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Critiques de Pär Lagerkvist (46)
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Barabbas

Le vendredi 3 avril 33, veille de la Pâque, à Jérusalem, Ponce Pilate est face à Jésus et les évangiles rappellent :

« Il y avait en prison le nommé Barabbas, arrêté avec les émeutiers qui avaient commis un meurtre dans la sédition.

La foule étant montée se mit à demander la grâce accoutumée.

- Donc Pilate demande : « Voulez-vous que je vous relâche le roi des Juifs ? »

- Les « grands prêtres » excitent alors « la foule » à demander qu'il relâche plutôt Barabbas.

- Pilate questionne : « Que ferais-je donc de celui que vous appelez le roi des Juifs ? »

- La foule » répond à deux reprises « Crucifie-le ! ».

- Pilate alors, voulant contenter la foule, leur relâcha Barabbas et, après avoir fait flageller Jésus, il le livra pour être crucifié. »



Mais que devint Barabbas ? Les évangélistes et les historiens sont muets sur son histoire ce qui offre un espace aux romanciers que Pär Lagerkvist, prix Nobel de littérature, occupe en 1950.



Libéré, Barabbas observe dans l’ombre l’exécution de Jésus, puis repart jouer au gendarme et au voleur et retourne à la case prison…



Hanté par le remords, Barabbas se demande pourquoi « le fils de Dieu » s’est laissé supplicier. Interné dans une mine concentrationnaire, il rencontre Sahak, un esclave converti au christianisme. L’enseignement de celui ci dépasse Barabbas mais il est sensible à son comportement charitable. Le coeur est touché ; la tête reste obscurcie. Quand Néron accuse les chrétiens de l’incendie de Rome (18 juillet 64) et les condamne au martyre, Barabbas sans hésiter, mais sans vraiment comprendre, se range à leurs cotés.



André Gide, en octobre 1950, écrivait au traducteur (Lucien Maury) «  je ne pouvais qu'entrevoir à quel point le récit des aventures de Barabbas était lié à l’histoire de la crucifixion du Sauveur ; à quel point l’évolution trouble du bandit restait en fonction de ce qu'il avait vu sur le Golgotha, ou cru voir, et de tous les « on-dit » qui suivirent de près cette divine tragédie — dont devait dépendre par la suite le sort de l’humanité presque entière. Et c'est bien là le « tour de force » de Lagerkvist, de s'être maintenu sans défaillance sur cette corde raide tendue à travers les ténèbres, entre le monde réel et le monde de la Foi.



La dernière phrase du livre reste (volontairement sans doute) ambiguë : « Quand il sentit venir la mort dont il avait toujours eu si grand-peur, il dit dans les ténèbres, comme s'il s'adressait à la nuit : A toi je remets mon âme. »



Ce « comme si » laisse douter si ce n’est pas au Christ plutôt, et sans trop s'en rendre compte, qu'il s’adresse ; et si le Galiléen finalement « ne l'a pas eu ». Viciesti Galileus, comme disait Julien l’Apostat. »



Roman bouleversant qui interpelle le lecteur et l’introduit au mystère de la rédemption.



PS : ma lecture des mémoires de Ponce Pilate
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Le Nain

Le Nain est l’œuvre la plus célèbre de Pär Lagerkvist qui obtint le prix Nobel en 1951.

Ce roman est bâtit sous forme d'un récit à la première personne, plus précisément, sous forme d'un journal tenu par le nain d'un prince d'une des grandes cité-états du nord de l'Italie au tournant du moyen âge et de la renaissance, c'est-à-dire entre le XVème et le XVIème siècle.

L'auteur ne précise pas, mais l'on suppose qu'il s'agit de Milan, que le prince en question doit être Ludovic Sforza. Ainsi, nous sommes plongés dans les intrigues de la cour en ces temps mouvementés au travers des yeux malsains d'un obscur émissaire, misanthrope, haineux, ambitieux, impitoyable, volontiers assassin et conspirateur.

Ce nain nous décrit aussi les relations entre son prince est un certain Maître Bernardo, grand savant, peintre, conseiller avisé, bref, Léonard de Vinci.

On y lit le processus de création d'une des fameuses madones de Léonard, ainsi que la description de sa fameuse fresque représentant la Cène.

