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Citations de Mélanie Fazi (275)


Avant même qu’Ole Ferme-l’Œil m’apprenne ce qui était arrivé à mon frère, mon cœur se serrait déjà. J’avais su, confusément, que le répit ne durerait pas. Quelque chose se tramait, et je n’allais pas aimer. L’image des trois crapauds me revenait en mémoire. Il me l’avait dit lui-même : cette femme ne tolérait pas l’échec.
Assise en tailleur sur mon matelas dans ma chambre hachurée de rayons de lune, j’ai écouté ce bonhomme aussi impressionnant que minuscule formuler ses consignes. L’impossible faisait irruption dans ma nouvelle vie et je n’avais d’autre choix que d’y croire. (« Swan le bien nommé »)
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Chaque fois qu’un humain s’endort, une de mes sœurs s’éveille.
Perchée sur le toit d’un immeuble, je contemple la ville assoupie. Paysage de verre, de brique et de goudron encore parcouru d’un frisson de vie. Et qui s’anime déjà d’une autre activité. J’aime cette heure où les deux mondes se frôlent sans coïncider. Chuchotis des voitures tout en bas, dans les rues. Pas furtif des couche-tard qui rentrent au bercail. Et les murs nous libèrent peu à peu.
Je passe mes jours à sommeiller dans le béton. Fondue dans la masse des bâtiments. Imbriquée dans leurs molécules, moi qui ai la densité d’un souffle de vent. Et pas de corps contre lequel la matière peut lutter. J’attends, conscience éteinte, que le sommeil d’un humain me tire de ma torpeur. Pas forcément celui que je visiterai. Rarement lui, d’ailleurs… C’est devenu un réflexe : je m’éveille toujours avant qu’il ne s’endorme. (« Le pollen de minuit » »)
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Avant d’arriver chez les Sœurs, je croyais que le plus difficile serait d’être privée de mails, de portable, et de ne pas pouvoir sortir les premiers mois. Mais on s’y fait vite, finalement. On a l’impression d’être ailleurs. Le dortoir, les vieilles salles de pierre avec leurs sculptures et leurs tentures, les uniformes, et même les chemises de nuit… C’est presque un autre monde. Comme si le temps s’était arrêté pour nous.
En réalité, le plus dur, c’est de ne pas être certaine que j’arriverai à aimer le Dragon.
Quand les autres en parlent, elles ont des étoiles dans les yeux. Je vois bien qu’elles comptent les jours. Elles ne pensent qu’à ça, quand elles ne pensent pas aux garçons. Mais je n’y peux rien, j’ai peur du Dragon. Et presque aussi peur que les Sœurs s’en aperçoivent. (« Les Sœurs de la Tarasque »)
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Plus que quelques secondes. Il se concentra comme on avale une dernière goulée d’air avant de partir en plongée… Puis une main vigoureuse l’empoigna par la chemise et l’arracha à la terre, cassant une branche de l’arbuste au passage.
— Abel, tu es dégoûtant. Relève-toi !
On le remit debout sans lâcher sa chemise. Cette main lui avait griffé le cou, sans doute pas entièrement par accident. Janvier le secoua avec une rudesse inutile avant de lâcher prise. Abel releva les yeux vers le professeur qui fronçait les sourcils devant sa chemise et son pantalon maculés de terre. Il lui fourra chaussures et chaussettes entre les mains.
— Va te changer. Tout de suite. Et ne traîne pas, tu es en retard pour ton cours.
Un peu plus tard, alors que Janvier décrochait la ceinture de cuir pour lui imprimer la leçon dans le crâne, Abel se concentra sur un point au plus profond de lui-même, en quête de son dragon caché. (« Dragon caché »)
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Quelques jours après les plumes, l’offrande d’une des corneilles me prend au dépourvu. Une tête de pirate en bois sculpté, visage stylisé, barbe noire, tricorne juché sur le crâne. Un petit anneau métallique lui perce l’oreille. Je l’accroche au sapin, près du grelot, sans trop comprendre. On ne m’a jamais offert de pirate pour Noël, sous aucune forme dont je me souvienne. C’étaient les jeux de mon frère plus que les miens. Mais je me rappelle, l’année de mes treize ans… (« L’arbre et les corneilles »)
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Le lendemain soir, lorsque mon corps a réclamé son heure de marche, je suis retournée dans cette ruelle. L’image de ce bonnet me tournait dans la tête. Je voulais m’assurer qu’il était bien là et comprendre pourquoi. Je suis revenue sur mes pas une dizaine de fois sans retrouver le jardin de la veille. J’ai inspecté le mur à tâtons, paume à plat contre la pierre et les affiches, comme à la recherche d’un passage secret.
Et puis un autre soir, la même grille ouvragée dans une autre ruelle. Les mêmes arbres et le même silence au-delà. Je m’y suis engouffrée le cœur battant. J’ai fini par comprendre que ce serait toujours le jardin qui viendrait à moi, pas l’inverse. Il ne se manifestait jamais au même endroit, mais il avait cette manie d’apparaître sur mon chemin quand je sortais marcher le soir. On s’apprivoisait petit à petit. Il n’exigeait que ma confiance. (« Le jardin des silences »)
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Et si en fin de compte la peau n'était là que pour dissimuler ? Pour être retiré lambeau par lambeau comme on épluche une banane.
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Peut-être que nos plus grands espoirs ne servent qu'à être déçus. Peut-être qu'on devrait toujours laisser les légendes intactes.
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Rien n'est plus sinistre qu'une ville sans histoire.
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C'est triste, une maison vide, triste et fragile. Une coquille creuse qu'on menace de briser en marchant dessus. Ils avaient vu une maison qu'on vidait comme on dépouille un cadavre encore chaud, sans pudeur aucune, avant que l'esprit quitte le corps pour de bon.
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Certains griefs ne connaissent pas l'usure.
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