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Citations de Maurice Leblanc (813)


« Puis il souriait :
« — Mais pourquoi m'inquiéter ? C'est lui-même qui se chargera d'éveiller la haine au cœur de ceux qui ont oublié et de ceux qui n'ont pas vu. Est-ce qu'il peut changer, lui ? Tu verras, Paul, tu verras. Tout ce que je puis te dire ne vaut pas l'effroyable réalité. Ce sont des monstres. »
Paul Delroze s'était tu. Sa femme lui demanda, d'une voix un peu timide :
« Pensez-vous que votre père avait tout à fait raison ?
— Mon père était peut-être influencé par des souvenirs trop récents. J'ai beaucoup voyagé en Allemagne, j'y ai même séjourné, et je crois que l'état d'âme n'est plus le même. Aussi, je l'avoue, j'ai quelquefois du mal à comprendre les paroles de mon père... Cependant... cependant elles me troublent très souvent. Et puis, ce qui s'est passé par la suite est si étrange ! »
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« Ces journées, qui devaient se terminer par la plus affreuse catastrophe, m'ont laissé des impressions profondes. Aux bords de la Loire, dans les plaines de la Champagne, dans les vallées des Vosges, et surtout parmi les villages de l'Alsace, quelles larmes j'ai versées en voyant couler les siennes ! De quel espoir naïf j'ai palpité en écoutant ses paroles d'espoir !
« — Paul, me disait-il. Je ne doute pas qu'un jour ou l'autre tu ne te trouves en face de ce même ennemi que j'ai combattu. Dès maintenant, et malgré toutes les belles phrases d'apaisement que tu pourras entendre, hais-le de toute ta haine, cet ennemi. Quoi qu'on dise, c'est un barbare, une brute orgueilleuse, un homme de sang et de proie. Il nous a écrasés une première fois, il n'aura de cesse qu'il ne nous ait écrasés encore, et définitivement. Ce jour-là, Paul, rappelle-toi chacune des étapes que nous parcourons ensemble. Celles que tu suivras seront des étapes de victoire, j'en suis sûr. Mais n'oublie pas un instant les noms de celles-ci, Paul, et que ta joie de triompher n'efface jamais ces noms de douleur et d'humiliation qui sont : Frœschwiller, Mars-la-Tour, Saint-Privat, et tant d'autres ! N'oublie pas, Paul...
« Puis il souriait :
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« Lorsque ma mère mourut, j'avais à peine quatre ans, et mon père m'entoura d'une tendresse d'autant plus vive que la mort de sa femme l'avait frappé cruellement. Il tint à commencer lui-même mon éducation. Au point de vue physique, il s'ingéniait à développer mon entraînement et à faire de moi un gars solide et courageux. L'été, nous allions au bord de la mer ; l'hiver, dans les montagnes de Savoie, sur la neige et sur la glace. Je l'aimais de tout mon cœur. Aujourd'hui encore, je ne puis songer à lui sans une émotion réelle.
« A onze ans, je le suivis dans un voyage à travers la France, qu'il avait retardé depuis des années parce qu'il voulait que je l'accomplisse avec lui, et seulement à l'âge où j'en pourrais comprendre toute la signification. C'était un pèlerinage aux lieux mêmes et sur les routes où il avait combattu jadis, durant l'année terrible.
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« Comme je vous l'ai dit, Elisabeth, l'épisode se rattache à un drame terrible, et si étroitement, que cela ne fait et ne peut faire qu'un dans mon souvenir. Ce drame, on en a beaucoup parlé à l'époque, et votre père, qui était un ami de mon père, comme vous le savez, en eut connaissance par les journaux. S'il ne vous en a rien dit, c'est sur ma demande, et parce que je voulais être le premier à vous raconter ces événements... si douloureux pour moi. »
Leurs mains s'unirent. Il savait que chacune de ses phrases serait accueillie avec ferveur et, après un silence, il reprit :
« Mon père était un de ces hommes qui forcent la sympathie, même l'affection, de tous ceux qui les approchent. Enthousiaste, généreux, plein de séduction et de bonne humeur, s'exaltant pour toutes les belles causes et pour tous les beaux spectacles, il aimait la vie et en jouissait avec une sorte de hâte.
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La route escaladait en pente raide les hauteurs de Corvigny et constituait au milieu de la ville, entre la double rangée des magasins, des monuments publics et des hôtels, l'artère principale, encombrée ce jour-là d'attroupements inusités. Elle redescendait ensuite et contournait les antiques bastions de Vauban. Puis il y eut de légères ondulations à travers une plaine que dominaient à droite et à gauche les deux forts du Petit et du Grand Jonas.
