouver et de mettre des mots sur son drame personnel sur les chemins de Compostelle…

Gabrielle Tuloup retranscrit très bien la vie intérieure d’un collège, les interactions entre élèves et professeurs, élèves et surveillants, professeurs et principal… à travers différents points de vue, rapports et bulletins scolaires… Elle nous met face à la façon de penser des jeunes entre eux qui n’hésitent pas à se juger cruellement jusqu’à affirmer que si Fatima a été violée, “c’était qu’elle l’avait bien cherché”. Et peut-être que le texte aurait été encore plus fort si la romancière avait continué à creuser ce sillon plutôt que de nous embarquer dans le périple personnel de la professeur de français. Elle m’a alors sorti de l’histoire qui reste ainsi sur un sentiment d’inachevé…
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La nuit introuvable

Ce premier roman est un peu l'histoire des non-dits , une relation assez compliquée mère-fils , emprunte de froideur et même d'indifférence .

En revanche , le fils de Marthe est , ou était très proche de son père .

Nathan Weiss voyage entre Paris et la Slovénie où se trouve son emploi . Il a pratiquement coupé les ponts avec sa mère , Marthe .

Il se trouve extrêmement décontenancé lorsqu'une amie de sa mère lui annonce qu'elle est atteinte de la maladie d'Alzheimer , et qu'elle lui a laissé huit lettres , sa voisine étant chargée de lui en remettre une à chacune de ses visites . Réticent au début , il accepte finalement de prendre connaissance de ces lettres .

Et là , il découvre les différentes facettes de sa mère qu'il ignorait jusque là , une femme amoureuse de son père , une mère incapable d'exprimer son amour à son fils unique , Nathan , et toutes les failles qui la déchirent .

C'est aussi une course contre la montre : à chaque lettre qu'elle écrit , la maladie gagne un peu plus de terrain .

On ne peut parler de "la nuit introuvable" sans évoquer René Char , et "fureur et mystère" , l'ensemble des textes que l'auteur a rédigés entre 1938 et 1945 , dans la résistance : "Marthe , (..) je veux être pour vous la liberté et le vent de la vie qui passe le seuil de toujours avant que la nuit ne devienne introuvable" .

Les lettres de Marthe sont poignantes , elle s'exprime avec une sincérité émouvante et s'épanche sans retenue , sachant que sa mémoire et sa compréhension vont progressivement s'estomper , à mesure que la maladie gagne du terrain .

En même temps , on découvre que son fils , qui avait tout fait pour l'oublier , renoue avec sa mère , par courrier interposé . Son regard sur elle va se trouver transfiguré . En définitive , ses courriers vont le rapprocher intensément de sa mère .

Ce roman aborde plusieurs thèmes , la vieillesse , les maladies neurodégénératives , et surtout l'incapacité de certains êtres à dire leurs sentiments , leur amour en l'occurrence .

Ce texte m'a profondément ému , il y a au fil des pages beaucoup de délicatesse et de sensibilité qui m'ont touché .
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La nuit introuvable

Il était très improbable que Nathan se rapproche un jour de Marthe (sa mère qu’il nomme par son prénom), leurs relations étant verrouillées et limitées au strict minimum depuis la mort du père quatre ans auparavant.

Pourtant, un coup de fil d’une amie de sa mère le contraint à lui rendre visite, il s’exécute de fort mauvaise grâce lors d’un retour à Paris, lui qui s’est exilé pour raisons professionnelles en Slovénie.

Il découvre que Marthe a été diagnostiquée malade d’Alzheimer et qu’elle a pris soin de lui laisser huit lettres dont il doit prendre connaissance selon un calendrier fixé par elle. Ces lettres ont été rédigées avant que la nuit ne recouvre la mémoire de Marthe.

Le texte est délicat et pudique, il interroge sur les liens filiaux, les non-dits, les peurs enfouies ; le récit ménage un certain suspense, j’étais avide des révélations de Marthe au même titre qu’Adrien au fur et à mesure qu’il lit les lettres.

C’est une lecture agréable qui tient en haleine que j’ai bien appréciée.

De relations quasi inexistantes entre la mère et son fils, il va naître au fil des pages une certaine tendresse du fils pour sa mère qui pourtant ne prononcera jamais le mot « maman ».

