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Critiques de Ronan Gouézec (44)
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Masses critiques

°°° Rentrée littéraire 2019 #16 °°°



Ça démarre par une tempête tonitruante, des éléments déchainés en pleine nuit, une mer furibonde qui fait chavirer un bateau de pêche. Comme un tocsin qui retentirait pour annoncer les destins fracassés, un gâchis irrémédiable.



C'est un roman noir, très noir, admirablement construit. A partir de cette retentissante scène inaugurale, une tension sourde monte, on sait, on sent que ça va déraper, on attend de découvrir comment, pourquoi, avec quelles conséquences la gorge nouée.



Mais cette noirceur est éclairée par la profonde humanité qui affleure dans chaque page. Car c'est le coeur des hommes qui intéresse profondément l'auteur. Sa façon de tisser les liens entre ses cinq personnages, amis ou ennemis, est très forte. Chacun est traité avec beaucoup de dignité et de tendresse, avec une psychologie fouillée, leur parcours n'est pas linéaire mais évolue au fil des événements. Des êtres de chairs, imparfaits, qui trahissent, pleurent, se débattent .



Bien sûr, il y a les bons, Marc en tête, le généreux, plein d'assurance malgré son obésité, intelligent et fin, un magnifique personnage. Mais surtout, Ronan Gouézec nous offre un «  méchant » extraordinaire, le frère aîné Banneck, bloc monolithique de haine et violence qui se fissure jusqu'à devenir terriblement touchant. C'est rare en littérature de lire de tels mots pour décrire un être qui a semé le malheur dans les chapitres précédents :



« Ils s'étaient assis en silence. Et, très vite, ça aussi c'était inédit, une ou deux larmes avaient tenté une sortir sur le visage de Banneck aîné. Elles n'avaient pas pu rouler bien loin sur la peau tannée du grand frère, trop de rides, de cicatrices, d'obstacles à leur progression, de fierté aussi. Alors elles étaient restées accrochées au niveau des pommettes comme deux perles de givre, bientôt fondues et évaporées sans qu'il y touche, tant le sang qui circulait sous le cuir était vif et chaud. »



L'écriture de Ronan Gouézec offre un grand plaisir au lecteur dès les premières phrases. Très souvent, au fil de ma lecture, je me suis délectée de sa plume précise, généreuse, élégante.



Un roman intense et beau construit comme une tragédie universelle. Une belle réussite.
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Rade amère

Pour pallier tout manque si d'aventure la Covid nous faisait la mauvaise blague de nous obliger à un nouveau repli sur soi , j'approvisionne abondamment ma PAL ces derniers temps . Parmi mes dernières "prises" , un premier roman , " Rade amère " de Ronan Gouezec... Une couverture "inquiétante " , une quatrième de couverture alléchante et ...me voici parti ...en Bretagne ...C'est le soir , il pleut et tout ce que l'on peut faire , c'est se laisser tenter par un repas dans un des nombreux estaminets qui bordent le port ...Poussons la por......Le bruit , la lumière, les cris , les rires gras , vulgaires , la fumée , l'odeur âcre de transpiration , les regards simplement curieux , ou mauvais ou lubriques s'abattent sur vous , vous absorbent , vous traînent sans aucune pitié....Jour de grande marée, vous y êtes dans la tourmente , vous n'en sortirez plus avant de tourner la dernière page , c'est trop tard , ouvrir cette porte a scellé votre destin et celui de Brieuc et Caroff , deux hommes qui ne se connaissent pas , n'ont aucune raison de se rencontrer mais qui poursuivent une même chimère , se reconstruire et prendre " un nouveau départ " .Pour eux deux , l'espoir est à portée de mains mais l'océan et les " marées humaines " sont des adversaires redoutables . La quête a un prix et la note risque d'être " salée " .

Ce roman , à n'en point douter , est un roman noir , un vrai . Un de ces romans où espoir et malheur semblent liés et les noeuds de la corde sont serrés.

L'histoire , en elle - même n'est pas exceptionnelle , assez convenue et sans grand envolée. Non , pour le fond , pas d'emballement . On ne s'ennuie pas , certes , mais il manque un petit " je ne sais quoi " qui aurait pu ....Que les lecteurs sont exigeants , c'est incroyable....

L'atmosphère, par contre , est pesante en permanence , ce qui , vous le reconnaîtrez, est tout de même un élément essentiel dans " un roman noir " .L'auteur possède une " belle plume " et son style nous accroche , nous ramène sans cesse vers cette masse grondante comme l'océan , hurlante comme les hommes avec un petit éclair d'espoir , l'amitié entre Caroff et Toni ...c'est bien peu et , pour le pardon , il faudrait .....

Un bon roman pour les amateurs du genre mais....munissez - vous de l'imper , du ciré, des bottes car ça décoiffe....Avec , en plus , le masque , le flacon de gel , vous êtes parés. Bienvenue à Brest et " attachez vos ceintures " , ça va tanguer ....

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Masses critiques

.

Mer d'Iroise démontée , roches aiguisées , vent hurlant par une nuit sans lune , c'est le décor apocalyptique d'où surgissent les terribles frères Banneck .

Braconniers des Abers , usuriers sans scrupules , ils sont les dignes héritiers d'un patriarche alcoolique et violent .



Tout près de là , à Brest , vivent René et Marc liés depuis l'enfance par une amitié fraternelle indéfectible .

René et son épouse tiennent un restaurant à poisson , très coté , face à la rade.

Marc , lui , travaille dans une agence comme conseiller financier. Son travail l'ennuie et sa copine a pris le large .

La famille de son ami est donc devenue son refuge quasi quotidien .

