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Citations de Mélanie Fazi (275)


Je consacrais des heures chaque jour plus nombreuses à m'immerger dans l'eau. J'apprenais son contact sur ma peau. Je me découvrais des envies de traiter le courant de noms obscènes ou crus, mais rien ne me venait. Que des noms féminins : l'onde, toujours, et je m'interrogeais sur la symbolique des ondines. Pourquoi choisir des figures féminines quand le fleuve charriait une telle masse d'eau, avec une telle puissance ?
("La danse au bord du fleuve")
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A moins que j'aille me fondre à la pierre, quelque part, pour devenir muraille à mon tour. Ma peau se dessèche déjà. Mon visage n'est plus qu'un nid de démangeaisons, et le bout de mes doigts commence à s'effriter. Si je ne me dépêche pas de gagner du répit en capturant une nouvelle prise, je perdrai bientôt l'usage de mes mains. Venise préférera sans doute cette fin-là : lente et raffinée à la fois.
("La cité travestie")
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D'autres avant moi l'avaient éveillée à la chair, que me restait-il à lui apprendre ? C'était la première fois qu'elle m'appartenait totalement, absolument, moment d'autant plus précieux qu'il serait bref et sans retour.
Parce que j'étais le seul, le premier, le dernier.
Son seul et unique meurtrier.
J'allais lui faire ce qu'aucun homme avant moi n'avait fait.
Ce qu'aucun après moi ne ferait.
Tout ce que j'avais à lui apprendre.

[Le passeur]
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Le choix du motif n’a rien d’anodin, c’est un geste porteur de sens. Témoignage d’un instant qui vous accompagnera toute votre vie durant. On le choisit comme une profession de foi, un totem ou un blason. Un corps, on naît avec, mais rien n’empêche d’agir sur lui.
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Parfois, je préférerais que les gens apprennent à goûter et à respecter le silence. La conversation ordinaire demande trop de contorsions, de réflexions, d'efforts ; elle demande de ne surtout pas entrer dans le détail ou la nuance, elle demande de s'effacer pour aller dans ce qu'on suppose être le sens commun.
Et parfois les gens comme moi, qui maîtrisent mal ces fonctionnements-là, pèchent par excès de spontanéité. On dit les choses telles qu'elles sont, telles qu'on les perçoit ; on oublie qu'à quelqu'un qui n'est pas proche, on ne doit pas parler de la fatigue d'un voyage, mais uniquement de ses merveilles. Et ce faisant, on commet des impairs sans bien comprendre pourquoi.
Les discussions ne seraient-elles pas plus simples si l'on cessait de déguiser les choses ? Qu'il faille constamment se nier soi-même par souci de politesse me semble aussi vain qu'épuisant.
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Alors voila, j ai fait peau neuve. Je suis louve désormais ; j'apprends à montrer ma fourrure au grand jour. Mais j'ap- partiendrai toujours à la lune beaucoup plus qu'au soleil. Et c'est ainsi qu'il doit en être.
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Si j’ai écrit et publié deux romans, c’était pratiquement par accident et je n’ai jamais été tentée de recommencer depuis. Cette forme-là n’a rien de naturel pour moi : pourquoi dire en trois pages ce qui tient si efficacement en deux lignes ? Mon propre plaisir d’écriture est là, dans la concision, la suggestion, le fait de semer le trouble chez le lecteur puis de m’en aller sur la pointe des pieds pour tout reprendre ailleurs.
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Ce n'est sans doute pas un hasard si le fantastique me parle autant. C'est le genre de l'étrange par excellence, qui soulève le voile des apparences et donne la parole au monstre, à la sorcière, à ceux qui ne sont pas comme les autres et qui, parfois, ne désirent qu'être acceptés pour ce qu'ils sont.
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On vit parfois des révolutions tranquilles sous les yeux des autres, à leur insu.
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A tous ceux qui se cherchent,
ceux qui se sont trouvés,
ceux qui le feront un jour.
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Je ne souhaite plus désormais, comme autrefois, "être quelqu'un d'autre". Cette histoire qui est la mienne est bancale et pas toujours simple, mais elle est la plus intéressante qu'on ait pu me donner à vivre. Et je m'aperçois que les aspects de ma vie et de ma personnalité auxquels je tiens le plus sont liés à ma part autistique. Mon rapport à l'écriture, bien sûr, et toutes les portes qu'il m'a ouvertes. Mais aussi un certain rapport à la sincérité, une manière intense de vivre les choses, un regard différent de celui des autres. On m'a dit un jour que mes perspectives étaient toujours singulières, et je l'ai reçu comme un grand compliment.
