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Critiques de Marlon James (57)
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Brève histoire de sept meurtres

Pas facile à suivre ce récit à plusieurs voix autour du chanteur reggae Bob Marley et de la Jamaïque, pas celle des vacances à la plage mais plutôt celle des gangs de rues de Kingston, la capitale. On est en 1976 : plaque tournante du trafic de drogue provenant de la Colombie, la Jamaïque inquiète aussi le gouvernement américain qui craint l'émergence d'un autre Cuba près de ses côtes. En effet, la prochaine élection pourrait voir un président issu du Parti national du peuple (PNP), aux tendances socialisantes, accéder au pouvoir. « La première fois que j'ai entendu Papa-Lo dire que des élections se préparaient, il l'a dit froidement et à voix basse, comme si le tonnerre et la pluie allaient s'abattre sur nous et qu'on y pouvait rien. » Depuis 1959, des agents de la CIA sont présents à Kingston et en cette année électorale, arpentent le territoire, tentant d'influencer le vote en faveur du Pari travailliste de Jamaïque (JLP), plus conforme aux visées capitalistes.

D'une extrême violence, cette histoire plonge au coeur d'un pays mystique où se côtoient mafieux, rastafaris, espions, journalistes, politiciens et trafiquants de drogues. Une lecture exigeante tant par les différents niveaux d'écriture attachée à chacun des narrateurs que par la densité du propos. Récipiendaire du prix Booker 2015, Brève histoire de sept meurtres mérite qu'on s'y attelle mais il faut bien s'accrocher car la route est longue et cahoteuse.
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Brève histoire de sept meurtres

Magnifique roman. Une écriture sèche, brutale pour décrire les quartiers pauvres, les bidonvilles de Kingston sous le contrôle des gangs, les luttes sans fin et l'extrême violence entre gangs pour le contrôle des trafics manipulés par les politiques eux-même marionnettes entre les mains de la CIA, ou bien sous le contrôle des cartels de la drogue. Marlon James, nous raconte l'histoire de sept tueurs qui ont tenté d'assassiner Bob Marley en 1976. Au travers de leur parcours vu par chacun des personnages c'est l'occasion d'essayer de raconter cette violence inhérente à l'enfer dans lequel sont maintenus des populations entières pour des raisons politiques et géo-stratégiques, d'expliquer les conséquences d'un tourismes blanc occidental dans ces îles des Caraïbes qui relève du pur colonialisme et emprunt d'un racisme latent. L'auteur nous raconte comment les politiques et les pouvoirs externes les soutenants ont cherché à détruire le mouvement initié par Bob Marley, pour réconcilier les factions et ramener la paix, l'espoir aura duré un an ! Le roman est truffé de référence à la culture jamaïcaine, au différent genres et styles musicaux qui accompagne cette époque. Un roman coup de poing, qui invite à réécouter et lire les textes des chansons de Bob Marley, comprendre ou du moins s'interroger sur la situation sociale et politique dans les îles des caraïbes et les conséquences encore aujourd'hui du colonialisme et du racisme.
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Brève histoire de sept meurtres

Extrait de ma chronique (en 3 parties, "Jamaican Tabloid", "Dodécaphonie", "Un héros, un grand méchant et une Cassandre" :



"Comme Catherine Dufour (qu'il ne connaît sans doute pas), Marlon James prend grand soin de singulariser, linguistiquement parlant, chacun des 12 personnages auquel il donne la parole : pour ne citer que quelques-uns des tics les plus voyants, Papa-Lo nous apostrophe en nous appelant "gentlemen" (ou "braves gens") ; Demus organise systématiquement son discours à l'aide de "voici" ou "voilà", etc.





Ce n'est pas qu'un brillant exercice de style : comme l'explique Marlon James dans un entretien accordé à Vogue, c'est bien sa volonté de servir une histoire au mieux qui le conduit vers des narrations inhabituelles ("je ne commence pas par me dire 'je vais repousser les limites de ce qu'est un roman' ; en fait, je fais même l'inverse").





Comme l'écrivait Isabelle Boof Vermesse dans un article sur Ellroy, une telle structure polyphonique pousse en effet le lecteur ou la lectrice "à ne pas se concentrer sur une causalité linéaire inducto-déductive (comme dans le roman policier classique) mais au contraire à envisager les choses globalement, à prendre en compte les échanges simultanés de toutes les parties du système, l'accent étant mis sur l'interaction et l'interférence" – et dans cette interaction peuvent, possiblement, se dévoiler des choses qui ne seraient pas apparues autrement."




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Brève histoire de sept meurtres

En 846 pages, Marlon James nous brosse une série de portraits qui, mis bout à bout, délimitent une certaine Jamaïque. C'est tellement riche et complexe que l'on peut prendre ce roman par plusieurs bouts.



On suit l'ascension, l'apogée et la chute de Josey Wales, un tueur affilié à un gang de Kingston. D'homme de main, il devient Don, en doublant son propre boss et en s'acoquinant avec Medellin d'une part pour la C et le crack, et avec la CIA d'autre part (ce qui n'est de toute manière pas contradictoire). Il s'implante à New York. Puis il est lâché par les mêmes qui l'ont placé à la tête des traffics. Au suivant ! L'Histoire est un éternel recommencement.



On suit la fuite de plusieurs témoins de la tentative d'assassinat du Chanteur, jamais nommé, mais que l'on ne peut manquer d'identifier. On décrypte certaines de ses chansons, dont la moindre n'est pas Buffalo Soldiers, posthume.



Ces témoins sont une femme qui vivra dans la crainte d'être rattrapée, exécutée pour ce qu'elle a vu. C'est aussi un journaliste qui a compris les rouages de la tentative d'assassinat sur le chanteur. C'est le dynamiteur en chef mandaté par la CIA. Ce sont plusieurs petites frappes jamaïcaines, dont le quotidien est fait de lignes de coke, de viols, de meurtres.