Faire bonne chère est un plaisir commun aux deux amis qui d'ailleurs en imposent par leur exceptionnelle corpulence . Détail qui , au fil du récit a son importance .



Peu à peu , on va découvrir les sources d'un conflit , des côtés sombres et des secrets larvés .

Une intrigue âpre de thriller qui va parfois prendre des allures de western .

Des masses qui s'affrontent tant physiques que mentales, des caractères trempés , entiers , pugnaces , têtus , obstinés mais surtout animés par la vengeance et la haine . Un choc de titans , extrême .



Excellent moment de lecture .

Ayant déjà beaucoup aimé " Rade amère " , j'avais hâte de retrouver la très belle prose de Ronan Gouézec . Mais là , je trouve le roman encore plus abouti avec beaucoup de sensibilité , de profondeur , de délicatesse aussi . Il nous offre une analyse fine du caractère de ses personnages qui évoluent dans une mise en scène aussi subtile que surprenante .



Autre petite saveur , j'y ai souvent vu l'ombre de Franck Bouysse , version gens de mer ...

Mais , on ne s'y trompe pas : Ronan Gouézec a son style , déjà une signature semble-t-il .

Atmosphère ...



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Rade amère

Comme d'habitude le ciel dégringole sur Brest.

Il est de ces nuits où parfois "il y pleut la mer" !

"Rade amère" est un roman de Ronan Gouézec, paru en 2018 dans la collection "Rouergue Noir".

C'est un roman policier, un roman à l'ambiance moite et poisseuse où l'on ne découvre que petit à petit les ressorts d'intrigue.

Ronan Gouézec ne distille qu'au compte-goutte, et très adroitement, les éléments de mise en place de son récit.

Ce qui ne veut pas dire qu'on s'y ennuie.

Deux histoires y sont menées en parallèle.

Caroff est un pêcheur qui a merdé, qui subit les assauts de la mer, du banquier et d'une bande de malfrats avec lesquels il a eu tort de s'accoquiner.

Brieuc, lui au contraire, a eu l'idée qu'il fallait avoir eue d'ouvrir un service de taxi à travers la grande rade.

L'heure prévue d'abordage entre les deux hommes et leurs embarcations a été calculée pile au vingtième chapitre de manière à embrayer sur un épilogue implacable et inaccoutumé.

Ronan Gouézec a écrit là un véritable Western maritime, un roman dur et nerveux, un récit cependant que les faiblesses des personnages viennent remplir d'humanité.

Les liens qui se tissent n'ont de prime abord aucune évidence mais finalement viennent étoffer un récit riche en rebondissements.

"Rade amère" un roman policier, l'élément maritime n'y étant introduit qu'en guise de décor.

A aucun moment la vie des pêcheurs n'y est décrite, ni envisagée.

Une seule chose est sûre, c'est qu'il est difficile de tenir debout sur un pont secoué par la mer, et lessivé par pas ses vagues !

Le style d'écriture de Ronan Gouézec est très particulier.

Il sent la pluie qui alourdit le caban, il est plein de remugles de sueur et de bière, plein de bruits de luttes et de murmures d'espérances.

On est loin de la carte postale, ce récit est une plongée dans la Bretagne des barbares !

Tout changement de décor mis à part, ce livre m'a fait penser à "la Horse" de Michel Lambesc, et avec un peu moins de raisons à "Canicule" de Jean Vautrin.

Il est à signaler que "Rade amère" n'a rien à voir avec ces livres policiers locaux dont les titres à tiroirs ont envahi quelques étagères de libraires, des rayons entiers de l'épicerie dite culturelle, les boîtes à livres de nos quartiers et quelques-unes des caisses des brocanteurs les moins bibliophiles.

Ce roman policier a du sang dans les veines, une véritable nervosité et un rythme heurté.

En un autre temps, cela lui aurait sans nul doute ouvert les portes de quelque belle et noire collections, sans code barre bien entendu ... Une belle réussite pour un premier roman !
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Masses critiques

J'ai laissé passer plusieurs semaines entre la lecture des deux ouvrages de Ronan Gouézec, "Rade amère" et "Masses critiques".

Non pas que le premier roman de Ronan Gouézec m'ait déplu, bien au contraire.

Mais c'est un récit policier fort, sombre, épais et dense.

Disons qu'une deuxième tartine de Maroilles à suivre, c'est un peu trop pour la petite nature que je suis.

Et que j'ai eu peur de gâcher le plaisir d'y revenir ...

J'y suis pourtant revenu.

D'aillleurs, on revient toujours à Brest lorsque l'on a eu la chance d'y passer.

Brest est une ville particulière, une ville qui n'est plus tout à fait à terre, une ville qui déjà semble avoir appareillé vers d'autres ailleurs ...

Et les mots de Ronan Gouézec lui collent bien à la peau.

Cela commence par un pont lessivé par les paquets de mer.

Pourtant mille fois décrites par d'autres écrivains, les images d'éléments déchainés semblent ici renouveler l'exercice.

Et, Ronan Gouézec s'y affirme comme une véritable plume marine ... tourmentée mais marine.

Le premier Chapitre est un véritable exercice de style, une scène qui prend aux tripes et nous laisse, comme l'aîné des frères Banneck, groggy au bord de la côte.

Car le vieux Banneck et ses deux fils se sont mis au sec sur une roche.

Le vieux est au fond !

Et René Joffre, un restaurateur avec lequel ils étaient en compte a refusé son aide ...

"Masses critiques" est un roman policier sombre, violent et colérique.

Il est captivant et remarquablement bien écrit.

