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Critiques de Sarah Jollien-Fardel (244)
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Sa préférée

Ancienne blogueuse devenue journaliste sur le tard, Sarah Jollien-Fardel livre ici un premier roman percutant, déjà couronné du Prix Roman Fnac 2022 et également candidat au Prix Goncourt 2022.



Jeanne, la narratrice de cette histoire a grandi dans le canton du Valais, dans un petit village montagnard, en compagnie d'un père cruel et violent qui martyrise quotidiennement sa femme et ses deux filles. Malgré ce père abusif et des villageois, dont le médecin de famille, qui ferment volontiers les yeux sur les traces de coups et autres dégâts causés par ce patriarche chauffeur routier porté sur la boisson, Jeanne parviendra à s'extraire de son milieu, à quitter sa région natale et à se construire une nouvelle vie…



Tout bon père de famille est sensé donner des racines, des ailes et une bonne dose d'amour à ses enfants. Dans le cas de Jeanne, l'envol s'avère beaucoup plus périlleux car les racines sont totalement pourries, les ailes entièrement brisées et même l'amour-propre a pris des sérieux coups au fil de cette enfance meurtrie. Des trois femmes soumises à la violence de ce monstre, elle sera d'ailleurs la seule à parvenir à s'extraire de l'enfer…Mais dans quel état ? Certaines plaies ne cicatrices malheureusement jamais, obligeant de grandir marqué à vie par les traumatismes de l'enfance. Peu importe la distance qu'elle met entre sa nouvelle vie et cette enfance détruite, l'horreur ne cesse de la rattraper, de la couvrir de honte, de culpabilité, de tristesse et de colère. Outre le portrait d'une femme totalement cabossée, Sarah Jollien-Fardel dresse également celui d'une région de montagnards taiseux, à une époque où le silence ne se brisait pas encore à coups de hashtags MeToo…



Bénévole dans une association d'aide aux femmes battues, l'autrice nous cueille dès la première phrase, nous oblige à prendre cette narratrice par la main et à partager son calvaire au quotidien, tout en levant très vite le voile sur un passé ravagé par des mots et des scènes d'une violence insoutenable. À l'aide d'un style direct et d'une justesse incroyable pour un premier roman, elle donne la parole à cette femme broyée par la vie, qui partage sa douleur au fil d'une narration qui retentit comme un appel à l'aide, un long cri de détresse dont l'écho résonne encore dans ces montagnes où tout a commencé…



Malgré quelques scènes de tendresse plus lumineuses et à l'inverse de l'excellent « Vers la violence » de Blandine Rinkel qui, abordant les mêmes thèmes, permettait tout de même au lecteur et à l'héroïne de se relever au fil des pages tout en constatant les dégâts de l'enfance, cet ouvrage laisse beaucoup moins de place à l'espoir, mettant le lecteur définitivement KO.
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Sa préférée

Un roman coup de poing. Un texte d’une grande force qui sonne juste. Bien que le thème des violences intrafamiliales et de l’enfance brisée soit un peu éculé et malgré la noirceur du roman où les malheurs s’accumulent, l’intensité de la narration, l’épaisseur des personnages et l’écriture percutante, vive, rattrapent cette surenchère.

Ce récit a été écrit avec une sensibilité à fleur de peau.

« Je n’avais pas trente ans, j’étais en guerre. Depuis toujours. Pour toujours ». Cette colère tenace Jeanne la tient de son enfance détruite par la violence de son père, un tyran alcoolique maltraitant envers sa femme et ses deux filles.

Dans leur village montagneux du Valais, en Suisse, ces dernières se sentent prisonnières de la maisonnée où la peur domine « il a confisqué toutes nos allégresses. Il a massacré toutes nos jouissances ».

Continuellement en alerte, elles épient les réactions de ce monstre qui «a le pouvoir terroriste de moduler l’air et l’ambiance ». Jeanne n’aspire qu’à quitter « ce trou pestilentiel» où personne ne leur vient en aide, pas même le docteur de famille, ce lâche, qui sait mais ferme les yeux. Elle finira par fuir et s’installer à Lausanne où elle se régénère près du lac Leman, symbole de son exil, avec l’espoir de se laver de son passé. Apaisée Jeanne n’en reste pas moins tourmentée d’autant qu’une série de drames viendra entacher sa convalescence et raviver sa culpabilité. C’est un roman émouvant sur la difficulté de la résilience, les actes irrémissibles, sur les séquelles des traumatismes et l’héritage de la violence « Mon passé, que je m’acharne à répudier, me saute à la gorge ».

Ce n’est pas une victime ordinaire car elle a hérité une partie de cette brutalité « comme si l’ombre de mon père se terrait encore en moi ».

Elle cherche une issue mais « tout conflue vers lui ».

Racornie, les abus inscrits dans son corps et son esprit altèrent sa relation aux autres et son image dégradée des hommes la pousse vers des aventures avec des femmes jusqu’à sa rencontre avec Paul qui réveillera un début de pulsion de vie.

Il y a des passages sublimes et poignants sur l’amour, le deuil mais aussi le désespoir.

