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Citations de Jean-Pierre Luminet (182)


[...] Il ne convient pas de divulguer à tout le monde ce que nous avons acquis avec de si grands efforts.
[...] Je n’osais aller jusqu’au bout de mon raisonnement, je ne pouvais formuler les conclusions qui s’imposaient.
[...] — Abrège, mon garçon, et cesse de tourner autour du pot. On dirait que tu as peur de ce que tu veux me dire.
[...] Copernic n’est pas encore mis à l’index, il est « au purgatoire » tant côté catholique que côté protestant.
[...] Cette méfiance des grands esprits de ce temps pour la chose imprimée.
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[...] Copernic, se terrait dans sa tour, en administrateur du chapitre scrupuleux, inattaquable, et même tatillon.
[...] Nicolas Copernic, docteur ès arts et ès droit canon, médecin, bourgeois par naissance, gentilhomme par fonction.
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L'Histoire ne retient que le nom des rois. Celui des pauvres gens ressemble à un grain de sable. Il ne brille qu'à l'instant où une goutte de pluie le touche. Après, tout s'évapore.
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Le tableau final n'est qu'un résultat du processus de composition, et non un moteur premier.
[...]
En ce sens, cette œuvre* rejoint bien la définition donnée par Delacroix au salon de 1846 : "Un tableau est une machine dont tous les systèmes sont intelligibles pour un œil exercé."

*"Route avec cyprès et ciel étoilé"
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Le village de Van Gogh n'existe pas. Ou plutôt il est une recomposition faite d'après mémoire de certains villages hollandais, une réminiscence de son pays natal.
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Certaines œuvres d'art traduisent la fragilité de l'existence humaine. En cela, elles se rapprochent de l'exploration de l'Univers lointain, qui nous rappelle combien la condition humaine, si limitée dans le temps et l'espace, paraît dérisoire. N'est-ce pas justement le propre de la recherche scientifique et de la création artistique que de nous élever au-dessus de cette condition ?
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Jean-Pierre Luminet
a. Héraclite 1-8-20
b. Umberto Eco 22
c. Maurice Maeterlinck, 13
d. Michel Souriau 17
e. Filippo Tommaso Marinetti 5
f. Zhang Zai 16 – 4
g. Rabindranath Tagore 2
h. John Wheeler 7 -21
i. Albert le Grand 15
j. Isaac Newton 3
k. William Shakespeare 6
l. Richard Wagner 10-14
m. Guillaume d’Auvergne 9 – 19
n. Jean-Pierre Luminet 11 – 12- 18 – 23 – 24
o. Erik Satie 25
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Jean-Pierre Luminet
11. Avec la relativité générale
le temps acquiert une élasticité supplémentaire

12. Toute distance cosmique augmente avec le temps.

13. Si les astres étaient immobiles
le temps et l’espace n’existeraient plus.

14. Oh cette double mer du temps et de l’espace
où le navire humain toujours passe et repasse

15. Le temps et l’espace sont morts hier

16. Au fil du temps même l’or et les métaux se désagrègent
les plus hautes montagnes s’érodent
toute chose qui a forme se détruit facilement
seul le vide suprême
étant inébranlable
est le comble du plein.

17. Tout ce temps j’ai cru que c’était un jeu

18. Toute la difficulté est de penser que l’univers ait pu avoir un commencement dans le temps
par là même une existence temporelle
et de postuler l’éternité dans son futur
comment concevoir une éternité dans le futur sans postuler celle du passé
ou ce qui revient au même
comment penser d’une même entité physique
qu’elle peut être à la fois temporelle et éternelle

19. Celui qui pose cette question
avant le commencement du temps y a-t-il eu quelque chose
alors que le mot avant implique l’idée de temps
fait exactement comme s’il demandait
dans le temps qui a précédé le commencement du temps
quelque chose a-t-il existé ?

20. On ne peut descendre deux fois dans le même fleuve

21. Du temps nous ne savons encore rien
à moins forte raison s’il est une dimension
ou plusieurs
ou autre chose

22. La nature ignore le temps
le temps est une invention de l’occident

23. L’être est une farce éphémère
un fond de rien où le temps explose

24. Les physiciens cherchent
sans se l’avouer vraiment
à éliminer le temps
car le temps c’est le changeant le variable
tandis que la physique prétend à l’immuable à l’invariant
son but n’est-il pas d’extraire des lois éternelles
c’est-à-dire affranchies du temps
à partir de phénomènes passagers ?