Cependant, le rôle le plus éminent du nain a lieu pendant l'attaque sournoise orchestrée par son maître contre une cité-état voisine.

Le personnage du condottière est incarné par Boccarossa, chef mercenaire, prêt à vendre ses services tantôt dans un camps tantôt dans l'autre selon le montant des rétributions.

Enfin, ce journal intime nous accoquine avec une autre réalité de l'époque, les épidémies de peste qui ravageaient les villes assiégées à l'hygiène douteuse.

En somme, cette histoire de nain machiavélique peut être lue comme une chronique historique, mais au regard du contexte où elle a été écrite (en pleine seconde guerre mondiale), on ne peut s'empêcher d'y lire entre les lignes des messages beaucoup plus contemporains, notamment sur le sens de la vie, sur le châtiment, sur la justice, sur la folie, la solitude, l'ambition, la perversion, le lien entre Science et Pouvoir et l'utilisation qui en est faite en temps de guerre, en un mot, une réflexion bien plus vaste et profonde que le seul contexte de la Renaissance italienne, mais tout ceci, bien sûr, n'est que mon avis, c'est-à-dire, pas grand-chose.
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Barabbas

« Tout le monde sait qu'on le crucifia en même temps que deux autres; on sait quelles personnes se tenaient groupées autour de lui: Marie, sa mère, et Marie de Magdala, Véronique et Simon de Cyrène, qui avait porté la croix, et Joseph d'Arimathie, qui devait l'ensevelir. Mais un peu plus bas sur le versant, à l'écart, un homme observa sans arrêt celui qui était cloué là-haut sur la croix et suivit l'agonie du commencement à la fin. Il s'appelait Barabbas. C'est de lui qu'il s'agit dans ce livre. »

Barabbas, l'homme gracié et libéré par Ponce Pilate à la place de Jésus de Nazaret …



Pär Lagerkvist nous entraîne sur les pas de Barabbas, dans les ruelles de la Jérusalem antique de la porte de David (Porte de Sion) à celle du Fumier (Porte des Maures) jusqu'au Mont Golgotha, lieu du supplice où notre brigand se repaît du spectacle de la crucifixion de Jésus et des prodiges qui en découlent.

Les interrogations de Barabbas sont immédiates : « Dès qu'il l'avait aperçu dans le prétoire du palais, il avait senti qu'il y avait quelque chose d'extraordinaire en lui. Ce que c'était, il n'aurait pu le dire, il le sentait seulement. »

Evénement et incidents qui le marqueront à tout jamais, déchaînant des sentiments profonds et contraires, provoquant des agissements paradoxaux, Barabbas s'aventure dans les perspectives amenées par la foi au contact et à la fréquentation des premiers disciples de la communauté chrétienne.

Mais le doute sera l'expression dominante de son ressenti, lui le brigand des montagnes, sans foi ni loi, lui, l'esclave déporté dans les mines de cuivre de Chypre, n'aura de cesse de comprendre ce dont il a été témoin et ce jusqu'à son dernier soupir sur une énième croix.



« Au crépuscule les spectateurs étaient déjà partis, fatigués de rester là debout. Et d'ailleurs tous les condamnés étaient morts.

Seul Barabbas vivait encore. Quand il sentit venir la mort, dont il avait toujours eu si peur, il dit dans les ténèbres, comme s'il s'adressait à la nuit:

« A toi je remets mon âme. »

Et il rendit l'esprit. »



Entre les premières lignes de l'incipit et les dernières lignes de la fin du récit (recopiés tous deux ici), une plongée plus que réaliste, humaine, dans le coeur, le corps et l'âme de Barabbas.

Dans cette exploration universelle et intemporelle de la pensée humaine, nous sommes ballotés dans les affres existentielles et émotionnelles, les turpitudes physiques et les vicissitudes quotidiennes de Barabbas.

Les méditations de Barabbas semblent le conduire malgré tout vers une ouverture spirituelle, un reveil philosophique.

Une écriture fluide, précise et efficace sert la narration.

Magnifique.

Un très beau moment de lecture et surprise d'avoir été captivée!