Peut-être même trop bien écrit, car parfois l'opulence de la description et la richesse du style en viennent à polluer un peu la clarté du récit.

Sous la plume de Ronan Gouézec, les mots semblent se solidifier dans ces descriptions.

Point trop n'en faut !

Cependant, une fois lancé, le récit se révèle passionnant.

La lectrice, le lecteur se doutent bien que ça va mal finir ...

Ronan Gouézec n'est pas un auteur de demi-mesure.

Il n'est pas du genre à ménager ses personnages.

Il va leur charpenter une vraie stature, leur imposer son intrigue policière et tragique.

En arrière-plan, Brest est là, bien présente en toile de fond avec son tram tout récent.

Brest qui ne semble pas bouger.

Brest en a vu d'autres mais tout de même.

Brest où ont disparu les pompons rouges, les mâtures de son arsenal et quelques uns de ses emblématiques bouquinistes.

Un serrurier-rempailleur de chaises m'a autrefois vendu quelques bons vieux introuvables avant que je ne parte en mer.

C'était cela Brest, une rue de la soif qui se terminaient dans une boutique de vieux livres ; du soleil, de la pluie et de la brume tout à la fois et la mer Zizou qui vendait des frites aux marins en piste jusqu'au petit matin dans une baraque en tôle au bas de la rue de Siam ...

Quoi qu'il en soit, le livre de Ronan Gouézec , s'il fait la part belle à la cité, ne donne pourtant pas dans la moindre nostalgie.

Et surtout, il n'est pas à confondre avec toute cette littérature policière locale de gare dont les titres semblent rebondir d'un calembour à un autre.

Il y a fort à parier que l'auteur de "Rade amère" et "Masses critiques" se taille bientôt une belle renommée dans le genre.

Si ce n'est déjà fait ! ...





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Rade amère

Rade amère, c'est le titre de ce premier roman de Ronan Gouézec, publié aux Éditions du Rouergue et que j'ai lu dans le cadre de la sélection du prix Cezam 2019.

Rade amère est un roman noir, un roman d'atmosphère, battu par les vents du large et les pluies cinglantes qui viennent parfois gifler les visages d'ici.

Je vous parle d'ici car c'est près de ce paysage que je vis, au bord de cette rade immense, la rade de Brest, à la fois ouverte et fermée, ouverte vers l'océan plus large que le ciel et l'horizon, elle est en même temps fermée, refermée dans un réceptacle où les vagues basculent et se bousculent dans une étreinte insoluble.

Rade amère, c'est le lieu où se déroule ce roman sombre et profondément humain. Dans ce roman, la mer est un personnage à part entière.

C'est ici que j'habite depuis 1994, ce paysage est mon quotidien et je vous invite à monter à bord de ce très beau roman avec une immense subjectivité totalement assumée.

Je n'ai pas le pied marin, c'est ici aussi que j'ai failli me noyer il y a 25 ans en tombant à l'eau depuis un petit catamaran avec une mer de force 6. Je n'ai eu la vie sauve que grâce à un véliplanchiste qui passait par là par hasard... Mais je continue d'aimer à toutes forces cet océan, que je tiens désormais à distance, en préférant les chemins côtiers qui le bordent de part en part.

Aujourd'hui, comme dans les pages de ce roman, c'est le ciel lourd et humide de l'hiver qui est au rendez-vous, c'est un fragment de Bretagne maritime qui vient dans la bourrasque et les embruns des mots que je vous écrits.

Nous entrons de plein pied dans l'itinéraire chaotique de deux hommes qui ne se connaissent pas et qui ont cependant un point commun, cet océan, le goulet, cette rade immense qui va depuis le port de Camaret jusqu'à Brest, en passant par la pointe des Espagnols.

C'est un homme à la dérive qui nous accueille. Il s'appelle Caroff, « un nom qui sonne comme un aboiement ou un raclement de gorge ». C'est un pêcheur, désormais rejeté par les siens. Par imprudence, il a pris un jour la mer alors qu'il ne le fallait pas, la mer était démontée, tout le monde lui disait de ne pas y aller, il n'a écouté personne et cela a couté la vie d'un matelot de seize ans qui était à bord. Depuis il traîne sur les quais, rejetés par les siens, pour autant aimé par sa femme Marie et sa fille Gaëlle, les aimant plus que tout, ces êtres étant toute sa vie. Il est à la dérive et veut refaire surface.

Tout près de là, allant d'une rive à l'autre, un autre homme tente aussi à sa manière de se reconstruire. C'est Brieuc, il est en train de mettre en place une activité de taxi maritime entre Camaret et Brest.

Caroff reprend goût au ciel qui vient comme un rebond, à la faveur d'une étrange affaire dans laquelle il se laisse embarquer. Mais a-t-il encore le choix ?

Brieuc, lui, tend les bras vers une femme pour l'aider à embarquer dans une vie qui se reconstruit sur la crête des vagues. Elle s'appelle Babeth. Il n'y a pas de hasard, il n'y a que des rendez-vous et c'est le premier rendez-vous merveilleux et improbable qu'offre ce roman.

Caroff lui aussi tente de se reconstruire, renouant avec ce bateau qui porte la poisse. Dans cette affaire sordide, on l'affuble de deux « gamins » issus des quartiers périphériques de Brest et qui paraissent totalement atypiques au monde marin. L'un s'appelle Toni alias 180 et l'autre Yann. Drôle d'équipage pour aller pêcher au large d'étranges colis qui n'ont rien à voir avec le genre halieutique.

Mais Caroff a un coeur immense, comme la rade qui est là sous ses yeux, prêt à l'emporter au plus près des tangages et des rêves éperdus.