25. Le temps passe (& ne repasse pas)
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Jean-Pierre Luminet
1. Rien n’est permanent
sauf le changement

2. Le temps a commencé avec la matière le ciel
et le mouvement du ciel

3. Le temps absolu
vrai et mathématique
qui est sans relation à quoi que ce soit d’extérieur en lui-même et de sa nature
coule uniformément
on l’appelle aussi durée

4. Le papillon ne compte pas les mois mais les instants
et il a assez de temps

5. Tu vois mon fils
espace et temps
ici ne font plus qu’un

6. Le temps n’a pas la même allure pour tout le monde

7. Si l’on inverse le sens du temps dans les équations de la physique traditionnelle rien ne change fondamentalement

8. Le temps est un enfant qui joue

9. De même que le monde n’a pas de dehors
n’a pas d’au-delà puisqu’il contient et embrasse toute chose
de même le temps qui a commencé à la création du Monde
n’a pas d’auparavant ni de précédemment
puisqu’il contient en lui tous les temps qui sont ses parties.

10. Le temps
c’est ce qui empêche tous les événements de l’univers
de se produire en une seule fois
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La lumière, le Temps, l’Espace, l’Énergie
Furent jadis des dieux de la mythologie :
La Physique a la sienne et nous les a ravis
Sous l’autorité de sa Muse rigoureuse.
Notre vie en est-elle ou moins ou plus heureuse,
À ton avis ?
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La douceur de la danse est passée.
Danse silencieuse
Ivresse du mouvement circulaire, légèrement embarrassée par les irrégularités célestes.
Le moins chaud tourne autour du plus chaud, à juste distance.
L’apanage des êtres vivants est le mouvement volontaire
Et l’irruption est un bris de clôture.
L’espace est plein comme une petite chambre.
Aussi loin qu’il porte, nous trouvons des soleils
et toute sensation excitée, les membres de nos corps animaux se mouvant le long des filaments solides de nos nerfs…
Ces rapprochements sans heurts, ces nœuds dénoués, cette confusion aussitôt démêlée…
d’autres glissements se produisent
et nos nuits rayonnent d’une splendeur inconnue
Ce qui semble noir, muet, se comble de son et de clarté.
La lumière forme avec tes mèches des rets infinis, qui lient toutes les parties de mon univers
et les désirs en sont les nœuds.
Riche en corps noirs invisibles, feutrée de nébuleuses obscures qui absorbent l’excès de mes rayons
ta ténèbre est féconde
Son eau noire, du sépulcre dissous
vagues lourdes et suffocantes
corps plus pâle que tous les ors imaginables
Le vide est un creux psychologique
Unité indéfiniment rompue par une dispersion nouvelle.
Etait-ce un soleil de feu ? Non, un globe obscur, terraqué mais environné d’un éther raffiné
Le corps est donc obscur.
Pour une raison logique les petits corps obscurs tournent autour des étoiles.
Voilà ce qui détermine les courbes et les formes
L’attraction n’est pas une loi d’amour: c’est une chaîne.
Rotation, perpétuel recommencement
La lumière visible elle aussi est un trou
une faille
une diminution de quelque chose d’autre.
Et moi si joyeusement accueilli par ces gemmes de lumière vivante qui forment couronne autour de toi
demeure un étranger dans ton espace.
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Jean-Pierre Luminet
3
Pour conclure cette longue enquête, récapitulons avec l’aide de Philippe André :

La Nuit étoilée est une peinture composite et en partie imaginaire, à l’instar d’une figure de rêve, avec essentiellement quatre éléments chargés de symboles qui participent à sa composition :
– les astres vus probablement pour la première fois le 25 mai à 4h 40
– la grande volute qui anime le ciel, représentation probable de nuages, moins probablement d’une nébuleuse spirale
– le village idéalisé au clocher pointu mis à la place du champ de blé de l’asile, en référence aux paysages de maîtres hollandais comme van Goyen et van Ruysdael, qui évoque sa terre natale.
– le cyprès, totalement provençal, symbole de la nuit même en plein jour, dont on retrouve la forme telle qu’il l’appréhende sur d’autres toiles peintes au même moment.

