Citations de Roland Topor (200)
L'estomac compense le coeur. Puisque personne ne m'aime, je me juge exécrable. Alors j'essaie d'avaler le monde pour le supprimer, et m'anéantir avec lui.
A vrai dire c"est même le manque absolu de distinction qui définit le mieux Topor et sa topographie.
Imagine-t-on cela?
Manquer à ce point de mesure et de goût alors que le bon sens est la clef du succès et de l'estime intellectuelle?
Monsieur Topor, c'est moi qui vous le dit, il faudra sérieusement vous détoporiser si vous voulez arriver à quelque chose - réussir, comme on dit.
Mais moi, je suis à l'écart. Comme un hippopotame baignant dans une flaque, j'écarte les mâchoires en un bâillement prodigieux : c'est en moi que se trouve le théâtre. Il m'habite. Il me hante. Je suis le lieu et l'action.
Elle se tortilla sur son siège et les seins libérés jaillirent hors du soutien-gorge, doux et mous. Il les pétrit convulsivement.
Tout en s'activant, il repensa à Simone Choule.
- Peut-être est-elle en train de mourir à cette seconde même ?
Mais elle ne devait mourir qu'un peu plus tard, au coucher du soleil.
Visages aux gros yeux exorbités de crapauds, visages maigres et tranchants d'hommes aigris, faces larges et molles de bébés anormaux, cous de taureaux, nez de poissons, becs-de-lièvre.
Il ne faisait rien, il ne pensait à rien de précis, mais laissait se dérouler dans son cerveau les quelques épisodes sans intérêt de la journée dont il se souvenait. Des bribes de phrase, des gestes sans signification, des visages entrevus dans le métro.
Quand la société serre les fesses, les espaces de liberté individuelle rétrécissent.
Comment allaient-ils s'y prendre pour le pousser au suicide ? Il ne désirait pas mourir. Etait-ce un échec des voisins ? Si leur piège avait fonctionné parfaitement, Trelkovsky aurait dû se transformer vraiment en Simone Choule, et comme telle se suicider spontanément. Ce n'était pas le cas puisqu'il faisait semblant, puisqu'il savait très bien qu'il n'était pas Simone Choule. Alors qu'espéraient-ils ? Qu'il fit également semblant de mourir ?
Les malheurs peuvent s'accumuler à l'infini, alors que le bonheur, on en a vite fait le tour.
"Vaches noires".
Je ne veux plus augmenter le déficit de la sécurité sociale.
"Les nuits de la semaine restent à baptiser."
"Qui aime un chat aime tous les chats. Qui aime son chien n'aime pas les autres."
Et puis, l'inspiration vint.
Le moteur qui animerait mon Golem, fabriqué de mots libres et indépendants, ce serait l'Amour. Le sujet a fait ses preuves.
Que dire du résultat ? Je crois que ma créature fonctionne. Pour moi, c'est le plus important. (...) S'agit-il de littérature ? Comment se défendront les quelques mots semés sans précaution à la surface du papier blanc ?
Le moindre vent critique les fera-t-il s'envoler ? Ou bien des racines leur étant poussées, tiendront-ils bon pour fleurir dans l'imagination des lecteurs ?
Tant pis... Tant mieux... (Paris, le 26 avril 1969)
Ces mauvais artistes créent. Hélas, et vous assistez à leur création. Elle est grotesque. Trop tôt pour les convaincre de leur déplaisant échec. Dans quelques années, ces ratés, enfin assagis, renonceront à l'expression, pour s'adonner à la mécanique ou à l'agriculture. Mais il est malheureux qu'ils s'obstinent en ce moment.
"Max Lampin est une ordure.
Max Lampin est un fumier.
Max Lampin est une crapule.
Max Lampin est une ordure de fumier de saloperie de merde."
Roland TOPOR, La vérité sur Max Lampin, 1968, éditions Wombat (2020).
« La mère de Max Lampin est une sale putain ignoble qui se fait enculer par tout le monde »
Roland TOPOR, La vérité sur Max Lampin, 1968, éditions Wombat (2020).
Parce que j'ai toujours eu envie de posséder une langue morte.
Parce que j'ai préparé une très belle phrase à dire au dernier moment, et que, si j'attends trop, je risque de l'oublier.
Un anus enflammé de rat, rougeâtre rosette, défigure le revers de sa veste.
Roland TOPOR / Pense-bêtes / Le cherche midi éditeur 1992
« Les êtres humains, autant que le vin, ont besoin d’acidité pour vieillir. Sinon, ils se madérisent. »
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