Par ailleurs ce récit romancé de la vie de Barabbas, qui reste encore trouble pour les historiens, a aiguisé ma curiosité: en effet Barabbas qui signifie fils du père en araméen aurait désigné Jésus lui – même, ce qui revient à dire que devant Ponce Pilate la foule demandait en vérité la libération de Jésus, fils du père!

Très intéressant, c'est le sujet d'un autre livre, Jésus dit Barabbas de Gérald Messadié que je lirai à l'occasion.
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Le bourreau

J'ai lu il y a longtemps « Barrabas ». Si je me souviens bien, le roman commence avec le Christ sur la croix. Alors que « Le bourreau » s'achève avec la crucifixion. Contrairement au Christ qui rachète le péché des hommes par sa mort, le bourreau dont il s'agit ici est fatigué de tuer les hommes pour les racheter. Il pensait œuvrer sous le commandement de Dieu, mais il s'aperçoit que Dieu n'existe pas ! Il a dû lui même crucifier Jésus. Et il arrive maintenant dans cette taverne, après l'élection d'Hitler. Le livre est écrit en 1933. On assiste à une fête improvisée, célébrée par un petit groupe d'excités dont les propos rappellent furieusement les discours nazis. Le bourreau, malgré lui est adulé, vu comme la solution de tous les problèmes. Par Lagerkvist nous offre ici une belle métaphore sur l'homme et le mal.
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Barabbas

Il existe plusieurs romans faisant parler les personnages ayant fait partie, de près ou de loin, de l’entourage de Jésus lors de sa mort. « L’évangile selon Pilate » d’E.E. Schmitt, par exemple.

En voici un autre, beaucoup plus ancien (1951), écrit par un grand auteur suédois, et qui a reçu le prix Nobel, qui plus est.

Comme tout ce qui concerne les religions m’intéresse énormément, lorsque j’ai découvert ce roman dans la bibliothèque de mon père, je m’en suis réjouie.



Nous sommes donc le jour de la crucifixion de Jésus. Barabbas vient d’être gracié alors que c’était à lui de subir cette torture avant de mourir, on le surnomme d’ailleurs : « Barabbas le libéré ». Il en est encore tout ébahi, et est intrigué fortement par cet homme que la foule s’est empressée d’anéantir sous ses huées de mise à mort, alors que lui, Barabbas, n’en était pas à un crime près.

Il le suit dans son chemin de ronces et de souffrance jusqu’au Golgotha, croise Marie, cette « paysanne au visage rude » ainsi que Pierre, « un gaillard à peine dégrossi, les cheveux roux ébouriffés et drus, le visage large et plein, et les yeux bleus qui avaient quelque chose de singulièrement naïf ».

Il croise beaucoup de gens, d’ailleurs, qui ne font guère attention à lui, ou qui, s’ils échangent quelques mots, se méfient de son aspect rogue et cassant. Des prostituées aux premiers disciples, en passant par des esclaves et des Romains, Barabbas se heurte à la réalité et n’arrive pas à trouver un chemin dans sa vie : qui est-il ? Et qui est cet homme crucifié dont on commence à parler et à cause duquel on commence à être persécuté ?

Nous le suivons jusqu’à sa mort, des années plus tard, après une vie chaotique de liberté et d’esclavage.



Economie de moyens, pudeur, secret.

C’est un roman très curieux parce que nous voyons que Barabbas est tourmenté, mais nous n’entrons pas plus loin dans son cœur. Cela m’a déroutée et un peu éloignée de la description de cette période où un grand bouleversement a eu lieu dans les mentalités.

« Barabbas » : roman de la solitude, de l’incompréhension, du doute, de l’angoisse aussi.

Très humain, finalement.

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Barabbas

L’histoire de Barabbas est si bien contée qu’elle donne l’impression que l’auteur y était physiquement ! Qui est Barabbas ? Pär Lagerkvist le décrit comme un gaillard d’une trentaine d’années, solidement bâti, avec un teint blême, une barbe rousse, des cheveux noirs. Les sourcils de même étaient noirs ; les yeux s’enfonçaient dans les orbites, comme si le regard avait voulu se cacher. Barabbas c’est le brigand gracié par la foule au détriment de Jésus de Nazareth qui se prétend fils de Dieu, un dieu unique sur le ciel et la terre. Au pied de la croix, se tenaient Marie, sa mère, Marie de Magdala, Véronique et Simon de Cyrène, qui avait porté la croix, et Joseph d’Arimathie, qui devait l’ensevelir ; et un homme caché, Barabbas, qui suivit l’agonie du commencement à la fin.