Dans mon billet consacré à la Nuit étoilée au-dessus du Rhône, j’avais montré que Van Gogh était déjà familier de ce genre de montage. En tout état de cause, ce chef-d’œuvre qu’est la Nuit étoilée à St Rémy traduit une admirable et triple conjonction entre observation précise, imagination et mémoire.

Chef-d’œuvre considéré comme tel aujourd’hui, mais qui en son temps n’a guère été apprécié, à commencer par son propre auteur. Vincent envoie sa toile achevée à son frère Théo en septembre 1889 en même temps que quelques autres, l’appelant simplement tantôt « étude de nuit », tantôt « effet de nuit ». Théo, pour sa part, l’appelle « le village au clair de Lune », et dans une lettre qu’il écrit à Vincent le 22 octobre 1889 [Lettre 813] il donne diplomatiquement un avis très mitigé « L’exposition des Indépendants est terminée & j’ai de retour tes iris; c’est une de tes bonnes choses. Je trouve que tu es le plus fort en faisant des choses vraies, comme cela, ou comme la diligence de Tarascon, ou la tête d’enfant, ou le sous bois avec le lierre, en hauteur. La forme est si bien arrêtée et l’ensemble est plein de couleur. Je sens bien ce qui te préoccupe dans les nouvelles toiles comme le village au clair de lune ou les montagnes mais je trouve que le recherche du style enlève au sentiment vrai des choses. »
Vincent semble accepter la critique de Théo. Dans une lettre du 3 novembre [Lettre 816] il lui répond : « Je sais bien que les études dessinées avec de grandes lignes sinueuses du dernier envoi n’étaient pas ce que cela doit devenir, pourtant j’ose t’engager à croire que dans le paysage on continuera à chercher à masser les choses par le moyen d’un dessin qui cherche à exprimer l’enchevêtrement des masses.[…] Tu verras que dans un grand paysage avec des pins, des troncs ocre rouge arrêtés par un trait noir, il y a déjà davantage de caractère que dans les précédents. »
Et dans une lettre du 26 novembre [Lettre 822] à Emile Bernard il ajoute : « Cependant encore une fois je me laisse aller à faire des étoiles trop grandes etc., nouvel échec et j’en ai assez. »

Je finis ce long billet avec un poème sur la Nuit étoilée que j’avais écrit à la demande de l’éditeur Bruno Doucey pour son anthologie La poésie au cœur des arts, parue au printemps 2014

La Nuit étoilée de Vincent Van Gogh

Il prête au ciel la vitesse vertigineuse
convenance parfaite entre mouvement et essence
part intégrante de l’éternité
Sa mesure roule d’un tournoiement sonore
acier cristal saphir
sont les substances des cercles véritables
Les étoiles sont dispersées en ordre
comme une poignée de graines
petites et grosses
éparpillées par une main diligente
sans la faiblesse des yeux nous verrions d’autres soleils
Lumière partout présente
inquiétude clandestine
Voici donc un monde merveilleusement simple
mais cerné d’inconnu
ce monde dont le commencement et la fin
restent dans une ombre surnaturelle
Blanches traînées de vapeurs
jetées sans direction dans l’espace
entre elles des déserts où toute lueur se perd
incessamment des mondes croulent
sans que jamais se vide le ciel
Où sont ces royaumes célébrés
où les délices des enfants des hommes
petits nids accrochés dans un coin de l’univers
pollens de fleur
moucherons dans la lumière ?
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Jean-Pierre Luminet
2Reste à discuter, dans la partie terrestre, du cyprès, qui fait la jonction avec la partie céleste. Comme Vincent l’écrit à Théo (Lettre 783 du 25 juin 1889) : « Les cyprès me préoccupent toujours, je voudrais en faire une chose comme les toiles des tournesols parce que cela m’étonne qu’on ne les aie pas encore faits comme je les vois. C’est beau comme ligne et comme proportions, comme une obélisque égyptienne. Et le vert est d’une qualité si distinguée. C’est la tache noire dans un paysage ensoleillé mais elle est une des notes noires les plus intéressantes, les plus difficiles à taper juste que je puisse imaginer. »Outre le symbole de la Provence, le cyprès, de par son omniprésence dans les cimetières, serait un puissant symbole de la mort. Selon certaines exégèses, sa pointe dirigée vers le ciel évoquerait la lettre à Théo du 9 ou 10 juillet 1888 (lettre 638) : « Mais toujours la vue des étoiles me fait rêver aussi simplement que me donnent à rêver les points noirs représentant sur la carte géographique villes & villages. Pourquoi, me dis-je, les points lumineux du firmament nous seraient-ils moins accessibles que les points noirs sur la carte de France ? Si nous prenons le train pour nous rendre à Tarascon ou à Rouen nous prenons la mort pour aller dans une étoile. Ce qui est certainement vrai dans ce raisonnement c’est que étant en vie nous ne pouvons pas nous rendre dans une étoile. pas plus qu’étant morts nous puissions prendre le train ».