Un roman puissant et percutant.
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Sa préférée

" Ma préférée". le titre par lui même est assez intriguant, et la quatrième de couverture m'ont incité à découvrir cette histoire.

Un roman hors norme et des personnages hauts en couleur.

J'ai trouvé la lecture assez perturbante, il n'est assez commande de traiter un tel sujet. L'histoire est oppressante, suffocante, d'une noirceur extrême. L'auteure nous entraine dans un univers de maltraitance, d'humiliation quotidienne, et une violence conjugale sans limite. Un homme qui utilise sa femme de pushing ball, il déverse toute sa haine , envers elle., ses deux filles sont continuellement rabaissée.

Trois femmes, qui évolue dans un univers malsain, une femme , une mère qui fait tout son maximum pour protéger ses enfants . Un moment de répit lorsque cet être abject , routier de métier, part. Un répit de courte durée ,il rentre ivre mort, sa meilleure amie est sa bouteille ,d'alcool. Ce dernier a eu un acte de violence envers une de c'est fille, et nous découvrons la mentalité des personnes de l'entourage qui ferment les yeux; ainsi que le médecin ,aucune aide, chacun pour soi, taire la vérité.

La narratrice Jeanne décide de quitter le foyer familiale, partir loin, le plus loin possible, mais aucune distance ne pourra faire oublier cette enfance de malheur; Un espoir traverse son chemin , elle peut reprendre ses lectures, un échappatoire , une sorte de renaissance. Emma sa jeune soeur, décide de partir à la découverte d'un autre monde, mais elle n'aura pas la même chance de Jeanne, elle tombe dans la prostitution , elle préfère se suicider, le passé rattrape Jeanne.

Un petit village où les ragots vont bon train, tout le monde connait la vie de tout le monde, au lieu de fermer les yeux, Auront-ils pu sauver le vie de ses trois femmes?

Nous sommes loin des contes de fée, où tout est beau , une vie merveilleuse loin des malheurs des autres.

L'auteure nous raconte la destruction psychologique du destin de trois femmes.

Je stoppe là pour ne pas spoiler l'histoire.

Je ne sais pas si j'ai ressenti de l'empathie ou de l'apathie pour les personnages j'ai eu un peu du mal à comprendre leurs émotions. Chaques protagonistes de cette histoire ont un rôle crucial , ce qui pimentent le suspens.

L'auteure nous capte dés le début jusqu'au final. Elle ne tergiverse pas nous plante le décor , ce milieu malsain, j'ai eu un sentiment de voyeurisme, de mal-être ,une incapacité de venir en aide , une sentiment de frustration.

L'écriture du roman est percutante, glaciale, terrifiante . La lecture est perturbante, je ne me suis pas sentie à l'aise. L'auteure utilise les justes mots , là où il faut pour nous décrire en profondeur cet enfer.

Un thématique maitrisée à la perfection, nous ressentons cette douleur, cette vie brisée, mais saupoudrée d'un brin d'espoir, voir une lumière au bout de ce chemin.

Un livre court, des chapitres courts, des phrases courtes, ce qui donnent une puissance au récit. Un roman clair, net et précis.

Un livre que nous avons du mal à lâcher, un livre tellement réaliste, que nous avons du mal à dire que c'est une fiction. Un roman qui nous prend aux tripes, on ne peut pas sortir indemne d'une telle lecture.

Comment se sortir de cet enfer?

Peut-on pardonner?

Un livre qui nous laisse dans le questionnement.

Un premier roman et une véritable réussite.
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Sa préférée

Tendu, de la première à la dernière page.

Battues dès les premières lignes. Jeanne, Claire sa mère, Emma sa soeur.

Tout au long du roman je suis resté en première ligne. En apnée. Émotion sur émotion.

Ce roman est un cri, un hurlement. Urgent.

Presque un témoignage, une déposition de manque d'affection sans guérison.

Je lis l'intimité de la cruauté paternelle. Un chapitre, une claque.

Les mêmes séismes après chaque point, comme des répliques de tremblements de terre.

Des tremblements à taire. Ne rien dire. Secousses de lâches.



Jeanne, sa vie, enfouie. « Je découvre ce que mes parents auraient dû me donner : une identité.

La mienne, je l'ai créée, pleine de haine et de pourriture. »



L'auteure m'entraine dans les violences du Valais par une tragédie qui me fait suffoquer.

Je ne suis pas préparé à affronter la brutalité dans ce canton Suisse de toute beauté que j'affectionne pour assidument le fréquenter où règne pour moi une enveloppante quiétude et où il fait si bon respirer et profiter d'un climat généreux et d'un environnement admirable.



« Parce que je ne vis plus là, parce que j'ai renié ma famille et mon passé, je peux, enfin, inventer mes origines et peut-être aimer ces attaches que j'avais laminées avec hargne et colère. »



Le lac Léman récure. Y nager chaque jour l'été est un cadeau du ciel.

Jeanne crawle avec ses sentiments : La duplicité, la loyauté, la culpabilité, l'humilité, la haine.



« Je suis la fille vide qui regarde son père mourir. » Je conçois tellement.



