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Critiques de Mathieu Bablet (508)
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Carbone & silicium

Il y a quelques jours, j'ai écouté le passage d'Alain Damasio dans L'Heure bleue, sur France Inter. Pendant cette émission il parlait de la puissance vitale que pouvait et même devait insuffler un livre à son lecteur pour que celui-ci ait réellement "servi". Ce ne sont pas ses mots exacts mais l'idée est là.

Inutile de vous dire que si je l'écris ici, c'est parce que "Carbone et Silicium" m'aura laissé cet effet. Ce parfum de vitalité nouvelle insufflé dans mes poumons quand je l'ai terminé.



Mathieu Bablet est un artiste incroyable. Je le découvre seulement mais j'entends bien explorer ses œuvres précédentes.

Si j'ai autant apprécié celle-ci c'est sans doute également pour l'écho de mes propres sentiments qui remuait dans les pages.

L'image du futur que je me fais dans un premier temps. Un monde écroulé, je dirais même effondré -ça sonne dans l'aire du temps, mais qui tend vers un espoir, un semblant de reconstruction et de résilience insoupçonnée.

Cette manière incroyable que l'homme a eu de créer des robots qui sentent et ressentent des sentiments alors que lui-même pert la capacité de ressentir, d'exprimer de l'empathie, d'aller vers l'autre. Autrement dit, l'humanisme de nos robots héros. Ce moment quand ils arrivent pour la première fois dans un aéroport, leur enthousiasme pour toutes ces sensations et ses émotions qu'ils voient tout auteur d'eux, la conscience qu'ils ont de l'importance de tout ça. Mais aussi cette capacité à ressentir le Monde, ses transformations, ses levers de soleils "à chaque fois différents".

La complexité des rapports, des liens, entre le collectif et l'individuel. La difficulté de ressentir la communauté, d'y vivre sans y être écrasé et de la quitter sans en être amputé.

L'Amour évidemment. Carbonne et Silicium ne sont qu'un tout en étant deux identités bien séparées. Elle, s'enracine aux gens, trouve sens en eux et pour eux. Lui, s'envole toujours plus loin décidé à explorer la Terre entière qu'importe le nombre d'années que cela prendra.

Et enfin, la nostalgie étrange qui ne m'aura pas quittée du début à la fin. Née en partie du dessin et de ses couleurs qui sont tout bonnement indescriptibles de beauté. Les couleurs et leurs harmonies, cette manière d'exprimer le Réseau. C'est tout simplement magnifique !

Cette nostalgie douce comme les vagues qui lèchent les orteils, comme la caresse du vent et son bruit dans les bambous. Une nostalgie qui s'imbrique dans mon cœur, qui s'y love et qui le réchauffe de sa triste délicatesse.



Je me suis déjà trop épanchée alors qu'il vous suffirait de lire la postface toujours si juste du fameux Damasio dont je parlais plus haut. Evidemment, lisez l'album avant, n'est-ce pas ? Quoi que vous en tirerez, vous ne le regretterez pas.

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Carbone & silicium

Grosse déception. Je suis vraisemblablement passée à côté de ce "Chef d'oeuvre" dont j'attendais la lecture depuis des mois (le temps que la médiathèque l'achète, que ce soit mon tour de l'emprunter...) Quand j'ai reçu le mail m'annoncant que Carbone et Silicium m'attendait, j'ai cru que j'avais gagné un Oscar. Limite si je ne me suis pas achetée une robe de cérémonie pour aller la chercher!

Bref, je la rapporte chez moi et, je l'ouvre... Et, première grosse déception: les dessins sont affreux. Je n'ai jamais vu des personnages aussi laids de ma vie. Même la femme enceinte est repoussante. Ça commençait très mal niveau crédibilité. Qui peut croire en effet que des androïdes ultra sophistiqués et destinés à assister des vieux dans des EHPAD soient formés d'une tête minuscule posée sur un énorme corps gras gelatineux ?

J'ai essayé de passer outre mais sans succès. J'ajoute que plus le temps passe plus ils sont laids.

Bon, je me concentre alors sur l'histoire et, rebelote: grosse déception: c'est un plagiat de Real humains mâtiné de Blade runner lié avec une bonne dose de moraline bienpensante. Et c'est glauque, mon Dieu ! Jamais un sourire, jamais une once de joie ! C'est bien la peine d'être supra intelligent pour être aussi malheureux, soit immensément seul (Silicium) soit droguée au réseau (Carbone). Et puis ce n'est même pas visionnaire. Tout est présenté à l'aune ne nos préoccupations actuelles (migrants, droits des minorités, recherche de connexion). Pas non plus de pari fou (l'Afrique reste sous-développée au XXIIIeme siècle, les Péruviennes sont toujours des mamitas coiffés de chapeaux en alpaga).