Comme me l’a cependant écrit Philippe André, il ne faut peut-être pas se contenter d’une formule aussi simple. On n’est pas chez Böcklin et son « Île des Morts » bordée de cyprès. La mort, pour Vincent à ce moment-là et probablement jusqu’à la fin, n’est qu’une transformation au sein d’un grand tout, un changement de mode de vie. Le cyprès est surtout un lien, le symbole (dans sa première signification grecque) entre vie et mort, mais aussi entre terre et ciel, entre bas et haut, entre passé (le village de l’enfance) et présent, entre le limité et l’infini.
Passons maintenant à une nouvelle analyse du paysage céleste, qui m’avait surtout occupé dans ma reconstitution des années 1990, avec comme date de début de composition proposée le 25 mai 1889 à 4h40.
En me rendant sur place j’ai pu vérifier que la fenêtre de la chambre de van Gogh lui servant d’atelier donnait bien dans la direction de l’Est où se lèvent le Soleil et Vénus. Dans ma première reconstitution je ne prétendais pas cependant que le 25 mai était la date de réalisation finale de la peinture. Rappelons-nous que ce n’est que la première semaine de juin qu’il avait reçu les couleurs et les brosses envoyées par son frère Théo. Et par sa lettre du 2 juillet on apprend qu’il travaillait encore sur sa toile. Le scénario probable est le suivant : Vincent, sujet à une insomnie (il y fera référence dans ses lettres), fait un croquis du ciel étoilé tel qu’il lui apparaît le 25 mai à presque cinq heures du matin. L’aube va poindre, ainsi qu’il le suggèrera plus tard par les touches claires qui forment comme un cours d’eau dans le ciel juste au-dessus de l’horizon. En tout cas, d’autres fois Vincent admirera ce spectacle de « l’étoile du berger » à travers les barreaux de sa fenêtre au lever du jour (lettre du 6 juin). La précision de son dessin est étonnante mais plausible. Vincent a travaillé à ses débuts, et jusqu’à un an auparavant, avec un cadre perspectif dans le souci d’être précis. Il a exécuté des centaines et des centaines de dessins. Il sait faire. Deux ou trois semaines plus tard, il commence à peindre, dans son atelier de l’asile, sa Nuit étoilée.

