Citations de Samuel Beckett (907)
Rien n'est plus drôle que le malheur... c'est la chose la plus comique du monde.
Si je pouvais le tuer, je mourrais content.
CLOV (regard fixe, voix blanche). -
Fini, c'est fini, ça va finir, ça va peut-être finir. (Un temps.) Les grains s'ajoutent aux grains, un à un, et un jour, soudain, c'est un tas, un petit tas, l'impossible tas. (Un temps.) On ne peut plus me punir. (Un temps.) Je m'en vais dans ma cuisine, trois mètres sur trois mètres, attendre qu'il me siffle. (Un temps.) Ce sont de jolies dimensions, je m'appuierai à la table, je regarderai le mur, en attendant qu'il me siffle.
HAMM - La nature nous a oubliés.
CLOV. - Il n'y a plus de nature.
HAMM - Plus de nature ! Tu vas fort.
CLOV. - Dans les environs.
HAMM - Mais nous respirons, nous changeons ! Nous perdons nos cheveux, nos dents ! Notre fraîcheur ! Nos idéaux !
CLOV. - Alors elle ne nous a pas oubliés.
-Il pleure.
-Donc il vit. As-tu jamais eu un instant de bonheur ?
-Pas à ma connaissance.
HAMM - Mais réfléchissez, réfléchissez, vous êtes sur terre, c'est sans remède !... Mais enfin quel est votre espoir ? Que la terre renaisse au printemps ? Que la mer et les rivières redeviennent poissonneuses ? Qu'il y ait encore de la manne au ciel pour des imbéciles comme vous ?
HAMM - Oh c'est loin, loin. Tu n'étais pas encore de ce monde.
CLOV. - La belle époque !
Réfléchissez, vous êtes sur terre, c’est sans remède
Clov. – Fini, c'est fini, ça va finir, ça va peut être finir. (Un temps) Les grains s'ajoutent aux grains, un à un, et un jour, soudain, c'est un tas, un petit tas, l'impossible tas.
(Première réplique).
- HAMM. - Embrasse-moi. (Un temps.) Tu ne veux pas m'embrasser ?
- CLOV.- Non.
- HAMM. - Sur le front.
- CLOV.- Je ne veux t'embrasse nulle part.
Un temps.
- HAMM (tendant la main). - Donne-moi la main au moins. (Un temps.) Tu ne veux pas me donner la main ?
- CLOV.- Je ne veux pas te toucher.
Hamm. - Coïte ! Coite tu veux dire. A moins qu'elle ne se tienne coite.
Clov. - Ah ! On dit coite ? On ne dit pas coïte ?
Hamm. - Mais voyons ! Si elle se tenait coïte nous serions baisés.
Un temps.
HAMM. -
J'ai connu un fou qui croyait que la fin du monde était arrivée. Il faisait de la peinture. Je l'aimais bien. J'allais le voir, à l'asile. Je le prenais par la main et le traînais devant la fenêtre. Mais regarde! Là! Tout ce blé qui lève! Et là! Regarde! Les voiles des sardiniers! Toute cette beauté! (Un temps.) Il m'arrachait sa main et retournait dans son coin. Epouvanté. Il n'avait vu que des cendres. (Un temps.) Lui seul avait été épargné. (Un temps.) Oublié. (Un temps.) Il paraît que le cas n'est... n'était pas si... si rare.
CLOV. -
Un fou? Quand cela?
HAMM. -
Oh c'est loin, loin. Tu n'étais pas encore de ce monde.
CLOV. -
La belle époque!
HAMM - Il y a de la lumière chez la Mère Pegg ?
CLOV. - De la lumière ! Comment veux-tu qu'il y ait de la lumière chez quelqu'un ?
HAMM - Alors elle s'est éteinte.
CLOV. - Mais bien sûr qu'elle s'est éteinte ! S'il n'y en a plus c'est qu'elle s'est éteinte.
HAMM - Non, je veux dire la Mère Pegg.
CLOV. - Mais bien sûr qu'elle s'est éteinte !
Hamm. : Clov !
Clov (absorbé). : Mmm.
Hamm. : Tu sais une chose ?
Clov (de même). : Mmm.
Hamm. : Je n'ai jamais été là. (Un temps.) Clov !
Clov (se tournant vers Hamm, exaspéré). : Qu'est-ce que c'est ?
Hamm. : Je n'ai jamais été là.
Clov. : Tu as eu de la veine.
Il se tourne vers la fenêtre.
Hamm. : Absent, toujours. Tout s'est fait sans moi. Je ne sais pas ce qui s'est passé. (Un temps.) Tu sais ce qui s'est passé, toi ? (Un temps.) Clov !
Clov (se tournant vers Hamm, exaspéré). : Tu veux que je regarde cette ordure, oui ou non ?
Hamm. : Réponds d'abord.
Clov. : Quoi ?
Hamm. : Tu sais que ce qui s'est passé ?
Clov. : Où ? Quand ?
Hamm (avec violence). : Quand ! Ce qui s'est passé ! Tu ne comprends pas ? Qu'est-ce qui s'est passé ?
Clov. : Qu'est-ce que ça peut foutre ?
Il se tourne vers la fenêtre.
Hamm. : Moi je ne sais pas.
On pleure, on pleure, pour rien, pour ne pas rie, et peu à peu... une vraie tristesse vous gagne.
Hamm : Comment vont tes yeux ?
Clov: Mal.
Hamm: Comment vont tes jambes ?
Clov: Mal.
Hamm: Mais tu peux bouger.
Clov: Oui.
Hamm (avec violence): alors bouge !
Tout cela est plaisant en effet. Veux-tu que nous pouffions un bon coup ensemble ?
HAMM. - Si je pouvais me traîner jusqu'à la mer ! Je me ferais un oreiller de sable et la marée viendrait.
CLOV. - Il n'y a plus de marée.
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Hamm : (...) Quelle heure est-il ?
Clov : La même que d'habitude.
Hamm : Tu as regardé ?
Clov : Oui.
Hamm : Et alors ?
Clov : Zéro.
Hamm - Je serai là, dans le vieux refuge, seul contre le silence et ... (il hésite)... l'inertie. Si je peux me taire, et rester tranquille, c'en sera fait, du son, et du mouvement.