Ne pas pouvoir rendre l'amour que l'on n'a pas reçu.

Ne pas savoir échanger le malheur contre le bonheur.

Avoir trop peur de se réfugier ailleurs que dans sa jeunesse pourrie.



A lire, vite.



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Sa préférée

La narratrice Jeanne vit avec sa famille dans un village niché au plus profond du Valais, en Suisse. Un rien suffisant à déclencher ses incontrôlables fureurs, son père terrorise la maisonnée, roue de coups sa mère et abuse de sa sœur aînée. Battue comme plâtre pour avoir un jour osé lui tenir tête du haut de ses huit ans, la petite fille réalise avec amertume, que pas plus le médecin que leurs voisins et proches, n’ont envie de s’en mêler. Tous savent, mais se taisent. Dès lors, c’est la rage au ventre et toute entière tendue par le désir de s’échapper, que Jeanne grandit, puis parvient enfin à s’émanciper. Mais à quel prix ?





« Tout à coup, il a un fusil dans les mains. La minute d’avant, je le jure, on mangeait des pommes de terre. » Ainsi commence le récit fracassant d’une enfance ravagée, tellement gorgée d’acide qu’elle rongera la narratrice sa vie durant, se moquant bien de la distance et du silence dont cette dernière tentera pourtant d’user comme d’un barrage entre elle et les siens. Les scènes, cruelles et brutales, usent d’un réalisme saisissant pour évoquer la violence absolue d’un homme au-delà de toute rédemption, et ses effets dévastateurs sur ses proches, abandonnés à sa merci, comme dans la cage d’un fauve, par la lâche indifférence des témoins.





Sur les trois femmes coincées dans l’orbite du monstre, pendant que la mère, privée d’échappatoire par sa dépendance économique, et son aînée, vampirisée par la « préférence » incestueuse du père, se laissent réduire en cendres au fond de leur enfer, seule Jeanne trouve la force de rester debout, en préparant son évasion. Elle ne se doute pas encore que cette violence qu’elle combat, elle l’a déjà fait sienne au travers de son dégoût et de sa haine, et qu’elle n’est déjà plus que l’un de ces arbres, certes encore droits mais à demi calcinés, qui continuent à se consumer de l’intérieur à petit feu, longtemps après le passage de l’incendie.





Cinglé par la grêle de ses mots durs et acérés, l’on s’engloutit dans cette histoire - d’une noirceur que rien, ni l’amour d’une mère, ni les attachements amoureux, ni le puissant enracinement à une terre, ne parvient à exorciser -, impressionné par l’évidente vérité de ses personnages. Qu’il s’agisse de leurs mots, de leurs émotions ou de leur comportements, tout sonne juste et s’enroule autour d’une analyse psychologique irréprochable de pertinence et remarquable d’empathie. Et c’est déjà bien ébranlé par les uppercuts encaissés au fil des pages, que l’on s’achemine vers le coup de grâce d’un dénouement, sans doute d’autant plus bouleversant, que simplement, mais clairement, suggéré… Coup de coeur.


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Sa préférée

De ma terrasse où je viens de passer un après-midi bouleversant au soleil à la lecture de Sa préférée, je lève les yeux sur Vercorin et son tour du mont, à la recherche d'une sérénité perdue l'espace d'une lecture.

Vercorin.... Son calme, ses couleurs, sa beauté, ses habitants, son Margueron et son téléphérique, son église et ses mazots.

Vercorin... Ses parapentes colorés qui titillent ma soif de liberté chaque matin et en toute saison.

Vercorin... Havre de paix dans lequel Jeanne, la narratrice, puise quelques forces pour tenter de trouver l'équilibre qui lui a toujours fait défaut.

Vercorin... comme Valais, personnage principal de ce premier roman, son caractère rude, franc, vrai, tortueux et tellement ancré dans sa terre, dans son terroir.



L'histoire principale ne se passe pas dans cette vallée d'Anniviers. Elle habite la vallée d'à côté. Les rencontres y sont pourtant les mêmes. Les familles cabossées hantent les mêmes lieux. Les ragots se murmurent au détour des sorties de messes. Les secrets se terrent. Et le silence règne. Terrible. Terrifiant.

Les appels au secours d'une enfant ne sont pas suffisamment dérangeants pour que les adultes osent sortir de leur petite vie tranquille ou misérable, épanouie ou hypocrite.

Un enfant, ça se tait. Ça ne sait pas. Ça ne doit pas faire trembler les adultes.

Du moins, c'était avant !

Car aujourd'hui le Valais a changé. Ou la société. Ou les deux. Le silence a été rompu. L'heure est à l'entraide, à la dénonciation, à la solidarité ou à l'accusation. Du moins, c'est ce que je veux bien croire.



Le silence pourtant est bien là, au plus profond de mon âme, au moment de refermer ce coup de poing littéraire qui m'a chahutée, secouée, terrassée.

