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Citations de Martine Pouchain (339)


(...)  Jean Le Monnier qui veillait sur sa fille depuis sa plus tendre enfance comme sur une porcelaine rare. 
Jamais encore elle n’était sortie seule, et aucun jeune homme n’avait eu le loisir d’échanger avec elle plus de quelques mots anodins, encore était-ce toujours en présence de l’un de ses parents. Par ailleurs, son père voulant la préserver à tout prix des mauvaises influences et des dangers, elle avait reçu toute son éducation à domicile. Ainsi, à la veille d’être mariée, la pauvrette ne connaissait de la vie qu’un univers familial bien austère. Depuis deux mois néanmoins, un nouveau précepteur venu de la capitale, égayait chaque semaine deux de ses soirées en lui enseignant la grammaire, l’arithmétique, la logique et la poésie. 
Prudent, le meunier n’avait accepté la présence de ce maître, bien que ce ne fût pas un homme d’Église, que parce qu’il était affublé d’un vilain bandeau noir qui lui barrait le visage et dissimulait son œil manquant. En outre, il claudiquait affreusement et aidait sa marche d’un bâton noueux qui faisait qu’on l’entendait approcher à vingt pas. Jean Le Monnier sentait qu’il n’avait rien à redouter pour sa fille d’un individu aussi disgracieux. Gaucelm de Tours était le nom de cet homme étrange dont nul à Amiens n’avait jamais entendu parler auparavant. (...)
On racontait qu’il était l’instigateur de réunions nocturnes en des lieux sans cesse renouvelés et où se rendaient des notables de la ville et des jeunes gens de bonne famille. Gaucelm leur dispensait-il un enseignement ésotérique ou bien fomentait-il des complots en leur compagnie ? 

Chapitre 1
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Pour faire de la thune, vaut mieux être mort si on a du talent, ou singe si on n'en a pas, décrète Jojo. (p.215)
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Amaury s'arrêta un instant devant la cathédrale pour en contempler la façade. Quelques emplacements apparaissaient encore vides au milieu de cette exubérance de pierre et semblaient attendre le labeur de quelque sculpteur.
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Je vois une petite fille. Elle a dix ans, peut-être plus, pas beaucoup. Une porte claque, elle sursaute.
Je ferme les yeux très fort pour que ça s’arrête, que ça s’arrête, que ça s’arrête… Je ne veux plus voir cette petite fille avec ses yeux d’enfer, je ne veux plus !
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Je cueillais des champignons dans la forêt.
L’orage menaçait, mais il était loin encore, du côté de Mauron. J’avais le temps de remplir mon panier déjà lourd de russules et de lentins qui feraient une soupe parfaite avec un peu de lard.
Je me hâtais de récolter une colonie de chanterelles. Elles étaient plus nombreuses que je ne l’aurais cru et l’air était moite. J’avais soif. Je fis halte à la fontaine pour me désaltérer. J’aime son eau glacée qui déguise en miroir la pierre obscure. Les gens d’ici disent que les fées viennent y boire, mais je ne crois pas que les fées existent réellement. Le curé dit que non, alors, les gens d’ici rétorquent que le curé ne sait pas tout. Pas devant lui, bien sûr.
Je ne sais pas qui a raison, mais je n’ai jamais vu de fée.
L’onde frissonnait sous l’haleine du noroit. Je bus.
C’est alors qu’à la surface de l’eau redevenue lisse, je vis naître un nuage de poussière dorée. Au coeur de ses volutes, des guerriers se battaient, innombrables. Certains drapés de tuniques blanches barrées d'une croix rouge, d’autres qui les affrontaient portaient des vêtements de couleur vive et de longues épées courbes. Tous tailladaient sans pitié en poussant d'effroyables hurlements d’hommes en colère. Et soudain, je vis Luern, mon Luern aux cheveux clairs que le soleil embrasait, croiser le fer avec un guerrier en tunique jaune brodée d’un croissant d’or. Il était épuisé, affaibli, il vacillait déjà lorsque le sabre ennemi perça son flanc droit et que le sang jaillit. Je hurlais.
L’image aussitôt se tordit dans les replis de l'onde.
Ce n’était pas la première fois que j’avais une vision. Depuis longtemps, depuis toujours, la simple contemplation d’une surface lisse et brillante suffit à les provoquer, mais j’ai longtemps cru que c’était dans l’ordre des choses. Et puis un jour que je jouais aux osselets avec les filles du village, une vieille femme s’est dressée devant nous, menaçante. Elle pointait son index vers moi avec un rictus étrange dont je ne parvenais pas comprendre si c’était un sourire ou une grimace. Je crois que je suis devenue toute pâle.
- On dirait que tu regardes la Sainte Vierge, a rigolé Jehanne.
Jehanne est une buse et je déteste quand elle rit comme ça. J’ai balbutié quelque chose, je ne sais plus quoi, au sujet de la vieille.