D’une manière plus générale le texte interpelle chacun sur la vieillesse et les liens filiaux et interroge avec sensibilité.





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La nuit introuvable

La nuit introuvable n’est pas vraiment un roman comme les autres : court, à l’écriture incisive, il nous conte une histoire somme toute assez banale mais qui prend une dimension toute autre grâce au traitement de l’auteur. On suit avec délectation les destins de deux personnages blessés par la vie, jusqu’à comprendre ce qui a vraiment joué contre eux. C’est bien ficelé, bien écrit et intelligent.



Nathan vit en Slovénie depuis la mort de son père. A presque quarante ans, il n’a jamais réussi à se lier à sa mère qui l’a toujours laissé de côté. A tel point que Nathan s’est convaincu que sa mère n’avait plus assez d’amour pour lui, après avoir tout donné à son mari. Heureusement que ce dernier fut un bon père. Le jour où il reçoit une requête de la voisine de sa mère le priant de venir voir cette dernière lors d’un de ses passages à Paris, Nathan est tenté de ne pas y aller. Mais il finit par s’y rendre et trouve sa mère diminuée, atteinte d’Alzheimer. Avant que la maladie ne fasse trop de ravage, elle a confié huit lettres à la fameuse voisine. A chacun de ses passages, il devra rendre visite à sa mère et aura droit à une missive. Pas emballé de prime abord, il finit par s’y plier. Il fait alors la connaissance par ces lettres de la jeune femme qu’a été sa mère, elle-même attachée à une mère diminuée, qui a vécu une jeunesse pas toujours facile, au gré de rencontres plus ou moins avisées. Elle lui conte tout, avec sincérité, ses erreurs et ses victoires, ses chances et ses espoirs. Et il comprend. Parce que se cachent dans ses lettres les raisons qui ont amené cette mère à délaisser son petit garçon. Les raisons qui font que Nathan est ce qu’il est : seul après un divorce, s’attachant à des femmes avec qui ça ne pourra fonctionner. Et si cette dernière volonté d’une mère peu aimante était le plus beau cadeau qu’elle pouvait faire à son fils avant de partir afin qu’il parvienne enfin à se construire ?



En cent cinquante et une pages, Gabrielle Tuloup parvient à l’exploit de nous conter une histoire complexe, bien ficelée, aux personnages parfaitement construits et denses. Une histoire loin d’être bâclée ! On y ressent tout le désarrois de Nathan, sa colère, sa tristesse, sa solitude, son mal-être. Et on sent sa lente remontée à la lecture des lettres de sa mère Marthe. On comprend dès le départ cet homme blessé avec lequel on compatit, on est avec lui, « dans son camp », face à cette mère peu aimante qui lui laisse un goût amer dans la bouche. Et comme lui, on s’insurge face à cette manipulation, ce jeu des lettres contre visites, comme si elle se jouait de lui, comme si elle l’obligeait à ne pas la laisser seule afin d’espérer des réponses qu’il n’est même pas certain d’avoir à la fin de sa lecture. Mais comme lui, on est intrigué, on veut quand même savoir.



Marthe est un personnage complexe, qu’on ne connaît que par Nathan. Dans les lettres, on rencontre une vieille dame qui a un regard vif et sans concession sur sa jeunesse, qui sait également distiller le suspens comme personne. On ne sait où elle veut en venir en parlant d’une de ses rencontres amoureuses compliquées avant sa rencontre avec son mari Jacques. Et si à un moment donné, on a bien une idée de ce qui attend Nathan, Gabrielle Tuloup parvient à nous surprendre et à nous détromper complètement ! Parce que, ce qui se cachent dans les lettres de Marthe, c’est avant tout une grande souffrance qu’elle dépeint crument et sans concession, ce qui rend ce personnage éminemment touchant. La plus belle victoire de l’auteur est sans conteste d’avoir réussi à dépeindre une histoire si commune et à la fois exceptionnelle avec une vraie retenue dans les émotions. Elle ne tombe jamais dans le pathos, ce qui rend son roman encore plus beau.