À partir de cet événement, Barabbas épie les disciples du Sauveur, ceux qui se réunissent en secret, ceux qui parlent de Jésus, fils de Dieu, le ressuscité. Il ne sait que penser, son caractère change, mais tel Judas, il niera une quelconque appartenance ou accointance avec les chrétiens. Pär Lagerkvist décrit la vie de Barabbas dès le jugement par Pilate et la crucifixion de Jésus, jusqu’à la fin de sa propre vie. Il évoque avec force les inquiétudes et les tourments qui assaillent Barabbas.

Un très beau et noble moment de lecture !
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Le Nain

"[...] ce que je fus forcé de voir me remplit à la fois de sombre exaltation et du sentiment de la vanité des choses, de l'écroulement de tout." Ainsi parle le Nain, personnage principal et narrateur du roman phare de Pär Lagerkvist, écrivain suédois récipiendaire du prix Nobel de littérature en 1951.



Quattrocento, quelque part en Italie, dans une puissante cité que l'on peut se risquer à assimiler à Milan ou à Florence. Un Prince y règne, protégeant les arts, stimulant les sciences, glorifiant la foi, portant la guerre chez son voisin, l'ennemi séculaire, et tenant brillamment sa Cour. Au coeur de celle-ci, un homme, ou plutôt un demi-homme, un nain ; quoiqu'à la réflexion on ne puisse pas le considérer comme tel. Parlons donc plutôt d'une créature, lui-même ne souhaitant pas être autre chose.



Le récit du Nain est d'abord une description minutieuse du quotidien de la Cour et l'immersion dans la Renaissance italienne si magnifiée aujourd'hui fait appel à tous nos sens. Toucher, odorat, goût, ouïe, vue, aucun n'est épargné. De l'observation, la narration glisse subrepticement à l'analyse. Le Nain, figure de la servitude et de la fidélité, peu porté au jugement, va développer un esprit de plus en plus critique vis-à-vis de son environnement et de son maître. Son point de vue peut alors se résumer par la citation dont je me suis servie pour introduire cet avis. D'un naturel cruel et misanthrope, il va assister à la chute des grands et témoigner de la vacuité des ambitions humaines. La guerre, la famine, le déshonneur, la maladie, la folie et l'hypocrisie seront de plus de poids que la spiritualité, l'amour, le génie et la philosophie.



Bien qu'il soit dur dans le ton ce récit se lit avec une facilité déconcertante. Le Nain, dans ses notes, est lapidaire et va à l'essentiel. Sa froideur et son indifférence face aux maux de son siècle peuvent déstabiliser le lecteur mais elles ne peuvent gâter le plaisir morbidement fascinant de cet incroyable voyage dans le temps. Si "Le Prince" n'avait pas été un titre déjà pris, nul doute que Lagerkvist l'aurait utilisé pour son machiavélique roman.

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Barabbas

Dans ce court roman réédité en 2008 on découvre avec intérêt comment Barabbas, après avoir été libéré à la place de Jésus-Christ, assiste à sa crucifixion, médusé par ce pauvre type que l'on prétend fils de Dieu... Et commence alors pour lui un long cheminement au sein des premières communautés chrétiennes qu'il croise de loin en loin et qui le fascinent sans qu'il puisse le comprendre (lui, Barabbas, un bandit respecté !). Animé par un vague sentiment de culpabilité, mais surtout de curiosité, Barabbas essaie de comprendre ces disciples fervents du soi-disant Dieu qu'il a vu périr sur la croix et qu'il ne cesse de croiser sur la route qui le conduira de Jérusalem à Rome, en passant par Chypre. Sceptique, mais aussi confondu par tant de ferveur jamais il ne redeviendra l'homme qu'il était, tourmenté par les hommes qu'il a rencontrés et la foi qu'il a lue en eux.