C'est sombre et violent. On pense à Ellroy. Déjà en soupesant le volume... mais pas seulement. On pense à Toni Morrison, pour les aspects ethniques. Mais à B.E. Ellis aussi pour les scènes de sexe décrites crûment. Ou celles d'intimidation. Et à plein d'autres.



Marlon James structure son roman choral de manière tout à fait convaincante, brillante. On retrouve plusieurs époques-clés, chaque chapitre portant le nom du protagoniste principal, celui qui porte le récit du chapitre en "je". Et l'auteur arrive à bien rendre les spécificités de chacun, le langage, le style, les tics... Puis, la dernière partie fait la synthèse. On suit Josey Wales en attente d'extradition vers les USA, une infirmière en exil à New York et le journaliste qui a commencé à relater la tentative d'assassinat du Chanteur.



Le résultat est un hymne à la Jamaïque. Marlon James aime son pays. Mais cet amour passe par la lucidité. Rien ne sert de se voiler la face.



Et, bien sûr, le point final n'en est pas un. Le Don est mort, longue vie au nouveau Don...
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Léopard noir, loup rouge

30 décembre 2022



Ayant reçu ce livre dans le cadre d'une Masse Critique, j'étais très impatient de m'engager dans la lecture de ce roman de fantasy d'inspiration africaine pour lequel les éloges ne tarissent pas...Et là, grosse claque : je me perds totalement durant les premières pages, et je n'arrive pas à coller à la narration de Pisteur.



C'est riche, baroque, ça foisonne de partout, on est chahuté, on a dû mal à imprimer ce qu'il se passe, s'en est trop : j'abandonne.J'ai laissé le livre de côté quelques semaines, je pense qu'il faut être dans de bonnes conditions pour s'y attaquer (ce n'était pas le cas pour moi).



Ce n'est pas juste une lecture pour se divertir, ça demande un sacré effort de concentration.J'ai repris la lecture à zéro il y a quelques jours seulement (pour honorer la Masse Critique quand même !), profitant de mes vacances, du repos, pour m'y atteler à nouveau. Et ça va déjà mieux ! Accrochez-vous pendant les 100 premières pages et vous sentirez que les choses commencent à se mettre en place doucement...



Vous l'aurez compris, il est encore trop tôt pour moi de donner un avis détaillé sur ce livre. Mais promis juré dès qu'il est fini, je viens vous raconter mon ressenti, si je ne me suis pas perdu sur les traces du Pisteur (ce serait une belle ironie...)



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28 janvier 2023



Un mois après mes premières impressions sur Léopard noir, loup rouge, je reviens comme promis terminer ma critique de ce roman vertigineux !Oui, ça vaut le coup de s'accrocher pendant les 200 premières pages. le récit se décante petit à petit et on comprend mieux l'intrigue, les relations entre les différents personnages, le monde dans lequel ils évoluent.Pour la faire simple, Léopard Noir, loup rouge, c'est Tolkien et G.R.R Martin qui rencontrent Quentin Tarantino (pour l'hémoglobine) Jean Genet (pour l'érotisme homosexuel) et Toni Morrisson (pour le réalisme magique et l'horreur).

C'est hyper violent parfois, avec des scènes d'horreur que vous n'êtes pas prêts d'oublier...



Personnellement, je trouve ça fabuleux qu'on ait une fantasy d'inspiration africaine, sans aucun personnage blanc, et avec un héros noir et homosexuel. Cela aurait-il été possible il y a 20 ou 30 ans ? D'ailleurs, je me demande s'il n'y aurait pas un peu de Marlon James dans Pisteur : dans une interview au Gardian, l'auteur explique que plus jeune en Jamaïque, alors qu'il découvre son homosexualité, il a été contraint de suivre des thérapies de conversion dans des églises Pentecôtistes pour "soigner" sa déviance. L'homosexualité décomplexée de Pisteur, et sa tendance à vouloir "niquer les dieux" à tout va n'est-elle pas une revanche de l'auteur pour clamer haut et fort son identité sexuelle et son rejet de la religion ?



En tout cas, cet univers inspiré des traditions et récits africains est tout bonnement spectaculaire. Parfois, j'ai dû relire une fois ou deux certaines descriptions de personnages, démons rencontrés, villes traversées (Dolingo !!), car mon imagination n'arrivait pas à imprimer.



En parlant des personnages, je trouve qu'il y a là aussi une grande réussite : certes nous suivons les péripéties de Pisteur, mais il y a de la place pour des personnages secondaires qui ne vous laisseront pas insensibles, comme le Léopard, Sogolon, ou l'Aesi. Et c'est pas anodin, car dans le tome deux de cette trilogie dénommée Dark Star, nous aurons la version de l'histoire depuis le point de vue de Sogolon, et nous en apprendrons plus sur l'Aesi. le tome 3 se terminera avec le point de vue de l'enfant...



De quoi vous donner l'envie de poursuivre la découverte de cet univers totalement déjanté et magnifique, même si la lecture n'est pas toujours aisée et que les lecteur·trices sont parfois malmené·es par la trame narrative et bien secoué·es par des scènes violentes.
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Léopard noir, loup rouge

Marre de la fantasy d'inspiration médiévale européenne ? Ce livre pourrait grandement vous plaire !



C'est foisonnant, brutal, ébouriffant.

Rien qu'à la lecture de la liste des personnages en début de volume, on est projeté dans ce monde incroyablement excitant bâti par Marlon James.



Merci à Albin Michel et à Babelio pour ce livre reçu via une Masse critique.