Je n'ai absolument pas réussi à prendre de la distance avec cette histoire dramatique, ses personnages si singuliers et pourtant si universels. J'ai plongé au coeur de l'horreur me projetant des dizaines d'années en arrière. Et si, en tant qu'amie, qu'écolière, que co-équipière je n'avais pas su voir des appels au secours ? Et si j'avais ouvert plus grand mes oreilles aux murmures feutrés des confidences ? Et si j'avais accepté d'être dérangée dans ma petite vie bien tranquille ?

Comme Sarah Jollien-Fardel, je suis Valaisanne, fière de mes racines et terriblement consciente des secrets hantant les fonds de vallée.

"On l'envoyait à l'alpage. Mais on savait exactement ce qu'il se passait là-haut avec le berger. Personne ne disait rien. C'était comme ça." m'avait confié un collègue un jour autour d'un café. Et moi d'oublier de déglutir.



Sa préférée ne laissera personne indifférent.

L'écriture percutante de l'auteure, sa volonté de percer les mystères, de décrire l'innommable, de relier les décennies, de secouer les bonnes consciences nous emmènent loin au pays des émotions, des bouleversements, des remises en question, des doutes et des silences.



Ajoutez à cela son amour pour une terre, pour son Valais natal, et vous aurez, je l'espère, le Prix Goncourt 2022.

C'est tout ce que je souhaite à cette auteure si talentueuse.

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Sa préférée

Une nouvelle expérience pour moi que cette lecture, je devrais dire d'ailleurs écoute. C'est le premier roman que je découvrais en roman audio (ma seule expérience avait été Mythos qui se prêtait très bien à ce format) et à ma grande surprise j'ai aimé.

D'abord le roman n'est pas très long, ce qui veut dire pas trop d'heures d'écoute, et puis je l'ai écouté en faisant mes marches rapides. Un ami commun m'avait donné l'idée d'écouter des livres en courant, bon je ne cours plus (vous verrez quand vous aurez mon âge avancé) mais j'ai retenu l'idée et le rythme du livre s'accordait bien avec celui de la marche. J'ai en plus aimé la voix de la lectrice, bien dosée au niveau des effets et d'une tonalité qui correspondait bien à la gravité du livre.



Car, contrairement à la citation que j'ai postée, qui reprenait ce mot désormais célèbre, primesautier, ce livre est dur. Portrait d'une femme Jeanne, qui n'a jamais pu se construire , son enfance ne lui ayant par permis de bâtir des fondations solides. Elle a grandi dans un petit village du Valais, chichement. Mais le drame n'était pas dans cette pauvreté, mais dans le personnage du père. Violent physiquement, injurieux, humiliant, il régnait en maitre sur sa famille et contraignait sa femme et ses deux filles à vivre dans la peur. Et tout le monde savait, mais personne n'a rien fait, même pas le médecin dans lequel Jeanne avait placé tous ses espoirs.



Jeanne saura s'évader de cette prison, elle fera sa vie à Lausanne, mais n'oubliera jamais. Elle restera celle qui sursaute au moindre bruit, celle qui aura du mal à redresser les épaules, celle dont la respiration ne deviendra plus ample qu'après de longues heures de baignade dans le lac, qu'elle vénère.



Elle ne pardonnera jamais, et cette rancoeur, cette colère empoisonneront son existence de femme, comme la violence avait empoisonné celle de l'enfant.



Un roman comme un cri, qui m'a mis souvent les larmes aux yeux, La détresse de cette femme résistera aux belles rencontres qu'elle fera et continue à résonner dans ma tête longtemps après le dernier mot.



Merci à NetGalley et aux éditions Audiolib pour la découverte de ce livre et de ce mode de lecture.
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Sa préférée

Au cœur des montagnes valaisannes, Jeanne grandit au sein d'une famille désaccordée. Un père violent, alcoolique et tyrannique, dont la moindre contrariété, le moindre travers est sujet aux coups ou aux gifles, dont seront victimes aussi bien sa mère, sa sœur aînée ou bien elle. Si celles-ci n'osent répliquer et courbent l'échine, Jeanne, de par l'audace de son jeune âge, osera faire front. Ce qui lui vaudra une belle correction et la visite du docteur qui, malgré ses dénonciations, fera semblant de ne pas voir, encore moins d'entendre. Alors, Jeanne grandit dans la haine et la colère, impatiente de quitter cette famille et ce canton. Installée à Lausanne, près du lac Léman dans lequel elle se ressource, la jeune femme va tenter de se construire une autre vie cahin-caha, malgré sa rage toujours prégnante et cet héritage familial bien trop lourd...