Un petit roman court mais saisissant qui m'a fait penser à "L'évangile selon Pilate" d'Eric Emmanuel Schmitt mais aussi à "Catholique anonyme" de Thierry Bizot.
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Barabbas

Ce roman valut le prix Nobel de littérature à l’auteur, il donne à lire l’histoire de Barabbas le libéré, celui qui échappa à la crucifixion aux dépens de Jésus Christ.



Aux commencements du Christianisme, ce Barabbas nous laisse aussi percevoir la création d’une foi et l’aura (pour ne pas dire l’aspect légendaire) qui l’accompagne aussi.



Barabbas sera marqué, à vie et à mort, d’avoir été libéré bien sûr mais aussi d’avoir assisté à l’agonie et à la passion du Christ sur la croix.



Nous donnant « sa » version, il sera confronté aux crédules qui firent les croyants et non content d’avoir été celui en faveur duquel le Christ perdit la vie, Barabbas ne sera jamais vraiment convaincu par la foi et le prosélytisme qui l’environneront jusqu’au jour de son trépas.



Barabbas peut être devenu fou de cette simple loterie qui modifia considérablement la face de l’humanité par le développement et l’essor du christianisme ; il peut aussi, mais l’on n’y croit guère, avoir émis ces doutes, ces questionnements qui ne sont jamais de bon aloi quand doit naître ou grandir une foi, ces doutes et ces questionnements qui font pourtant que s’il fallait un berger nous n’avons pas tous des vocations de mouton.
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Barabbas

Barabbas est l’homme qui fut jugé en même temps que le Christ, mais que le peuple décida de gracier, condamnant du même coup Jésus à la crucifixion. Voilàpour les faits. Et ce que nous narre Pär Lagerkvist dans ce roman, c’est l’histoire fictive de Barabbas après qu’il eut assisté au calvaire du Christ sur la croix. Cet homme, bandit jusqu’alors sans la moindre conscience, va s’intéresser de près à la vie de cet homme mort à sa place. Il va se rapprocher des disciples de Jésus, essayer de comprendre comment cet homme qu’il a vu mourir comme un simple esclave, a pu susciter une telle ferveur. Comment pourrait-il être le fils de Dieu, et s’être laissé ainsi exécuter ?



Petit à petit, à force d’entendre tous ces témoignages passionnés et de constater l’immense douleur de ces hommes et femmes orphelins de leur guide, la culpabilité va ronger Barabbas, qui ne sera plus jamais le même et qui aimerait tant croire à son tour. Mais c’est un sceptique, et tous les actes accomplis par le soi-disant Sauveur en qui il n’a rien vu d’extraordinaire, il ne les a pas constatés lui-même. Tout repose sur des rumeurs, des histoires qui se racontent et sont certainement magnifiées. Pourtant, cette culpabilité et cette mort obsédante finiront par lui faire épouser le destin de celui qui rendit l’âme sous ses yeux sur le mont Golgotha.



André Gide avait dit de ce livre, que son éditeur lui avait fait découvrir : « n’en doutons pas : le Barabbas de Pär Lagerkvist est un livre remarquable (…) ». Il l’est effectivement, d’abord car il dépeint admirablement les tourments intérieurs de cet homme. Ensuite car il nous montre à quel point il est difficile de croire, tant les faits fondateurs du Christianisme semblent impossibles, si l’on se place sur un plan uniquement cartésien. Et malgré cela il est remarquable enfin, tant il nous restitue la foi immense et absolue des hommes et femmes prêts à tout - y compris perdre la vie - pour suivre Jésus et propager son commandement : « aimez-vous les uns les autres ».




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Barabbas

L’intrigue commence à la crucifixion de Jésus Christ vu à travers les yeux de Barabbas, bandit de grand chemin, libéré à la place du Christ. Dans le livre, ces deux protagonistes sont d’ailleurs appelés respectivement “le crucifié” et “le libéré”. Cette scène impressionne fortement Barabbas qui se demande comment ce prophète ou ce dieu, malgré toute sa puissance peut se laisser crucifier et pourquoi, lui, a été sauvé par ce dieu.