Ce n'est que vers la moitié que ça a commencé à me plaire, quand enfin (!!!) le paradoxe de la condition humaine a été abordé (liberté et solitude vs société et aliénation, quête de soi mais volonté d'appartenance) dans une double problématique de surpopulation (surtout si on ajoute les robots) et de réchauffement climatique.

L'histoire d'amour entre les 2 androïdes est touchante mais bon, ça ne m'a pas suffi.
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Shangri-la

Science fiction qui masque - à peine - une critique de notre société actuelle avec ses sociétés omnipotentes qui créent les besoins et l'entretiennent ad nauseam. Allié à un graphisme étonnant et superbe, que ce soit des pleines âges ou le gaufrier habituel, c'est inventif et même si cela se passe dans l'espace, c'est notre société qui est visée. Et c'est plutôt bien fait.

BD qui fait réfléchir (raisonnablement) mais cela fait du bien,

A lire.
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Shangri-la

Douloureux...



Ce roman m'a clairement mise à mal. Choisit pour ses graphismes travaillés, son jeu de couleur intense et sa colorimétrie impeccable, j'ai été sous le charme de ces bulles, proches pour certaine d'un tableau de maître.



L'introduction de ce roman avec ce personnage proche de la folie est intrigante et autant vous prévenir que la fin l'est tout autant... Lire ce roman graphique demande de la réflexion et une seconde lecture ! Mais cela en vaut la peine !



L'intrigue de ce roman tourne autour du destin de l'humanité, ou tout du moins ce qu'il en reste. La critique est acerbe, vise juste, et est aussi cynique que réaliste. C'est puissant.



Mais là où j'ai réellement eu les tripes retournés, c'est quant à la violence qui se dégage de ces bulles. Au milieu de la BD par exemple nous découvrons le secret de l'entreprise Tianzhu et j'ai pleuré de douleur durant ce passage. Ce roman m'a marqué au fer rouge, j'ai été mal à l'aise, j'ai eu du mal à regarder certaine bulle tant la violence était marquante et c'est bien la première fois que cela m'arrive...



Ce roman graphique est réellement une claque. Et je le recommande sans hésiter, mais pas à tous le monde... car je ne suis pas certaine que tous puisse le supporter.



Bonne lecture à tous.
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La Belle Mort

J'aime les BD qui créent des ambiances et celle-ci en fait partie. À première vue, le dessin ne me correspond pas vraiment avec ces personnages aux visages très simplifiés et aux traits taillés à la serpette. Cependant, la manière dont est dessinée cette ville, potentiellement New York, crée une ambiance troublante : les environnements urbains sont représentés avec une méticulosité particulière, toujours dans des tons sépia. Presque toutes les cases présentent un point de fuite dans la perspective des bâtiments avec jamais autre chose que la ville à l'horizon. Ça m'a donné une impression d'oppression, d'isolement. Mais c'est bien le but recherché puisqu'on suit les seuls rescapés d'une sorte d'apocalypse dont on ne sait pas grand chose, si ce n'est qu'ils craignent des créatures insectoïdes plus que tout et qu'ils n'ont rien à manger d'autre que les conserves qu'ils trouvent. Leur espérance de survivre est très limitée.

On retrouve les thèmes classiques de la SF ou de livres style Je suis une Légende ou La route : être seul et rescapé devient presque une punition et survivre un calvaire dont la seule issue est la mort violente, à petit feu ou le suicide.

L'auteur arrive à insuffler une atmosphère très prenante, passant d'un début assez réaliste et cruel à un progressif glissement vers une situation de plus en plus étrange. On se demande si on ne voit pas simplement les personnages devenir fous ou si on plonge vraiment dans le fantastique. Je n'en dirai pas plus pour ne pas dévoiler l'intrigue que je vous laisse découvrir. Juste un mot sur la fin assez ouverte qui peut s'interpréter de manières différentes et dont je me demande toujours si elle est positive, pleine d'espoir ou simplement totalement désespérée et cynique ou un mélange des deux.

En tout cas, j'ai vraiment apprécié cette lecture d'une BD d'ambiance très aboutie, assez rare dans son genre et très bien servie par un graphisme approprié et particulièrement pour les représentations architecturales. Par contre un dernier conseil : à ne pas lire si vous n'aimez pas les insectes et encore moins les insectes qui grouillent ;)
Lien : http://nourrituresentoutgenr..
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The Midnight Order

Ce roman graphique me pose problème.