Le fait-il pour lui ? Pour elles, c'est-à-dire ses vies, Marie, Gaëlle ?

Il est vrai qu'il aimerait tant que Marie continue à le regarder comme un homme nouveau.

Et puis, leur fille Gaëlle, c'est comme un petit miracle qui les maintient tous les deux à flot.

Dans le même temps, Brieuc et Babeth accompagnent un vieil homme et sa femme jusqu'au bord de leur vie ultime. C'est beau.

Ces deux hommes, Caroff et Brieuc, peu à peu reprennent, chacun à leur manière, leur vie en main.

Le savent-ils déjà, qu'ils vont bientôt entrer dans une zone dangereuse et violente ? Comment ressent-on que le destin construit un chemin en nous, quelque chose qui nous entraîne dans la douleur des flots ?

Au large, c'est le rail d'Ouessant, "là où les cargos se suivent et se croisent comme des camions sur une autoroute".

On peut naviguer sans arrêt dans cette rade immense et amère. "C'est le même endroit, la même zone de navigation et pourtant rien n'est jamais pareil". La lumière du ciel n'est jamais la même.

Caroff devient comme un père pour Toni, il se métamorphose.

Il y a comme une fraternité qui se dégage des personnages. Une immense fraternité.

Cette rade de Brest, c'est comme le réceptacle de leurs dernières illusions.

Il y a comme une impatience à embarquer, à aller au bout de l'horizon, à peut-être chavirer dans l'envers du décor sans savoir si c'est le vide ou le ciel qui nous attend de l'autre côté des vagues.

Ecrire que l'océan est ici un personnage à part entière, c'est peut-être faire injure aux autres personnages de ce roman.

Disons qu'il en le révélateur, il les met en relief, en action comme une forme de tragédie presque à huis clos.

Le huis clos, c'est cette rade de Brest et son goulet, qui en déterminent le contour géographique.

Mais si l'océan prend autant de place dans le récit, c'est peut-être aussi au détriment de l'intrigue qui en souffre un peu. Après tout ce n'est pas bien grave, tant les personnages sont ciselés avec justesse et sensibilité.

J'ai aimé ce roman, j'ai hâte de rencontrer son auteur dans le cadre du prix Cezam 2019 pour le lui dire, il est invité par la bibliothèque de Plougastel-Daoulas le 29 mars prochain.

Au final, n'est-ce pas toujours la mer qui a le dernier mot ? La mer, et ses plis sinueux, ses méandres, sa douleur et ses chimères.
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Rade amère

« Qui voit Sein voit sa fin ».



Brieuc et Caroff sont dans une mauvaise passe. Ces deux Finistériens voient dans la mer une planche de salut. Brieuc sort d'une rupture difficile et a cédé sa librairie pour créer une activité de bateau-taxi. Caroff est miné par la pire des infamies pour un marin-pêcheur : il a perdu un homme d'équipage en mer. Privé de son chalutier, il vivote avec sa femme et sa fille jusqu'au jour où un inconnu lui propose de participer à un trafic lucratif. Mais confier son destin à la mer n'est pas sans danger. Elle peut se déchaîner sans délai et écraser les existences comme de modestes rafiots.



La rade, c'est celle de Brest et on se plait dans ce roman à passer le goulet pour naviguer en mer d'Iroise, au large de l'île de Sein. Ronan Gouézec décrit le port et son environnement et les conditions de vie pénibles des travailleurs de la mer.



L'auteur réussit à créer des atmosphères particulières, et cela commence dès les premières lignes, sous une pluie furieuse, dans un rade du port dont on devine l'humidité, l'exiguïté, le brouhaha. On ressent une tension qui porte en elle les germes de l'histoire à venir.



J'ai trouvé que les émotions des personnages étaient rendues avec beaucoup de justesse. Certaines scènes sont cocasses, je pense notamment à l'improbable rencontre entre un marin-pêcheur et deux « cailleras ». L'auteur sait également s'amuser des clichés sur la Bretagne. D'autres scènes sont poignantes ; les deux protagonistes feront des rencontres qui les guideront vers la voie d'une renaissance précaire.



Un « roman de mer », un roman amer, parfaitement maitrisé, dans lequel je vous invite à embarquer.

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Masses critiques

Rade amère, le roman précédent de Gouézec, m'avait laissé un sentiment ambigu. Une rare qualité d'écriture, un vrai sens de l'humain, mais une intrigue assez limitée. A la réflexion, après lecture de Masses critiques, peut-être m'étais-je laissé aller à penser que ce titre paru dans la collection Rouergue noir se devait d'être un polar construit et assuré. Ce qu'il n'était pas… et ce que n'est pas non plus Masses critiques.

Avec ce dernier livre, Gouézec construit un drame ; un terrible drame porté par la dureté des hommes et les caprices du destin.



Dés les premières pages, la qualité d'écriture de Gouézec éclate. Chaque paragraphe est ciselé. On sent les vagues se jeter contre le granit breton, la tension entre les êtres, leur indéfectible amitié aussi.

Le clan des Banneck, braconniers des mers, est mené par le père dur et alcoolique, avec ses deux fils, l'aîné, copie du père, qui ne connaît que la violence comme de fonctionnement, et le jeune qui peine à imposer ses velléités d'indépendance. Un trio qui se fracasse une nuit comme leur bateau contre les rochers affleurant dans le goulet où ils ratissent les fonds marins. Le père y passe. Le petit est sorti de l'eau par son aîné plus mort que vif. Banneck junior appelle René, qui est en dette avec eux pour les sortir de cette mouise.