On suit ensuite Barabbas dans ses pérégrinations et ce qui semble être ses doutes et réflexions sur Jésus Christ. Le livre est assez frustrant car on ne devine jamais ce que pense Barabbas, comme tous ses contemporains d’ailleurs. Il reste dans l’ensemble complètement indifférent et en fait inatteignable, malgré une vie bien remplie (brigand puis esclave dans une mine de cuivre, puis esclave à Rome). On sent qu’il est attiré par la religion chrétienne mais que la haine qui l’anime (et qui ressemble à une malédiction de naissance, une tâche indélébile) l’empêche de croire et de comprendre.



Un des intérêts du livre est d’assister à la naissance de la religion chrétienne, qui se répand parmi les esclaves et les marginaux de la société, en secret car elle est perçu comme une attaque envers l’organisation de la société par les élites. On la perçoit comme la religion des réprouvés qui souhaitent la fin de l’ordre imposé (en tout cas, c’est l’interprétation de Barabbas). C’est un mélange de crédulité, de naïveté et d’imprécision mais aussi de générosité et de sérénité. Le sentiment ressenti est assez étonnant.



Le livre est assez frustrant à cause de l’incompréhension qu’on a de la figure de Barabbas et du fait qu’il ne participe pas et reste en-dehors des événements. On aimerait lui secouer les puces. Frustrant aussi car j’ai l’impression que la signification du livre m’a échappée.

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Le Nain

Il est salement teigneux, ce Nain. Bon, il a des excuses : pour commencer, sa famille l'a vendu. Pas vendu comme vous l'envisagez (quand Petit Chéri dessine au feutre sur le papier peint) : nan nan, vendu pour de vrai, vendu comme bouffon à un prince italien de la Renaissance.

Alors là son prince, il le kiffe : c'est "mon maître" par ci, "mon seigneur" par là...

Quitte à appartenir à quelqu'un, autant se persuader qu'il est le meilleur des maîtres. Le reste de la maisonnée, par contre, ne mérite que sa haine.

Après cette présentation de la cour, voici qu'arrive Léonard de Vinci (renommé ici Bernard, carrément moins stylé). Mais c'est trop cracra ce qu'il fait celui-là, à disséquer les cadavres ! Et puis ses peintures, ça n'avance pas ! Mais au moins, il dessine de chouettes machines de guerre.

Et la voilà, la guerre : vêtu de son armure, le Nain vit sa meilleure vie - même s'il continue juste à servir à boire au prince (Oui, vous aussi vous voyez Tyrion Lannister)

Bon, j'arrête là cette tentative. C'est un flot d'acide qui s'écoule de la plume du Nain, cet homme pitoyable, hérissé contre le monde entier - surtout les personnes qui lui montrent de l'amitié, ce qu'il ne saurait tolérer.

Ce roman d'une extraordinaire virtuosité est traduit à la perfection par Marguerite Gay.

LC thématique d'octobre 2021 : "Cap au Nord !"

Challenge Nobel
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Barabbas

Le livre qui lui valut le prix nobel de littérature. Dans ce roman de Pär Lagerkvist, la contemplation du crucifié sur le mont Golgotha entraîne Barabbas vers une sorte de quête de la foi. Le supplice du Christ le marque à tout jamais, jusqu’à l’instant où, à son tour crucifié, il prononce ces mots à la fois mystérieux et transparents : « À toi je remets mon âme…». L’ouvrage de Lagerkvist qui m’a peut-être le plus marqué.
Lien : https://thedude524.com/2008/..
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Le Nain

Prix Nobel de littérature en 1951 pour Barabbas, Pär Lagerkvist livre ici un roman noir, journal d’un Nain de cour, au service d’un prince italien de la Renaissance.

De l’image de « bouffon » du roi que donnent des nains la littérature et le cinéma, le romancier suédois nous dépeint un homme méchant, qui dit ne pas être un homme, qui éprouve une aversion pour l’Homme, son physique, ses odeurs, ses penchants, ses amours, ses réflexions, ses goûts…

Assoiffé de violence, rêvant de tuer plus encore que le nain qu’il a étranglé ou l’autre qu’il a fendu de son épée, il adule la guerre. Il rejette tout, même ceux de sa race. Il est unique, il est à part et doit supporter ce monde dans lequel il vit. Il supporte, c’est sa force et au terme du livre son ressort.