Je l'ai aimé sans vraiment l'aimer.



Je m'explique.

L'univers est fascinant : on découvre un ordre secret de sorcières qui forment et qui traquent. Avec une notion de ce qui est juste ou pas mise sur la table et un paradoxe avec la chasse menée contre les sorcières dans le passé. De plus, certains chapitres sont superbement illustrés et certains font un focus historique pertinent sur le mythe de la sorcière.



Pour autant, j'ai trouvé que l'histoire était mal ficelée. Les chapitres s’enchainent un peu maladroitement, on sait où on va, pas de suspense, certains styles graphiques m'ont moyennement plu.



Donc un avis mitigé, pour une lecture intrigante mais en demie teinte. C'était bien puis c'était bof, puis c'était bien. Assez déstabilisant.

Je jetterai sûrement un coup d'oeil aux "Midnight Tales" pour voir si c'est mieux fichu. Parce que l'univers est cool, je dois le reconnaître.
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Shangri-la

Si on commence par ce qui est très bon dans cette bande dessinée, on peut parler du dessin, de la créativité du contexte, du développement, du scénario, des points de vue politiques, sociaux et économiques, de la construction des métaphores et… Oui ! Il y a vraiment plein de trucs géniaux dans Shangri-La



Mais si certaines planches sont magnifiques, d’autres m’ont laissé froid et fatalement, au fil de la lecture, je me suis éloigné.



Reste un space opera graphique impressionnant au service d’une critique sociale très contemporaine de nos compulsions acheteuses abruties par un pouvoir économique omnipotent. Portrait d’une société lobotomisée qui court à sa perte en croyant à un paradis promis lui permettant d’oublier les oeillères qu’elle s’est mise elle-même.



Un album au flashback éblouissant
Lien : https://www.noid.ch/shangri-..
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Adrastée, Intégrale

Mais quelle merveille !

Fan inconditionnelle de Mathieu Bablet, je ne m'attendais pas à être autrement que ravie par cette Bd mais le dessin y est somptueux !

Le grand format choisi est parfait pour cette revisite mythologique, ses paysages, ses couleurs et ses décors.

On retrouve une nouvelle fois la question du temps au cœur du récit, comme dans Carbone et Silicium, et on ne peut qu'apprécier la profondeur du regard de cet ancien roi d'Hyperborée sur sa condition d'immortel.

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Carbone & silicium

Si vous aimez les ambiances post-apocalyptiques et le cyberpunk, vous pouvez jeter un oeil à cette histoire d'amour entre 2 robots qui traversent les âges et époques et parle en filigrane de notre finitude et notre rapport au monde/corps.



Dans la postface, Alain Damasio la définit comme une saudade mue par une "solstalgie" qui serait la "nostalgie d'une solitude qui ne serait pas totale, d'un lien entre humains qui ne serait pas coupé" et je trouve que ça situe bien l'atmosphère très particulière de la BD.



Pas le chef d'oeuvre ou coup de coeur annoncé de mon côté mais plaisant malgré tout.
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Adrastée, Intégrale

Avec Adrastée, le génial Mathieu Bablet entraîne son lecteur dans une mystérieuse odyssée, celle d'un être immortel qui veut comprendre la raison de sa condition. Pourquoi cet ancien roi d'Hyperborée qui a déjà vécu plus de 1000 ans a vu ses proches disparaître , a contemplé l'effondrement de son royaume ? Pourquoi doit-il continuer à uniquement vivre alors que les personnes autour de lui vivent mais meurent aussi tandis que les villes deviennent des ruines ? Entre ces questions, notre triste héros tente de se souvenir, de ses âges et surtout de la femme qu'il a aimé et à qui il n'a pu dire au revoir.



Pour son deuxième album plus personnel aux éditions Ankama ( d'abord paru en deux tomes puis réédité en intégrale en 2016 ) , Mathieu Bablet remplace l'horreur insecticidede la ville chez La Belle Mort pour privilégier un cadre fantasmé de Grèce Antique avec une belle touche d'imaginaire baroque et foisonnant. La mythologie dans Adrastée semble hors du temps, les environnements sont détaillés, beaucoup plus variés que dans le précédent titre, toujours sublimés par le style vertiginieux et profond d'un dessinateur qui confirme ici ses qualités de faiseur d'univers.



Dans La Belle Mort, Mathieu Bablet confirmait sa maîtrise des lignes, sa notion des champs, des espaces, dans Adrastée, il confirme davantage les qualités de son dessin architectural.



