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Citations de Sandrine Collette (1582)


S'ennuyer. Une chance inouïe, ajoutait-elle. S'ennuyer, cela ne faisait pas de douleurs aux bras, ni aux jambes, ni au dos, ni aux mains que l'arthrose avait commencé à déformer. Cela ne pliait pas le corps, cela n'affolait pas l'esprit. C'était du temps béni : celui où on peut inventer le monde. Rien n'empêchait. Rien n'interdisait.
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...c'est la nature qui efface les traces des hommes. C'est comme si elle nous détestait, la nature, et dès qu'on fait quelque chose elle tend à le détruire pour reprendre tout l'espace. On croirait qu'il n'y a pas de place pour elle et nous, il y en a un de trop là-dedans. Au début je me rappelle Henry disait que la nature a horreur du vide alors elle le comble c'est tout mais à mon avis c'est bien davantage. Ce n'est pas qu'elle le comble, elle ne se contente pas de remplir les vides. Si c'était simplement ça, dans le monde il y aurait des œuvres à elle et à côté des oeuvres à nous et ainsi de suite. Or j'en ai vu des maisons ou des villages désertés par les hommes, et je peux affirmer qu'en quelques années ils se font dévorer par les herbes et les lianes et les arbres. J'en ai traversé des ruines comme ça et la façon dont la nature monte à l'assaut de nos constructions ça n'est pas juste pour venir se coller tout contre elles : c'est pour les engloutir, c'est ni plus ni moins ce qu'un boa constrictor fait avec un lapin c'est exactement l'idée que j'en ai. La nature si elle peut, elle nous bouffe.
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C’est la perte qui donne conscience de la valeur d’une chose : tant qu’on l’a, cela paraît normal. Il faut un choc. Il faut la peur – pour se rendre compte que rien ne va de soi, et rien n’est éternel.
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Hier on a longé une rivière et même si on était toujours au nord ça faisait des lumières que je n'avais jamais vues. Ce n'est pas qu'elles n'existaient pas avant mais je ne les regardais pas.
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Aru ne dit rien de la matinée. Je suis de mauvaise humeur. Je le prends mal son silence, j'ai l'impression qu'il m'accuse de quelque chose
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Le tintement de la pluie sur le monde quand on est à l’abri c’est ce qu’il y a de plus beau. Je suis sûr qu’il y a des milliers de bêtes dans la montagne qui se disent la même chose au même instant et on laisse passer du temps les yeux à demi fermés , ce monde-là dehors résonne en nous et on l’accueille.
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J'étais paralysé par la tournure que prenaient les choses. Ses sanglots ressemblaient à des plaintes de petit chat, à des pleurs de bébé. Quelque chose clochait. De ce vieux corps fripé sortait une psalmodie d'enfant et je sentais mes poils se dresser sur mes bras. J'avais l'impression de contempler un truc malsain, pas résolu, mal enfoui. Ou une maladie.
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C’est peut-être à force de remuer ça dans ma tête que ça arrive jusqu’à Aru et il se tourne vers moi. Encore une fois c’est fou, à part qu’il tremble un peu je jurerais qu’il n’y a rien de changé en lui et un instant j’ai l’espoir insensé qu’il ne m’en voudra pas, qu’il fera table rase ça y est c’est oublié : c’est ça qu’il va me dire et c’est pour ça qu’il me regarde enfin. Mais les explications c’est moi qui dois les donner, c’est moi l’adulte et ça je n’y pense pas je suis vraiment un con je ne peux pas le dire autrement. Je fixe Aru en attendant éperdument qu’il articule cette belle phrase pour me pardonner et j’ai fait quoi pour la mériter cette phrase ? J’ai l’air de quoi pendu à ses lèvres et qu’est-ce que je peux attendre d’un gosse de cinq ans – je n’ai pas tellement de lucidité à ce moment-là alors les mots qui viennent, je les prends de plein fouet et je les encaisse et ça me laisse sonné, et il a raison le petit parce qu’il n’y avait qu’elle qui l’aimait et il dit :
Elle revient quand maman.
C’est un coup terrible dans ma poitrine. Il ne le sait pas et moi je le regarde avec mon sourire figé et c’est tout mon être qui s’est tétanisé, je veux dire pas seulement mon visage tendu et ma peau qui pique mais tout l’intérieur. J’ai l’impression que mon sang s’est vidé et que plus rien ne circule. Je ne bouge pas si je bouge je m’écroule, il faut que ça revienne un peu. Je croyais qu’Aru avait compris je me rends compte que non. Ou alors il est tellement malheureux que son seul recours c’est sa mère morte et c’est ça que je réalise, parfois on est mieux avec les gens morts qui nous aimaient qu’avec ceux qui restent et qui ne représentent rien pour nous, et moi je suis ce type lointain qui ne s’occupe pas de lui (…).
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Ça ne me gêne pas d’être une carne. Les gens qui me connaissent disent que j’ai un fond en or seulement il est tout au fond voilà. Ce métier cette vie c’est le mieux que je pouvais décider pour moi, depuis tout petit je ne peux pas trop faire confiance aux gens ou alors il faut vraiment qu’il y ait très peu de gens. Sinon ça me rappelle mes parents qui gueulaient et cognaient sec et les voisins qui ne disaient rien on aurait cru que c’était normal tout ça. C’est peut-être pour ça que je n’aime pas les vieux, ça me rappelle les miens et ça n’est pas du bon souvenir (…).