Il a un profond mépris pour les « grands » qui l’entourent mais dans le même temps le lien de dépendance qui l’unit au prince, tout en le révulsant le fait vivre, exister.

Outre une description des mœurs et des conditions de vie de l’Italie morcelée de la Renaissance, c’est surtout le caractère de ce nain de 26 pouces qui fait la force de ce roman. Cette solitude, ce regard froid, souvent ironique et cynique fait vivre comme ne procuration. Cette différence physique lui permet tout, même l’indicible…c’est parfois savoureux.



Ce roman est servi par une écriture froide, sans fioriture, répétitive, précise, qu’on aime ou pas…



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Barabbas

Figure éminemment solitaire, que celle du proscrit Barabbas, dont Pär Lagerkvist imagine la destinée, après qu'il fut gracié par la volonté de la plèbe hurlante, au détriment du Rédempteur. Conçu dans la haine du ciel et de la terre, fruit de l'union sans amour d'un malfaiteur et d'une fille publique, le brigand Barabbas, que l'auteur conçoit comme une sorte de reflet négatif de l'apôtre Pierre, poursuit son errance terrestre, dans l'ombre de la figure du Christ, portant, malgré lui, la culpabilité d'être l'instrument de la plus insensée des injustices, victime des prophéties et des décrets du ciel. Le sans-dieu, qui pourtant voudrait bien croire, croisera à plusieurs reprises les disciples de cet être singulier, qui se disait fils de Dieu et se laissa volontairement supplicier. 

 

Barabbas valu à son auteur le prix Nobel de littérature 1951. Après le Bourreau et le Nain, il est le troisième roman d'un triptyque mettant en scène des êtres que le sort a rendus marginaux, condamnés à vivre leur vie durant dans la réprobation et le mépris. C'est cette solitude foncière et irrémédiable du paria qui est poignante dans la lecture de cette œuvre. 
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Le Nain

Bienvenu dans le monde de Piccolino. Piccolino n'est pas un bouffon risible, un pantin ridicule. Piccolino est un nain. Mais de la pire espèce. Luciférien, inhumain, pervers. C'est un être odieux, antipathique, haïssable, monstrueux - physiquement et moralement. En plus d'être laid, il est vieux comme le monde. Et cela semble lui convenir à merveille. Sur son visage difforme, disgracieux, circule toutes les haines, les rancœurs, les méchancetés qu'il pense et qui exsudent, qui suintent le long de ses rides nombreuses et profondes.



Piccolino déteste tout le monde à la cour du prince, particulièrement Théodora, épouse de son seigneur. Pourtant, il la tient entre ses mains parce qu'il lui sert de confident, de confesseur, d'émissaire secret de ses amours clandestines. Son amant du moment - Don Ricardo - est son pire ennemi. S'il en avait le pouvoir, Piccolino les enverrait tous les deux rôtir dans les feux de l'enfer. Il tire de son animosité contre la société de son époque, contre les grands de la cour, contre le peuple, contre les artistes, les savants, les humanistes, les sages une jouissance extatique.
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Barabbas

Alors que le Christ vient d'être jugé coupable et condamné à mort par le tribunal de Ponce Pilate, Barabbas - libéré - suit malgré lui, hypnotisé, le calvaire du prisonnier jusqu'au Mont Golgotha où il doit être crucifié. En regardant passer ce sinistre cortège, peuplé de femmes et d'hommes compatissant à la souffrance du condamné, Barabbas se pose de nombreuses questions. Pourquoi se sent-il attiré, comme subjugué par la force tranquille qui émane de cet homme ? Pourquoi le sait-il innocent, malgré sa condamnation ? Pourquoi cet homme ne s'est-il pas défendu des accusations faites à son encontre ?



