Citations de Jean-François Revel (236)
p. 272... des lampes de chevet ayant un vague rapport avec la fonction d'éclairer la page d'un livre ou d'un journal.
Le but n'est pas de "sortir" du monde mais de ne plus lui être assujetti. Le monde n'est pas mauvais en lui-même, c'est notre façon de le percevoir qui est erronée. Un maître bouddhiste a dit : "Ce ne sont pas les apparences qui t'assujettissent, c'est ton attachement aux apparences."
L'exemple de la protection de l'environnement est très révélateur d'un manque général de sens de la responsabilité. Bien que les conséquences nuisibles de la pollution, de l'extermination des espèces animales, de la destruction des forêts et des sites naturels soient incontestables et, dans la plupart des cas, incontestés, la majorité des individus ne réagit pas, tant que la situation ne lui devient pas personnellement intolérable.
Que dire d'un Romain Rolland, d'un Langevin, d'un Malraux, qui admirent et approuvent le régime dit soviétique sans y être contraints par la faim ou quelque torture ?
Boris Souvarine 1937
L'idéologie fonctionne comme une machine à détruire l'information, au prix même des assertions les plus contraires à l'évidence.
..... Les buts ordinaires de l'existence - le pouvoir, les possessions, les plaisirs des sens, la renommée - peuvent procurer des satisfactions momentanées, mais ne sont jamais la source d'une satisfaction permanente et, un jour ou l'autre, se transforment en mécontentement.
Un petit nuage n'apporte pas la pluie. C'est quand une pensée surgit qu'il faut s'en occuper, pas quand les émotions sont devenues incontrolâbles. Il faut maitriser l'étincelle, sinon que faire lorsque la forêt tout entière est en flamme ?
La méthode des communistes français s'est peu modifiée :
Ils défendent en parole les libertés, mais ils gardent une façon totalitaire de nous les garantir.
Par quel aveuglement a-t-on parfois pu considérer Proust comme un romancier de la vie mondaine, quoique exceptionnel, un romancier dont le mérite essentiel serait d'avoir su tirer le profond du superficiel, rendre humaine une matière ingrate - un peu le Saint-Simon de la haute bourgeoisie?
p85
Journaliste (NYT): On dit que vous êtes un écrivain de droite...
Jean-François Revel: Vous dites ça parce que j'écris en français?
Bien souvent la fascination pour le "neuf", le "différent" reflète une pauvreté intérieure. Incapables de trouver le bonheur en nous-mêmes, nous le cherchons désespérément à l'extérieur dans des objets, des expériences, des manières de penser ou de se comporter de plus en plus étranges. En bref, on s'éloigne du bonheur en le cherchant là où il n'est pas. Ce que l'on risque en procédant ainsi c'est de perdre définitivement sa trace. A son niveau le plus banal, la "soif de nouveauté" naît d'un attrait pour le superflu, qui ronge l'esprit et nuit à sa sérénité. On multiplie ses besoins au lieu d'apprendre à ne pas en avoir.
La droite démocratico-libérale ne représente qu'une version édulcorée du socialisme égalitaire et une version atténuée du mercantilisme américain. Robert Aron
Un philosophe peut fort bien se perdre dans ses problèmes personnels, ou un savant dans ses émotions, alors qu’un disciple engagé sur une voie spirituelle saura qu’il fait fausse route s’il constate qu’au fil des mois et des années ses qualités humaines — bonté, tolérance, paix avec soi-même et avec autrui — déclinent au lieu de croître.
Proust pose le principe qu'on aime toujours sans être aimé.
p127
S'il est absolument certain que "l'important est d'aimer ", Proust n'en aboutit pas moins, et justement pour cela, à un pessimisme découragé, car en définitive, toute tentative pour sortir de nous-mêmes et dépendre sincèrement d'un autre être ne peut conduire qu'à la souffrance.
P71
Le passage d'une constellation philosophique à une autre n'est pas du tout la conséquence d'une réfutation* de ce que le système précédent contenait de faible. Une philosophie est remplacée*, elle n'est jamais réfutée. Quand elle règne aucune objection ne peut amoindrir son autorité. Quand elle est détrônée, aucune plaidoirie ne peut la sauver, même dans ce qu'elle a d'intéressant. Ses pires inanités étaient inattaquables pour la majorité des esprits au cours de sa période faste, ses éventuelles bonnes idées deviennent indéfendables pour les mêmes esprits dès qu'elle se décompose. Le langage philosophique nouveau devient à son tour pour quelque temps invulnérable. Il est inutile de se demander par la vertu de quelle démonstration la deuxième théorie a été jugée supérieure à la première. Il n'y en a pas. […] Ce qu'il faut se demander, ce n'est donc pas quelle est la validité des arguments établissant une théorie, mais quels sont les besoins que cette théorie satisfait. [Préface à l'édition de 1971, p. 4]
* Sur un site bien fait, ces deux mots seraient en italique.
Le cliché de la révolution faite par une poignée de conspirateurs provient du précédent russe, qui est loin d’être probant. Flatteur pour le narcissisme de certains « révolutionnaires » qui se croient spécialisés, ce cliché est satisfait le goût du monopole et du vedettariat. Les « chefs » bavardent volontiers sur la spontanéité des masses, mais ils condamnent ou approuvent l’orientation de cette spontanéité selon des critères détenus par eux seuls. Ils réprouvent le peuple quand ce peuple semble désirer des réformes qui n’ont pas l’honneur de leur approbation. Les travailleurs sont aliénés dès qu’ils s’écartent des schémas qui leur feraient plaisir. Cette réintroduction du pouvoir des élites dans la révolution est une des principales causes, en Europe, du tarissement de l’inspiration révolutionnaire. [p. 153]
La réalité première et ultime, le point de départ et le point d'arrivée de toutes choses, dans les sociétés humaines, c'est l'individu. [...] Sociologues, idéologues, voir démagogues nous l'ont certes assez seriné dans le passé : l'individu ne s'appartient pas, il appartient toujours à un groupe, et même, dans toute société complexe, à plusieurs groupes à la fois. Mais cette appartenance ne saurait prévaloir contre le seul fait invariable dans l'histoire des hommes : qu'au bout du compte, tout se vit sous forme d'expérience individuelle.
Le Point - 5 décembre 1983
La communication... c'est ce qui sert à expliquer que les échecs sont des succès ; le service public de la communication, c'est ce qui sert à contraindre les citoyens à écouter cette explication.
Dissoudre l'attachement mental à la réalité du moi s'accompagne bien d'un anéantissement, mais ce qui est anéanti c'est l'orgueil, la vanité, l'obsession, la susceptibilité, l'animosité. Et cette dissolution laisse le champ libre à la bonté, l'humilité, l'altruisme. En cessant de chérir et de protéger le moi, on acquiert une vision beaucoup plus large et profonde du monde.