Citations de Jean-Louis Fournier (1466)
Depuis que tu es partie, j'ai pu compter jusqu'à sept millions neuf cent quarante-huit mille huit cents. Tu as eu le temps d'aller te cacher loin. Je cherche partout. Je ne trouve pas, je désespère. La partie de cache-cache dure trop longtemps. Allez, tu as gagné, tu peux sortir de ta cachette. Je n'ai plus envie de jouer. Sors de ta cachette, tu as gagné. Sors de ta cachette, je t'en supplie, j'ai perdu, j'ai tout perdu.
Les intellectuels barbus partent dans le Larzac élever des chèvres et faire des fromages immangeables. Les chèvres en meurent de honte. Dans les Cévennes, ils vont engraisser des canards. Dans les bocaux de confits, il y a autant de mouches que de canard. Ailleurs, ils élèvent des chiens au régime macrobiotique, sans viande. Les chiens se portent très bien. Puis un jour, ils disparaissent. On les retrouve tous morts. Ils ont été tués par l’éleveur de faisans, il en a eu marre qu’ils viennent chez lui faire des razzias de volatiles.
Les paysans du dimanche sont retournés à la terre, mais ils sont vite rentrés déçus avec mal aux reins. Ils n’imaginaient pas la terre aussi basse.
L'autre, il a freiné pour ne pas m'écraser, et il m'a fait un signe amical.
Il m'a retenu la porte, il m'a cédé sa place assise, il m'a laissé passer devant, il m'a souri, il a ri quand j'ai fait une plaisanterie.
Il m'a donné du feu, quand les croquants et les croquantes, tous les gens bien intentionnés m'avaient fermé la porte au nez.
L'autre n'a pas que des défauts.
( p.51 / Lattès, 2019 )
Y a-t-il une vie après la mort ?
Ce qui est sûr c’est qu’il y a une mort après la vie.
Cher Mathieu,
Cher Thomas,
Quand vous étiez petits, j'ai eu quelquefois la tentation, à Noël, de vous offrir un livre, un Tintin par exemple. On aurait pu en parler ensemble après. Je connais bien Tintin, je les ai lus tous plusieurs fois.
Je ne l'ai jamais fait, ce n'était pas la peine, vous ne saviez pas lire. Vous ne saurez jamais lire. Jusqu'à la fin, vos cadeaux de Noël seront des cubes ou des petites voitures...
Maintenant que Mathieu est parti chercher son ballon dans un endroit où on ne pourra plus l'aider à le récupérer, maintenant que Thomas, toujours sur la Terre, a la tête de plus en plus dans les nuages, je vais quand même vous offrir un livre. Un livre que j'ai écrit pour vous. Pour qu'on ne vous oublie pas, que vous ne soyez pas seulement une photo sur une carte d'invalidité. (...)
Je n’oserais pas dire parfaite, c’est un mot que je n’aime pas beaucoup. Les gens parfaits manquent de charme… Nous étions faits pour vivre ensemble, on aurait dû mourir ensemble. Tu as été ma chance… Je n’ai plus de chance maintenant.
A un bout de la grande table, il y a un seau avec dessus un torchon blanc immaculé. Quand on soulève le torchon, on voit la crème de lait lisse et brillante comme de la peinture. Quelquefois, une mouche gourmande s'enlise dans la crème. On dirait un skieur pris dans une avalanche.
Les dindes, les vautours, les bécasses, les buses, les pintades, les corbeaux, les serins, les pies...et les morues, les thons, les requins, les cochons, les vipères, les taupes, les cafards, les cancrelats, les chacals, les gloutons, les hyènes, les chiens, les chiennes, les chameaux se sont regroupés pour créer l'association Les Colériques homonymes.
Ils ne supportent plus que leurs noms servent d'insultes.
En revanche, les tourterelles, les lapins, les biches, les colombes sont enchantés que leurs noms soient utilisés par les humains dans leurs déclarations d'amour. (p. 30)
La grande poilade. Avec ce titre, on pouvait s’attendre au pire, je n’ai pas été déçu. Le pire est arrivé.
On atteint le fond. Des rigolos de fin de banquet, « humoristes » autoproclamés, racontaient leurs histoires les plus drôles.
La grossièreté, la vulgarité, l’autosatisfaction des « humoristes » et l’enthousiasme d’un public ravi et hilare, m’ont accablé.
Merci mon petit agneau que j'appelais pelote. Tu as réchauffé dans ta laine mes mains glacées. Plus tard, j'ai adoré ta souris.
Je n’ai pas eu de chance. J’ai joué à la loterie génétique, j’ai perdu.
Bleu Bleuet
Bleu Ardoise
Bleu Majorelle
Bleu Saphir
Bleu Outremer
Bleu Nuit
Bleu Klein
Bleu Marine
Bleu Lavande
Bleu Indigo
Bleu Pétrole
Bleu Cobalt
Bleu de Prusse
Bleu Lapis-Lazuli
Bleu Acier
Bleu Canard
Bleu Céleste
Bleu Turquoise
Bleu Azur
Bleu Roi
Bleu Électrique
Bleu Contravention
Trop de Bleus à l'âme.
Dans certains livres, trop de pages. Dans les pages, trop de mots. Quelquefois des mots inutiles. Des mots compliqués pour faire intelligent. Quand on ne trouve pas le mot juste, on met plusieurs mots approximatifs.
« Mathieu et Thomas dorment, je les regarde.A quoi rêvent-ils ?Font-ils des rêves comme les autres ? Peut-être que la nuit, ils rêvent qu’ils sont intelligents.Peut-être que la nuit, ils prennent leur revanche, qu’ils font des rêves de surdoués.Peut-être que la nuit, ils sont polytechniciens, savants chercheurs, et qu’ils trouvent.Peut-être que la nuit, ils découvrent des lois, des principes, des postulats, des théorèmes.Peut-être que la nuit, ils font des calculs savants qui n’en finissent pas.Peut-être que la nuit, ils parlent le grec et le latin."
Mon père est mort à quarante-trois ans , j'avais quinze ans . Aujourd'hui , je suis plus vieux que lui . Je regrette de ne pas l'avoir mieux connu .
Je ne lui en veux pas .
Tu sais bien que je ne suis pas anticlérical, ni agnostique, ni athée. Peut-être panthéiste, tendance iconoclaste.
Je n'aime pas qu'on se moque des curés, je préfère le faire moi-même. (p.13)
L'humour est un antalgique, on l'utilise quand on a mal.
Quand papa il était petit, il avait aussi renoncé à Satan et à ses pompes, mais je crois que Satan il a jamais renoncé à papa.
La mort de quelqu'un qui vous aime, c'est de l'amour en moins.
J'ai acheté une bouteille de saint-estèphe, je ne dois pas me laisser aller, j'aurais bien aimé la boire avec toi, j'aurais caché l'étiquette pour te faire deviner ce que c'est. On jouait à ça souvent.
Je l'ai bue, ça va mieux. Il faut que j'apprenne à profiter du présent, à déguster l'instant, sans passer à demain, parce que demain ne me dit rien de bon.