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Citations de Hermann Hesse (2212)


D'ici là, maître, je ne veux pas faire un métier, vernir des motifs décoratifs, sculpter des chaires et mener dans l'atelier la vie d'un artisan, gagner de l'argent et devenir comme sont tous les ouvriers, non je ne veux pas de cela, mais j'entends vivre et vagabonder, sentir passer l'été et l'hiver, voir le monde et sa beauté, savourer son horreur. Je veux souffrir la faim et la soif et je veux oublier tout ce que j'ai vécu et appris chez vous et m'en dégager.
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Il regarda les femmes et les servantes se rendant au marché et resta surtout près de la fontaine du marché aux poissons, les yeux fixés sur les poissonniers et leurs épouses mal embouchées qui offraient et vantaient leur marchandise, sortaient des baquets les poissons frais et argentés. Les poissons, la bouche douloureusement ouverte, leurs yeux d'or anxieux et fixes, s'abandonnaient avec résignation à la mort ou se débattaient contre elle avec fureur et désespoir.
Comme il était arrivé maintes fois déjà il fut pris de pitié pour ces animaux et de dégoût à l'égard des hommes; pourquoi étaient-ils si insensibles et brutaux, si immensément bêtes et stupides; pourquoi ne voyaient-ils rien, tous, les poissonniers et les poissonnières, et les clients qui marchandaient, pourquoi ne voyaient-ils pas ces bouches, ces yeux dans l'angoisse de mort, ces queues frappant furieusement autour d'elles, cette affreuse et inutile lutte désespérée, cette transformation intolérable des animaux mystérieux, merveilleusement beaux, le dernier léger frisson de la mort passant sur leur peau agonisante avant qu'ils soient là, allongés, morts et éteints, lamentables morceaux de viande destinés à la table des ces mangeurs réjouis? Ils ne voyaient rien, ces hommes, ils ne savaient rien et ne s'apercevaient de rien, rien ne leur parlait. Peu importait qu'une pauvre et noble bête crevât sous leurs yeux ou qu'un maître rendit sensible à en donner le frisson toute l'espérance, toute la noblesse, toute la douleur, toute l'obscure et poignante angoisse étouffante de la vie humaine; ils ne voyaient rien, rien ne les touchait. Tous ils étaient joyeux, ou occupés, se donnaient des airs d'importance, ils étaient pressés, criaient, riaient, ou rotaient les uns devant les autres, chahutaient, blaguaient, se chamaillaient pour deux liards, et tous trouvaient que tout allait bien, que tout était dans l'ordre, et tous se sentaient contents d'eux et du monde. C'étaient des cochons, ah! bien pires, bien plus dégoûtants que des cochons.
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Souvent il sentait en lui le désir de voir ce visage calme, beau et impassible, ravagé par la douleur ou la jouissance, s'ouvrant pour livrer son secret.
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Peut-être, pensait-il, la source de tout art et sans doute aussi de toute pensée est-elle la crainte de la mort. Nous la craignons, nous frissonnons en présence de l'instabilité des choses, nous voyons avec tristesse les fleurs se faner, les feuilles tomber chaque année, et nous sentons manifestement dans notre propre cœur que nous sommes, nous aussi, éphémères et que nous nous fanerons bientôt.
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Oui, mon vénérable ami, le monde est hanté par la mort, hanté par la mort, il y a un squelette assis sur chaque enclos, il s'en cache un derrière chaque arbre et ça ne vous sert à rien de bâtir des murs et des dortoirs et des chapelles et des églises, elle jette un œil par la fenêtre, elle rit, la Camarde! Chacun de vous elle le connaît sans erreur possible; au milieu de la nuit vous l'entendez ricaner sous vos fenêtres et prononcer votre nom. Vous pouvez toujours chanter vos psaumes, brûler gentiment vos chandelles devant l'autel, et réciter vos vepres et vos matines, ramasser vos herbes dans le laboratoire et vos bouquins dans les bibliothèques! Jeûnes-tu, ami, te prives-tu de sommeil? Ça te servira bien! L'ami Hein¹, lui, te ravira tout jusqu'aux os! Trotte, mon très cher, trotte; dans le champ là-bas elle passe, la Camarde, cours et numérote bien tes os, ils vont s'en aller aux quatre vents, ils ne veulent pas rester en nous. Ah! pauvres os, pauvre gosier, pauvre estomac, pauvre brin de cervelle sous notre crâne! Tout veut foutre le camp, tout veut s'en aller au diable, et les corbeaux sont là sur l'arbre, les sinistres curés!
