AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Citations de Mélanie Fazi (275)


Un corps, on naît avec, mais rien n'empêche d'agir sur lui.
Commenter  J’apprécie          20
L'espoir vous mine plus sûrement que l'oubli.
Commenter  J’apprécie          20
_ C’est Jonas qui m’envoie.
Et son regard incandescent, comme sous l’effet d’une flamme en lui rarement éteinte, s’est illuminé d’un degré supplémentaire. Le sourire du lutin s’est fait gourmand.
_ Tu viens pour la spéciale, c’est ça ? Jonas a dû t’expliquer qu’elle n’est pas à la portée du premier venu.
Oui, Jonas m’a parlé de ces encres qu’ils sont cinq à se partager. Chacun son art, sa façon de procéder, et un but commun pour les cinq. Il m’a tracé les grandes lignes du récit qu’allait ensuite me détailler Nikolai, ce premier soir dans sa boutique.
Et dans ce regard, comme plus tôt dans celui de Jonas, une lueur de défi à mon intention : maintenant, Joseph, essaie de me surprendre. Raconte-moi ton histoire.

Au moins affiche-t-il clairement son goût de l’artifice : l’épaule que dévoile son débardeur arbore deux masques de théâtre tatoués, l’un souriant, l’autre pleurant. Il ressemble à ces ados malingres au goût prononcé pour le mysticisme à deux balles. J’en ai connu beaucoup. Il partage avec eux une façon de s’affirmer contre le monde, jusque dans ses moindres gestes, à la différence près que lui semble conscient de la farce.
_ Installe-toi ici, dit-il en désignant un siège. Je vais chercher le matériel. Sa voix garde une trace d’accent assez prononcé pour être repérable. Il rebondit à la surface des mots dont il peine à épouser le contour exact. J’imagine qu’il n’a jamais cherché à se corriger. Tout en lui est affirmation, jusqu’à ce prénom qui claque comme un coup de fouet et s’achève sur une envolée, rappelant qu’il vient d’ailleurs.
Je le regarde s’affairer avec une souplesse et une précision qui ne s’acquièrent qu’à force d’exercice. Il a le goût du geste parfait, jusque dans la façon dont ses longs cheveux blonds, des cheveux de jeune fille, accompagnent ses mouvement tel un voile.
_ Attends de voir le motif : je suis sûre que tu vas adorer, me promet-il.
Puis il me tend le croquis réalisé d’après ses esquisses de l’autre jour. Il avait écouté patiemment mon récit, sans sourciller, sans faire mine de s’offusquer comme je l’avais craint tout d’abord. Imène avait raison : ces cinq-là sont prêts à tout accepter, pour la seule beauté du geste. Ils se plient aux demandes les plus invraisemblables. J’ai su alors que j’avais trouvé mon homme. Celui devant lequel je pourrais mettre ma conscience à nue sans crainte de jugement moral. Parce que sa tâche est au-delà, et que seul importait le défi. Et la pièce de choix que j’apporterais à sa collection.

S’il te plaît, dessine-moi une pulsion.

C’est lui qui m’a aidé à préciser ma demande. Il n’a pas dû y en avoir beaucoup, comme moi, pour lui offrir de travailler dans l’abstrait. A force de patience et de questions, il m’a soutiré l’essentiel, et au fil de mes descriptions instables et maladroites, lui traçait sur le papier de grandes lignes crayonnées, affinées peu à peu.
Commenter  J’apprécie          20
J'ai suivi des yeux son bras tendu vers l'horizon, vers le ciel étoilé, vers les champs de blé. Je n'aurais jamais cru que le toit d'une maison si peu élevée puisse offrir une telle vue, Bailey Creek n'existait plus: vu d'ici, le monde commençait là où s'étendaient les champs. Ils semblaient cerner la ville tout entière. Des champs de blé et le ciel dégagé à perte de vue.