Dès les premières phrases, l'on est happé. Percuté par cette violence. Par les mots de Jeanne... Dans ce canton du Valais, calme, paisible où tout se sait mais aussi où tout se tait, ces trois femmes vivent dans la terreur, sous le joug d'un mari et d'un père violent. Tandis que Claire, la mère, se réfugie dans les romans, qu'Emma se bouche les oreilles, Jeanne, elle, sera sans arrêt sur le qui-vive. À cause de ce père et de ce médecin en qui elle espérait se fier, elle finira, sans se poser de questions, par haïr et fuir tous les hommes. Si elle seule aura réussi à s'enfuir, elle n'en demeurera pas moins meurtrie, blessée, méfiante, sachant pertinemment que cette colère et cette rage enfouies finiront par entacher ce qui aurait pu être beau, malgré ce semblant de sérénité, malgré la douceur des caresses. Sarah Jollien-Fardel, dans ce court roman incisif, d'une intensité rare, évoque, avec force et sans concession, le long et terrible cheminement de Jeanne vers l'émancipation, femme pétrie de colère, certes, mais aussi de culpabilité, condamnée à lutter pour ne pas sombrer. Un roman tragique et amer d'une impossible renaissance...
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Sa préférée

Dans le Valais, un homme martyrise ses femmes . Il bat son épouse, humilie ses filles , les bat aussi un peu et plus si affinité. Un connard, un vrai, de ceux qui ont la bourse et avilisse .

Pas facile alors de se projeter et de se construire dans la vie adulte , une fois l'envol réalisé. Jeanne et Emma vont pourtant s'y essayer.



Je rejoins les quelques critiques lues. Un livre coup de poing, très bien écrit avec un magnifique portrait de femme cabossée, se cherchant après une enfance des plus éprouvante.

On ne tergiverse pas dans ce roman , on raconte l'essentiel tout en cisaillant parfaitement quelques portraits qui marquent indubitablement le lecteur. Jeanne bien entendu, mais Emma que l'on connait en quatre pages , Claire la maman, Paul, Marine, Charlotte , Simon...

Pour le père, il boit, il tape , ça suffit , il est cerné;

C'est noir , parfois gris , presque gris clair, on aimerait blanc même un peu sale mais non.

L'eau , les montagnes , la vallée apaisent pourtant. C'est aussi un livre sur ses racines et l'attirance qu'elles exercent à tout âge. On n'est pas d'un pays mais on est d'une ville chantait Bernard Lavilliers. Il a bien raison.



Un livre aussi magnifique que dérangeant.
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Sa préférée

Emma, la sœur ainée de Jeanne, était la préférée de leur père. Une préférence qui va lui couter très cher.

En Suisse, dans la montagne valaisanne, la cellule familiale est la victime des violences, des colères, de la perversité du père et de l’indifférence de ceux qui savent.

« Ça pouvait être la viande filandreuse du ragoût, un clou de girofle de trop, une feuille de laurier trop dure, une carotte trop cuite, des oignons coupés trop gros. Ça pouvait être la pluie ou la chaleur étouffante de la cabine de son camion. Ça pouvait être rien. Et ça démarrait. Les cris, la peur, la vulgarité des mots, un verre contre un mur, une claque sur le visage de ma sœur ou de ma mère. Je courais sous la table, je fixais le mouvement des pieds dans cette danse familiale trop connue. Parfois, ma mère tombait devant moi, lovée en boule sur le sol. » (p.12)



Jeanne va constituer en elle une pelote de haine et de colère au fil de son enfance. Parvenue à l’âge adulte, elle va constater avec douleur qu’alors qu’elle croit jeter loin d’elle cette pelote, celle-ci revient sans cesse comme aimantée.

Le ressentiment la dévore, les souvenirs douloureux l’asphyxient, prennent tout l’espace, ne laissant aucune possibilité à l’amour, à un espoir de reconstruction, au pardon.

« Je le fuyais, mais, en même temps, tout tourne autour de lui. Puisqu’il avait le pouvoir terroriste de moduler l'air et l'ambiance, j'étais en permanence obsédée par lui. » (p.16)



Jeanne se révèle impuissante à briser le cercle de la violence transmise par son père qui a germé en elle. Elle se sent mauvaise graine, pourrie à l’intérieur.



Un court roman noir uppercut, très dur, qui sonne juste avec des phrases ciselées sans un mot de trop.

C’est poignant, marquant, j’ai lu le roman quasi d’une traite et suis ressortie de ma lecture complètement sonnée. Bravo à Sarah Jollien-Fardel, une autrice prometteuse dont je lirai le prochain livre.



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Sa préférée

«…je vivais sur mes gardes, je n’étais jamais tranquille, j’avais la trouille collée au corps en permanence. Je voyais la faiblesse de ma mère, la stupidité et la cruauté de mon père. Je voyais l’innocence de ma sœur aînée. Je voyais tout. Et je savais que je n’étais pas de la même trempe qu’eux. Ma faiblesse à moi, c’était l’orgueil. Un orgueil qui m’a tenue vaillante et debout. Il m’a perdue aussi. J’étais une enfant. Je comprenais sans savoir. »



Difficile de sortir indemne de la lecture de ce premier roman qui narre la violence d’un père et la culpabilité d’une fille, incapable de s’aimer et d’accepter d’être aimée. Colère, tristesse, dégoût sont le quotidien de Jeanne, après une enfance rythmée par les coups et les mots orduriers. Les phrases se font puissantes pour raconter l’empêchement d’être heureux, la difficulté à se construire

Un récit bouleversant. A ne pas manquer.
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Sa préférée

Comment vivre, se construire, se reconstruire quand on a une enfance baignée dans la violence ? Est-il possible de pardonner ? doit-on le faire ?