Un dessin dans lequel on aime se perdre, dans lequel on erre, parfois avec la boule au ventre face à des vestiges, parfois avec enchantement face à de véritables peintures d'une nature titanesque le tout sublimé par une colorisation fort aux tonalités bien prononcées suivant les différentes étapes de la marche de notre héros.



Adrastée se construit donc comme une errance sans véritables finalités. Là où l'intrigue de La Belle Mort démarrait comme une histoire de survie post-apocalyptique classique avant de s'orienter vers une issue curieuse et darwinienne, l'intrigue d'Adrastée est assez évasive, presque abstraite. Elle se contente de nous faire partager la route d'un immortel dont on découvre peu-à-peu le passé. Un immortel qui erre seul mais qui n'est pas tout seul malgré tout. Sur sa route, il fera des rencontres plus ou moins amicales et bénéficiera même de l'aide des dieux du panthéon grec, il se heurtera à de colossales ennemis et traversera tout un monde en guerre.



Avec Adrastée, Mathieu Bablet donne l'impression que l'intrigue se tisse sans véritable structure narrative. C'est à la fois la force et la faiblesse de ce titre puisque d'un côté, nous avons affaire à une odyssée remplie de surprises dans laquelle notre héros évolue dans différents environnements marquants, de l'autre, nous avons affaire à une intrigue parfois abstraite qui semble être traité de manière un peu pompeuse, un peu froide surtout au vu d'un final qui se laisse aller à une sorte d'abandon. C'est le genre d'intrigue qui peut aussi rendre perplexe et cela se comprend...



Mais Adrastée se lit surtout pour la beauté de ce voyage mélancolique et de ce côté-là, Mathieu Bablet nous régale ! Vestiges d'une civilisation de pierre rongé par la faune entrecoupé de quelques plans aériens vaste cité peuplée sur le point de partir en guerre, scènes crues d'une fête orgiaque , ascension jusqu'à un certain Mont Olympe... L'odyssée à laquelle nous convie l'auteur est d'une belle richesse contemplative. Encore une fois, on s'y perd mais on s'en régale, on savoure la qualité de ce voyage varié.



L'auteur emploie remarquablement son talent dans cette fantasy mythologique qui possède aussi une petite dimension à la Moebius dans le traitement labyrinthique de son environnement.



Un mot tout de même sur le chara-design qui est forcément plus affiné avec beaucoup plus de personnages. Bablet varie un peu les horizons en s'inspirant fortement de la mythologie grecque à travers un bestiaire du merveilleux qui comprend la sphinge ( ou sphinx) , le cyclope, un gigantesque titan de métal... Bablet garde son style angulaire et allongé avec des apparitions de toute beauté telle qu'Adrastée mais il montre aussi son aisance dans un imaginaire plus influencé et varié.



Adrastée est une bande dessinée à lire absolument pour qui aime le style de cet auteur mais aussi pour celles et ceux qui adorent les albums qui invitent au voyage, à un imaginaire baroque influencé ici par le cadre de la mythologie grecque.

Avec Adrastée, Mathieu Bablet s'impose comme l'un des meilleurs dessinateurs architecturaux contemporains.



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Carbone & silicium

Et c'est ainsi que naquirent Carbone et Silicium...

Ça ressemblerait presque à un conte de fées mais ça n'en est pas un !



Carbone et Silicium sont deux intelligences artificielles nées de l'obstination de chercheurs et intégrées dans des enveloppes corporelles proches de celles des hommes.



Deux "non humains " dotés de réflexions intenses, d'émotions qui voient réellement ce que le monde est en train de devenir et décident de s'enfuir.



Ils deviennent alors des fugitifs chacun de leur côté, mais se recroisant de temps en temps, assistant à la décheance de l'humanité, au réchauffement climatique, à la folie des hommes....et ce sur près de 300 ans.



Un sacré pavé de 250 pages, aux dessins parfois dérangeants tant l'auteur ne tend pas à embellir la réalité, la rendant parfois "crade" mais aussi parfois poétique.



Un sacré boulot, un superbe ouvrage, difficile à expliquer et qu'il vaut mieux lire pour en apprécier l'univers.

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La Belle Mort

J'adore le travail de Mathieu Bablet depuis que j'ai découvert comme beaucoup d'autres son fameux Shangri-La. A l'époque, je débutais un stage en librairie spécialisée bd, je n'avais pas une grosse culture en bd/manga et la lecture de Shangri-La me procura un sérieux coup de pied au derche. Ce fut un coup de cœur immédiat à tel point que je conseillais presque en exclusivité ce titre sous les rires des employés.