Barabbas avait été gracié par le tribunal du peuple le jour de la Pâque, qui avait préféré sauver le voleur, l'ivrogne, le brigand, plutôt que l'autre qui se disait le Fils de Dieu et qui respirait la pureté, l'innocence, la douceur faite homme. Pourquoi l'avait-on jugé coupable ? Parce qu'il accomplissait des miracles et se disait rabbin. Parce qu'il avait promis le Royaume de Dieu aux pauvres, aux désœuvrés et même aux prostituées. Seulement, Barabbas se sent d'un coup détaché de ses anciens amis qui lui rappellent sans cesse qu'il est retourné à la vie, qu'il a ressuscité en quelque sorte, que l'autre a payé pour ses fautes. Il était méditatif, comme si son âme chaste s'était dissociée de son corps abject pour rejoindre celui que tout le monde commençait à nommer le Messie.
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Ames masquées - La Noce

Un tout petit livre qui traîne depuis …. Très longtemps.

Une fin d’année qui donne envie de faire du rangement … et de lire une petite chose ne demandant pas trop de temps.

Plutôt raté… comme choix.

C’est court … mais concis et demande une bonne concentration sur le texte pour en apprécier toute la saveur.

Cela s’avère très riche … très littéraire.

Un homme rencontre une femme … ou peut être une femme rencontre un homme … ainsi commence l’histoire … après … la vie s’écoule avec au centre de tout, l’amour de l’autre.

Si vous croyez trouver dans ce petit livre une bluette quelconque, vous serez surpris car il s’agit au contraire d’une vraie histoire d’amour, une de celle qui vous prend au corps et aux tripes sans vous lâchez avec la joyeuse description de ce qu’est une vie avec l’amour de sa vie.

L’écriture est au service des scènes bucoliques décrites avec beaucoup de maîtrise et des ressentis de chacun des personnages qui nous invite à partager leurs moments de joies et de douleurs.

Je suis ravie d’avoir eu l’occasion de rencontrer le prix Nobel de littérature de 1951 !
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Barabbas

Roman intéressant. Lagerkvist a traité de manière créative l'histoire connue de la Passion Chrétienne et s'est concentré sur la perspective de Barabbas, le criminel qui, dans l'histoire biblique, a été libéré en échange du Christ. Il est présenté comme un homme troublé, qui voulait vraiment mais ne pouvait pas croire en Jésus. Heureusement, le ton moralisateur scandinave traditionnel est absent. Joliment écrit, avec parfois de beaux passages et même à bien des égards une évocation de la vie en marge et au centre de l'Empire romain. Selon moi, Lagerkvist aurait pu aller un peu plus loin dans son portrait psychologique, et allonger le roman ; il y a un peu trop peu de chair sur l'os, ici.
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Barabbas

"Barabbas", écrit en 1950, est un roman de Pär Lagerkvist, écrivain Suédois, prix Nobel de Littérature 1951.



Magnifique roman historique chrétien sur la vie supposée de "Barabbas", ce brigand des Evangiles, acquitté à la demande de la foule par Ponce Pilate à la place de Jésus qui sera condamné et crucifié.



On suit d'abord Barabbas libéré dans Jérusalem, il est témoin de la mort et de la résurrection du Christ. Il rencontre les premiers "chrétiens", mais se méfie d'eux. Les anciens compagnons d'armes de Barabbas ne le reconnaissent pas, car quelque chose, une pensée obsédante le tourmente : "Cet homme, innocent, est mort à ma place, alors que j'étais coupable".



Dans la seconde partie, Barabbas est devenu esclave, il fait la rencontre d'esclaves chrétiens, il voudrait croire lui aussi mais n'y arrive pas. Il est finalement amené à Rome, où il participe à l'incendie de Rome croyant hâter ainsi la venue de ce monde meilleur annoncé par les chrétiens. Arrêté avec les autres chrétiens, un Ancien le reconnaît, s'ensuit un dialogue où l'Ancien lui explique en quoi il s'est trompé. Il a servi l'empereur et non le Dieu-Amour auxquels ils croient. Ils seront tous crucifiés. Et sur la croix, Barabbas prononcera ces mots : "À Toi, je remets mon âme".



J'aimerais pouvoir décrire la force qui se dégage de ce court roman. On suit Barabbas dans ses pensées, ses tourments, et ses pensées ne sont pas tendres, sa vie non plus. L'auteur le rend témoin de beaucoup d'évènements et le fait s'interroger sur bien des questions. En procédant ainsi, l'auteur rend le lecteur également témoin de ces évènements et les questionnements de Barabbas deviennent les nôtres.



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