Surtout que le passé de Marthe se mêle à son présent, à sa maladie, ses pertes de repères, ses confusions, prenant Nathan pour Jacques, et à la difficulté de s’occuper d’une personne atteinte d’une telle maladie. Et là encore, l’auteur parvient à nous émouvoir de son sort sans jamais tomber dans des excès, en restant à chaque instant dans un ton juste, digne, réaliste, et qui nous donnent de fait l’impression que Nathan et Marthe pourraient tout à fait exister tels quels.



Et tout cela est possible grâce à l’écriture très particulière de Gabrielle Tuloup qui nous conte le chassé-croisé d’une mère et de son fils, en quête d’une mémoire bientôt effacée. Ses phrases sont courtes et incisives, ses mots justes et vrais, sans emphase et envolée. On est dans le réel. Et quand on sait qu’elle fut championne de slam, on comprend mieux son écriture. En peu de pages, elle parvient à nous conter une vraie histoire dense, aux personnages étoffés et complexes.



Ce roman est une vraie pépite, lue en quelques heures et qui nous touche au cœur. Bien écrit, aux personnages saisissants, à l’histoire plus vraie que nature et touchante au possible, je ne peux que vous conseiller avec ferveur le premier roman de Gabrielle Tuloup.
Lien : https://breveslitteraires.wo..
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La nuit introuvable

Ce roman a plusieurs thèmes : fin de vie des parents et Alzheimer, secret de famille, instinct de maternité. C’est bien écrit, il y a un petit suspense, mais je n’ai pas été convaincue.

L’approche de l’Alzheimer est restée très superficielle. Seule est abordée la peur de la mère d’oublier ses secrets, mère toute de même assez manipulatrice. L’auteure étant très jeune est sans doute plus restée dans l’imaginaire que dans le concret de cette terrible fin de vie.

Il m’a été difficile d’admettre les raisons de la froideur de la mère. Je peux très bien comprendre qu’une mère n’aime pas son enfant, pour ça il peut y avoir des tas de raisons, mais comment se retenir de toucher, câliner un petit quand on éprouve des sentiments pour lui? Et si j’étais le fils je ne suis pas sûre que je pardonnerais.



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La nuit introuvable

Tu vas être un peu moins enthousiaste que d’autres sur ce titre… et quel dommage, car tu étais toute disposée à l’aimer. Nathan, la quarantaine, exilé en Slovénie pour le travail, reçoit un beau jour l’appel d’une voisine de sa mère qu’il n’a pas vu depuis des années. Elle l’intime de rendre visite à Martha, qui a besoin de lui. N’ayant guère reçu d’affection maternelle de la part de cette femme, Nathan s’exécute, surtout par devoir, et le souvenir de son père Jacques, adoré. Martha est atteinte de la maladie d’Alzheimer et ne le reconnaît pas. Jeanne, la voisine, a été chargée par elle de donner à son fils une lettre numérotée à chaque visite. Il y en a huit en tout. Nathan découvre donc une à une ces lettres et à travers elles l’histoire d’une femme dont il ignorait tout. Et toi lectrice, tu n’as pas été touchée là ni par l’écriture de Gabrielle Tuloup, ni par ces lettres, ni par la réaction de son fils. Tu as eu un sentiment à la fois de déjà-vu, et de mieux fait ailleurs. La transition entre la lecture des courriers et le cheminement de Nathan ne t’a pas semblé assez développé, et le pathos bien trop grossièrement amené. Cependant, il s’agit là d’un premier roman d’une toute jeune romancière en devenir, ce livre a touché heureusement bien d’autres blogueuses (il est d’ailleurs dans la sélection de rentrée d’hiver 2018 du groupe des 68 premières fois), et tu es persuadée de relire cette plume de nouveau avec plaisir. Une rencontre qui ne s’est pas faite sur ce roman, c’est tout.
Lien : https://leslecturesdantigone..
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La nuit introuvable

La nuit introuvable est une histoire très touchante, très émouvante, qui nous pousse dans la réflexion. Elle nous pousse à voir, à comprendre, peut-être même à pardonner l'autre, le parent ou l'enfant, pour avancer, voire tourner la page.