C'est en suivant cette route sinueuse, qui serpentait parmi les pièces d'avoine et de blé, sous le dôme ombreux formé au-dessus d'elle par des alignements de peupliers, que Paul Delroze revint sur cet épisode de son enfance dont il avait promis le récit à Elisabeth.
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Jérôme avait pris les sacs et les déposait dans une calèche commandée à Corvigny, et qu'il fit avancer. Quant aux gros bagages, il devait les emporter avec la charrette de la ferme.
Le temps était beau. On releva la capote de la voiture.
Paul et sa femme s'installèrent.
« La route n'est pas bien longue, dit le garde... quatre lieues... Mais ça monte.
— Le château est-il à peu près habitable ? demanda Paul.
— Dame ! ça ne vaut pas un château habité, mais tout de même, monsieur verra. On a fait ce qu'on a pu. Ma femme est si contente que les maîtres arrivent !... Monsieur et madame la trouveront au bas du perron. Je l'ai avertie que monsieur et madame seraient là sur le coup de six heures et demie, sept heures...
— Un brave homme, dit Paul à Elisabeth quand ils furent partis, mais qui ne doit pas avoir souvent l'occasion de parler. Il se rattrape... »
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« Ah ! c'est vous, Jérôme, s'écria Paul. Très bien. Je vois que vous avez reçu la lettre du comte d'Andeville. Nos domestiques sont arrivés ?
— Tous les trois de ce matin, monsieur, et ils nous ont aidés, ma femme et moi, à mettre un peu d'ordre dans le château pour recevoir monsieur et madame. »
Il salua de nouveau Elisabeth qui lui dit :
« Vous me reconnaissez donc, Jérôme ? Il y a si longtemps que je ne suis venue !
— Mademoiselle Elisabeth avait quatre ans. Ç'a été un deuil pour ma femme et pour moi quand nous avons su que mademoiselle ne reviendrait pas au château... ni M. le comte, à cause de sa pauvre femme défunte. Et ainsi M. le comte ne fera pas un petit tour par ici cette année ?
— Non, Jérôme, je ne le crois pas. Malgré tant d'années écoulées, mon père a toujours beaucoup de chagrin. »
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Il avait une figure énergique et franche, à la peau durcie par le soleil et par le froid, des cheveux déjà gris et cet air un peu rude qu'ont certains vieux serviteurs à qui leur place laisse une complète indépendance. Depuis dix-sept ans, il habitait et régissait pour le comte d'Andeville, père d'Elisabeth, le vaste domaine d'Ornequin, au-dessus de Corvigny.
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Il y eut un mouvement dans la foule. Tout le monde se groupait autour de la sortie. C'était un général, accompagné de deux officiers supérieurs, qui se dirigeait vers la cour où l'attendait une automobile. On entendit une musique militaire : dans l'avenue de la gare passait un bataillon de chasseurs à pied. Puis ce fut, conduit par des artilleurs, un attelage de seize chevaux, qui traînait une énorme pièce de siège dont la silhouette, malgré la pesanteur de l'affût, semblait légère grâce à l'extrême longueur du canon. Et un troupeau de bœufs suivit.
Les deux sacs de voyage à la main, Paul, qui n'avait pas trouvé d'employé, demeurait sur le trottoir, lorsqu'un homme guêtré de cuir, habillé d'une culotte de velours gros vert et d'un veston de chasse à boutons de corne, s'approcha de lui, et, ôtant sa casquette :
« Monsieur Paul Delroze, n'est-ce pas ? Je suis le garde du château... »
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A l'évocation de ce mariage si récent, et où il y avait de telles promesses de joie profonde et durable, son joli visage blond qu'illuminait une auréole de boucles dorées souriait déjà du sourire le plus confiant, et elle murmura :
« Mariés de ce matin, Paul. Alors, vous comprenez, ma provision de bonheur n'est pas bien lourde. »
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Il lui pressa la main.
« N'ayez pas peur, Elisabeth. Rien de tout cela n'arrivera. Pour qu'il y ait la guerre, il faut que quelqu'un la déclare. Or, quel est le fou, le criminel odieux, qui oserait prendre cette décision abominable ?
— Je n'ai pas peur, dit-elle, et je suis même sûre que je serais très brave si vous deviez partir. Seulement... seulement, ce serait plus cruel pour nous que pour beaucoup d'autres. Pensez donc, mon chéri, nous ne sommes mariés que de ce matin. »
A l'évocation de ce mariage si récent, et où il y avait de telles promesses de joie profonde et durable, son joli visage blond qu'illuminait une auréole de boucles dorées souriait déjà du sourire le plus confiant, et elle murmura :
« Mariés de ce matin, Paul. Alors, vous comprenez, ma provision de bonheur n'est pas bien lourde. »
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C'était le dernier jeudi de juillet, le jeudi qui précéda la mobilisation.
