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Citations de Laurine Roux (303)


J'ai souvent cette impression d'être aspirée jusqu'à m'évaporer dans son sillage. Cela ne me paraît pas insensé. Ce n'est pas sage non plus. C'est ainsi.
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Quand les ours en peluche n’étaient pas manchots, il leur manquait une patte. En fouillant, on pouvait trouver des membres de marionnette arrachés, une tête dévissée, des roues sans carrosse. Le placard avait l’allure d’un cimetière de jouets. Grisha y serait en sécurité. Elle s’endormit profondément après s’être aménagé une couche au milieu des vieilles peluches éventrées. Quelqu’un finit par lui tirer la manche pour la réveiller. C’était le petit Youri, pas plus haut que trois pommes.
Un Va-au-Diable. Toujours avec son filet de morve qui lui pendait au nez. Ni la présence de Grisha dans le placard, pas plus que son ventre rond ne retinrent son attention. Il voulait seulement attraper la carriole en bois sur laquelle Grisha avait posé son bras. Elle lui caressa la tête et lui tendit l’objet. Avant de le lui remettre, elle posa son index sur sa bouche. Aucun adulte ne devait savoir qu’elle était là. Ce serait leur secret.
C’est ainsi que Grisha passa les derniers mois de sa grossesse enfermée dans l’armoire à jeux de l’orphelinat. La nouvelle circula vite parmi les enfants qui s’organisèrent pour lui apporter régulièrement à boire et à manger. Tromper l’attention des surveillants devint un véritable défi. Les plus grands profitaient des jours où les assiettes étaient bien remplies pour glisser de la nourriture dans leurs poches. Un bout de pain, un morceau de viande. Les portions n’étaient pas copieuses mais suffisaient. Ils chargeaient ensuite les petits de faire semblant d’aller chercher un jouet pour apporter le tout à Grisha. Le placard devint son nid, les orphelins sa famille. Jamais les gouvernantes ne soupçonnèrent quoi que ce soit. La nuit, elle sortait se dégourdir les jambes.
Un matin du neuvième mois, Grisha ressentit de violentes douleurs. Un liquide transparent s’écoula entre ses jambes. Elle tenta autant que possible de ne pas crier mais les contractions étaient si fortes qu’elle ne put se retenir. Un hurlement parvint aux oreilles des gouvernantes. Elles accoururent, suivies par les enfants. Grisha était allongée dans le placard, les jambes écartées, le lit de peluches barbouillé de sang. Quand les gouvernantes la reconnurent, une violente dispute éclata. Qu’allait-on faire? L’aider à accoucher ? Ne rien dire à la famille? Non, c’était trop risqué. On devait la chasser au plus vite! Un cri coupa court aux débats, lacérant l’air et les tympans. Grisha sentit sa chair se déchirer, un poids tomber de son ventre. Le bébé était né. Elle le prit dans ses bras, à moitié consciente. Voyant cela, les petits, Miraculés et Va-au-Diable, se mirent à applaudir mais Grisha ne les entendit pas. Un son strident, venu de loin, couvrit leurs acclamations. Elle avait beau se boucher les oreilles, le sifflement s’amplifiait. On courut aux fenêtres. Des oiseaux de feu traversaient le ciel. On n’avait jamais vu de bombardiers dans la région. Les gouvernantes oublièrent Grisha, les orphelins et tout le reste. Il fallait rentrer chez soi au plus vite, sauver les siens. (p. 106-107)
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Au bout des mots et de la nuit,je m'endors.
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Je n'ai pas peur. Je sais que je le laisserai faire.Cela devrait me désespérer, je devrais crier, me battre, chercher à le retenir.Pourtant cela me procure une immense sensation de calme.Le chemin parcouru avec lui a été un long enseignement d'abandon.

(...) je sais cette fois qu'il ne reviendra pas.

(...) Car nous sommes tous de passage.Simplement de passage.

( Éditions du Sonneur, 2018, p.119)
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Le printemps nous offre ses consolations.
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Et lorsque l’adolescente passe éperdue devant elle, la vieille lui murmure ces mots, Le puma ne vit pas dans une cage. Au même moment un rayon de soleil frappe son pendentif. Poma sent une secousse, quelque chose d’électrique. Elle ignore par quel mystère, mais la vieille l’a armée de courage. À peine a-t-elle le temps de jeter un œil en arrière que la montagne engloutit la silhouette de Huapa. Poma porte machinalement sa main à son cou : le pendentif y est accroché.
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Le trajet en ses inverse est éprouvant: Escarpements abrupts, rosée du soir, on se prend les pieds dans des racines sorties de terre, on dérape sur des mousses gluantes. Partout la main noire de la nuit a tendu ses pièges et les arbres animent leurs branches pour nous capturer.
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"Le bruit du vent mérite plus d'attention que les vaines paroles."
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Un autre monde existe .Dans sa bouche, le passé trouve chair.
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On parle d'exécutions. Les journaux évoquent une poignée de victimes, mais le bruit court qu'il y aurait plus d'une centaine de fusillés. Des camarades abattus froidement, sans jugement, dans les cours des casernes.Ça fait mal au bide d'entendre ça. L'espoir ne devrait jamais se solder d'une manière aussi dégueulasse.Le général qui dirige la répression ? Un certain Franco.