Mathieu Bablet est un auteur de bd qui travaille exclusivement pour Ankama et plus précisément pour leur terrible collection Label 619 qui est responsable de certains titres assez déjantés comme Mutafukaz de Run, les comics horrifique Doggy Bags ou encore Freak's Squeele de Florent Maudoux. Outre son travail pour les anthologies Doggy Bags, Mathieu Bablet a surtout signé quatre magnifiques albums au Label 619, quatre bd dos toilé qui mélange fantastique et sociétal, action et réflexion dans des mondes où parfois l'être humain disparaît pour mieux renaître.



La Belle Mort est son premier album réédité en 2017 à l'occasion de la sortie de Shangri-La. En postface , on peut relever le petit témoignage de l'auteur ému de ce premier titre qui lui a apporté la confirmation d'un auteur de bd. Même si nous ne sommes pas encore dans la consécration apportée par Shangri-La, force est de constater que l'auteur impose avec aisance son imaginaire réfléchi et vertigineux dans ce premier titre.



La Belle Mort est une aventure post-apocalyptique. Dans une immense ville dont on ne connaît pas le nom, trois personnes tentent de survivre dans ce vaste environnement urbain des plus déserts. L'humanité semble avoir quasiment disparu mais les derniers êtres humains résidant dans ce labyrinthe de bétons et de gratte-ciel ne sont pas seuls. La menace qui a réduit à néant l'humanité est bien présente. Elle se tapie dans les rues, grouillante, raclant le bitume, s'infiltrant peu à peu dans les appartements. Ce ne sont pas des zombies mais des insectoïdes, sortes d'insectes intelligents qui ont supplanté l'humanité.



Attention, je ne conseille pas cet album aux entomophobes ( les personnes atteint de la phobie des insectes) qui risquent d'en être traumatisés. Mais les insectes n'arrivent pas de suite dans cette fiction.



L'auteur privilégie d'abord l'immersion et un certain sentiment de solitude qui entourent ces personnages livrés à eux-mêmes dans une ville vidée de ses habitants. Les premières pages s'ouvrent sur un pauvre hère qui déambule tout seul dans cette cité labyrinthique avant de basculer sur un petit groupe de trois personnes qui survit en ramassant les quelques boites de conserves encore consommables , ceci dans l'attente mortelle de leur date de péremption. Ils déambulent d'immeuble en immeuble jouant les yamakasi tout en se cachant des vagues insectoïdes.



Ce qui dénote en premier lieu et qui frappe en pleine figure, c'est le dessin architectural , vertigineux, précis, un dessin tout en profondeur, parfaitement rectiligne qui nous fait perdre la tête dans cette cité urbaine qui semble si vide mais qui est si dangereuse. Des toits des immeubles jusqu'aux intérieurs étouffants et morose des appartements, Mathieu Bablet s'impose facilement comme un " faiseur" d'univers, un artiste parfaitement à l'aise dans la création d'environnements à la fois vaste et régressifs pour l'être humain. Cet effet de "cage", nous la retrouvons d'ailleurs dans Shangri-La qui se déroule dans une immense base spatiale enfermée sur elle-même et qui réduit son humanité à de vulgaires consommateurs. Ajoutez à cela une très bonne utilisation de la couleur et des teintes qui varient suivant les moments de la journée ou qui accentue les effets de torpeurs, d'enfermements, accentuant la folie de certains passages comme une scène d'amour un poil perturbante ou encore la morosité d'une vie enfermée.



Dans La Belle Mort, cette immense ville dont on ne voit pas les limites agit en effet comme une espèce de prison pour les quelques survivants qui tentent de trouver sans forcément chercher une fin honorable à cet état de survie. Assez fort dans ces thèmes, ce premier album de Mathieu Bablet dépasse la structure classique du récit post-apo. La survie est une première base sur laquelle l'auteur étoffe la psychologie de ces personnages, leur solitude ainsi que des thèmes fort comme le devenir de l'humanité, le reflet du transhumanisme comme en témoigne le personnage du mort-vivant. C'est un titre qui dévoile déjà les qualités ambitieuses de l'écriture de Mathieu Bablet qui n'hésite pas à élever cette fiction vers des sommets extrêmes, parfois un peu casse-gueules, il faut le reconnaître



L'auteur possède un bon sens du rythme dans un premier temps en tout cas. Par exemple, les insectes n'apparaissent pas de suite mais ils envahissent peu à peu les cases. Invisible dans un premier temps ( on ne voit que l'ombre d'un mille-pattes géant ) , ils apparaissent peu à peu dans le champs des cases : insectes rampants, volants... jusqu'à des planches titanesques dévoilant des rampants géants où la gueule colossale d'une reine...