La nuit introuvable c'est l'histoire de Nathan Weiss, 40 ans, qui s'est éloigné de sa mère, Marthe, juste après le décès de son père. Il est parti pour la Slovénie où une nouvelle vie l'attend, un nouveau job, loin de Paris, et de cette femme. Les années ont passé et voilà qu'un jour il reçoit l'appel téléphonique d'une inconnue, pour lui annoncer la maladie (Alzheimer) de sa mère, et souhaite le voir.



Comment réagir face à un tel appel ? Bien évidemment, le choc est là, puis, vient la peur, la douleur de perdre l'autre, la colère aussi, malgré l'éloignement qui s'est installé au fil du temps, jusqu'au point de non-retour. Hélas, Nathan est fils unique. L'unique famille, c'est lui. Il rentre à Paris. Une fois arrivé, il retrouve Jeanne, l'inconnue du téléphone, et apprend par celle-ci, que sa mère avait écrit huit lettres avant ses pertes de mémoire et qu'elle doit obligatoirement lui en remettre une à chacune de ses visites. Intrigué par tout ce mystère, mais furieux de se faire manipuler, Nathan accepte de lire la première lettre.



Comme je le disais plus haut, l'histoire est touchante, mais aussi très réaliste et nous met face à nos propres responsabilités, nos priorités, et nos blessures, pour certains, dans le sens où l'on peut facilement se mettre à la place du personnage principal et dans sa complexité. On sent que ce n'est pas évident pour lui de revoir cette femme qui l'a toujours rejeté, quand il était enfant, loin de l'amour qu'il aurait dû recevoir. Et pour quoi, d'ailleurs ? Pourquoi une telle indifférence ? Après toutes ces années à oublier, le voici à nouveau devant sa mère qui ne le reconnait peu ou pas, avec des lettres regorgeant de secrets, de non-dits, et d'un passé qu'il était loin de se douter vis-à-vis de sa famille.



De sa plume poétiquement belle et délicate, l'autrice aborde la maladie d'Alzheimer tout en finesse, juste dans les contours, avec un sujet très fort : la reconstruction d'un lien fissuré, voire inexistant, entre le parent et l'enfant adulte, pendant la maladie, à travers des lettres pour tenter de réparer un passé mal construit, rempli d'erreurs et de regrets... avant qu'il ne soit trop tard. On comprend que souvent tout remonte à bien loin.



Le pardon ou la rancœur...



Je recommande !
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Sauf que c'étaient des enfants

Un peu de mal à me mettre dans le roman. Le livre se lit vite. Nous avons deux expériences pour une histoire. J'ai eu du mal à voir ou voulais en venir l'autrice. Nous allons aborder le sujet du viol, du point de vue de différents protagonistes. J'avoue que n'ayant pas accroché à l'histoire mon point de vue n'est pas optimal, mais cela reste un sujet intéressant à lire.
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Sauf que c'étaient des enfants

👬 « Fatima était tombée amoureuse de ce type de quatre ans son aîné. Elle rêvait d’une belle histoire. Peut-être la bonne. Il était adulé de tous, en ayant de préférence elle se sentait privilégiée et bénéficiait par rebond de la considération de son entourage. Les civilités furent de courte durée. Quand au bout de plusieurs mois elle accepta de le suivre, comme les autres avant elle, pour « faire l’amour » sur un matelas défoncé dans un recoin sale, toute courtoise à son égard cessa. »

(P.83)



👬 Dans le collège de Stains, ce lundi matin, la police débarque et emmène huit garçons. Ces enfants sont suspectés de viol. Ils ont entre treize et dix-huit ans. Dans les salles de classe, dans les couloirs, chez les profs, les pions et les élèves, c’est la stupéfaction. Seul le principal était dans la confidence. Et évidemment, il n’a rien pu dire : il a tenté de préserver au maximum les élèves, les suspects surtout, de leur accorder un peu de dignité.



👬 Je n’irai pas plus loin dans la description de ce roman : je l’ai détesté. Rien ne m’a plu : ni le style (que j’ai trouvé d’une abominante platitude pour un thème si brûlant), ni la structure du roman (d’eux récits qui se mêlent au point qu’on en perd le sujet central, à savoir le viol d’une jeune fille par un groupe de mineurs), et encore moins l’accumulation abusive de clichés (sur la vie en banlieue, les surveillants, Charlie Hebdo [oui parce qu’on parle même de ça], les profs désabusés, le directeur las qui ne sait plus quoi faire pour aider ces jeunes et oui, la police, bien sûr la police).