C'est de la vie de Jeanne qu'il est question ici. Jeanne, la narratrice qui va devoir se débrouiller seule puisque tout le monde se tait, tout le monde fuit ses responsabilités.

Une fois encore, ce sont les études qui vont permettre une lueur. Les études vont la sauver lui permettre de découvrir autre chose que la violence, la peur, les coups au quotidien. Tourefois, si les études vont être une échappatoire elles ne seront cependant pas suffisantes pour retrouver la paix. " La haine et la colère restaient comme figées. Je suis devenu rance. Je détestais celle que je devenais. Incapable de pardon, incapable d'avancer ou de me défaire des frusques puantes de mon enfance."

La rencontre avec l'amour des femmes va l'aider à se réconcilier avec l'homme.

Très beau livre fort et bien écrit.
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Sa préférée

« Sa préférée » est l’histoire d’une reconstruction, celle de Jeanne, la narratrice, qui a grandi dans une famille dysfonctionnelle où le père avait la main lourde et l’insulte facile. La mère effacée tente d’offrir tout l’amour à ses filles dont une sœur aînée souvent victime des colères du père. Habitant un petit village suisse, tout le monde sait les violences dont le père est l’auteur mais les voisins préfèrent fermer les yeux et se taire.



Par le résumé du livre, le lecteur se rend vite compte qu’il va se trouver face à un récit difficile : celle des violences intra-familiales. Pourtant, son autrice, Sarah Jollien-Fardel, en a tiré une histoire menée par une héroïne forte en apparence mais dont les faiblesses la rattrapent, et ce, même après avoir quitté le domicile familial.



Ce premier roman est bouleversant par la façon dont l’autrice à de conter l’innommable où les gens vont favoriser le silence à l’action et faire comme s’ils ne savaient pas. Même si le roman ne compte que 200 pages, on n’a pas l’impression que des éléments auraient été oubliés et aucune phrase ou passage n’est superflu.



Le livre est narré par l’actrice, Lola Naymark, dont la voix douce apporte une touche solaire à la vie bien sombre de Jeanne. Dès les premiers mots, j’ai été aspirée par le récit et eu l’impression que l’actrice et la narratrice ne faisaient plus qu’une. C’est un peu comme si la lectrice incarnait en lieu et place cette héroïne, Jeanne et qu’elle nous narrait sa propre histoire personnelle. J’ai vraiment été totalement envoûtée par son brin de voix unique.



Au vu des qualités entourant ce livre, il n’est pas étonnant qu’il ait été primé au Prix du Roman Fnac 2022 et du Choix Goncourt de la Suisse 2022.
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Sa préférée

Dans les années 1970, la narratrice, Jeanne, vit avec ses parents et sa soeur aînée Emma en Suisse, dans une région montagneuse et montagnarde, le comté du Valais, à 100 kilomètres de Lausanne. Elle grandit dans un foyer plein de violence où le père, chauffeur routier régulièrement saoul, frappe et humilie sa femme et sa fille aînée quotidiennement. Jeanne, une fois, subit le déchaînement de violence de son père et s'aperçoit que dans son village, rien ni personne ne viendra à leur aide. Elle grandira marquée par cette maltraitance et tentera de fuir son histoire en quittant sa région natale.



Désespérant. C'est le mot qui me vient en refermant ce livre. Mais pas désespérant au sens négatif, loin de là. Plutôt littéral. C'est un livre où l'espoir n'a pas sa place malgré quelques rais de lumière, qui fusent par ci, par là. L'histoire de Jeanne, c'est une histoire universelle. Celle de la violence qui s'abat le plus souvent dans l'indifférence et le silence de ceux qui savent : conjugale, domestique, psychologique.C'est l'histoire des femmes d'une époque et d'un lieu particulier, où la soumission est de mise C'est aussi l'histoire d'une région. le Valais, c'est un comté de montagnards, de taiseux. Rustique pour les mauvaises langues, où le cloisonnement empêche toute rêverie et toute émancipation, toute modernité ; authentique pour ceux qui savent y retrouver leurs racines, une région sauvage et belle.

Le récit que nous fait Sarah Jollien-Fardel est bouleversant, percutant, âpre . Thèmes du poids familial, des racines vers lesquelles on revient toujours, de la honte, de la culpabilité, de la violence, tous ont été maintes fois traités. Mais le talent de l'auteure suisse qui signe ici son premier roman réside dans le fait que dès la première phrase , elle nous prend par la main et ne la lâche plus. A travers un style fluide et direct, sans ambages inutiles ; à travers des mots et des phrases que l'on sent polis à l'infini, on enfile les pages les unes après les autres. Et derrière la dureté de Jeanne ou l'horreur des scènes de violence s'immiscent parfois quelques signes de tendresse et peut-être d'espoir. Jeanne tend vers eux, elle essaie de trouver où elle le peut ce qui la lavera de toute cette souillure. Mais il est des fardeaux parfois trop lourds à porter, des questions qui demeureront éternellement sans réponse et « Sa préférée » n'est pas un conte de fées. Même si l'ogre, ici, existe bel et bien.