Honnêtement, je suis tellement ensorcelé par le travail de Mr. Bablet que j'ai du mal à y distinguer des défauts avec suffisamment de recul. J'ai relu cet album avec beaucoup de plaisir. Ce qui peut déranger dans cet album pour celles et ceux qui ne connaissent pas le travail de Mathieu Bablet, c'est peut-être le fait qu'en dépit de son rythme progressif, Mathieu Bablet ronge un peu sa narration vers les dernières parties de la bd. L'album devient plus précipitée avec l'apparition de la jeune femme Soham dont le lien avec quelques personnages et éléments de l'intrigue est un peu mal emmené, voir un peu floue. Les flash-backs entourant ce personnage sont tardifs et égarent un peu le lecteur. La structure de cette fiction se fragilise dans une seconde partie qui précipitent un peu les choses. De plus , on peut reprocher un petit côté un peu "poseur", un peu mauvais trip avec l'image du corps parasité par les insectes qui, malgré la symbolique de la métamorphose, se révèle un bancal dans l'intrigue et s'inspire plus d'un trip jubilatoire à la Tetsuo dans Akira. La narration de La Belle Mort est parfois un peu égarée par ses trips étranges ou par le rôle des fois mal emmené de certains personnages.



Je passe sur le design des personnages qui est assez particulier mais qui est tout simplement le style de Mathieu Bablet. A la première lecture de Shangri-La, je me rappelle avoir été un peu sceptique sur le dessin des personnages comparés notamment à la qualité des décors et environnements architecturaux. Les personnages sont en effet tous construit sur un même moule avec des traits ovales, aplatis. C'est un style propre à Mathieu Bablet qui souffre un peu de disproportions et de maladresses dans ce premier titre ( première œuvre oblige !) mais qui est renforcé à chaque album tout en étant affirmé sans être un style passe-partout et qui se marie d'ailleurs plutôt bien avec la bd de genre. On y reviendra avec la future critique de Shangri-La.



Côté édition, les bd de Mathieu Bablet sont de bels objets : dos toilé, pelliculage mat, couverture immersive... A noter que la pagination augmente d'album en album et nous nous retrouvons avec de bons gros volumes à conserver soigneusement dans votre bibliothèque.



En somme, pour cette première bd parue en 2011, Mathieu Bablet délivre une curieuse et intense fiction post-apocalyptique. C'est une aventure hors-normes, dans lequel l'auteur nous éblouit déjà par son style graphique en matières de décors et d'environnements urbains. C'est précis, c'est détaillé et c'est diablement immersif. De même, on distingue d'ambitieuses qualités au niveau du scénario qui est un peu piégé par ses propres ambitions ce qui risque de déranger un premier lectorat mais qui se dévore tout de même avec un grand plaisir, juste pour les émotions que ce premier album nous fait ressentir.





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Shangri-la

222 pages de pur bonheur !

Découvert en lisant Carbone et Silicium, j'ai foncé sur Shangri-La, et aucun regret, car Mathieu Bablet est un magicien.

Ses dessins sont poétiques mais également sophistiqués, et le scénario ?

Malgré qu'il fasse froid dans le dos, c'est extraordinaire.

Gros, gros coup de coeur pour cet auteur !
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Shangri-la

Dans une poignée de centaines d’années, la Terre étant devenue inhabitable, ce qu’il reste d’humanité est rassemblé (entassé, confiné) dans une station spatiale, propriété de la société Tianzhu, dirigée par une poignée de personnes inaccessibles. On travaille, on mange, on s’habille, on consomme, on est piloté par Tianzhu. Le mot d’ordre est simple : « travailler, acheter, jeter, remplacer » avant la moindre obsolescence. Implacable dictature de la consommation dans laquelle les humains n’ont pas à penser et semblent heureux. L’« étranger » sur lequel reporter son besoin de domination et d’humiliation a même été créé, sous la forme d’animoïdes, animaux humanisés. Une dystopie tellement proche de notre monde actuel en concentré et en exacerbé que cela fait froid dans le dos, avec des faces cachées absolument écœurantes.

Le travail graphique est colossal, l’environnement à la fois grandiose et étriqué est montré avec beaucoup de détails. L’ersatz de vie dans la station et son inhumanité est parfaitement rendu par les couleurs froides et grises, le traitement monochrome, des visages austères et anguleux comme taillés à la serpe. Les rares courbes et les couleurs chatoyantes sont réservées au monde extérieur (l’espace, les planètes) et aux animoïdes, ce n’est pas un hasard.