- Mais quelle vieille ? ont-elles demandé.
C’est à ce moment-là que j’ai compris qu’elles ne la voyaient pas. Déconcertée, au lieu de leur faire croire que j’avais dit ça pour rire, j’ai insisté. Je l’ai montrée du doigt à mon tour.
- Là, juste derrière le père François qui flatte l’encolure de son cheval, vous ne voyez donc pas ?
Je me suis énervée, ridiculisée. Je leur donnais des détails :
- Elle porte une cape noire et des cheveux filasse…
Les filles se tenaient le ventre tellement elles riaient.
- Voilà qu’Ana est devenue aussi folle que Bran !
- Elle voit une sorcière ! Dis donc Ana, pourquoi tu n’inventes pas une histoire de prince charmant, ce serait quand même plus agréable.
- Et qu’est-ce qu’elle fait cette sorcière ? Elle est là, debout, et puis quoi ? Elle t’a jeté un sort ?
A ce moment, la vieille eut un petit ricanement sec, comme si elle était bien contente du tour qu’elle me jouait, et pfuittt ! s’envola, telle une pelure d’oignon que le feu dévore.
Depuis, Gaëlle et Jehanne et toutes les autres filles du village ne m’ont plus adressé la parole que pour me traiter de folle… ou de sorcière.
Je me suis torturée à essayer de comprendre pourquoi je voyais des choses que personne ne voyait. Quelle faute avais-je donc commise pour mériter ce châtiment ? Je préfèrais croire à la disgrâce de Dieu qu’à l’amitié du Diable, mais est-ce que l’une n’entraînait pas l’autre ?
Je n’en ai jamais parlé à mon père, j’avais trop peur qu’il ne veuille plus de moi lui non plus. J’ai enfoui mon secret dans ma mémoire comme dans un écrin et prié Dieu chaque jour de me guérir. Mais Dieu n’exauce pas toutes les prières.
Ce jour-là, dans la forêt, je ne sais pas combien de temps je suis demeurée penchée sur l’eau de la fontaine. Quand je me relevai, l’orage s’était abattu sur la forêt qu’il secouait de sa mauvaise humeur, et d’immenses nuages noirs pesaient sur elle, tels un couvercle.
J'ai ramassé mon panier en hâte et me suis éloignée, ou plutôt, enfuie, poursuivie par la tourmente et par la vision de Luern se vidant de son sang.
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"Quelque part en forêt de Brocéliande. Printemps mil quatre-vingt-dix-sept"
A présent, mon amour s’en va. Déjà sa silhouette se mêle à la brume qui monte de la terre fraîchement retournée, déjà elle s’enfonce dans les profondeurs de mon souvenir.
Quand reviendra-t-il ? Reviendra-t-il ? Je retiens mes larmes. J’ai peur que la lune n’en fasse des perles de lumière que Luern verrait de loin. Comme s’il allait se retourner. Comme s’il m’aimait…
Mais bien sûr qu’il m’aime ! Seulement il est jeune encore. Il n’en sait rien encore, il n’a pas su voir encore cet amour d’Ana, « sa petite sœur ».
Toujours il m’a appelée « ma petite sœur ».
Luern s’en va et c’est moi qui l’ai aidé à partir. Si je ne l’avais pas fait, il n’aurait peut-être pas osé. Il serait demeuré là, près de ses parents qui seront épouvantés demain quand je leur annoncerai la nouvelle de son départ, qui passeront tout le temps de sa longue absence, à redouter qu’il ne revienne jamais de la croisade, parce qu’il est leur fils préféré, et parce qu’ils n’ont que lui à qui léguer leur héritage puisque Bran est un innocent. Pauvre Bran. Pauvre moi.
C’est vrai, j’ai aidé Luern à partir, mais de toute façon, il s’en serait allé tôt ou tard. C’est mieux qu’il parte maintenant, mieux qu’il ne devienne pas aigri ou stupide comme ces jeunes seigneurs qui passent leur temps à tuer les chats et à jouer leurs serfs aux dés. Luern a toujours eu cette rage de chevalerie en lui, le barde n’a fait que la réveiller. Et ce chevalier aussi. Cet Olivier si fier qui me regardait comme une petite fille, qui ne comprenait pas que je sois familière avec Luern, moi, simple fille de métayer.
J’ai seulement montré à Luern qu’il pouvait réaliser son rêve, que c’était possible, que je m’occuperai de tout en son absence. De ses parents, de tout. C’est vrai, je l’ai aidé à partir. Mais peut-être son départ était-il déjà inscrit dans le livre divin. Ce livre que parfois il m’est permis de lire comme en ce jour de mai où j’eus une si étrange vision.
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Je vois une petite fille. Elle joue avec une poupée de chiffon dans la lueur des bougies que le souffle de l’orage menace. Elle a peut-être dix ans, peut-être plus, pas beaucoup.