Elisabeth se serra anxieusement contre son mari.
« Oh ! Paul, dit-elle en frissonnant, pourvu qu'il n'y ait pas la guerre !...
— La guerre ! En voilà une idée !
— Pourtant, tous ces gens qui s'en vont, toutes ces familles qui s'éloignent de la frontière...
— Cela ne prouve pas...
— Non, mais vous avez bien lu dans le journal tout à l'heure. Les nouvelles sont très mauvaises. L'Allemagne se prépare. Elle a tout combiné... Ah ! Paul, si nous étions séparés !... et puis, que je ne sache plus rien de vous... et puis, que vous soyez blessé... et puis... »
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La gare présentait une animation extrême. Il y avait beaucoup de soldats et un grand nombre d'officiers. Une multitude de voyageurs, familles bourgeoises, paysans, ouvriers, baigneurs des villes d'eaux voisines que desservait Corvigny, attendaient sur le quai, au milieu d'un entassement de colis, le départ du prochain convoi pour le chef-lieu.
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Ils descendirent. Le train s'était arrêté en gare de Corvigny, station terminus de la ligne d'intérêt local qui part du chef-lieu, atteint la vallée du Liseron et aboutit, six lieues avant la frontière, au pied de la petite cité lorraine que Vauban entoura, dit-il en ses Mémoires, « des plus parfaites demi-lunes qui se puissent imaginer ».
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Il parlait avec une gravité soudaine, et comme si l'évocation de ce souvenir eût éveillé en lui les pensées les plus pénibles.
Elisabeth lui dit :
« Racontez-moi cela, Paul, voulez-vous ?
— Je vous le raconterai, fit-il. D'ailleurs, bien que je ne fusse encore qu'un enfant à cette époque, l'incident est mêlé de façon si tragique à ma vie elle-même que je ne pourrais pas ne pas vous le confier en tous ses détails. »
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« Si je vous disais que je me suis trouvé en face de lui, jadis, sur le territoire même de la France ! »
Elisabeth regarda Paul Delroze avec l'expression de tendresse d'une jeune mariée pour qui le moindre mot de celui qu'elle aime est un sujet d'émerveillement.
« Vous avez vu Guillaume II en France ? dit-elle.
— De mes yeux vu, et sans qu'il me soit possible d'oublier une seule des circonstances qui ont marqué cette rencontre. Et cependant il y a bien longtemps... »
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Leurs mains s'unirent. Il savait que chacune de ses phrases serait accueillie avec ferveur et, après un silence, il reprit :
« Mon père était un de ces hommes qui forcent la sympathie, même l'affection, de tous ceux qui les approchent. Enthousiaste, généreux, plein de séduction et de bonne humeur, s'exaltant pour toutes les belles causes et pour tous les beaux spectacles, il aimait la vie et en jouissait avec une sorte de hâte.
« En 70, engagé volontaire, il avait gagné sur les champs de bataille ses galons de lieutenant, et l'existence héroïque du soldat convenait si bien à sa nature qu'il s'engagea une seconde fois pour combattre au Tonkin, et une troisième fois pour aller à la conquête de Madagascar.
« C'est au retour de cette campagne, d'où il revint capitaine et officier de la Légion d'honneur, qu'il se maria. Six ans plus tard il était veuf.
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Il faut tout faire pour celle que l'on aime. Il faut se sacrifier à elle, lui offrir tout ce qu'il y a de beau dans le monde, de la joie, du bonheur... et, si elle s'ennuie, de belles aventures qui la distraient, qui l'émeuvent et qui la font sourire... ou même pleurer.
(Les huit coups de l'horlogue)
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L’analogie des cinq crimes était telle qu’il n’y eut qu’une seule instruction, laquelle engloba les cinq enquêtes, et d’ailleurs n’aboutit à aucun résultat. Disparition d’une femme, découverte de son cadavre huit jours après, exactement. Voilà tout.
(Les huit coups de l'horloge)
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Huit jours après leur départ, on retrouvait chacune d’elles en un endroit quelconque de la banlieue ouest de Paris, et chaque fois, ce fut un cadavre qu’on retrouva, le cadavre d’une femme frappée à la tête d’un coup de hache. Et chaque fois, près de cette femme attachée solidement, la figure inondée de sang, le corps amaigri par le manque de nourriture, des traces de roues prouvaient que le cadavre avait été apporté là par une voiture.
(Les huit coups de l'horloge)
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