Personnages marquants, analyse psychologique très fine, récit d'une géographie sociale, "Sa préférée" offre un moment de lecture difficile à oublier.



Coup de coeur.
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Sa préférée

Jeanne vit dans un petit village, tout se sait mais tout se tait. Son quotidien, c’est la violence de son père, dont elle apprend à déchiffrer les signes annonciateurs et qu’elle évite. Jusqu’au jour où elle ose une réplique méprisante qui lui vaut d’être tabassée, le médecin appelé à son chevet, auquel elle se confie, ferme les yeux et nie l’évidence. Alors, Jeanne comprend qu’elle devra faire face seule, car personne ne viendra à son secours.



Elle arrive, avec la complicité de son professeur à s’inscrire à l’école normale, un répit bienvenu, mais elle a du mal à remonter à la surface ; alors qu’elle surnage avec effort, elle est prise pour une sauvage. Comment les autres étudiants peuvent-ils concevoir qu’elle ne peut s’épancher sur ses années d’enfance parce que tous les souvenirs sont douloureux ; alors elle se referme.



Le temps passe, mais Jeanne a du mal à se reconstruire ; la blessure est restée béante et le suicide de sa sœur va accentuer le malaise.



Jeanne apprend à vivre avec ses blessures, son mal être, mais comment se construire quand les bases ont été sapées ? Quand on doute sur sa culpabilité, aurait-elle pu éviter la violence de son père, le suicide de sa sœur ? Aurait-elle dû rester et aider sa mère, la sauver ?



Sarah JOLLIEN-FARDEL a écrit un roman touchant, nous montrant les problèmes de reconstruction des victimes, qui parfois se sentent responsables de leur sort et culpabilisent.



L’écriture est simple, belle et vivante ; elle nous montre la haine et la violence de la victime qui se noie dans sa rage et n’arrive pas à pardonner.



Bref, un roman émouvant sur la maltraitance infantile et les violences conjugales.



À lire près d’une fontaine ou d’une source d’eau, installé(e) sur un plaid en vous régalant de chouquettes avec un thé Gunpowder.





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Sa préférée

Sa préférée est un livre brutal sur un sujet violent. Il n’est pas un ouvrage de plus sur la maltraitance familiale, mais l’histoire des conséquences ravageuses sur une vie d’adulte.



Le père de Jeanne (la narratrice) est d’une violence difficilement imaginable. Jeanne, Emma, ainsi que leur mère sont battues, frappées, humiliées, parfois sans raison. Emma grandit persuadée qu’elle n’a aucune valeur et se donne au premier venu. Un jour, c’est le drame, elle se suicide. Jeanne, elle, a réussi à s’enfuir et c’est son impossible reconstruction que ce livre raconte, malgré ce que la vie mettra de bien sur sa route.



Le récit ne suit pas un ordre chronologique et demande donc un effort au lecteur.


Lien : https://dequoilire.com/sa-pr..
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Sa préférée

Ce premier roman vous happe

dès ses premiers mots.

Embarquement immédiat pour l'enfer.

C'est un long cri pour survivre,

dire, comprendre, faire avec, dépasser ...

Jeanne est encombrée par son passé

qui l'empêche d'avancer.

Elle ruse, trace droit, mais...ça coince toujours.

Elle veut se laver de son histoire,

la révoquer, la repudier.

Elle part, se sauve mais, reste vissée, là .

Transfuge de classe sociale,

après une psychanalyse, de brillantes études

avec"une belle situation "....

Rien n'y fait!

"Elle demeure dans une destructrice intranquillité"



Je vous laisse découvrir le chemin de Jeanne .

L'écriture est âpre et acérée,

cette histoire, un tourbillon sidérant.