Dehors, le ciel crache ses éclairs dans le sombre de la nuit avec un fracas de tambour.
Soudain une porte claque. La petite fille sursaute, se retourne. Et dans ses yeux, c’est l’enfer.
Ensuite la petite fille c’est fini, je ne la vois plus, je vois juste sa poupée de chiffon abandonnée sur le plancher, comme morte, et j’entends… j’entends… non ! Je ne veux plus l’entendre ! Je ne veux plus ! Je ne veux plus voir, je ne veux plus entendre. Je bouche mes oreilles et je ferme les yeux très fort pour que ça s’arrête, que ça s’arrête, que ça s’arrête.
Et ça s’arrête.
Ça ne dure jamais longtemps, mais parfois c’est trop long quand même. Parfois aussi, j’ai envie de crier.
« Laisse-moi tranquille Dieu s’il-te-plaît ! Je ne veux plus voir cette petite fille avec ses yeux d’enfer, je ne veux plus ! »
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Lambert le Secq est amoureux d'Élisabeth et il a
l'habitude, sur le chemin de son atelier, de donner
trois coups légers sur le volet. Il n'attend pas de
réponse. Il manifeste seulement sa présence pour
faire savoir à la jeune fille qu'il pense à elle. Il faut
dire qu'il n'a guère d'occasions de la voir. Elle tra-
vaille beaucoup. Beaucoup trop. Avec sa mère et ses
sœurs à la parcheminerie. Et le soir, quand il
repasse, elle est à l'étage où elle fait Dieu sait quoi
et refuse de descendre. C'est tout juste s'il parvient
à l'emmener manger quelques beignets parfois
quand sonne sexte.
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La jalousie a pu motiver un tel geste, mais nul
en cette ville n'est au courant de ce qu'elle est en
train de faire puisqu'elle œuvre en secret et l'a dissi-
mulé jusqu'à sa propre famille.
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Les femmes n'ont pas de jugeote. Si elles en avaient, elles comprendraient que le travail ne peut que nuire à leur beauté et à leur santé. Quant à l'étude, n'en parlons même pas. Chacun sait qu'il n'est pas bon qu'une femme soit plus intelligente que son époux. Cela la pousse inévitablement à se mêler des affaires des hommes.
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Les livres sont la mémoire du monde, et quand les hommes qui les ont écrits auront disparu, leurs œuvres seront là qui témoigneront de leur vie.
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La jalousie a pu motiver un tel geste, mais nul en cette ville n'est au courant de ce qu'elle est en train de faire puisqu'elle œuvre en secret et l'a dissimulé jusqu'à sa propre famille.
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« – Mais… y a un type qui s’appelle Giono, qui dit que la guerre « c’est inutile. Inutile pour moi. Inutile pour le camarade qui est avec moi sur la ligne de tirailleurs. Inutile pour le camarade en face ». Alors, papa, la guerre, au bout du compte, si c’est inutile pour tous ces gens-là, à quoi ça nous sert, à nous? »
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« À quoi ressemblait un ennemi de près? Quels visages avaient-il, ces monstres, ces violeurs, ces tueurs d’innocentes victimes? Figurez-vous qu’ils ressemblaient terriblement à des hommes. »
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« La vérité, c’est que je ne voulais tuer personne, jamais, ni un Allemand, ni qui que ce soit d’autre. Je refusais d’ôter la vie, quel que ce soit l’affront subi. L’œil pour œil n’avait jamais fait partie de ma philosophie. « Je préfère vivre. Je préfère vivre et tuer la guerre (…) Je préfère m’occuper de mon propre bonheur? » « (Refus d’obéissance de Jean Giono)
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J’ai essayé de penser à la naissance des petits chats derrière le poêle, mais je pensais aux Allemands, j’ai essayé de penser à l’orange qu’on m’avait offerte à Noël, mais je pensais aux Allemands, j’ai essayé de penser à mon père le jour où il était rentré tout ruisselant d’orage, mais je pensais aux Allemands,et ça ne me faisait pas plaisir… et je n’étais pas la seule.
Les autres aussi y pensaient.
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in tres bons livre avec beaucoup d'emotion
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"Il y a quand même un truc vicié à la base de cette éducation, si on doit mettre des barreaux autour des gosses pour qu'ils apprennent ! Il me semble que ça devrait être plutôt appétissant, la connaissance."
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C'est trop facile d'abandonner le navire pour monter sur un autre rafiot dont on n'est pas plus assuré qu'il tiendra la route ! Faut faire des efforts, peaufiner.
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- Tu vas quand même pas travailler le jour de Noël !
- J'ai un roman à lire, c'est plutôt sympa comme travail.
Ce n'est pas vrai, mais ça leur cloue le bec. Il n'y en a tellement pas un qui lit dans cette famille que je fais soudain figure d'intello.
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