Reste à discuter l’hypothèse selon laquelle le tourbillon représenté au centre de la toile seriat une reproduction d’une image astronomique – soit la nébuleuse des Chiens de Chasse M51, soit la nébuleuse du fantôme M74 – que Van Gogh aurait vue dans une revue de vulgarisation scientifique de l’époque ou à la lecture de Camille Flammarion. En un sens, l’hypothèse est trop belle pour ne pas être prise en compte. Pour l’appuyer, examinons la curieuse représentation du croissant de Lune dans le dessin que Van Gogh a envoyé le 2 juillet à Théo : avec ses cornes qui se touchent presque, elle n’est pas vraiment réaliste. Or, on trouve exactement le même type de représentation chez Camille Flammarion, dans une illustration de son ouvrage de 1884 Les Terres du Ciel.A l’encontre de cette hypothèse, le fait que l’on ne trouve aucune mention de Flammarion ou d’un quelconque livre ou magazine d’astronomie populaire dans l’ensemble de la correspondance de Van Gogh, allant du 29 Septembre 1872 au 31 Juillet 1890, est toutefois problématique. Il y a certes de nombreuses références aux étoiles, mais généralement dans un sens plutôt mystique et pas astronomique. En outre, Vincent faisait toujours part à son frère de toutes ses connaissances, découvertes, lectures et sources détaillées de ses tableaux (dans plusieurs de ses lettres il parle par exemple de Michelet, Emile Zola, Victor Hugo, Shakespeare, etc.). Là, pas un mot, ce qui serait plus qu’étonnant si l’hypothèse astronomique était valide. Difficile d’imaginer qu’il se soit tu juste là-dessus quand il a parlé de sa toile à son frère. Et puis surtout, comme me l’a judicieusement fait remarquer Philippe André, la grande volute qui anime son ciel présente une indubitable analogie avec la forme qu’il donne aux nuages dans plusieurs de ses toiles, comme Champ de blé après la tempête (déjà mentionnée pour la figuration du même profil de collines), Champ de blé avec cyprès montré plus haut (même ciel tourmenté avec mêmes collines et même cyprès), ou encore Oliviers avec les Alpilles à l’arrière-plan, toutes datées de juin-juillet 1889 !



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Jean-Pierre Luminet
Au mois de septembre 2016 je me rends au monastère Saint-Paul-de-Mausole, chef d’œuvre de l’art roman provençal construit dans le voisinage de la cité gallo-romaine Glanum, au Sud de Saint-Rémy de Provence. Une partie du bâtiment demeure aujourd’hui un établissement sanitaire à vocation psychiatrique. Van Gogh y a séjourné du 8 mai 1889 au 16 mai 1890. Au premier étage, la chambre où il était interné a été reconstituée.
Par la fenêtre, orientée plein Est, on y voit le paysage que Van Gogh pouvait contempler. Même si celui-ci a été transformé depuis un peu plus d’un siècle, on n’y aperçoit nullement les collines représentées dans sa peinture. Il y a dans la réalité le mur du parc de l’asile qui enserre un champ de blé, lequel s’étend entre l’asile et le mur. Et pas de grand cyprès en vue, et encore moins le village de Saint-Rémy.
De fait la petite chaîne des Alpilles est en direction du Sud. Quant au village de Saint-Rémy et son clocher d’église, assez loin dans la direction du Nord, il est tout autant invisible depuis la fenêtre. On en conclut que Van Gogh n’a pas peint la partie terrestre de sa Nuit étoilée d’après ce qu’il voyait de sa fenêtre.
Il a dû forcément sortir. Mais quand ?
L’ami Philippe André, psychiatre et amateur d’art qui a étudié à fond la correspondance de Van Gogh avant de publier en 2018 son roman Moi, Van Gogh, artiste peintre, m’écrit l’an dernier que dans les premiers jours suivant son internement le 8 mai : « La nuit, il est enfermé dans sa chambre et son matériel est sous clef dans une autre chambre vide qu’on a bien voulu lui allouer à cet usage. De plus il est très angoissé et ne parvient qu’à repeindre ses propres œuvres (Tournesols, Joseph Roulin…) ou à peindre des éléments très proches qui sont dans le parc de l’asile (Iris, Lilas…). Aucune force, durant ces premières semaines, pour peindre de profonds paysages ! »

