Citations de Pascal Garnier (531)
À l'accueil on lui demanda de patienter un instant, quelqu'un allait venir le chercher. Il prit place sur une des chaises de plastique moulé rouge alignées le long des murs vert hépatique. S'il devait être malade à l'hôpital, ce qui l'humilierait le plus, ce serait de se traîner dans les couloirs en pyjama-robe-de-chambre-pantoufles. Il en éprouvait la même répulsion que pour le jogging acrylique-baskets dénouées des jeunes, ou l'intolérable short-casquette américaine des vacanciers. "On a du temps à passer, faut se la jouer confort. L'éternité vue par Adidas."
Je serai là-haut, tout là-haut, là où il y a un grand trou à la place du bon Dieu et je m’assoirai sur son trône à ce vieux con et c’est moi qui me mettrais aux commandes, je pourrai pas faire pire que lui. Ce sera mon tour de me fendre la poire en tirant les ficelles, ça oui !… Et puis non, tiens, je laisserai tout tomber. Je ferai des chapeaux à plumes pour les anges et ceux qui voudront pas les porter je les enverrai griller en enfer, comme des poulets ! Et que je te tournerai la broche et que je tournerai, tournerai…
La lune avait le sourire de Fernandel tandis qu’il emboîtait un à un ses petit Lego d’espérance.
–Il est gentil, Bernard.
–…
–Vous êtes de la même famille ?
–Non.
–Ah, je croyais. C’est peut-être parce qu’il vous admire qu’il vous ressemble. Il marche comme vous, fronce les sourcils comme vous… On finit par ressembler à ceux qu’on aime, non ?
On ne tue pas ses peurs, on vit avec, mais chacun chez soi… (p.79)
Mieux vaut mourir dans sa peau que vivre dans celle d'un autre. (p.73)
Faut pas te sentir coupable, t'es juste responsable. C'est le métier qui rentre. (p.68)
- Songez à notre proposition, nous pouvons faire de vous un homme célèbre !
- Qu'est-ce que vous voulez que ça me fasse ? Aujourd'hui, le dernier des crétins peut devenir célèbre. Suffit de manger trois kilomètres de boudin ou d'avoir été pris en otage, et hop ! tout le monde parle de vous. C'est pas difficile. (p.47)
De son nuage, Vincent leur crie : "Cerveaux lents mais mongols fiers !... Indirigeables !... (p.41)
Faut que tu te remettes à lire. Sinon t'es comme un aveugle dans la vie, t'avanceras toujours à tâtons. (p.30)
Jusqu'à présent, pour Vincent, les anges n'étaient que des espèces de petits poulets rôtis qu'on accroche dans les branches des sapins de Noël. (p.25)
Au bout de trois taffes, Vincent balance sa clope d'une pichenette comme pour ajouter une étoile à ce ciel méprisant qui semble l'ignorer. (p.15)
Ce splendide coucher de soleil va aussi bien au ciel de la cité que le rouge à lèvres sur la bouche de sa mère quand elle veut se faire belle. ça les rend encore plus moches, l'un comme l'autre. Faut pas éclairer la misère. (p.7)
- Gabriel, vous avez déjà été heureux?
- Oui, une fois. Ça m'a fait très peur.
- Pourquoi ?
- Parce que c'était la dernière.
C'est un petit bonhomme sépia de la tête aux pieds qui a toujours dû avoir le même âge, c'est à dire aucun. Un brouillard d'homme.
- Voulez-vous que je vous dise… Je n’y crois pas un seul instant à leur progrès. Tenez, c’est comme le téléphone. Mes enfants m’ont acheté un portable parce que ça les rassure. Eh bien ! vous me croirez si vous voulez, mais ça ne marche jamais ce truc-là. Et c’est toujours de ma faute, je ne suis jamais au bon endroit, je n’ai pas rechargé les batteries, je n’ai pas appuyé sur la bonne touche, que sais-je encore ! Ils ont toujours une bonne raison pour me faire croire que c’est toujours moi qui m’y prends mal. Ils m’ont offert un ordinateur aussi, pour être plus près de moi, paraît-il. Du coup, je ne vois mes petits-enfants qu’en photos et je ne reçois plus de cartes postales… C’est un monde de jeunes, plein de boutons.
De chaque côté de la route, des champs de boue s'étendent aux confins d'un horizon approximatif. C'est un paysage supposé. On n'est pas obligé d'y croire. Même la présence d'une poignée de corbeaux n'est pas irréfutable.
Gabriel déchire des lambeaux de barbe à papa et les laisse fondre lentement dans sa bouche. On ne devrait se nourrir que de nuages...
C'est peut-être ça, un écrivain, un mec qui déborde de mots comme une casserole de lait sur le feu. Parfois, il vaudrait mieux couper le gaz.
Le curé lui avait demandé s'il était chrétien, s'il avait lu la Bible, bref, s'il avait ses papiers. Roland répondait oui à tout en hochant la tête, comme un âne, c'était plus facile.