La lune paraissait tellement proche que j'aurais juré pouvoir l'atteindre. Il suffisait de tendre la main. On pouvait même deviner sa texture, froide et un peu rugueuse au toucher. Elle semblait tellement concrète, grosse boule suspendue en l'air, caillou phosphorescent. On ne regarde pas la lune: c'est elle qui vous regarde. Elle est toute proche et elle vous regarde. Pas comme le soleil qui vous force à baisser les yeux.
Commenter  J’apprécie          20
Dans une ruelle obscure ou une station de métro, je les aurais pris pour des mendiants. Mais il y a autre chose. Ce regard paumé qui scrute le vide ? L'absence de bagages ou même de sac à main ? Le silence obstiné de ces deux-là, qui semblent à peine conscients de leur présence mutuelle ? [nous reprendre à la route]
Commenter  J’apprécie          20
Cette nuit-là, j'ai fait un vœu.
Sur une impulsion soudaine, parce que ces statues me rappelaient des images anciennes de cercles de pierre, avec la crainte immémoriale rattachée aux énigmes. Toutes ces superstitions ancrées profond, aujourd'hui encore, et qui refont surface dès qu'on s'éloigne des villes. Je ne sais plus trop ce qui m'a pris. Mais sur le moment, ça paraissait couler de source.
[Notre-Dame-Aux-Écaille]
Commenter  J’apprécie          10
Une petite voix me souffle qu'on ne devrait jamais tordre la réalité. Qu'on devrait dire les choses plus simplement, telles qu'elles sont réellement, et ne pas chercher à se composer un personnage.
Commenter  J’apprécie          10
Je suis toujours très agacée par l'idée reçue qui voudrait que les écrans isolent les gens et les coupent des relations véritables, comme s'il y avait une incompatibilité profonde entre le réel et le virtuel, et un risque inévitable de finir par confondre les deux. (66)
[...]
Je crois que, sans Internet, j'aurais été très seule et que je me serais privée d'une infinité de moments parmi les plus précieux que j'aie vécus. Le discours qui diabolise les écrans sans discrimination m'agace au plus haut point. Sans parler de cette caricature qui veut qu'une personne qui a le nez collé sur son téléphone soit nécessairement en train de s'abrutir pour ne surtout pas réfléchir ou regarder autour d'elle. (68)
Commenter  J’apprécie          10
Je parle vite, trop vite, on me l'a souvent dit, et ça m'est nécessaire pour suivre le fil de mes pensées ; si j'essaie de ralentir, je les perds d'un coup. De la même manière, je ne peux pas regarder mes interlocuteurs en face quand je réfléchis à ce que je suis en train de dire, sous peine de me déconcentrer. (27)
Commenter  J’apprécie          10
J'avais appris cette leçon précieuse entre toutes : à se montrer tel qu'on est, on gagne le respect de ceux qui nous entourent. (17)
Commenter  J’apprécie          10
On n'apprécie jamais de voir ses défauts en négatif chez les autres, même chez les amis de passage.
Commenter  J’apprécie          10
C’est une révolution quand, pour la première fois, quelqu’un vous donne le droit de vous assumer. On m’avait toujours dit, en substance : « Tu ne peux pas être comme ça; personne n’est comme ça. » S’autoriser pour la première fois à penser « Ce que je suis existe et je n’ai pas à le changer », c’est incroyablement grisant. J’avais toujours su, intuitivement, que les autres se trompaient. Mais ils étaient si nombreux, si insistants parfois, que j’avais fini par les croire.
Commenter  J’apprécie          10
Mélanie Fazi
Nous sommes ceux qui, un jour, ont dû décider de ne plus se taire.
Commenter  J’apprécie          10
p.82.
- Mais le plus bizarre, c'est ta réaction juste après. Tu restes là comme une débile, le temps de comprendre que tu viens de faire... une connerie, tu sais, une vraiment monstrueuse. Et le premier truc qui te traverse l'esprit, c'est : Je fais quoi ? Même pas le réflexe d'être désolée pour lui, ou de me dire qu'il va me manquer, ou... Enfin, d'abord tu te sens anesthésiée, et puis la panique monte d'un coup, et la seule putain de question que te traverse le crâne, c'est : Et maintenant, je fais quoi ?