René, restaurateur, a pu construire et développer son affaire avec l'argent des Banneck, et leurs pêches hors saison et hors taxes. Mais depuis il subit pression, brimades et anxiété. L'occasion est trop belle de s'émanciper de ces butors. Il refuse de les aider.

Marc, largement plus du quintal, enveloppé par un corps qu'il traîne comme il peut et qui lui vaut dans son dos commentaires et railleries, sent venir le plan de licenciement massif dans son entreprise. Depuis l'enfance, il est lié à la vie à mort avec Marc. Ces deux-là n'ont pas besoin de se parler.

Pourtant René n'a rien dit à Marc de ses accords avec les Banneck et de leurs intimidations. Pourtant Marc n'a rien dit à René de ses examens à l'hôpital de la ville. Inutile d'alerter le copain.



Gouézec s'insère dans les pensées de ses personnages avec talent. La brutalité gratuite de l'aîné des Banneck, dont le seul référentiel a été son père monolithique. Le petit frère Banneck qui veut s'émanciper, trouver de l'air, échapper à un avenir tout tracé. René, l'apeuré qui décide puisque le destin semble lui être favorable, de désormais vivre sans arrières pensées, et sans téléphone qui sonne en pleine nuit pour déverser des menaces. Marc, profondément observateur des autres, qui devine et qui est toujours là pour René. L'obèse, raillé par les autres, en soutien de son ami d'enfance, restaurateur en difficulté.



Gouézec a un réel talent pour arriver à décrire si finement l'âme humaine. Il sait aussi habilement placer son intrigue dans une Bretagne maritime qu'il ne nomme pas vraiment, mais qui, quand on connaît Brest, est magnifiquement représentée. Il conduit son histoire tel les actes d'un opéra menant inéluctablement à un drame final. Terriblement noir, mais aussi terriblement juste.

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Rade amère

La quatrième de couverture laisse imaginer un roman policier sur fond maritime. On est plutôt dans le drame humain. Un drame bien noir, sur fond de vagues de la mer d’Iroise, aux reflets bleus-gris.



Caroff est un patron pécheur brestois pour qui les choses ont mal tourné. Accident en mer – de sa responsabilité disent ses collègues, qui le fuient désormais. Caroff n’a plus de bateau, plus d’avenir, que des dettes. Alors quand un gars du Sud vient lui proposer une combine pour le renflouer, il pense à sa femme, à sa fille … et à une nouvelle vie ailleurs.

Jos Brieux commence, lui, une nouvelle activité de bateau-taxi dans la rade de Brest. Un boulot pour effacer le départ de l’être aimé. Le premier client de Jos est un petit couple de retraités de Camaret, dont le mari René se rend régulièrement au CHU de Brest suivre une chimiothérapie. Rapidement le courant passe avec le malade. Jos enchaîne les sorties en mer et les rencontres.

Ces deux destins tourmentés vont se croiser quelque part entre le goulet de la rade et le grand large.



Ronan Gouézec déroule son histoire d’une belle plume. Évidemment la pluie est là, les embruns aussi ; les machines des navires sont huilées, les bars remplis de fortes personnalités pas toujours commodes. Il y a même de quasi passagers clandestins : deux gamins pas sortis de l’enfance, ratés scolaires, trimbalant chaînes et breloques sur leur haut de survêt, ignorant tout des choses de la mer, même si celle-ci est à quelques centaines de mètres de leur cité.

Le résultat final n’est toutefois pas totalement concluant. A soigner la forme du récit, Gouézec oublie un peu d’avancer l’intrigue. Laquelle d’ailleurs se résume à fort peu de choses, et part parfois dans le caricatural.

Ce sont les quelques moments d’amitié entre Jos et René, l’ancien, qui touchent le plus le lecteur. Quelques moments de grâce lors d’une ballade à l’île de Sein; quelques moments de vie arrachés à la maladie.
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Rade amère

Ah, comme j'aime les romans noirs bien noirs, battus par les vents violents de l'océan et une bonne pluie glaçante qui vous saisit les os ! Pas beaucoup d'éclaircies dans ce récit bien sombre qui met en scène Jos Brieuc (oui, ça se passe en Bretagne!), un ancien libraire divorcé qui s'est lancé dans une entreprise de taxi maritime. Un bon gars qui ne va pas très bien depuis que sa femme l'a quitté et qui aimerait bien se sortir de sa solitude et de sa vie de galère… Il a réinvesti tout son argent dans l'achat d'un bateau et il compte transporter les gens autour de la rade de Brest, vers Camaret ou la pointe du Conquet. Une remise à flot qui semble plutôt partir du bon pied. J'ai dit « qui semble »…

Et puis, il y a Caroff, un ancien pêcheur qui, il y a de ça quelques années, a voulu à tout prix sortir en mer alors que le temps était menaçant. Le jeune matelot de seize ans qui l'accompagnait est mort et depuis, tout le monde lui en veut de sa folle imprudence. Il vit dans un pauvre mobil-home posé sur un terrain vague avec sa femme et sa fille, ses seuls bonheurs de l'existence. Sans boulot, sans bateau, ça sent le fiasco et l'avenir lui paraît bien compromis, alors quand on lui propose de tremper dans une magouille qui rapporte - des colis à récupérer en mer -, il a beau vouloir refuser, il se dit que c'est peut-être l'unique chance qui lui permettra de partir avec sa femme et sa fille en Irlande et de couper avec cette vie pourrie dont il ne veut plus.

Deux hommes, deux destins qui n'auraient jamais dû se rencontrer...