👬 Tout pour moi est survolé, il n’y a aucune psychologie, aucune empathie, aucune transcendance, rien : je n’ai rien ressenti face à cette lecture, sinon la colère d’avoir perdu mon temps.
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Sauf que c'étaient des enfants

Un matin, la police entre dans un collège de Stains. 8 élèves sont suspectés de viol en réunion sur une fille de la cité voisine, Fatima. Leur interpellation fait exploser le quotidien de chacun des adultes qui entourent les enfants. En quoi sont-ils, eux aussi, responsables ? Il y a les parents, le principal, les surveillants, et une professeure de français, Emma, dont la réaction extrêmement vive surprend tout le monde.



Tandis que l’événement ravive en elle des souvenirs douloureux, Emma s’interroge : face à ce qu’a subi Fatima, a-t-elle seulement le droit de se sentir victime ? Car il est des zones grises où la violence ne dit pas toujours son nom…



Qu'est-ce qu'un abus sexuel dans notre société ? Que recouvre la notion de consentement ? Et la loi du silence dans tout ça ?



Gabrielle Tuloup nous livre un récit difficile écrit avec simplicité et pudeur, abordé sous un angle particulier. Peu de pages, peu de détails. Juste les faits et les réactions, les attitudes, les réflexions qu'ils engendrent.



Comment réagir face à ces actes ? Dans une société hypersexualisée dans laquelle les jeunes sont baignés, quelle attitude adopter pour les conscientiser ?



Ce sont des enfants. Oui. Mais ces enfants sont le reflet d'un monde d'adultes. Peut-être que certains de leurs comportements ciblent les failles de ce monde ?



La question n'est pas de pointer du doigt le coupable idéal. Ce n'est pas une accusation. Il s'agit ici de lancer des pistes de réflexion pour éviter ce genre de choses, ou encore guérir de l'irréparable.



La deuxième partie s'est fortement démarquée pour moi. Une plume absolument superbe sert le questionnement d'Emma, sa réalité et la violence qui l'a accompagnée. Certains passages sont à épingler, d'une pureté absolue.



Une lecture dont j'ai encore du mal à parler aujourd'hui tant elle regorge de choses à penser, à débattre, à dire. Je vous la conseille vivement !
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Sauf que c'étaient des enfants

Sauf que c'étaient des enfants.



Un titre qui en dit long sur ce roman mais pas assez en même temps.



Nous allons suivre une équipe pédagogique d'un collège de banlieue de Paris et plus particulièrement le directeur et une enseignante. Un matin, le directeur reçoit la visite de la police avec une jeune fille, Fatima. Fatima a été violée par plusieurs garçons du collège et les reconnais grâce à un trombinoscope.



Dès lors, nous assistons au questionnements de l'équipe pédagogique sur ce qu'elle n'a pas vu, ce qu'elle aurait pu faire pour éviter cela. Mais le sujet va plus loin, le déni, le mouvement de groupe, le silence, l'acceptation, la banalisation... sont présents dans ce roman.



Malheureusement, j'ai trouvé le roman trop court et auraient voulu en savoir plus sur l'enquête et la jeune Fatima. Le roman fait moins de 200 pages et il y a une partie sur une des professeurs qui fait face à la situation avec beaucoup plus de difficulté que les autres donc l'histoire au lycée passe très vite.



Malgré ce côté court, l'autrice à tout de même réussi à me captiver.
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Sauf que c'étaient des enfants

Reçu dans le cadre de la Masse critique de septembre 2021 (merci !), j'avais demandé ce roman dans une perspective pédagogique. Etant enseignante (HG-EMC) et ayant été confrontée à cette problématique du viol d'une mineure, le sujet m'interpellait.

Quand j'ai reçu le roman, j'ai eu cette réaction : "mais c'est tout petit !" soit un "zut" de déception pour moi, mais aussi "un bon point pour les élèves" dont souvent la motivation décroît à la vue d'un "pavé".

Je sais qu'il ne faut pas préjuger de la consistance, de la qualité d'une histoire à l'épaisseur du livre ! mais la perception d'un élève est différente ..si déjà ils lisent !