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Et pourtant il faisait cela, il souffrait cela; il souffrait cela volontiers et, au fond, s'en trouvait heureux. C'était bête et difficile, c'était compliqué et épuisant, de vivre de cette manière, mais c'était merveilleux.
Merveilleuse la tristesse splendide et sombre de cet amour, sa folie, son désespoir sans issue; merveilleuses les nuits sans sommeil toutes remplies de pensées, tout cela était beau et délicieux comme les signes de la douleur sur les lèvres de Lydia, le son désespéré et résigné de sa voix, quand elle disait son amour et son souci.
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« Quand on cherche, reprit Siddharta, il arrive facilement que nos yeux ne voient que l’objet de nos recherches ; on ne trouve rien parce qu’ils sont inaccessibles à autre chose, parce qu’on ne songe toujours qu’à cet objet , parce qu’on s’est fixé un but à atteindre et qu’on est entièrement possédé par ce but. Qui dit chercher dit avoir un but. Mais trouver, c’est être libre, c’est être ouvert à tout, c’est n’avoir aucun but déterminé. »
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Peu à peu, cet immense établissement sonore où la musique entraînante retentissait dans tous les salons, cette foule grisée de masques se transformèrent pour moi en un paradis imaginaire et extravagant. Les fleurs me charmaient les unes après les autres de leurs parfums; je prenais chaque fruit entre mes mains; des serpents me lançaient des regards tentateurs dans l'ombre verte des feuillages; des fleurs de lotus flottaient, tels des fantômes, à la surface des marais obscurs; des oiseaux faisaient entendre dans les branchages leur chant magique et envoûtant. Néanmoins, tout cela me conduisait vers le seul but auquel j'aspirais; tout cela éveillait en moi le désir intense de rejoindre une unique femme.
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Personne, on le sait, n'écrit aussi mal que les défenseurs des idéologies vieillissantes; personne n'accomplit son travail avec moins de soin et d'application.
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Je me figurais qu'ils aimeraient Goethe de la même manière que moi; qu'ils se feraient de lui une image globalement identique à la mienne. Mais je découvre à présent qu'ils ont disposé là, dans leur salon, ce portrait de mauvais goût, dénaturé, édulcoré , et qu'ils le trouvent magnifique. Ils ne s'aperçoivent pas le moins du monde que l'esprit de cette oeuvre représente exactement le contraire de l'esprit de Goethe.
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Deux minutes auparavant, je montrais les dents avec fureur à la terre entière que je maudissais; et voilà que maintenant je répondais avec émotion et empressement à la première invitation, au premier salut anodin d'un brave homme respectable, me vautrant comme un porcelet dans les délices que m'inspirait cette petite manifestation de bienveillance, de considération et d'amabilité.
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Ce vieux mur d'hôpital recouvert d'un vieux crépi gris verdâtre rongé par le temps et taché, envahi de fissures et de crevasses dans lesquelles on devinait mille fresques : qui répondait à sa présence, qui laissait son âme s'en pénétrer, qui l'aimait, qui ressentait la magie de ses couleurs agonisant doucement?
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Elle savait qu'elle n'avait plus d'efforts à faire pour me rendre amoureux d'elle. Je lui appartenais. Aussi s'offrit-elle entièrement à moi dans ses mouvements, dans ses regards, dans ses baisers, dans ses sourires.
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Dès l'époque de ma jeunesse, j'avais pris l'habitude de disparaitre de temps à autre et de me plonger dans d'autres mondes afin de m'y rafraîchir.