Alison ne me quitte plus des yeux. À chaque mot prononcé, tout me revient en pleine figure. La seconde de terreur et d'indécision, l'engourdissement, et plus moyen de bouger de là. Juste de me demander : Je fais quoi ? Je m'enfuis, je reste là, je préviens les flics, la famille, les voisins, je file à l'étranger, n'importe quoi, mais quelque chose. Il faut réagir, et vite.
Commenter  J’apprécie          10
p.81.
Je m'en moque pas mal qu'Alison soit au courant. J'ai besoin de m'entendre le dire tout haut. Comme on se parle devant un miroir. Je ne suis pas sûre qu'elle enregistre vraiment ce qu'on lui dit. Ce qui fait d'elle, paradoxalement, la confidente parfaite. Et quand bien même, à qui le répéterait-elle ? Mais moi, je veux m'entendre raconter tout ça.
Commenter  J’apprécie          10
Tout trouve son utilité un jour. Même la différence.
Commenter  J’apprécie          10
Pourtant, je découvrais en moi une profonde angoisse qui émergeait, une séance après l'autre, sans trouver de cause précise. Une sorte de trou noir qui refusait de se laisser définir et nommer.
Cette absence d'explication me perturbait de plus en plus. "On n'en a jamais parlé, mais vous avez une histoire", m'a dit la même généraliste un jour où j'ai fondu en larmes dans son cabinet. Je n'ai pas osé répondre qu'au contraire je n'en avais aucune et que je m'en voulais d'aller si mal sans raison.
Commenter  J’apprécie          10
La différence dont je vous parle tient à l’absence d’une petite chose très bête que tout être humain est censé posséder : une pulsion considérée comme la chose la plus universelle et la plus banale au monde. Celle qui pousse à chercher un partenaire, à désirer la vie de couple, les relations charnelles, celle qui incite à fonder une famille. La recherche de l’âme sœur, si vous voulez. Après tout, les contes de fées de notre enfance se terminaient toujours quand les héros partaient vivre heureux et faire beaucoup d’enfants.
Commenter  J’apprécie          10
- Je ne peux pas dire que j'étais tellement plus heureuse quand j'étais petite. C'était juste différent. Mais des fois, je regrette. L'époque où je ne devais pas réfléchir tout le temps... Le loyer, les factures, chercher un appart, ne pas savoir si tu vas perdre ton boulot, ne pas avoir l'énergie d'en chercher un autre, déjà que ça te pèse de te lever tous les matins pour celui-là... C'est ça que je regrette. Savoir qu'il y avait les adultes pour s'occuper de ces choses-là. Ne pas être responsable en permanence. Tu comprends ?
Commenter  J’apprécie          10
Quand les forains débarquaient en ville, il y avait toujours des gamins de mon âge pour venir traîner autour des caravanes. Le plus souvent, ils se tenaient à l’écart sans oser s’en approcher, comme s’ils craignaient qu’elles soient gardées par des bêtes sauvages. Ou parce que les forains, forcément, devaient être des gens bizarres. Pensez donc, ils n’avaient même pas de toit ! Alors les gamins observaient notre petit manège et s’amusaient à deviner quelles seraient les attractions. Pour l’instant, tout restait possible : on pouvait se prendre à espérer monts et merveilles, de quoi occuper ces après-midi d’été interminables. Mais bientôt la fête serait installée, prête à les accueillir, forcément moins fabuleuse que celle dont ils avaient rêvé. L’arrivée des forains suscitait toujours une excitation unique, car c’était le moment où tout restait à faire.
Commenter  J’apprécie          10



Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Lecteurs de Mélanie Fazi (690)Voir plus

Quiz Voir plus

Le Joueur d'échecs

Quand Stefan Zweig a-t-il écrit cette nouvelle ?

En 1914
En 1929
En 1938
En 1942

10 questions
786 lecteurs ont répondu
Thème : Le Joueur d'échecs de Stefan ZweigCréer un quiz sur cet auteur

{* *}