Ce que j'ai trouvé vraiment très réussi dans ce roman, c'est la description des lieux, l'atmosphère  : on sent que l'auteur connaît la Bretagne et sait de quoi il parle. La pluie, les nuages sont omniprésents (seuls ceux qui ne sont pas du coin semblent d'ailleurs en souffrir - « en Bretagne, il pleut que sur les cons » aiment rappeler mes collègues bretons), le vent du large ne décoiffe pas que les Bigoudens, son souffle hurle la nuit, se faufile dans les moindres recoins. Tout craque, tout vibre, croule sous les rafales. Une bourrasque en appelle une autre. Il n'y a jamais aucun répit, à peine une accalmie. C'est bien sombre, bien pesant et, en même temps, magnifique, comme une peinture dans les tons gris et noir. Les contrastes de lumière sont saisissants, quasi cinématographiques. Et l'on entend l'océan gronder dans le lointain… Tous les sens sont en alerte...

Une vraie plongée dans l'atmosphère bretonne donc, l'hiver bien sûr, parce que l'été...

J'ai beaucoup aimé aussi, malgré toute la noirceur de ce texte, l'humour : je vous en donne un exemple. Le gars chargé de transmettre les infos du boss auprès de Caroff est un homme du Sud, alors la Bretagne n'est pas vraiment son truc et c'est en ces termes qu'il en cause : « Des marées noires, des oiseaux crevés, des tempêtes… Il avait du mal à croire vraiment que des gens veuillent aller passer des vacances là-bas… Ou alors, il fallait être anglais ou belge... allemand à la rigueur... » ou bien « Bon, la Bretagne donc… Des plages désertes forcément, tellement il gèle, des crabes et des cirés jaunes un peu partout, des bonnets, des crêpes, des coiffes, misère… Il paraît qu'ils sont saouls toute la sainte journée... » Ça me fait rire parce que c'est exactement la façon dont les gens du Sud voient la Bretagne… Autre exemple, dans un autre domaine, assez marrant : notre Caroff se voit imposer deux loubards d'une cité brestoise qui n'ont pas franchement le pied marin, espèces de clichés ambulants, survêt' et chaînes dorées au cou, dont la description est à mourir de rire. Alors, il faut en profiter parce que pour le reste, encore une fois, l'atmosphère est comme le ciel : bien plombée. On met les pieds dans quelque chose qui ressemble à une tragédie. Ah, le destin des hommes parfois...

Dernier point pour finir de vous convaincre, l'écriture est magnifique (et ce n'est pas toujours le cas dans les romans policiers...). Espérons que l'auteur, dont c'est le premier roman, sera de nouveau inspiré par ses « vagabondages côtiers » comme le dit la 4e de couv' parce que des comme ça, on en redemande !

Une très belle réussite donc !
Lien : http://lireaulit.blogspot.fr/
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Rade amère

Brieuc, Caroff, la rade de Brest et le Sud qui s’invite sur cette pointe bretonne sous de funestes auspices.



Un hiver breton dégoulinant d’humidité. Petite parenthèse bretonne : pour faire mentir tous les clichés ce n’est pas systématique !



Joss Brieuc vient de pénétrer dans l’univers bruyant et surchauffé d’un bar-restaurant brestois. Dehors, des bourrasques de vent charrient des pluies collantes gorgées d’iode et de sel. Il rumine sa solitude et s’apprête à entamer le lendemain une reconversion professionnelle en s’installant comme bateau-taxi autour de la rade.

Caroff a tragiquement perdu en mer son tout jeune matelot. Rejeté violemment par son entourage, il se terre dans un misérable mobil-home. Pour offrir à sa femme et sa petite puce un plus bel avenir, il fait le choix hasardeux de tremper dans un dangereux trafic proposé par une crapule du Sud.



L’auteur déroule ce roman noir en nous guidant tout au long d’une succession de scènes très imagées. Scènes de bar, de navigation, de zone portuaire ou de port de plaisance, d’amitié ou de vie de famille écorchée, de déchaînements météorologiques, de balade venteuse sur l’île de Sein, de violence…

Il exploite à merveille les préjugés de certaines personnes du Sud vis-à-vis de la Bretagne avec des clichés criants de vérité.

L’écriture est surprenante. Jurons, langage familier contemporain et phrases descriptives travaillées et poétiques se côtoient en un mélange détonant et vivant qui finalement colle parfaitement aux différentes ambiances rencontrées.



C’est un premier roman prometteur qui, bien au-delà de l’intrigue qui est prévisible, m’a surtout plu dans la perception des différentes atmosphères. Entre les masses d’eau de la mer d’Iroise et celles déversées par un ciel aux différentes variations de gris, le chaos tempétueux s’installe dans cette rade amère.

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Masses critiques

Recevoir un roman intitulé "Masses critiques" dans le cadre d'une opération masse critique (merci à Babelio et aux Editions du Rouergue au passage), c'est plutôt amusant, non ?



Marc et René sont deux amis de trente ans, mais des vrais, unis, même si chacun a ses petites secrets. Et en face d'eux, il y a deux frères, les Banneck, dont l'aîné est du genre brutal, ivre de vengeance. L'affrontement (ou les affrontements plutôt) semblent inévitable(s). Haine et aveuglement sont mêlés, les rôles s'inversant après un terrible drame. Ce ne sera pas le dernier...



"Masses critiques" est une histoire forte, âpre, très sombre, possédant néanmoins quelques moments de franche lumière. L'écriture est très belle, brute, sèche, iodée. Les personnages sont bien campés, plutôt des taiseux, pleins d'une colère sourde, si difficilement contenue. Des personnages qui évoluent au fil de l'histoire, on trouve une forme de rédemption chez certains. Mais la colère et la violence les dépasseront...