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Je crois que j'accepte simplement que ce soit un gosse et ce n'est pas facile quand soi-même on n'a pas eu d'enfance on ne sait pas ce que c'est. C'est comme un canard ou un chien élevé par un humain; s'il n'a jamais entendu cancaner ou aboyer eh bien il ne sait pas le faire. Au fond on n'est pas mieux que les bêtes il nous faut une référence. On peu t la répéter ou la prendre à contrepied mais il y a un repère c'est ça l'important, qu'on fasse avec ou qu'on fasse contre c'est autre chose
page 139.
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C'est un pays que j'aime. (...) . ce pays-là personne ne le connaît entièrement et si quelqu'un essayait de le faire de toute façon ça changerait tout le temps, ce territoire ne veut pas qu'on sache qui il est ni comment il se renouvelle c'est sa force.
page 130.
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Mais leur regard ne s'arrête jamais sur moi, il passe au travers.
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Sandrine Collette
Toutes ce s années à devenir fort, à conjurer le sort, à croire que l'avenir peut s'infléchir et que l'on peut dominer le monde.Toutes ces années à trébucher et tomber sans faiblir, puisqu'il s'est relevé chaque fois. Mais mettre un genou à terre chacune de ces mille fois, cela fait des cicatrices.Cela laisse des traces.Parce qu'on n'oublie pas: on accumule.
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Leurs enfants ne jetaient jamais un oeil en se levant et en s'habillant, parce que le temps était toujours le même, toujours maussade, et qu'il n'y avait rien à voir, pas de magie, pas de lumière, pas de différence avec la veille, et l'avant-veille, et les huit cents jours qui avaient précédé, puis les mille, puis, bientôt les trois mille.
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Jolie petite biche qu’il suit depuis deux heures à présent, il a eu du mal à retrouver sa trace.
Jolie petite femelle qui lui fait briller les yeux et éclater le corps d’une exaltation indicible, maintenant qu’il l’a repérée. Il ne lâchera plus son sillage. Pour un fauve affamé comme lui, elle est une brillance dans les ténèbres, une explosion, la lumière de mille soleils.
Je vais t’avoir.
Elle ne le voit pas la contourner, passer à l’arrière du bosquet. Il y a trop de peur.
Elle ne le sent pas, elle ne l’entend pas.
D’un mouvement rapide, elle quitte le couvert des arbres et reprend sa course.
Il l’imite.
Il n’a plus d’effort à faire pour la pister : la culotte en soie blanche se reflète aux rayons de la lune, fuyante, agile, toujours là. Une tentation grandiose. Cela le fascine comme le petit cul des chevreuils virevoltant dans les bois de Sologne.
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Alors elle comprit que sur la terre un souffle infini était venu, enflammant tout sur son passage. Elle ne savait pas quoi, elle ne savait pas d'où. Elle l'avait entendu ronfler au-dessus de sa tête, elle sentait la chaleur qui cherchait l'entrée du tunnel...
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Sept ans auparavant, au dégel, lorsque les émanations toxiques du Kikhpinytch sont les plus dangereuses, dix ours y sont morts – ainsi que des quantités d’autres petits animaux piégés par les gaz. Le sol ressemblait à un grand cimetière où personne n’aurait eu le temps de creuser des tombes, un charnier naturel, même pas besoin de l’homme pour se faire crever, il suffit de respirer l’air vicié. D’autres fois, des humains s’y sont laissé prendre aussi. Maux de tête, vomissements, ceux qui ne s’enfuient pas aussitôt tombent au bout de quelques dizaines de minutes.
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Parfois, je me demande comment un lieu comme celui-ci peut exister. Pas à cause des vieux, de leur folie, de leurs sévices. Mais déjà l'endroit lui-même.
Un lieu où personne ne passe, jamais.
Un lieu désespéré dès le départ, perdu et muet. Maudit.
Il n'y a qu'ici que ce genre de choses pouvait arriver.
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Au fond, c’est Vlad qui avait raison quand il disait que rien n’était gagné d’avance, ni pour les hommes ni pour les ours. Cela se joue jusqu’au dernier moment. Jusqu’aux dernières blessures. Et à l’instant ultime de l’épuisement.
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Presque trois ans à vivre dans une cage qu'il a refermée insidieusement, un peu plus chaque jour, sans qu'elle s'en aperçoive. Trois ans : rien du tout. Dix-huit mois pour le coup de foudre et dix-huit mois pour l'enfer. Mais quand on y est, c'est long comme l'infini. Trois ans pour un travail d'orfèvre. Quand elle s'en est rendu compte, c'était trop tard - les affections étaient rompues. Plus de famille, plus d'amis, des relations minimales avec les rares collègues à la boulangerie, bonjour bonsoir, quelques conversations auxquelles elle ne participait pas. D'elle, on disait qu'elle était timide, repliée sur elle-même. La vérité est tout autre : Clémence est une oeuvre.
Son oeuvre à lui.
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