De fait, lorsque j’ai enfin pu consulter la correspondance complète de Van Gogh, je lis que le 9 mai, lendemain de son arrivée, il écrit à sa belle-sœur « Jo » (l’épouse de Théo donc) : « Quoiqu’ici il y ait quelques malades fort graves, la peur, l’horreur que j’avais auparavant de la folie s’est déjà beaucoup adoucie. Et quoique continuellement on entende ici des cris et des hurlements terribles comme des bêtes dans une ménagerie, malgré cela les gens d’ici se connaissent très bien entre eux et s’aident les uns les autres quand ils tombent dans des crises. En travaillant dans le jardin ils viennent tous voir et je vous assure sont plus discrets et plus polis pour me laisser tranquille que par exemple les bons citoyens d’Arles. Il se pourrait bien que je reste ici assez longtemps, jamais j’ai été si tranquille qu’ici et à l’hospice à Arles pour pouvoir enfin peindre un peu. Tout près d’ici il y a des petites montagnes grises ou bleues ayant à leur pied des blés très très verts et des pins. » D’après la première phrase, il ressort que son angoisse n’était peut-être pas aussi forte que cela, et la suite confirme qu’il a malgré tout commencé à peindre, sans toutefois pouvoir dépasser les lieux fermés de sa chambre ou du petit jardin.
Le 23 mai, il écrit à son frère Théo : « Le paysage de St Rémy est très beau et peu à peu je vais y faire des étapes probablement. Mais en restant ici naturellement le médecin a mieux pu voir ce qui en était, & sera j’ose espérer plus rassuré sur ce qu’il peut me laisser peindre. […] A travers la fenêtre barrée de fer j’aperçois un carré de blé dans un enclos, une perspective à la v. Goyen au-dessus de laquelle le matin je vois le soleil se lever dans sa gloire. Avec cela – comme il y a plus de 30 chambres vides j’ai une chambre encore pour travailler. […] Ce mois ci j’ai 4 toiles de 30 et deux ou trois dessins. »
Cela montre que Vincent envisage de pouvoir très bientôt se promener dans la campagne, hors du monastère. Les quatre toiles qu’il a en train ont été peintes dans le jardin.
Entre le 31 mai et le 6 juin il écrit à Théo pour lui demander de lui envoyer des toiles, des couleurs et des brosses, sa réserve arlésienne étant épuisée. Il ajoute : « Ce matin j’ai vu la campagne de ma fenêtre longtemps avant le lever du soleil avec rien que l’étoile du matin laquelle paraissait très grande. […] Lorsque j’aurai reçu la nouvelle toile & les couleurs je m’en vais un peu voir la campagne. »
Et enfin le 9 juin, après qu’il ait reçu les toiles et les couleurs envoyées par Théo qu’il remercie chaleureusement : « J’en ai été bien content car je languissais un peu après le travail. Aussi est-il que depuis quelques jours je sors dehors pour travailler dans les environs.[…] J’ai en train deux paysages (toiles de 30) de vues prises dans les collines. […] Dans le paysage d’ici bien des choses font souvent penser à Ruysdael. »Nous avons donc la réponse : Ce n’est que la première semaine de juin que Vincent a pu sortir du monastère et commencer à peindre les paysages vus depuis la campagne environnante. Commençons avec les collines des Alpilles. Comme dit plus haut, elles sont invisibles depuis sa chambre, elles ont donc forcément été peintes à l’extérieur. On retrouve le même profil dans d’autres toiles de la période :Le profil des collines est assez fidèlement restitué, comme j’ai pu le constater en retrouvant l’emplacement approximatif où Van Gogh a posé son chevalet (aujourd’hui un champ de vignes) :Toujours pour le paysage terrestre, passons au village et à son clocher. On pourrait penser qu’au cours de ses sorties, Van Gogh avait trouvé un emplacement pour le peindre d’après nature. Pour cela il aurait fallu que Vincent se trouve à l’ouest de la ville, d’où l’on ne voit nulle colline à l’arrière-plan… Le petit village de Van Gogh niché au creux des Alpilles, avec sa dizaine de maisons regroupées autour d’une église au clocher en aiguille (totalement inconnu en Provence) ne ressemble en rien au vrai village de Saint-Rémy-de-Provence (certes à l’époque plus modeste qu’aujourd’hui). Et l’église encore moins à la collégiale Saint-Martin de Saint-Rémy. Le village de van Gogh n’existe purement et simplement pas. Ou plutôt il est une recomposition faite d’après mémoire de certain villages hollandais, une réminiscence de son pays natal.Souvenons-nous en effet des lettres du 23 mai et du 9 juin où Van Gogh évoque les paysages des maîtres hollandais Van Goyen et Van Ruysdael, qu’il admirait et qui évoquaient pour lui sa terre natale, à laquelle il restait très attaché.