Pour vous donner mon avis, je ne vous fais pas le résumé (cf. la 4eme de couverture) mais je vais évoquer certains détails : ATTENTION SPOILERS donc....

Le roman est divisé en deux parties, dont le fil conducteur est le viol à l'origine du roman.

La première partie m'a littéralement happée. Elle se déroule principalement au collège où sont scolarisés les 8 garçons a priori coupables d'un viol en bande sur une jeune fille de 15 ans dans la cité sur le trottoir d'en face. Passons sur le titre du premier chapitre qui m'a fait hurler avant d'en comprendre le pourquoi à sa lecture.

L'autrice évoque dans cette partie, je pense avec beaucoup de justesse, de finesse, de pudeur et de sobriété, les réactions des uns et des autres, adultes et enfants, face à cet événement. On en voit les conséquences d'un point de vue judiciaire, sur les relations entre les élèves, les professeurs, les éducateurs et le personnel encadrant et accompagnant. J'ai trouvé cette partie vraiment bien faite, intense même si un peu journalistique dans l'idée de montrer tous les points de vue, l'impact de l'affaire dans tous les domaines ... SAUF qu'une seule personne n'a pas la parole dans tout ça et j'ai trouvé ça vraiment regrettable : Fatima, la victime. N'y voyez aucun voyeurisme ou inspiration malsaine de ma part, mais pédagogiquement parlant, ça manque. Le lecteur la voit successivement à travers les yeux du directeur du collège, de la gendarme, des autres élèves, de sa mère; Les élèves expriment leur opinion sur elle : "elle l'a cherché" domine ou "elle aurait dû se taire, ne pas dénoncer", des avis très durs mais probablement très réalistes sur ce que disent les jeunes dans ces situations. Mais rien venant de Fatima elle-même. Si le but du roman était de dénoncer un fait de société et d'encourager à la parole, de dévoiler les mécanismes de l'avant et de l'après, à mon sens il manque là quelque chose. Que s'est-il passé pour que Fatima et ses violeurs se retrouvent là ? Le seul moment dans la première partie qui donne la parole à une victime mineure et interroge sur les pressions sexuelles sur les adolescentes et pose la notion du consentement est l'histoire de Lina, bien trop brièvement glissée dans la trame générale. Pour voir le mécanisme d'emprise qui peut aboutir à un viol par personne proche, il faut aller dans la seconde partie :"sauf que c'était moi".

La seconde partie m'a surprise au vu du titre du roman qui semblait centré sur les enfants. L'écriture n'est pas différente, mais le rythme de l'histoire l'est, ce qui est un peu perturbent. La parole est donnée à Emma, la prof de français des garçons, car le viol de la jeune fille et son courage pour l'avoir dénoncé, les réactions contrastées de l'entourage (de la condamnation à l'indifférence) lui font prendre conscience de sa propre histoire. Elle en culpabilise d'ailleurs, de comparer son histoire avec Fatima : y a-t-il un viol pire qu'un autre ?

Emma est tombée amoureuse d'un pervers narcissique (même si le mot n'est pas prononcé) qui déploie sa violence d'abord dans les mots puis les actes et les coups jusqu'au viol. L'affaire de Fatima révèle à Emma ce qu'elle a enfoui et lui montre qu'elle doit réagir. La révélation se passe en filigrane au fil de l'histoire de Fatima (première partie) mais surtout dans la seconde partie, pendant sa marche sur le chemin de Compostelle (en février !) et aboutit à une très laborieuse séance de plainte au commissariat ... sans qu'on sache la suite.

Cette seconde partie est en elle- même aussi très intéressante, son lien avec la première est très clair : le viol, elle démonte le processus d'aliénation d'une victime par un proche qui devient un bourreau et conduit à l'horreur.

Le lien entre les deux parties est explicite mais pour moi chacune des deux histoires aurait mérité son roman. D'un point de vue pédagogique, je ne suis pas sure de la façon dont les élèves percevraient la seconde partie : il y aurait surement des frustrations de ne pas savoir ce qu'il arrive à Fatima ensuite, et aux garçons dans le processus judiciaire ? Verraient-ils dans le processus décrit par Emma un écho de ce que l'on devine subi par Fatima (pressions continuelles d'un proche pour céder ...) ?

