Je tiens d’abord à saluer l’esthétisme de ce livre, il est vraiment beau et agréable à manipuler et à lire. La couverture est mate, douce et éclatante. Éclatante comme l’histoire qu’elle protège. Ceci étant, le roman est également bouleversant, perturbant, percutant et atypique. Vous l’aurez compris, il recèle un petit trésor qu’il est difficile d’oublier.
Karen Joy Fowler nous trouble avec ce récit dont je dois taire la majeure partie des éléments fédérateurs sous peine de spoiler la première partie du roman. Ce qui gâcherait indéniablement votre lecture et la découverte de l’élément crucial de l’histoire. Alors je vais rester évasive et concise.
Rosemary nous raconte l’histoire de sa famille, sa mère, son père, sa sœur pas comme les autres, et son frère. La petite fille autrefois pipelette s’est tue quand sa sœur a disparu et quand son frère est parti quelques années plus tard. Et c’est à travers sa mémoire qu’elle retranscrit son passé comme elle le peut, à sa façon et de son point de vue. Elle pioche dans ses souvenirs pour reconstituer ce qu’il s’est passé et pourquoi.
Alors nous déambulons dans le milieu de l’histoire, dans la fin du début et le début de la fin de celle-ci, dans ce savant mélange de psychologie humaine, de relations familiales (maternelles, paternelles et fraternelles), et de science. A travers ce récit documenté et déroutant, nous faisons face à l’absurdité dont les Hommes peuvent faire preuve. Nous croisons la jalousie, la supériorité, l’instinct, la solidarité, la communication, la différence. Oui, il est beaucoup question de différence dans ce roman, et de la façon dont elle peut être vécue mais aussi perçue.
Nos années sauvages nous emmène dans des contrées inattendues qui nous poussent à la réflexion. L’écriture un peu folle peut déconcerter, mais il est certain qu’elle fait sourire, qu’elle émeut et qu’elle force le respect. Tout cela à la fois. Elle est pleine d’intelligence autant qu’elle est à côté de la plaque.
Je n’ai jamais lu de roman de cette trempe. Il est original autant dans l’histoire que dans la plume de l’auteure. Il ne faut absolument pas passer à côté. Il possède un côté tragique et dramatique, mais il est contrebalancé par l’amour fraternel. Le ton détaché et hors norme permet de ne pas en faire un roman sombre et difficile. Le sujet est intéressant, il est assez peu abordé en règle générale, ce qui est aussi sa force. On ne tombe pas dans le vu et revu de la thématique « famille ».
En conclusion, sans ne rien dévoiler, vous tomberez des nues à la 99ème page, vous explorerez l’âme humaine, vous jonglerez entre des souvenirs d’enfant et des révélations d’adultes, vous reconstituerez le puzzle en même temps que Rosemary, vous apprendrez à connaître sa famille et ses agissements, vous vous frotterez à la psychologie et à la science, vous vivrez la différence, vous serez révoltés contre la bêtise humaine, vous serez émus. Vous lirez quelque chose d’extraordinaire.
Ce livre est une expérience originale qui ne vous laissera certainement pas indifférent.
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