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L'amour ne doit pas prier, mais il ne doit pas exiger non plus. L'amour doit être assez puissant pour devenir une certitude. Alors au lieu d'être attiré, il attire.
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Il fit halte devant la petite maison où son père avait habité autrefois et s'adossa un instant, tendrement, à la vieille porte ; il voulut revoir le jardin : par dessus une clôture neuve en fil de fer, d'aspect rébarbatif, il découvrit des plantations nouvelles. Mais les marches de pierre usées par la pluie et le gros cognassier rond à côté de la porte était toujours là. Knulp avait passé ici le meilleur de sa vie avant de se faire chasser du lycée. Il avait goûté en ces lieux un bonheur complet, une joie sans mélange , une félicité sans ombre, des étés radieux, les délices secrets du voleur de cerises, les plaisirs absorbants et éphémères du jardinage, les soins attentifs que réclament les fleurs : giroflées jaunes, qu'il aimait tant, joyeux liserons, pensées de velours fin ; dans son petit atelier, il avait construit des clapiers, des cerfs-volants, des aqueducs avec de la moelle de sureau, des roues de moulin avec des bobines de fil et leurs aubes, avec des planchettes. Pas un toit dont il n'eut connu les chats, pas un jardin dont dont il n'eut goûté les fruits, pas un arbre où il n'eut grimpé pour cacher ses rêveries au milieu des frondaisons. Cette parcelle du monde lui avait appartenu, il en avait connu les moindres recoins, il avait aimé avec passion ; chaque buisson, chaque haie lui avait livré son sens, son âme, son histoire; chaque pluie, chaque neige avait parlé à son cœur ; l'air de la terre avait nourri ses rêves et ses désirs et palpité au rythme de sa vie.
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Si la beauté demeurait éternellement, je me réjouirais, certes, mais je la contemplerais plus froidement et je penserais : tu la verras toujours, elle n'est lié à l'instant. En revanche, ce qui est passager, ce qui se transforme, je le contemple non seulement avec joie, mais aussi avec compassion.
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Et d'ailleurs, il m'arrive de penser que la plus belle chose au monde, c'est un bel oiseau, un de ces oiseaux qui planent librement dans le ciel. Un autre fois, rien ne me paraît plus merveilleux qu'un papillon, un papillon blanc par exemple, avec des yeux rouges sur les ailes, ou bien un rayon de soleil couchant sur les nuages. Tout resplendit alors mais sans éblouir : tout semble innocent et joyeux.
C'est juste, Knulp. Une chose est belle quand on la regarde au bon moment.
Oui. Mais j'ai encore une autre idée là-dessus. Je crois aussi que la plus belle chose qui soit, c'est de connaître, en dehors du plaisir, la tristesse ou l'angoisse.
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J'étais incapable de réfléchir à l'origine de ses pouvoirs, de sa puissance magique ; aux raisons mystérieuses qui lui avaient conféré une importance si profonde à mes yeux.
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Siddhartha dit ; "Oui, j'ai eu des pensées, j'ai eu des "connaissances", de temps en temps. Parfois, pendant une heure, pendant un jour, j'ai senti en moi les effets du Savoir comme on sent la vie dans son propre coeur. C'étaient bien certainement des idées que j'avais, mais il me serait difficile de te les communiquer. Tiens, mon bon Govinda, voici une des pensées que j'ai trouvées : la sagesse ne se communique pas. La sagesse qu'un sage cherche à communiquer a toujours un air de folie.
- Tu veux rire ? demanda Govinda.
- Pas du tout. Je te dis ce que j'ai trouvé. Le Savoir peut se communiquer mais pas la Sagesse. On peut la trouver, on peut en vivre, on peut s'en faire un sentier, on peut, grâce à elle, opérer des miracles, mais quant à la dire et à l'enseigner, non, cela ne se peut pas. C'est ce dont je me doutais parfois quand j'étais jeune homme et ce qui m'a fait fuir les maîtres. (...)
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