Par ailleurs, l'administration scolaire et la police en prennent sérieusement pour leur grade dans le roman : il me semble qu'il ne faut pas faire de généralité ! et les réactions des instances censées porter secours n'incitent pas vraiment à la parole, de même que les réactions majoritaires de l'entourage (parlons du "devoir conjugal mal compris" ????). Le roman inciterait-il à libérer la parole ? ou annonce-t-il juste que si vous avez le courage de le faire, vous allez devoir affronter beaucoup de chose, mais sans qu'on sache si la parole a vraiment porté de bons fruits ?

En bref : le roman aborde en première partie un sujet hélas aussi dur que très réel, avec justesse et finesse, mais d'une façon qui me semble lacunaire (parole de la victime manquante) et inachevée (fin de l'histoire ?); il dénonce en seconde partie , de façon pertinente mais sans le nommer, l'emprise d'un pervers narcissique.

Un roman court, intense, au style d'écriture agréable, fort par les thèmes abordés mais à mon sens mal construit.

Me voilà bien embêtée pour mettre une note ...
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Sauf que c'étaient des enfants

🏢 Sauf que c'étaient des enfants - Gabrielle Tuloup 🏢

@editions_philippe_rey



Je mets la quatrième de couverture car je ne ferai pas mieux que l'éditeur pour résumer ce livre.

Un matin, la police entre dans un collège de Stains. Huit élèves, huit garçons, sont suspectés de viol en réunion sur une fille de la cité voisine, Fatima. Leur interpellation fait exploser le quotidien de chacun des adultes qui entourent les enfants. En quoi sont-ils, eux aussi, responsables ? Il y a les parents, le principal, les surveillants, et une professeure de français, Emma, dont la réaction extrêmement vive surprend tout le monde.

Tandis que l'événement ravive en elle des souvenirs douloureux, Emma s'interroge : face à ce qu'a subi Fatima, a-t-elle seulement le droit de se sentir victime ? Car il est des zones grises où la violence ne dit pas toujours son nom...



C'est un sujet délicat que l'auteure aborde : le viol. À l'heure où les violences faites aux femmes sont au cœur des discussions, des débats et des reportages, ce roman résonne particulièrement.

L'auteure aborde le viol en réunion de Fatima à travers une multitude de points de vue : les profs, le principal, les élèves, la mère de la victime, les parents des accusés... J'ai trouvé le ton très juste. Et j'ai trouvé qu'il était bien d'aborder les conséquences au sens large, l'impact sur l'entourage des victimes et des bourreaux. On est tour à tour atterré, révolté, attendri, perdu, désespéré et admiratif du courage qu'il faut pour parler.

C'est un roman fort, poignant, le genre de roman qui reste dans votre esprit bien après l'avoir refermé.
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La nuit introuvable

Le début du livre est un coup de poing au ventre. Ça m'a beaucoup marqué.

Sa description de cet événement est époustouflante et son analyse psychologique très perspicace. L'auteur nous fait plonger dans cette banlieue avec ses codes et sa propre culture. Et nous la montre à travers des gosses, ce qui fait mal car ça nous montre le délitement de notre société, qui abandonne une partie d'elle et la laisse livrée à une évolution très préoccupante.

La fin du livre est moins percutante et plus romanesque. Mais après le début enivrant je n'ai pas accroché.

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Sauf que c'étaient des enfants

Dans un collège de Stains, huit jeunes garçons parmi lesquels un élève de cinquième sont interpellés en plein cours, suspectés de viol en réunion sur Fatima, une fille de la cité voisine. Un effroyable événement qui produit un séisme au sein de l’équipe du collège, du principal aux surveillants. Ceux dont ils avaient la charge, ceux qui, dans l’enceinte de l’établissement, se comportent comme les enfants qu’ils sont encore endossent soudain un statut de criminels. Ont-ils conscience de la gravité de leur acte ? Nombreux sont les élèves - des deux sexes - à prendre la défense de leurs camarades et à reporter la responsabilité de ce qui s’est passé sur la victime. Tandis que les tensions divisent l’équipe pédagogique, Emma, professeure de français, ressent une vive colère. Une colère qu’elle a d’autant plus de mal à canaliser que l’événement fait écho à une douloureuse expérience personnelle... La situation était pourtant bien différente. N’avait-elle pas quant à elle donné son consentement ?