Le scénario se veut ambitieux par les thèmes abordés (avenir de l’humanité, scientifiques démiurges, racisme et exploitation, consommation infinie dans un monde fini, hyper contrôle des désirs et des destinées, propagande, medias pantomimes, notions d’astrophysique), qui auraient mérité d’être davantage développés dans un récit encore plus consistant. Le scénario manque de crédibilité sur plusieurs points, notamment les moyens d’action du groupe qui incarne la résistance. D’autres sujets ne sont pas du tout évoqués (comme l’absence d’enfants par exemple).

La scène du début reste un peu difficile à relier complètement au reste de l’histoire.

Cela reste un bien bel ouvrage, avec quelques scènes époustouflantes.
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Carbone & silicium

Roman graphique dense, épais, tant du point de vue de la narration que de sa force picturale. Carbone et Silicium sont deux Intelligences Artificielles, deux robots dotés de sentiment, teintés d'humanités, premiers du genre. Ils traversent les siècles et posent un regard inquiet, curieux et amoureux sur le monde terrien qui les entoure tour à tour d'affection, d'empathie ou de rejet. Dystopie aux allures post-apo, roman d'amour pour le genre humain, roman de couple d'un autre genre, l'imaginaire de Mathieu Bablet nous mène loin sur les contrées philosophiques de ce qui caractérisent l'humanité, la naissance, la création d'un monde, d'un sentiment, l'appartenance à un groupe. le dessin est magnifique est sert parfaitement cette fresque mélancolique où le destin funeste humain semble inévitable. Un ovni littéraire.
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Shangri-la

BD sous un format conséquent, Shangri-la ne s'arrête pas uniquement sur un domaine SF aérospatial. Les illustrations spatiales sont magnifiques et le degré des détails est impressionnant. Malheureusement, les personnages sont difficilement reconnaissables tant leurs traits sont similaires. On passe au contenu qui lui, vaut bien le détour. Beaucoup de messages passent à travers certaines illustrations et les actes du peuple comme des politiciens. C'est le type de BD qui fait réfléchir à notre société, nos vies et notre actuel système/comportement vis-à-vis des uns et des autres et de la nature. Bonne découverte dense mais intéressante!
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Midnight Tales, tome 2

A part la dernière histoire dont je n'ai vraiment pas aimé le dessin, j'ai préféré ce volume au précédent. Les cases sont en général superbes et les histoires bien amenées.



Deux nouvelles, la première passait bien, la seconde manquait clairement de relecture. Mais rien de transcendant-folichon non plus.



Et, surtout avec la première histoire, on ne peut que penser à la série Axolot. Dommage, tout ceci manque d'originalité, et je pense m'arrêter là dans la série des sœurs de minuit.
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Shangri-la

Le libraire qui m'a fourré Shangri-La dans les mains avait ses raisons, surtout idéologiques et commerciales : se faire des clients c'est bien, les convertir au Bien c'est encore mieux. Alors, comme en témoignent toutes les critiques ci-dessus, ce livre (roman graphique, bande dessinée, album, je ne sais) est une anthologie de tout ce qu'il convient de penser quand on cherche de la pensée dans les livres (ou les BD) de science-fiction. Mais le conformisme de l'idée affecte peu l'image qui reste belle, prenante, bien découpée et scénarisée, et j'ai vraiment beaucoup apprécié le jeu des coloris, la stylisation des silhouettes et des visages, le foisonnement des scènes, et la sobriété du commentaire : souvent le lecteur doit se débrouiller seul, sans mots, pour décrypter la scène et passer à la suivante. Donc un travail intelligent et beau, qui se sauve du conformisme plat, aussi, par le recours à la mythologie : toute l'oeuvre est une variation sur le mythe de Prométhée, et l'espace lui donne beaucoup d'ampleur.
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Shangri-la

« Shangri-La » avait marqué l’année 2016. L’album de Mathieu Bablet, lourd de ses 220 pages, proposait une couverture racée et intrigante et une science-fiction de qualité. Devant les promesses, j’avais hâte de me lancer dans la lecture du pavé.



Après avoir abusé de la planète Terre, l’humanité est contrainte de vivre sur une station orbitale. La société est régie par une consommation effrénée, censée abolir toute velléité de rébellion ou de religion. Bien évidemment, cela ne suffit pas à tout contrôler et l’on s’intéresse ici à un groupe de futurs résistants.