Je dois envoyer la critique pour des raisons de timing, mais il faut que je laisse décanter cette lecture massive ! Je reviendrai sur cette critique plus tard.
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Léopard noir, loup rouge

Avant-propos



En premier lieu, je remercie très chaleureusement Gilles Dumay (Albin Michel Imaginaire) et Carol Menville pour m’avoir envoyé ce service de presse pour me permettre de découvrir cette incroyable œuvre !



Premier tome d’une trilogie de l’auteur jamaïcain Marlon James, j’avais vu passer Léopard Noir, Loup Rouge sur Instagram et dès lors je n’avais plus eu qu’une envie : lire ce roman qui promettait d’être très différent de mes lectures habituelles. Ne serait-ce que parce qu’il s’agit d’une fantasy africaine.



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Introduction



Imaginez un monde ancien, une terre féroce maudite par la loi du plus fort. Une Afrique antique, sauvage et hallucinatoire, que les dieux semblent avoir abandonnée, laissant moultes créatures monstrueuses y faire leur nid. C’est un univers de dark fantasy qui se dessine, violent, riche et complexe, mais tout autant flamboyant.



Aux lecteurices de l’Occident assoiffé.e.s de lectures radicalement différentes, engagées, protéiformes, proposant personnages, décors et bestiaires d’autres cultures, arrêtez-vous sur ce roman. Si vous avez le cœur bien accroché, venez vous plonger dans les récits de Pisteur, lui qui ne croit pas aux dieux, bien qu’il combatte des êtres maléfiques, avant tout les hommes.



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La quête de Pisteur, narration protéiforme



D’emblée, nous entrons dans une narration orale, car Pisteur est interrogé par un Inquisiteur, accusé du meurtre d’un enfant. Car il y a plusieurs années, il avait été engagé pour retrouver un enfant, or l’on sait depuis le départ que celui-ci est mort. Toutefois, c’est loin d’être un récit linéaire que raconte Pisteur. Il mêle plusieurs histoires, dont celles d’autres pour, au final, dresser son évolution mais rapporter les visages changeant du monde dans lequel il vit, les horreurs et la cruautés humaines.



Ainsi, ce sont quêtes initiatiques, quête d’identité, de vérité, mission, rencontres, combats, tortures, métamorphes, sorcières, savants blancs, démons du plafond, vampire, oiseau-foudre qui ponctuent cet ouvrage coup(s) de poing. L’imagination de Marlon James se tisse avec une base de mythologies, légendes et folklores africains au point de ne plus les différencier.



Pisteur « a du nez », il est connu pour ça et d’ailleurs il vie à travers ce don, si on peut l’appeler ainsi. En effet, il est missionné : il est payé pour retrouver des personnes. Dès qu’il capte une odeur, il peut la suivre sur des distances incroyables et ce pendant des années. Au tout début roman, il revient sur quelques-unes de ces missions. Nous comprenons dès lors qu’il possède sa propre vision du monde, sa propre morale : ainsi il retrouve une épouse qu'il reconduit à son mari en lui ayant laissant une arme. Mais très vite, le récit bascule en incluant un bestiaire d’êtres et de créatures maléfiques, surnaturels, car les territoires où voyage Pisteur témoignent de mythologie vivante.



Cet enchevêtrement narratif, proposant à la fois plusieurs histoires et donnant voix à celles d’autres personnages, est lié à la magie, à la monstruosité, à l’imaginaire réel. Et si vous doutez de la véracité de tout ceci, venez écouter Pisteur raconter son histoire.



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Face à la magie



Plus jeune, alors qu’il est en quête de se origines, de son identité, Pisteur va rencontrer un étrange jeune homme qui va le mener aux rencontres qui bouleverseront son destin. Le Léopard apparaît dans sa vie, ce métamorphe homme/léopard ou léopard/homme, ainsi qu’une Sangoma (une « anti-sorcière ») et des enfants Mingi. Ces derniers sont considérés comme maudits, maléfiques, car ils sont différents, pouvant par exemple avoir des jambes trop longues, être albinos ou simplement avoir les dents du haut qui poussent avant celles du bas. Nourrissons, ils sont voués à être abandonnés, à être tués ou à être vendus à des sorcières, qui les dépèceront pour vendre leurs membres et leurs organes, pour préparer onguents et poudres soi-disant médicinaux.



Pisteur sauve des enfants Mingi avec le Léopard. Plus tard, par trahison, le refuge de la Sangoma est attaqué, alors qu’elle tentait de sensibiliser Pisteur à la magie ; d’ailleurs elle lui laissera une marque de protection ainsi qu'une ou deux formules. Elle l’aura davantage marqué, car son nom reviendra régulièrement dans ses récits ; l’on voit qu’elle a contribué à des changements dans sa perception de voir les mondes (la jungle des rêves pour ce citer qu’elle).



Dans cet univers, les hommes sont les proies de monstres, certains appelés par des sorcières, par la magie du sang (les Omoluzu), d’autres étant plus primairement prédateurs (Asanbosam et son frère Asanbonsam, l’un mangeur de chair humaine et l’autre buveur de sang). Mais il y a également des nécromanciens, dont les savants blancs qui mêlent l’alchimie à la nécromancie, ou encore le Mauvais Ibeji (jumeau difforme qui vous fera cauchemarder).



Ce folklore comporte lot de trahisons, d’alliances insoupçonnées, car dans chaque cœur bat la vengeance, la quête de vérité, de changement ; n’oublions pas que la loi du plus fort prévaut.



