Comme chaque mois sur Babelio, nous vous proposons de découvrir quelques adaptations de romans qui sortiront prochainement dans les salles obscures. Au menu ce mois-ci : un détective privé souffrant du syndrome de Gilles de la Tourette dans le New York des années 1950, les aventures d'une famille peu ordinaire, une disparition qui entraîne son lot de révélations dans un village de montagne, le destin de deux soeurs séparées par la vie et l'adaptation d'une célèbre comédie musicale où les chats se préparent pour le bal ...
Les Orphelins de Brooklyn de Jonathan Lethem : https://www.babelio.com/livres/Lethem-Les-Orphelins-de-Brooklyn/235131
La famille Addams de Chas Addams : https://www.babelio.com/livres/Addams-La-famille-Addams/403611
Seules les bêtes de Colin Niel : https://www.babelio.com/livres/Niel-Seules-les-betes/891940
Les mille talents d'Euridice Gusmao de Martha Batalha : https://www.babelio.com/livres/Batalha-Les-mille-talents-dEuridice-Gusmo/895067
Le guide des chats du viel opossum de T.S. Eliot : https://www.babelio.com/livres/Eliot-Le-guide-des-chats-du-vieil-opossum/217388
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« Tu te souviens du jeu de la queue de l'âne ?
- Quoi ?
- Le jeu de la queue de l'âne. L'enfant a les yeux bandés et doit coller la queue qu'il tient au dessin d'âne accroché au mur ? On y jouait à la kermesse de l'église.
- Oui, je m'en souviens.
- La vie, c'est comme ce jeu, Euridíce. Des fois, on croit bien faire, mais on finit par se rendre compte qu'on a les yeux bandés, et on n'arrive plus à rien. »
Elle avait lu et oublié certains livres, d’autres, elle les avait achetés et avait oublié de les lire. D’autres avaient été rangés là par Antenor, qui achetait des livres comme on achète des ampoules : il était bon d’avoir les plus grands penseurs chez soi, au cas où on en aurait besoin un jour.
Qu'il est triste de les voir ainsi s'effeuiller,
Les voir ainsi balayées dans le vaste ciel,
Ces illusions que nous portons et déposons
Sur la poitrine des mères, éternel autel.
On ignore jusqu'au comment, et jusqu'au quand
De cet instant qui nous soulagera de notre âme !
Car les âmes vont, perdues, glissent et flottent
Dans ce courant électrique de la mer !...
[Guerra Junqueiro]
Eurídice venait d’apprendre l’une des plus anciennes méthodes de guérilla féminine : le combat par la répétition, qui poussait toujours les hommes à dire oui.
Antenor savait ce qu’il était. C’était un jeune homme de vingt-trois ans, sorti du collège Pedro-II, nanti d’un diplôme de comptabilité, fraîchement engagé par la Banque du Brésil, avec un air de jeune premier (c’étaient là les mots de Dalva), et sans la moindre alliance au doigt. Il ne pouvait boire un café, entrer dans une boutique ou acheter un journal sans que ses mains ne soient examinées par toutes les jeunes filles et mères de jeunes filles se trouvant à proximité. Elles ne s’intéressaient pas à Antenor, mais à l’idée d’Antenor. Elles s’apprêtaient et se maquillaient non pour qu’Antenor s’intéresse à elles, mais pour l’idée qu’il se ferait d’elles.
On peut encore les [Eurídice et Guida] croiser. On les retrouve la nuit de Noël, où elles passent le plus clair de leur temps assises, serviette à la main. Ce sont les premières à arriver, et les premières à partir. Elles parlent des croquettes de morue, de la canicule ou de la pluie de la journée, du vin que certaines d'entre elles boivent encore, mais pas beaucoup, rien qu'un tout petit peu. Elles demandent si le mari va bien, si la petite-nièce a déjà un amoureux, si le petit-neveu est déjà en chemin. Certaines ont besoin d'aide pour quitter le sofa et s'asseoir à la table du dîner. Beaucoup ont perdu l'appétit, et considèrent la dinde avec détachement. D'autres s'animent à l'heure du dessert, parce que du pain perdu, ça ne se refuse jamais. Elles retournent s'asseoir sur le sofa et regardent les plus jeunes ouvrir leurs cadeaux, avec l'air de celles qui ne parviennent plus qu'à voir le passé.
Préface
Pour Feliciano, il était toujours aussi surprenant de constater que le chaos qu’il trouvait en rentrant chez lui était pire que celui qu’il quittait chaque matin pour aller travailler. Le salon était jonché de langes sales, de peaux d’orange, de petites voitures en bois, de bébés à la dérive et de bavoirs maculés. Les lits étaient dans le même état que toujours, à faire. La cuisine était sous la domination des blattes, qui trottinaient sur la vaisselle incrustée de restes. Dans le seul fauteuil qui ne faisait pas office de penderie, il retrouvait Maria Rita, encore en chemise de nuit,absorbée par les vers qu’elle écrivait dans son petit carnet.......Le couple se disputait chaque jour à cinq heures quarante et à dix-sept heures.
"Tu ne me comprends pas, je suis une poétesse, une artiste ! Un esprit libre qu’on a enchaîné à cette vie.
-Maria Rita, je te soutiens dans ton art, mais ce bébé a les fesses aussi rouges que celles d’un babouin ! Et regarde un peu les cheveux de notre fille, il va falloir les lui couper ras la nuque, avec tous ces nœuds."
Ces fornications en famille engendrèrent des hommes et des femmes qui se ressemblaient singulièrement............Il arrivait parfois qu’un Godoy ou un Moraes parvienne à se libérer de cette malédiction de la ressemblance, par la grâce de Dieu et de sa mère, qui avait senti sous sa jupe brûler un feu incontrôlable, dûment éteint au fil des siècles par deux curés, trois médecins, un explorateur perdu dans les anciennes forêts de Rio et cinq jeunes mulâtres. C’était justement le cas de Marcos, qui était né plus grand et plus blond que prévu, confortant la foi de sa famille en une évolution de l’espèce, et celle de sa mère dans le théâtre brésilien. C’était en effet dans un couloir du théâtre João Caetano qu’elle avait connu un acteur svelte, responsable du peu d’émotions qu’elle éprouva passé trente ans.
Assis dans son coin, Plínio ne répondait pas. Il avait succombé à ce mal qui touche tant d'hommes après quelques années de mariage : le vœu de silence. À partir des noces de cuir, le nombre de ses syllabes fut plus petit que celui de ses rots.
...quiconque habitait à Rio cessa d'être immigré portugais, turc de naissance, brésilien de souche, chinois expatrié, mûlatre, quarteron ou métis indien, pour n'être plus que carioca.