( Éditions du Sonneur, 2021, p.90)
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C'est empirique, une révolution, fait de tout un tas de tentatives, d'échecs et d'accidents heureux. Surtout, ça s'arrose de rêve.
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La maison est vide. Toya ôte sa jupe qui empeste le poisson. Elle reste jambes nues, peau rôtie par le soleil. Puis elle prépare du pan con tomate, des tranches de pain frottées d’ail et de tomate qu’elle arrose d’huile d’olive, et mâche sans fermer la bouche, c’est meilleur. Un peu plus tard, elle aperçoit la silhouette de son père au bout du chemin, allumette carbonisée dans les orangés du soir. Juan porte son baluchon sur l’épaule, son corps ploie à force de se pencher pour curer les digues, labourer les parcelles, les herser et y repiquer les touffes de riz. Toya le regarde avancer. Elle aime son ossature forgée par la besogne, sa casquette un peu de biais qui dit, Je fais ce que je veux, sa peau tannée, son œil gauche plus fermé que l’autre, ce léger dépôt de sel sur sa barbe.
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Elle avait dévoré les ouvrages interdits, rencontré les amis de Paco, découvert qu’il existait une autre Espagne. Qui avait soif. De vin, de joie, de liberté. Dans le groupe, on y croyait dur au retour de la révolution, l’espoir jutait comme une pastèque en été. 
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La peine n’est pas moins grande quand elle est partagée, mais elle pèse moins lourd. 
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Le monde a cessé de clignoter, il se repose, et cela aussi est étourdiment bon.
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Sa colère nous a effacées.
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De ceux qu'on aime, de ceux qu'on a aimés, il reste toujours quelque chose. Une sensation sur la peau, un petit rien qui palpite. L'amour est un oiseau, aussi fragile que capable de s'élever jusqu'aux astres. De ceux qu'on aime, de ceux qu'on a aimés, demeure toujours une lumière, pareille au soleil qui persiste sous les paupières quand on ferme les yeux.
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Un avertissement de temps à autre, lorsqu'un tronc ou un piège barrait la route.D'une voix presque effacée. J'étais à une coudée de son dos mais il me paraissait loin, perdu dans une tristesse plus vaste que l'hiver.Je n'ai jamais vraiment su d'où lui venait cette mélancolie. Olga disait qu'il n'est pas bon pour un homme de rester seul.Mais il y avait une plainte plus lointaine dans son coeur. Un chant inconsolable.Je le suivais sans trop me poser de questions.On vit aussi bien sans réponses.


( Éditions du Sonneur, 2018, p.41)
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Lorsqu'elle avait fini, elle me faisait venir à côté d'elle et me caressait la tête. Il me semblait que sa paume, constellée de résidus de sel, contenait toute la voûte céleste. En passant sa main dans mes cheveux Baba ornait ma coiffe de la parure du ciel, accrochant dans mes boucles des fragments de cobalt, des noirs épais, irisés de minuscules étoiles et habillait ma tête du silence profond des nuits. Mes cheveux devenaient alors des pièges, capturant rêves et visions, et je sombrais dans un demi-sommeil, emportée par un tourbillon d'images qui m'emmenaient plus loin que les ténèbres, à la frontière du règne des vivants, là où toute chose est son contraire, où l'homme et la femme se confondent comme le corps se mêle à l'esprit pour qu'enfin le monde se gonfle de toutes ses contradictions, produisant des créatures montrueuses et complètes [...]
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Le vacarme de l'eau recouvre mes pensées. C'est exactement ce dont j'ai besoin. Me perdre dans quelque chose de plus grand, un flux sans fin, capable de venir à bout des rocs et des montagnes, une eau qui sache conserver la trace des temps anciens, ère de fougères géantes et de reptiles volants, temps que les glaciers ont gardé intact, preuve que le monde restera monde malgré l'homme et ses cataclysmes, et qu'à l'image des dinosaures nous devrions nous en tenir à cette vérité première : nous ne sommes pas grand-chose sur Terre.
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