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Une drôle d’équipe



Le cœur du récit s’articule comme les plus épaisses lianes de cet enchevêtrement narratif autour de la mission de retrouver le garçon. Le garçon, il n’a pas de nom, et, pendant la quasi entièreté du récit, on ignore pourquoi il est aussi important. Pisteur et le Léopard sont missionnés par un esclavagiste, ils feront équipe avec Nsaka Ne Vampi et Nyka, deux mercenaires, Sogolon, la Sorcière de La lune, Bunshi, sirène métamorphe de la rivière, Sadogo, un Ogo, homme très grand et fort (mais ne l’appelez pas géant) et de Bibi, un serviteur de l’esclavagiste. Tout le monde traîne des pieds face à cette inclusion forcée dans ce groupe, surtout Pisteur, qui a un passé avec Nyka, un passé qui lui a, entre autres, coûté un œil ; la façon dont, à la place, il possède désormais un œil de loup, d’où son surnom Œil-de-Loup, est une histoire qu’il vous racontera plus loin dans le récit.



Toutefois, l’équipe est vite divisée, comme les tensions naissent parmi les membres autour de Pisteur. À commencer à cause de Fumeli, le jeune homme archer du Léopard qui se révèle jaloux et possessif. Pisteur ne fait pas confiance à Sogolon, il sait qu’elle ment à propos de leur mission, de l’identité du garçon. Alors que Pisteur et le Léopard se déchirent, Venin fait son apparition, cette fille qui était honorée de servir de sacrifice humain à des créatures monstrueuses. Elle ne cesse de vouloir regagner la forêt pour accomplir sa destinée, mais elle va changer, se rapprocher de Sogolon au point de savoir elle-aussi tracer des runes, et d’insulter la Sorcière de la Lune. Pisteur se rapproche de Sadogo, qui se révèle sensible et tourmenté par les innombrables meurtres qu’il a commis, même ceux datant de sa condition de bourreau.



Plus tard, s’ajouteront à cette drôle d’équipe le buffle, animal intelligent, et Mossi, bel officier du chef de l’armé de Kongor. Si la vérité sur les dessous de cette quête, à savoir l’identité du garçon, s’éclaircit, d’autres trahisons, combats et tortures n’épargneront pas les personnages.



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Monstres parmi les monstres



Comme je le disais plus haut, il faut avoir le cœur bien accroché pour se plonger dans les histoires protéiformes de Pisteur. L’ensemble ne tourne cependant pas au pathos, mais les thématiques n’en demeurent pas moins terribles. L’auteur traite de sujets durs et violents, non pas gratuitement, car il dénonce, il se révolte contre. Ainsi Pisteur, qui tue, déteste les esclavagistes, les hommes qui maltraitent leur(s) épouse(s), les pédophiles, les violeurs, les sorcières. De l’horreur, il y en a dans ces pages : carnages, corps démembrés, viols, enfants esclaves, tortures, ignominies des savants blancs, meurtres, festins de créatures maléfiques, incendie des archives de Kongor (la perte du passé), inceste…



Les véritables monstres, qui sont-ils ? Les enfants Mingi, anormaux ? Les diverses créatures qui ponctuent le récit ? Les métamorphes comme le Léopard, plus animaux qu’humains ? Les esclavagistes ? Les sorcières ? Les traîtres/traîtresses ? Les savants blancs (nécromanciens-alchimistes) ? Ou encore l'Aesi (cet être magnifique à la peau noire comme l'encre, aux yeux blancs et luisants, aux cheveux rouges comme des fleurs écarlates), surnommé roi-araignée ? Pour Pisteur, il n’y a que les hommes qui peuvent porter des masques, et pas les monstres… Les hommes sont les plus monstrueux en fin de compte (si vous en doutiez encore).



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Pisteur et la/les femme(s)



Le fil rouge personnel de Pisteur demeure la quête d’identité. Il cherche ses origines, bien qu’il rejette sa mère et son père, apprend les coutumes ku pour partir. Toutefois, sa quête d’identité ne va pas sans identité de genre. Lors d’une cérémonie initiatique chez les ku, la partie femme des hommes doit être tranchée, de même que la partie homme chez les femmes ; c’est le passage à l’âge adulte. Pour les ku, les individus naissent femme et homme, ce n'est que lors de cette cérémonie que l’on devient véritablement homme ou femme. Nous parlons bien d’excision (circoncision comme clitoridectomie).



Pisteur est trop âgé lorsqu’il découvre ce rituel. Et dès lors, il va s’imaginer une dualité interne, entre sa part virile et sa part féminine. Pisteur aime les hommes, toutefois, certaines de ses attirances, il va les mettre sur le compte de sa part féminine. De même que ce sera son excuse lorsqu’il ressentira certaines émotions, jugées « faibles », toujours selon la loi du plus fort.



Cela va plus loin, car Pisteur hait sa mère, de même que l’ensemble des femmes en général, lui qui déteste les sorcières et insulte par ce nom bon nombre de femmes qu’il rencontre. Misogynie ? Eh bien, non. Et c’est là toute la complexité qui unit Pisteur au féminin. Aimer, fonder une famille, tout cela lui paraît impossible ; le Léopard lui ayant dit que personne n’aimer personne, et d’ailleurs, comment fonder une famille, avoir des enfants alors qu’il aime les hommes ? C’est la rencontre avec un personnage en particulier qui va faire évoluer intérieurement Pisteur, qui va le pousser à voir les choses sous un angle différent, à s’accepter, enfin.



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Œuvre queer



L’œuvre de Marlon James est résolu queer, et c’est un régal de suivre Pisteur, charismatique, flamboyant, de le voir au côté du Léopard, ce chat à l’humour caustique qui est toujours fourré dans les scènes les plus drôles. Un lien profond uni ces deux-là, dans un « je t’aime, moi non plus » tantôt agaçant tantôt émouvant.



Dans la représentation queer, n’oublions pas Ekoiye, le prostitué aux formes féminines, ou l’utilisation de l’inclusif avec un personnage possédé par un esprit.