Voilà. Le mot est lâché. Celui qui s’affiche d’emblée sur la couverture du livre de Vanessa Springora (que je viens également de lire) s'invite à la fin de ce roman, explicitant ainsi tout son propos. Cette notion était déjà au coeur du dernier roman de Karine Tuil (que j’ai lu mais non commenté) comme elle l’a été dans d’autres ouvrages récents, et elle est l’épicentre de l’un des principaux débats qui animent aujourd’hui notre société.

Ce qui est selon moi une excellente chose. Autant de paroles libérées, de témoignages qui paraissent à certains brutaux, excessifs, mais qui, à mes yeux, n’égaleront jamais la violence de ce qu’ils dévoilent. Autant de regards qui aident à comprendre ce qui a été si longtemps étouffé, accepté, intériorisé. Autant d’approches qui permettent de saisir toute l’ambiguïté et le malentendu régnant - et entretenu ? - autour de cette notion. Certains clameront leur ras-le-bol, voire crieront à l’opportunisme. Je crois pour ma part qu’il est des réalités qui doivent être martelées.



S’inscrivant dans le plus pur registre de la fiction, le roman de Gabrielle Tuloup doit pourtant certainement beaucoup à des éléments vécus. Je veux dire par là qu’étant professeure de lettres en Seine-Saint-Denis, elle se trouve aux avant-postes pour entendre la manière dont de tout jeunes gens parlent de sexualité, perçoivent et conçoivent les relations entre les sexes, et la façon surtout dont le vocabulaire corrompt insidieusement leurs représentations, préparant ainsi le terrain d’une violence déconnectée de tout sentiment de culpabilité.

A cet égard, ce roman relativement bref et concis, qui se lit dans un souffle, rythmé par la froide chronologie des événements, est assez remarquable. Sans jamais chercher à jouer sur la corde sensible, l’auteure n’oublie aucun des protagonistes auxquels elle s’intéresse tour à tour : enfants victime et suspects, parents de l’une et des autres, enseignants, surveillants... aucun n’est négligé et tous sont placés sur un même plan narratif, évitant ainsi à l’émotion et à une certaine subjectivité de prendre le pas.



Seul un personnage prendra la parole dans les dernières pages : Emma, qui, à la faveur de ce qui vient de se passer, se trouve renvoyée à une situation qui pour n’être pas comparable n’en a pas moins été vécue comme un traumatisme. Et si, contrairement à Fatima, elle avait alors choisi le silence, les réactions des uns et des autres l’invitent à présent à reconsidérer sa propre blessure, à y porter un autre regard pour, enfin, dépasser la douleur et le sentiment de culpabilité. Un personnage en somme qui nous ressemble. A savoir un individu qui se trouve dans la nécessité d’avoir à repenser le statut et la position des femmes, de réévaluer ses paroles et ses gestes à l’aune de notre récente et salutaire prise de conscience.




Lien : https://delphine-olympe.blog..
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Pastiches littéraires

"L'hiver, la Glavoise est un torrent boueux dont les flots tumultueux charrient des arbres morts, des rochers noirs et des sangliers surgelés. Pourtant, sitôt passées les dernières neiges de mai, elle se métamorphose en une rivière paisible qu'on traverse à pied sec au lieudit du Gué-de-la-Corde. C'est là que le voyageur qui arrive à Courtonac par la route de Saint-Hilaire franchit la Glavoise, au Roc-de-la-Châtre. Un peu en aval, la route en pierre traverse le moulin abandonné du père Plasson. Devant le triste spectacle des ronces qui dévorent les meulines à foulon et les flaterets à courroie, on a bien du mal à croire que, jadis, les ânes, les boeufs et les femmes de Courtonac déchargeaient là leurs ballots de bressac frais pour qu'on les y moulût. Solide comme un linteau, son éternelle bamborgne à la bouche, le père Plasson transformait ici les précieuses gousses en une fécule à cataplasme, délicate comme de la peau d'oreille et fraîche comme un cul de pouliche." "Les engoulevents de la Grange-aux-Loups" est un pastiche des romans signés:

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