J’ai retrouvé dans les toiles de ces deux maîtres hollandais des clochers d’église extraordiinaireReste à discuter, dans la partie terrestre, du cyprès, qui fait la jonction avec la partie céleste. Comme Vincent l’écrit à Théo (Lettre 783 du 25 juin 1889) : « Les cyprès me préoccupent toujours, je voudrais en faire une chose comme les toiles des tournesols parce que cela m’étonne qu’on ne les aie pas encore faits comme je les vois. C’est beau comme ligne et comme proportions, comme une obélisque égyptienne. Et le vert est d’une qualité si distinguée. C’est la tache noire dans un paysage ensoleillé mais elle est une des notes noires les plus intéressantes, les plus difficiles à taper juste que je puisse imaginer. »extraordinairement ressemblants à celui qu’a peint Van Gogh – lequel avait une excellente mémoire visuelle.
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En quittant son étudiant, Maestlin se demanda si c'était vraiment une heureuse idée de convier ce garçon imprévisible à ses cours d'astronomie semi-clandestins. En bon disciple d'Érasme qu'il était, sous ses dehors d'irréprochable luthérien, le professeur de mathématiques se méfiait des mystiques, êtres de passion et non de raison.
En effet, Kepler ne fut pas long à devenir le plus convaincu des coperniciens, mais pour des raisons autant métaphysiques que physiques : ce fut par ferveur mystique qu'il opta pour un Soleil central et ses six planètes, dont la Terre, tournant autour de lui.
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Tycho partit tôt le lendemain. Il estimait n'avoir rien appris de son hôte d'une nuit. Certes, il savait enfin pourquoi Maestlin puis Leovitius faisaient aussi grand cas de Copernic. Mais, maintenant qu'il y pensait, il se disait qu'il aurait fort bien pu découvrir l'hypothèse du chanoine par lui-même, lorsqu'il avait étudié le Narratio Prima de Rheticus. Puis, au pas de son cheval, il se convainquit qu'il l'avait découverte, mais qu'il n'y avait pas attaché d'importance. Donc que ça n'en avait pas.
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Enfin, Tycho avait une indication sur ce Copernic dont l'autre lui rebattait les oreilles : il avait aidé Rheticus et Reinhold à élaborer ces fameuses tables. Et il ne put s'empêcher d'interrompre l'intarissable bavard :
– Je les ai étudiées, et j'y ai décelé un nombre incroyable d'erreurs, plus que dans les alexandrines ou les alphonsines. Revenez aux Anciens, mon vieux Maestlin.
C'était en effet là où le bât blessait, et Maestlin avait appris par son maître Rheticus que Copernic avait sciemment pipé les dés pour sauver les apparences, et démontrer que la Terre tournait autour du Soleil ainsi que les autres planètes. Visiblement, Tycho ignorait tout de l'héliocentrisme, la géniale découverte de Copernic ayant été étouffée, au lendemain de sa mort, par la conspiration du silence fomentée par les papistes et les luthériens, frères ennemis cette fois unis dans leur lutte contre la vérité de l'Univers.
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Tycho put recueillir les dernières volontés de son oncle, en présence du roi, et lui fermer les yeux. À nouveau, songea-t-il, les astres étaient avec lui. Il était devenu légataire universel des terres et de la fortune de son oncle. Ou plutôt, il le deviendrait à sa majorité, dans trois ans. Pour le moment, il ne pourrait que bénéficier d'une rente considérable, léguée par le défunt afin qu'il puisse achever ses études.
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Tycho passa les premières années de sa vie dans le château de son oncle, à Tostrup, lieu autrement moins sévère que le donjon de Helsingborg. Fenêtres et colonnades y remplaçaient avantageusement meurtrières et échauguettes. L'oncle Jorgen avait des prétentions italiennes, et son épouse Inger de plus grandes tendresses pour l'enfant qu'en aurait eues sa mère naturelle.
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Kepler sortit de cette audience très fier de lui. Il avait réussi, lui, le fils de l'aubergiste d'une petite ville oubliée du Wurtemberg, là où le maître du Saint Empire romain germanique avait échoué : s'emparer du trésor de Tycho.
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