L’histoire propose également des personnages féminins forts : Nsaka Ne Vampi, la mercenaire, Bunshi, la sirène métamorphe de la rivière, Sogolon, la Sorcière de la Lune qui dessine des runes et peut faire naître des tempêtes, la Sangoma qui protège seule des enfants Mingi.



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Les tambours de la jungle



Au sein des récits de Pisteur, le sang bat comme les tambours de la jungle. Menaces, trahisons, pistes mouvantes, détours, chaque minute rime avec survie, combat, tortures, souffrance, les plans sont souvent voués à l’échec. Toutefois, l’ensemble est émaillé de moments plus légers, amusants, parfois sexy, émouvants aussi (je pense à Sadogo, le Léopard, Mossi, le Pisteur). La narration est plutôt dénuée de pathos, mais les sentiments et émotions transparaissent : Pisteur n'est pas uniquement cet homme fort à la grande gueule qu’il prétend être.



Le sauvage transpire dans les pages : la violence et ignominies des hommes, les métamorphes mi-humains mi-animaux, le bestiaire des êtres dits maléfiques, la loi du plus fort, la prédation etc. Au-delà, l’auteur concocte des mélanges, rendant le sauvage horrible, intolérable : le progrès et l’alchimie au service de la nécromancie (je pense à Dolingo en particulier, où des scènes qui m’ont complètement révulsée). Les monstres, animaux comme créatures, tuent pour se nourrir, mais les hommes tuent par plaisir, pour dominer, pour écraser.



Le sang va battre dans vos veines et à vos tempes lors de votre plongée dans le monde Pisteur, dans cet ouvrage si délicieusement complexe dans lequel on s’immerge complètement. Peut-être se croisera-t-on dans la jungle des rêves ?

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En bref : Mêlant mythologies africaines à son imaginaire, Marlon James signe ici le premier tome de la trilogie Dark Star, récit coup(s) de poing et flamboyant. Dark fantasy, magie, monstres, queer : voilà les ensorcelants ingrédients de l’auteur !



La narration orale protéiforme donne vie à un enchevêtrement de récits, de monstres et de lieux spectaculaires, horribles, vertigineux, oniriques ; de palais et de champs de bataille/de lieux de carnages, à la jungle des rêves, à un royaume dans les arbres, des terres dans les souterrains. Plusieurs histoires, plusieurs voix, une galerie de monstres (souvent humains), de nombreux lieux, tout cela pour retrouver un garçon, cette énigme vivante.
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Léopard noir, loup rouge

Tout d'abord, merci à Babelio pour m'avoir offert ce livre dans le cadre d'une Masse Critique.



Ce bouquin, j 'avais flashé dessus. En tant qu'objet, il est beau. La couverture est canon, et la quatrième de couverture donnait très envie. De la fantasy en Afrique ? Génial comme concept !



Malheureusement, j'abandonne là. Comme je l'ai reçu via Masse critique, j'ai persisté mais là, je craque.

Ce n'est clairement pas mon univers. Je n'ai littéralement rien compris à la première partie. Je n'ai pas accroché au héros. En fait, je n'ai accroché à rien. Ni l'histoire (d'ailleurs, je n'ai pas trouvé d'intrigue en tant que telle) ni à l'ambiance ni aux personnages ni à la plume. Je ne visualisais pas du tout le monde ni les personnages.

Clairement, je ne suis pas le public visé.
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Brève histoire de sept meurtres

Au bout d'une centaine de pages, j'ai du renoncer à aller plus loin avant de recommencer. Stoppez tout, retour en arrière, ce roman se mérite pour en voir le bout. le manque de fluidité du style d'écriture de l'auteur demande beaucoup de concentration, d'autant plus pour suivre les multiples protagonistes de l'histoire qui gravitent autour d'un personnage central en arrière plan, Bob Marley en personne.

Autant vous dire que ce n'est pas un guide touristique de la Jamaïque. Ca défouraille dans tous les coins, ça corrompt dans les arcanes du pouvoir, les politiques et les chefs de gangs fricotent ensemble pour arracher des voix ou des territoires à contrôler et tout cela sous le regard toujours "bienveillant" de la CIA...

O toi lecteur, laisse donc tomber la lecture d'une carte postale paradisiaque, tu vas prendre un aller simple pour 800 pages en enfer.

La Jamaïque idyllique de l'occidental lambda est sérieusement écornée par la réalité de la corruption, les inégalités sociales criantes de désespoir, les règlements de compte dignes des mafieux de Martin Scorsese...

Marlon James raconte la violence et le désespoir au rythme des paroles de Bob Marley qui parsèment tout le long du livre un peu d'espoir et de paix.

Un très bon roman foisonnant et riche sur la face cachée de la Jamaïque mais exigeant sur la lecture.
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Brève histoire de sept meurtres

Partant des événements et des personnages entourant la tentative d’assassinat de Bob Marley, chanteur reggae pacifiste, en décembre 1976, cette fresque épique dépeint les sombres pouvoirs qui régissent la société, en Jamaïque comme aux Etats-Unis.

Et bien que dire de plus que toutes les merveilleuse critiques que l’on peut lire sur ce titre. Pas grand chose. Sauf peut-être qu’ado j’ai beaucoup écouté et joué Bob Marley. Il a été une idole pour moi, alors que je ne suis pas très idole en fait ! Alors ce livre a été une merveilleuse plongée dans mes jeunes années qui a éclairé mes croyances adolescentes et réveillé mes révoltes de l’époque.

Et puis encore que Bob Marley n’est pas le sujet du livre. C’est juste un fil rouge.

Et il y a aussi cette extraordinaire galerie de personnages que l’on va suivre tout au long de ce roman choral. Personnages que Marlon James fait vivre avec fureur qu’ils en sont parfaitement incarnés.