Un roman assez remarquable donc, à lire de préférence avec du Miossec en fond sonore...
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Masses critiques

Comme dans Rade amère, le précédent roman de Ronan Gouézec, le livre s'ouvre sur une scène d'anthologie : ici, une tempête en mer d'Iroise et le naufrage d'un bateau de pêche. L'écrivain a cette habileté, mais aussi ce talent, de nous projeter immédiatement dans son univers. C'est une affaire de style et Ronan Gouézec maîtrise un style à la fois ample et percutant. Lorsqu'il nous parle des éléments de sa Bretagne occidentale, du vent, de la mer, de la dureté du relief, sa phrase se fait aérienne, liquide, rugueuse. Quand il entreprend de cerner les travers d'une société gangrenée par l'argent, la rentabilité, l'épate, les mots sont durs, incisifs, ravageurs et le détail se fait assassin. le style au service du fond, un fond qui explore les marges, que ce soit le braconnage, les réussites bâties sur du sable, la souffrance au travail ou encore le handicap d'un corps hors norme.

La masse critique est la quantité de matériaux fissiles nécessaire pour déclencher une réaction en chaîne et une explosion. Ronan Gouézec, à la manière d'un entomologiste, va suivre le parcours de ses personnages, chargés comme des bombes nucléaires et hautement inflammables. le ton est juste, la mécanique de haute précision et le résultat conduit à un embrasement général. Cependant, dans une surenchère de noirceur, l'auteur pratique une politique de la terre brûlée à laquelle aucun de ses personnages ne survivra. Fallait-il aller jusque-là ? Je n'en suis pas certaine.

Petit clin d'oeil à Rade amère, les lecteurs croiseront Brieuc, le patron du bateau-taxi.
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Rade amère

Oh quelle noirceur......

J'en aurai mis du temps à entrer dans ce récit. Tout d'abord les histoires parallèles pas très joyeuses, des différents personnages ne me "parlaient" pas vraiment : toute une série de bonhommes plus ou moins cassés par la vie, qui font ce qu'ils peuvent pour continuer à avancer. Puis finalement j'ai compris leur point comment... enfin ils se sont retrouvés... et là, c'est encore pire qu'au début, ce n'était pas joyeux, c'était carrément glauque, sombre, sans espoir....

J'étais contente d'arriver au bout ; Il m'en aura fallut du temps pour finir cette lecture. Je vais pouvoir passer au suivant.
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Masses critiques

René Joffre, restaurateur, possède un bel établissement. Mais si sa femme lui demandait comment il a pu l’acheter, il serait certainement embarrassé pour lui avouer que les Banneck lui ont fait un prêt. Traiter avec les Banneck qui vivent de pêches illicites est très dangereux quand on est en dette avec eux ; pas de sentiment quand il s’agit de récupérer leur argent.



René ne soupçonne pas que la mort du père Banneck va l’entraîner dans une spirale de haine et de violence.



Un roman noir à l’écriture caustique sans fioriture qui provoque un vibrant ressenti au lecteur.

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Rade amère

Comment rebondir pour envisager un avenir lorsque la vie vous accable et que l’horizon fait le gros dos comme une mer déchainée ? Qu’est-ce-qui fait que vous défiez l’adversité ? Comment un homme puisse imaginer se sortir de son enfer en entrant dans un autre ?

C’est pourtant ce que Caroff, héros de cette histoire, va penser ! Pour se remettre de la mort accidentelle de son matelot qui l’a mis au ban de la petite société de pêcheurs et de son univers, il accepte de faire le passeur, sorte de go-fast maritime, et espère ainsi avoir les moyens de tourner la page pour envisager une autre vie avec sa femme, dont il forme un couple fusionnel, et leur petite fille, le soleil de leur union.

Du coup, racontez ainsi, l’histoire apparaît biscornue et irréelle ! Mais, c’est sans compter sans le talent de l’auteur qui signe ici son premier roman. Ronan Gouézec réussit à endormir tous nos signaux, à justifier l’injustifiable et à nous faire trembler pour ce héros si entier.

En suivant Caroff, on suit aussi un autre homme, Brienc, qui essaye lui aussi de tourner la page de l’adversité mais, lui, en toute légalité. Est-ce que ces chemins identiques feront la différence. Je vous laisse le découvrir !

Ronan Gouézec nous entraîne au milieu de cette mini-société d’hommes de mer confrontés à la rudesse du travail, où la parole est accessoire et où le courage est omniprésent. Ici, peu de dialogue mais des descriptions superbes qui immergent le lecteur dans cet univers particulier au cœur de cette nature omniprésente. Le film de cette histoire s’écrit avec des mots mais se déroule avec des images! Tenu en haleine jusqu’à la fin, Rade amère porte bien son nom !
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Rade amère

’ai eu beaucoup de difficultés à entrer dans l’histoire et ai même dû relire plusieurs fois les premières pages. Je n’explique pas trop pourquoi peut-être l’ambiance morose du départ et surtout peu de dialogues, beaucoup (trop) de descriptions. Puis petit-à-petit me voilà transportée en Bretagne bien que j’ai trouvée cette Bretagne triste à l’image des deux personnages principaux. Brieuc et Caroff sont à un tournant de leur vie, le premier ancien libraire vient de lancer son activité de taxi maritime. Cela va l’aider à se remettre de son divorce, surtout grâce aux rencontres qu’il va faire, entre autres celle de Babeth, écorchée aussi par la vie sans que nous sachions pourquoi. Leur rencontre est une bouffée d’air frais pour eux comme pour nous dans notre lecture. Caroff lui prend un chemin plus tortueux pour essayer de remonter la pente, homme plein de colère, c’est avant tout un père et un mari. Malheureusement un ensemble de mauvaises décisions va le mener à sa perte emmenant avec lui tout sur son passage.