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J'ai été étonnée à plusieurs reprises, sur les réseaux sociaux, de voir des gens s'engager dans un débat pour conclure ensuite qu'ils le poursuivraient plutôt en face-à-face, car Internet n'était, disaient-ils, pas le lieu pour ça. À mes yeux, c'est au contraire l'oral qui complique les échanges. Par écrit, on peut prendre le temps de la réflexion, trouver les mots adéquats, affiner sa pensée sans risquer d'être parasité par les circonstances : le nombre de personnes présentes, le volume sonore, le risque d'être interrompu par l'arrivée d'une tierce personne qui casse net le fil de votre raisonnement, la difficulté parfois d'arriver à se faire entendre, surtout pour peu qu'on soit au milieu d'une assemblée de personnes bien plus extraverties que soi. Sans parler du stress de l'interaction qui fait parfois dérailler la parole et empêche de trouver le bon mot au bon moment, la bonne répartie qui ne viendra évidemment que le lendemain. Par écrit, on peut approcher bien davantage, me semble-t-il, de la transmission exacte de nos pensées.
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Alors je creuse les causes de cette "fatigue autistique" dont je découvre l'existence. On lui attribue principalement deux origines. D'une part, la surcharge sensorielle, cet afflux constant de stimuli stressants contre lesquels le corps peine à se défendre. Et d'autre part, le coût en énergie des réflexes de camouflage acquis pour fonctionner au milieu des autres. Quand on doit constamment observer, analyser, décrypter ce qui se passe pour trouver comment réagir, adopter des comportements qui ne sont pas naturels pour nous, on s'épuise très vite au contact des autres, parce qu'on est constamment sur le qui-vive. Même si l'on a appris avec le temps à calquer notre comportement sur celui de notre entourage et si c'est devenu une forme de réflexe. Ou peut-être plutôt : surtout si l'on a appris. On ne se rend même plus compte de l'énergie que ça nous demande. On s'efforce d'agir comme les autres et, ce faisant, on s'épuise.
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Avant d'étudier le sujet, j'ignorais tout des causes réelles de l'autisme, en tout cas telles qu'elles sont désignées par les connaissances scientifiques actuelles. J'ai appris qu'il s'agit d'un trouble neurobiologique – c'est-à-dire que certaines zones du cerveau, pour des raisons qu'on ne comprend pas tout à fait, ne se développent pas comme elles le font chez la majorité des gens. Des zones qui gèrent entre autres, pour autant que j'aie pu le comprendre, la communication et les interactions avec les autres humains. Ce détail m'a beaucoup parlé quand je l'ai lu, d'une manière quasi viscérale : d'un coup, je mettais des mots sur cette sensation que j'ai depuis si longtemps, ce lien avec les autres qui ne se fait pas malgré tous mes efforts. Si ces zones du cerveau fonctionnent différemment chez moi, comment m'en étonner ? J'ai accueilli cette hypothèse avec un soulagement qui m'a surprise moi-même.
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J'ai six ou sept ans, je suis une petite fille discrète et imaginative qui aime la lecture et le dessin. L'un de mes plus grands plaisirs consiste à rester dans ma chambre pour passer des heures à dessiner, à lire – puis, plus tard, à jouer aux jeux vidéo sur l'Amstrad que je recevrai pour ma première communion. Certains jours, l'été en particulier, on vient me chercher pour me dire qu'il fait beau dehors, que je dois sortir jouer, que je ne dois pas rester enfermée en permanence. Mais l'extérieur m'ennuie ; je suis tellement mieux là, dans ma bulle. Il règne un tel calme quand je suis seule, quand je n'ai pas l'impression que les adultes me gardent constamment à l'œil. Je ne fais pas de bêtises, rien de répréhensible, simplement je me sens plus tranquille quand personne ne me regarde.
J'entendrai souvent dire, au cours de ma vie, qu'il ne faut pas "rester enfermé". Je ne comprendrai jamais pourquoi cette idée prend pour les autres une telle valeur d'évidence.
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Si ce que j’étais existais, pourquoi n’avais-je jamais rien lu sur le sujet ?
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Le monde niait chaque jour mon existence, mais j’étais bien là.
Et j’en avais le droit.
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Parce que c’est rassurant, tout simplement, de ne pas être seul. De savoir qu’il y en a d’autres comme nous, qu’on n’est pas une bête curieuse, que ce qui nous arrive est normal, différent mais normal. L’étiquette donne le droit d’exister. Elle fournit une réponse simple à des questions complexes. Voilà ce que je suis : regardez, ça porte un nom. Regardez, il y en a d’autres comme moi.
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Être dans sa bulle, je le comprends désormais, ce n’est pas ignorer la présence des autres ou ne pas s’en rendre compte. C’est au contraire en avoir une conscience aiguë, percevoir chaque chose avec une telle acuité qu’elle en devient douloureuse. La plupart du temps, je ne ressens tout ça que sous la forme d’un stress trop vague pour que je lui aie donné un nom jusqu’à récemment. Mais parfois, j’ai besoin que les gens s’écartent, qu’ils me laissent respirer, recharger mes batteries, pour mieux les retrouver ensuite. Je cherche le calme et ne le trouve nulle part.
p. 96
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Parfois, il semble que je fasse trop d’efforts, qui créent une sorte de malaise, et parfois, pas assez. J’ai compris récemment qu’il m’est souvent difficile d’estimer mon degré exact de proximité avec quelqu’un. À quel moment sait-on qu’on devient proches, qu’une connaissance devient un ami, que l’on peut commencer à partager certaines choses, et lesquelles exactement ?
p. 40
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