Ce premier roman, traduit en France, de Marlon James est une sacré découverte. Et il est certain que je n’en resterais pas là avec cet auteur
Lien : https://collectifpolar.com/
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Brève histoire de sept meurtres

Bon j'avoue je ne l'ai pas encore finis mais qu'est-ce qu'il est génial ce roman!! L'esprit du pays, des implications, la culture, les racines tout y est représenté. Les personnages nous laissent un petit brin de pensée au fil des pages et apporte petit à petit quelques détails à la trame du roman. J'ai adoré découvrir ces personnages crus, perspicaces, envolés, réalistes. Sur fond de Bob Marley je le conseille à tous les amateurs du genre.
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Brève histoire de sept meurtres

Brève histoire de sept meurtres de l'auteur jamaïcain Marlon James, est un pavé de presque 1000 pages, récompensé par le Man Booker Price 2015.



Un pavé, certes, mais qui vaut indéniablement le détour. Non seulement car l'immersion dans la Jamaïque des années 70, des gangs, des relations entre bandes rivales et politiciens, du pouvoir de l'argent et de la drogue y est total - mais aussi et surtout car le style de l'auteur est surprenant de véracité. Une dizaine de personnages se racontent à tout de rôle, évoquant avec leur vocabulaire et expressions propres, leur vécu, leurs craintes et espoirs d'une Jamaïque insaisissable rythmée par les chansons de Bob Marley.



Fil rouge de ce roman monumental: la tentative d'assassinat du Chanteur (Bob Marley) en décembre 1976 par sept hommes armés. Sept hommes que nous suivront jusqu'à leur mort.



Ce roman m'a fait penser à certains romans de James Ellroy, ou à La Compagnie : Le Grand Roman de la CIA de Robert Littell. J'y ai retrouvé cette précision dans les détails, la complexité des personnages et des relations.



Une belle découverte grâce à une masse critique Babelio.

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Brève histoire de sept meurtres

Histoire compliquée, texte long, long, long et par moments c'est vraiment dur de suivre, tellement les protagonistes sont nombreux; donc, quelques retours en arrière m'ont été nécessaires pour garder le fil. Une histoire de gangs et de meurtres (il me semble qu'il y en a plus de sept, mais j'ai peut-être mal compté) avec en filigrane la tentative d'assassinat de Bob Marley. C'est quand même un livre à lire pour le contexte à la Jamaïque, mais ce n'est pas du tout une brève histoire.
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Brève histoire de sept meurtres

Magnifique épopée au coeur de la communauté jamaïcaine depuis décembre 1976 jusqu'en 1991. La préparation de la tentative d'assassinat de Bob Marley n'est que le point de départ de ce roman dont les trois premières parties se déroulent en Jamaïque et les deux dernières aux Etats-Unis. Les événements sont narrés par divers protagonistes ayant eu un rôle actif ou ayant été impliqués malencontreusement dans ce fait divers. On les suit ensuite dans cette Jamaïque bouillonnante où la débrouille, les gangs et la violence permettent de survivre ou entrainent la mort. Certains personnages émigrent pour les Etats-Unis afin de fuir cette ambiance folle mais tout continue car, là aussi, il faut se débrouiller pour vivre. Ce livre est époustouflant du début à la fin. Le lecteur est plongé dans l'univers de chacun des personnages subtilement au travers d'un style de narration propre à chaque protagoniste. Ce faisant, l'auteur nous brosse le tableau de la politique de son pays, le système en place, les alliances et la vie sociale. On pleure, on angoisse mais on rit aussi tout au long des 850 pages de ce roman. C'est assurément un gros coup de coeur en ce qui me concerne que je recommande à tout amateur d'histoire à saveur exotique.
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Léopard noir, loup rouge

Comment parler d’une claque littéraire ? De ces lectures dont on ne se remet pas facilement ? De celles qui nous accompagnent toujours un peu et dont la marque ne veut pas s’atténuer ?



Je pourrai déjà parler de l’histoire du roman, de son synopsis faussement simple. Le narrateur, Pisteur, possède un don, celui d’avoir du nez, de pouvoir sentir, littéralement, toute personne ou chose, à des kilomètres à la ronde. Tout ce qui passe sous son nez reste gravé dans ses sens, et il peut ainsi pister, chasser, traquer. C’est précisément pour ce don qu’il est mandaté, lui et d’autres personnages haut-en-couleurs, pour une quête énigmatique : rechercher un petit garçon, disparu il y a quelques années. Mais cette mission se révèle bien plus profonde et tortueuse qu’elle ne le laisse présager, et Pisteur et ses compagnons de fortune participeront, malgré eux, à une quête d’une ampleur titanesque qui les dépassent tous.



Léopard Noir, Loup Rouge, c’est l’histoire d’un monde. Marlon James construit une fable démesurée, une mythologie dantesque dans une Afrique fantastique. Le bestiaire est grouillant, et on est autant curieux que dérangé devant la foule de créatures et personnages qui le composent. Les nécromanciens, les enfants hors-normes, les monstres cannibales, les métamorphes, les (anti)sorcières, les esprits, les géants, mais aussi les cités imprenables, les royaumes inexplorés, les griots et leurs histoires disparues, les obscurs mercenaires…On pressent que ce roman ne dévoile qu’une partie du monde grisant échafaudé par l’auteur.