Et pour les lier, la mer, la rade qui les fait vivre et espérer. Mais pour ces deux-là l’eau ne sera pas d’huile, les mauvaises décisions comme une tempête vont tout balayer dans leur vie. Beaucoup de tension dans cette lecture, de violence latente avec un final déroutant où nous assistons à un déchainement de fureur. L’auteur nous dépeint des personnages touchants malgré leurs failles auxquels je me suis attachée ce qui me laisse un sentiment amère à la fin de ma lecture.



Un roman noir avec peu d’espoir dont la fin m’a déçu, trop de violence à mon goût. Dans ce décor amère la plume soignée de l’auteur détonne un peu mais beaucoup de justesse dans l’ensemble de ses personnages qu’on prend plaisir à voir évoluer.
Lien : https://leslecturesdemamanna..
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Masses critiques

Le père Banneck n’aurait pas dû prendre la mer ce jour-là. Coutumier des pêches illégales et juteuses, il est parti en mer par grosse tempête sur son rafiot pourri que le sale temps ballote comme une coquille de noix. L’inévitable se produit : le rafiot sombre et le père avec. Par miracle, les deux fils s’en sortent. Apprenant cela, René, restaurateur en vue dans la rade de Brest, et qui a maille à partir avec les Banneck depuis belle lurette, se croit sauvé de leurs chantages et extorsions à répétition. C’est sans compter sur l’esprit de vengeance que les fils Banneck ont hérité de leur père et que l’accident va raviver. René compte alors s’appuyer sur son ami de toujours, Marc. Mais ce dernier est-il réellement fiable ?



Après « Rade amère » paru en 2018 et couronné par le Prix de la Roquette, Ronan Gouézec revient avec un deuxième roman « Masses critiques ». Et celui-ci est tout aussi captivant : il s’agit d’un roman noir dense, qui se savoure d’une seule traite, par petites goulées âpres.



« Masses critiques » c’est d’abord un roman d’atmosphère, celle d’un univers replié sur lui-même que l’espoir semble avoir déserté en cette terre du bout du monde, frappée par les tourments climatiques, vent, pluie, froid, … sans fin. Ces conditions qui modèlent la végétation, façonnent aussi les mentalités de ses habitants, les burinant comme des blocs de granit. Dans ces contrées arides, l’emploi est rare, reste précaire, surtout quand on vieillit ou qu’on se démarque d’une manière ou d’une autre, par exemple par l’obésité. Alors on cherche l’argent, où qu’il se cache et quelle que soit la manière de l’atteindre.



Face à l’adversité, la nécessité de survivre en milieu hostile, on se serre les coudes, qu’on soit frères de sang comme les Banneck ou de cœur comme René et Marc. Page après page, Ronan Gouézec peint des personnages empêtrés en eux-mêmes, avec eux-mêmes et les autres, protagonistes qui luttent pour s’en sortir et continuer à croire en la vie. Son style fabuleux décrit aussi joliment les paysages maritimes que les territoires obscurs de chacun et le roman file, inexorablement, vers sa chute, dépliant les ressorts d’une noirceur qui viendra exploser en filaments brillants, éclairant, pour une fois, la nuit sans fin.



De bout en bout, un grand bravo pour cette œuvre éblouissante qui dit à merveille l’obscur et la beauté de l’humain, intriqués.
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Rade amère

Caroff et Jos sont les personnages dont le lecteur fait connaissance petit à petit. L'auteur passe de l'un à l'autre et on ne voit pas où il veut en venir.



Il faudra  patienter jusqu'au dernier quart du livre pour le savoir.



J'avoue qu'il a fallu que je m'accroche un peu pendant la lecture de ce roman sombre. J'ai d'ailleurs bien fait car au fil des pages j'ai appris à connaître les personnages et j'avais envie de savoir où l'auteur allait les emmener. 



Dans ce roman je n'ai pas retrouvé la Bretagne que je connais mais une Bretagne sombre et morose. 



Heureusement quelques petites lueurs apparaissent dans les relations entre certains des personnages de cette histoire.



C'est donc un roman noir mais qui m'aura valu un fou-rire avec ma sœur quand je lui ai résumé le roman...
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Rade amère

Nous voici en terre bretonne, et même au bout du bout du Finistère, pour ce roman situé à Brest. Laissez de côté les enclos paroissiaux, la dentelle de pierre des clochers, les plages balayées de soleil, Ronan Gouézec nous propose un autre embarquement, sur un vaisseau fantôme, le Marie-Gaëlle, un fileyeur maudit depuis la mort en mer de son mousse de seize ans. Après cette tragédie, le patron du bateau, Caroff, est marqué du sceau de l'infamie par toute la communauté des gens de mer. Désespéré, il est prêt à tout pour sauver sa famille de la misère, réarmer le navire et retrouver une place parmi ses congénères. Quant à Jos Brieuc, autre laissé-pour-compte, il se sent également prêt pour un nouveau départ après un divorce et des rêves de transat engloutis avec sa librairie. Il démarre son activité de bateau-taxi avec l'espoir de vivre enfin en paix avec lui-même.

Mais, en mer, les coups de tabac sont sans merci et les pirates aussi. L'intrigue, lestée de toute la fatalité collée aux perdants, étend ses tentacules mortifères pour frapper les faux espoirs.

Âpreté, brutalité, désespérance, Ronan Gouézec écrit avec beaucoup de style un roman noir qui ne fait aucune concession à la rédemption, sinon au travers de la mort.
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