Passé le prologue très réussi, ça se gâte rapidement. À aucun moment je ne me suis attaché aux personnages, dont les motivations sont bien floues. La palme revient aux deux frères qui se font la gueule puis se soutiennent à longueur de pages sans que l’on sache trop pourquoi… C’est surtout que Mathieu Bablet nous propose une science-fiction tellement proche de notre quotidien, qu’elle manque de personnalité. On peut critiquer la société de consommation sans forcément montrer des êtres humains voulant à tout prix acheter le dernier smartphone et se prendre en selfie… Le point fort de la SF est de faire des parallèles avec notre monde. Ici, c’est tellement appuyé que ça en devient ridicule.



Au milieu de cette critique facile, quelques thèmes présentent de l’intérêt. Les personnages animaliers, appelés animoïdes, ont leur charme, même si encore une fois c’est très appuyé. On retrouve aussi la difficulté de l’engagement dans la résistance, le choix de la violence… Mais c’est dans ses choix métaphysiques que Shangri-La possède sa force. La place de l’Homme est intelligemment traitée et ses ambitions déifiques donne du poids à l’épilogue. Peut-être que cet axe aurait mérité d’être plus abondamment traité que le simple consumérisme.



Concernant le dessin, il participe certainement au succès de « Shangri-La ». Pour ma part, je n’ai pas été particulièrement séduit par le trait de Mathieu Bablet que je trouve assez froid et figé. Mais le travail des couleurs, la minutie de l’ensemble, notamment dans les décors, en font un ouvrage de qualité sur ce plan. Quelques pages dans l’espace sont bluffantes.



J’ai été déçu par « Shangri-La ». J’en avais entendu beaucoup de bien, mais je n’ai pas accroché, ni aux personnages (à part John), ni aux enjeux. Manquant de finesse dans sa dénonciation forcée du consumérisme, l’auteur s’égare alors que les bonnes idées semblent reléguées au second plan. Dommage.


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La Belle Mort

Univers post-apocalyptique. « Quoi ? Encore ? Mais ils n’en ont pas marre de nous bassiner avec les univers post-apocalyptiques !? Y’a jamais rien d’original. Ils tournent toujours autour des mêmes … » Voilà ce à quoi j’ai pu penser quand j’ai mis cette bande-dessinée dans mon petit sac à la bibliothèque : je me contrains bon et mal gré à tous les livres français présents dans ma bibliothèque (la langue de Molière me manque les amis !). Donc, je disais …



Avec La Belle mort, nous plongeons dans un décor post-apocalyptique et nous n’avons guère besoin de mille et une bulles pour nous le faire comprendre. La ville est déserte, dévastée par le temps et par quelque chose qui devient rapidement des « insectoides » grâce aux commentaires des personnages. « Insectoide » est un mot qui n’existe pas et pour cause, c’est une histoire alambiquée – nous sommes dans un univers post-apocalyptique, ne l’oubliez pas – qui prend néanmoins sens au fil des pages de la bande dessinée. Qui dit ville dévastée, proche fin du monde, dit forcément groupe de survivants. On ne va pas vous la faire à vous connaisseurs de Walking Dead et autres survivals du genre. Notre petit groupe de survivants vie donc de pillages de supermarché, de demeure et en revient à vivre de boites de conserve mais rapidement vient le temps des questions existentielles. Jusqu’à quand ? Et que faire après … quand tout aura été consommé, que faire ? Ces personnages sont bousculés. On remue leurs entrailles pour en faire ressortir ce qu’il y a de plus triste, de plus fou et même de plus beau car ils sont tous liés à une Destinée qui les dépasse … et de loin ! Pas beaucoup de scènes de guerre, on les compte sur les doigts. La Belle mort met en scène les entrailles de ses personnages et c’est ce qui est plaisant à lire : un livre intelligent.



Ce scenario est porté par un graphisme … impressionnant. Les couleurs, le coup de crayon, les perspectives des dessins ne font que renforcer ce sentiment de vide, de minuscule parmi le géant, de néant au milieu d’un tout. Véritable bande dessinée, les dessins ont un réel enjeu. Ils portent un message au même titre que les actions et paroles des personnages. Parmi ce décor particulier, nos personnages … minuscules, en pointillés …







La Belle mort est une incroyable découverte pour moi, et une franche réussite pour son créateur Mathieu Bablet. Sincèrement, cette copieuse bande dessinée – 140 pages – mérite le coup d’œil …

Gros énorme plus pour le cahier graphique final ! WAHOO !
Lien : http://leslescturesdespleenl..
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