C’est aussi l’histoire d’une langue et d’une écriture. Le récit ne se laisse pas facilement apprivoiser, il faut lutter pour être happé dedans. La lecture n’est pas aisée, autant par le style foisonnant de l’auteur que son écriture dense, poétique et sale à la fois. La multiplicité des personnages et des récits dans des récits eux-mêmes enchâssés dans des récits…On s’y perd, et c’est ce que Marlon James semble chercher. Le rythme est dense, les descriptions, actions et dialogues s’amoncellent. La jungle des mots est éreintante et laborieuse. Mais, peu à peu, on s’habitue à sa compacité et à sa masse, et on s’immerge de plus en plus dans ce paysage littéraire, en découvrant les couleurs, inédites, de son paysage. Les mots filent, laissent entrevoir et comprendre. Les phrases rayonnent, fusent, et font entendre l’écho de celles qui ne sont pas prononcées. Le dévoilement du récit est partiel, haché, et le silence de ce qui est laissé en suspend devient assourdissant.



Léopard Noir, Loup Rouge, c’est l’histoire de la violence. Gore, sanglante, sale, écœurante. La violence qui fait grimacer de dégout, celle que l’on préférait ne pas avoir découvert. La mort, torrentielle et brusque, est partout. On la sent à chaque détour de phrases, on la redoute tout en s’accoutumant à sa présence continuelle. Sadisme, tuerie, barbarie sont dépeints dans une jubilation perturbante. La bestialité enfin, comme un des fils rouges de ce roman. La sexualité, constante, est débridée et explosive, suinte des pages que l’on aimerait parfois refermer tant elles deviennent dérangeantes. La violence est physique, psychologique, sexuelle, verbale. Les coups sont aussi des mots. Les personnages se boxent par leur verve, dans un enchainement de punchlines dont on ne sort qu’essoufflé. Le langage est cru, incisif, et il ne nous ménage pas. Le récit raconte la violence, constitutive de la société et des personnages qui la composent. Pour parler de ce monde, il faut dire la violence, semble nous dire ici Marlon James.



C’est enfin l’histoire de l’identité. Celle que l’on cherche, celle que l’on a, que l’on pense avoir et que l’on aimerait acquérir. Une identité totale, celle qui fait que l’on comble notre existence, qui lui donne un sens, plus grand que notre vie elle-même. Pisteur cherche et se cherche, dans sa famille, dans son lignage, dans son héritage, dans son genre, dans sa capacité à aimer, à être complet. C’est la quête de l’identité d’un homme, de sa légitimité et de ce qui fonde son humanité. Cette quête se reflète alors dans tout le reste du récit, à toutes les échelles : personnages et royaumes cherchent à se comprendre et démontrer de leur légitimité face aux autres. S’il chasse pour accomplir sa mission, Pisteur traque aussi ce qui lui manque et ce qu’il désire, ce qu’il veut être et ce qu’il craint de perdre. Tout au long de ces centaines de pages, on l’accompagne dans sa découverte de lui-même, de son monde, de ce qu’il cherche à construire et de ce qu’il perd. L’histoire commence de la fin, du moment où Pisteur, emprisonné, est questionné par l’Inquisiteur. Le Pisteur qui nous raconte son histoire connait son identité, ce qu’il a cherché, trouvé, et perdu, et c’est finalement ce qu’il nous conte tout au long de son récit.



Difficile désormais de trouver les mots justes pour conclure cette chronique. Léopard Noir, Loup Rouge à été une lecture exigeante, parfois laborieuse, mais surtout jubilatoire et bouleversante. Il fait partie de mes chefs d’œuvres, de ces romans qui me marquent au fer rouge. Il est une ode à la littérature, à l’imagination, à l’amour de la liberté de la langue, à la puissance des mots.

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Brève histoire de sept meurtres

Dès les premières pages, on peut craindre le pire. Ce pavé de plus de huit cents pages se montre très vite indigeste au plus haut point. Un style basé sur la grossièreté, l’argot des petites frappes négro-jamaicaines, les langages orduriers de séries télévisées de bas étage ne saurait tenir lieu d’écriture. Au bout de cent pages de logorrhée de ce sabir “tendance, les petits bourgeois qui ont donné un prix à ce kilo de daube ont sans doute l’impression de s’encanailler à peu de frais, le cul enchâssé dans leur morale servile. Bref, c’est “à chierˮ, pour rester dans le vocabulaire de l’auteur, insupportable au bout d’une petite centaine de pages.
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Brève histoire de sept meurtres

Une brève histoire de 800 pages... à peine assez pour raconter un pays, mais beaucoup trop pour être résumé.

Car si cette brève histoire commence dans les années 70, par une tentative de meurtre, elle court ensuite jusqu'à nos jours, portraitisant une île et son destin de violence. Les conteurs sont multiples, ils sont la diversité qui peuple la Jamaïque. L'auteur passe de l'un à l'autre, d'un vécu à l'autre, forgeant une langue, un but, une posture propre à chacun. Cette brève histoire en mêle des centaines: des petites, des grandes, des trahisons, des espoirs, de petites et grosses magouilles... Elle tisse un quotidien fait de mille points de vue, de mille ambitions. Ce roman c'est celui d'une île étouffée par ses espoirs déçus, auréolée par un chanteur messianique, vérolée par les gangs et la politique.

Ce roman c'est celui qui manquait pour lever le voile d'un pays qu'on ne connaît que par Son Chanteur, mais dont on ignore tout du reste. Il est mené d'une main de maître par un auteur qui connaît les codes et vous plonge littéralement dans un vivier humain, profond, sombre et terriblement addictif. Ne soyez pas effrayé par sa densité, elle n'est rien comparé à la richesse de son texte.
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Léopard noir, loup rouge

C’est un peu comme un bain dans l’eau froide. Ou certains objets que l’on insère dans certains endroits. Ou plutôt, comme un plat épicé. Au début c’est difficile, puis ça devient agréable, pour devenir ensuite douloureusement addictif.

Léopard noir, loup rouge est un OLNI (objet littéraire non identifié). Quelque part entre une dark fantasy poisseuse, un récit de réalisme magique et les contes d’une Afrique imaginaire. Il m’a fallu plus de 100 pages de néologismes abscons, de descriptions hallucinées et de personnages étranges pour être bien dedans. Mais ensuite, quel voyage !

Dans une Afrique de légende, pré-islamique et pré-chrétienne, Pisteur raconte son histoire. Une histoire pleine de sexe, pleine de sang, de monstres et de cauchemars, une épopée brûlante, hallucinée, à travers une Afrique comme un rêve paludéen.

Le Roman est ambitieux, complexe. Il digère les poncifs de la Fantasy et les recrache, tordus, changés. Extrêmement cru, Léopard noir, loup rouge est un livre débordant de stupre, dégoulinant de sang.

Outre la brutalité du récit, sa complexité me fait lever un sourcil quand je le vois dans la catégorie « jeunes adultes ». Ce roman, à mon sens, s’adresse davantage aux amateurs de belles plumes, aux fans de fantasy rincés de manger toujours la même soupe, aux lecteurs de l’imaginaire fatigués du manque paradoxal d’imagination de ce genre.

J’ai lu ce livre il y a quelques années, je l’ai refermé avec le sentiment agréable d’avoir lu mon chef-d’œuvre annuel, et les images d’un continent noir cauchemardesque m’ont hanté longtemps.











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Léopard noir, loup rouge

Ce roman me faisait de l’œil depuis sa sortie, ce n’est pas tous les jours qu’on a un cycle de Fantasy d’un auteur non occidental, inspiré de cultures non occidentales (africaines, pour ce qui est de ce roman). J’étais donc ravie de le trouver dans la médiathèque de ma ville, d’autant que le rayon SFFF est… meh.



Malheureusement, j’ai assez vite déchanté. Sans cette curiosité pour ce roman, je pense que je l’aurais même abandonné. Mais je me suis accrochée, et je dois dire que ça valait le coup quand même.



Je m’attendais un peu à être perdue par les différences culturelles, mais même pas. Les noms ne sont pas habituels pour nous, les coutumes et les mythes non plus, mais ce n’est pas forcément plus compliqué que n’importe quel autre roman de Fantasy. Non, c’est la narration qui m’a perdue. Elle m’a donné l’impression de partir dans tous les sens, on passe du coq à l’âne d’un paragraphe à l’autre sans toujours comprendre s’il y a un lien ou pas, certaines choses ne sont pas expliquées, on fait des avancées et des reculs dans le temps… En plus, le narrateur n’est pas fiable, ni dans la véracité de ce qu’il dit, ni dans ses souvenirs, et il se trouve que c’est lui qui raconte l’histoire, dans une narration très orale.



Autre difficulté, la violence omniprésente (notamment homophobe et sexuelle), que ce soit dans le langage, les insultes ou les agressions, ne rend pas l’immersion très aisée… Puis bon, à titre personnel, la thématique omniprésente du sexe, c’est pas mon truc (même si c’est beaucoup plus rare en Fantasy d’avoir des personnages ouvertement Gay, ça c’est chouette). L’humour ne m’a d’ailleurs pas parlé, c’est souvent glauque et/ou grivois.



Bref, j’ai vu que des lecteurices avaient abandonné, et franchement, je les comprends. Ce n’est pas un roman facile d’accès, à différents niveaux, et j’ai failli faire partie du lot.



Mais curieusement, vers la moitié du livre, la narration a semblé se fluidifier. L’intrigue principale vient enfin de commencer, fini les circonvolutions intempestives, nous avons enfin une direction et un but. Et là, j’ai retrouvé la curiosité qui m’avait attirée au début. C’est toujours aussi viscéral, mais au milieu de toute cette violence, il y a quand même des personnages auxquels on s’attache (enfin, essentiellement un, c’est dire), des mystères que nous aimerions éclaircir, des créatures inconnues qui effraient et fascinent à la fois. L’univers est extrêmement riche et foisonnant, inspiré par des cultures que nous ne connaissons pas forcément, et a plusieurs reprises je me suis vue aller sur notre ami Google pour en savoir plus sur certaines des spécificités culturelles ou mythologiques qui émaillent le livre.



Mais voilà, c’est vraiment exigeant et complexe à lire, clairement, je pense que ce roman en a laissé plus d’un’e sur le bas côté du sentier. Je lirai très probablement la suite, si tant est qu’il m’en reste assez de souvenirs (parce que je ne me vois pas rempiler pour un second round).



Bilan

Difficile de conseiller ce livre tellement j’ai moi-même galéré sur sa première moitié, en raison de sa violence et de son écriture qui donne l’impression de partir dans tous les sens sans expliquer grand-chose. Mais en même temps, c’est un livre extrêmement riche en terme d’univers et de thématiques. Et puis de la Fantasy issue de cultures africaines, on n’en a quand même pas souvent, il faut bien l’avouer.
Lien : https://limaginaerumdesympho..
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Léopard noir, loup rouge

Livre monumental, ce "léopard noir, loup rouge" m'a laissé complètement froid. Les comparaisons avec " RR Martin (Trône de fer) " ou " le seigneur des anneaux " sont ridicules, à côté de la plaque. Des aventures, à gogo, des personnages incroyables (cette fille-fumée...), des divinités barjos, des situations rocambolesques, tout ce que vous voulez, mais à part l'imagination plutôt, donc, folle, de Marlon James, que reste-t-il ? C'est froid. Je n'y ai pas trouvé d'âme, de profondeur, pour tout dire d'humanité. Excessivement superficiel. Sorte d' "heroic fantasy" sans âme. Et c'est long........... si long, je tournais les pages en espérant que j'allais trouver le passage qui rachèterait l'ennui qui me gagnait. Ben non.
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