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Sa préférée

La saison des prix littéraires débutent avec ce Prix du roman Fnac 2022 qui échoit pour son tout premier roman, intitulé "Sa préférée", à Sarah Jollien-Fardel. Paru aux éditions Sabine-Wespieser, offrir un tel prix à ce roman qui nous pousse dans nos derniers retranchement de lecteurs, c'est sans nul doute un choix très pertinent, voir même courageux. Rarement un roman ne m'aura à ce point là remué jusqu'aux entrailles, atteignant mon coeur, le brisant comme le ferait un coup de dague, cette pointe aigue qui ne vous lâche plus, le souffle comme en apnée, l'air vicié, la violence crue, mis à nue d'une façon si pertinente, avec un sens du drame, qui confine dans chacune des parties de ce récit. Une écriture douloureuse, au cordeau, qui ne laisse rien passer, ne dissimule à aucun moment la souffrance de cette famille. L'histoire se déroule dans un petit village des montagnes valaisannes en Suisse. Jeanne est la narratrice et c'est selon son point de vue que nous nous immergeons dans une réalité sordide vécue par cette enfant, sa petite soeur et sa maman. le père de famille est connu de tous dans le village. Son alcoolisme et sa brutalité, sa monstruosité incestueuse envers la soeur de Jeanne qui finira par se suicider, elle que l'on jugeait comme une fille facile, alors qu'elle était simplement en quête de tendresse, d'un peu d'affection. Elle est détruite, consumée par les braises de l'enfance salies par ce père d'une vulgarité sans nom, qui frappe et humilie, maintient cette famille dans une terreur insupportable. Ce n'est pas un père, c'est un ogre dévorant le peu d'énergie vital restant chez la mère de ses enfants, ses filles. Jeanne a tenté de re rebeller, elle avait huit ans, il l'a battu et cogné jusqu'à la laisser presque morte. le médecin du village visite la petite et ferme les yeux sur la situation vécue par cette famille aux mains d'un monstres, d'un tyran incapable du moindre geste d'affection. La trahison de ce médecin de famille, Jeanne ne l'oubliera jamais. Sa soeur et sa maman ne songe pas à fuir, elles n'en ont plus la force. Jeanne veut fuir cette famille mortifère, parti au loin et tenter de se reconstruire. Elle part durant cinq années dans une école formant les institutrices. Elle essaie peu à peu de tenter de se défaire de son passé, de ses traumatismes. Peut-elle aimer ? La haine pour ce père monstrueux, la rage qui l'habite, peut-elle oublier, pardonner ? C'est une histoire extrêmement dure où les descriptions de cette violence paternelle nous marquent profondément. 200 pages et une acuité saisissante, une écriture au plus près de cette réalité sordide, de cette violence, de cette emprise, des humiliations, des insultes, des coups qui pleuvent sans aucune raison, la peur de ce bourreau. Un sujet profondément sombre mais le talent de l'autrice mérite avec ce roman, "Sa Préférée" ,amplement son prix Fnac Littérature 2022. Ils sont rares les romans de cette qualité, qui ne trichent pas, qui nous dépeignent l'indicible à travers le regard d'une enfant, d'une adolescente, puis d'une jeune femme. Lisez Sarah Jollien-Fardel car c'est un des grands romans de cette rentrée littéraire 2022.
Lien : https://thedude524.com/2022/..
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Sa préférée

Jeanne n’est pas la préférée de son père…il vaut mieux ! Car sa sœur ainée, la préférée, est violée par celui-ci régulièrement.

Jeanne assiste à l’immonde et tragique comportement de son père envers sa mère, quotidiennement. Des cheveux tirés jusqu’à ce qu’ils soient arrachés, des coups de poing dans la poitrine, dans le ventre, des gifles, des insultes, et j’en passe.

Une seule fois son père a battu Jeanne, le docteur est arrivé, et pourtant, il n’a « rien » vu…

La peur est là, chez chacun des trois membres féminins de cette famille valaisanne, et la mère aimante essaie tant bien que mal de « protéger » ses petites, de leur procurer un peu de douceur.

C’est la chronique d’une mort annoncée…



Vous pensez bien que je suis ressortie de ce roman bouleversant scandalisée, à terre !

Car si la lecture de l’enfance et de l’adolescence est terrible, celle de l’époque « jeune adulte » ne l’est pas moins : quand on est taraudée par d’horribles souvenirs et que l’on sait que la maltraitance est toujours d’actualité sur la maman, on ne peut que se replier en soi-même et malgré tout, essayer de vivre. Ces efforts sont déchirants, véritablement touchants, surtout au regard de la fin de l’histoire.



Et puis l’écriture pleine de finesse retranscrit à merveille l’état psychologique de Jeanne.

Etre amoureuse malgré tout, ne pas reproduire la violence sur les autres, ne pas livrer au monde la vérité crue, s’efforcer de tracer une ligne de vie droite, voici le message que Jeanne nous transmet, plein de glace et de feu.

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Sa préférée

Ma sœur, ma mère et... mon père



Sarah Jollien-Fardel est l'une des grandes découvertes de cette rentrée. Autour d'un père d'une violence extrême vis-à-vis de sa femme et de ses deux filles, elle construit un roman qui ne laissera personne indifférent.



Dans ce village de montagne des Alpes valaisannes, la vie d'Emma, de sa sœur Jeanne et de leur mère est un enfer. Un enfer qui a un nom, Louis. Quand ce chauffeur routier n'est pas sur les routes, il fait régner la terreur sur sa famille. Une violence qui surgit pour une broutille. Alors les coups pleuvent. Emma, la narratrice, a appris à anticiper et son intuition lui permet d'être davantage épargnée. Jusqu'à ce jour où elle tient tête à son père. Ses blessures nécessiteront de faire venir le médecin. Mais au lieu de signaler l'agression, ce dernier se contentera de soigner la fillette. Une lâcheté dont il n'est pas seul coupable. Dans le village, on sait, mais on se tait.

Emma va réussir à fuir en s'inscrivant au cours de formation des institutrices qui vont l'éloigner durant cinq années. Sa sœur aînée va trouver un emploi de serveuse chez un cafetier qui l'héberge également. En découvrant sa petite chambre, Emma va aussi apprendre que sa sœur a aussi régulièrement été victime de violences sexuelles, elle qui était la préférée de son père.

Elle aura essayé de s'en sortir, de trouver un gentil mari. Mais sa réputation de trainée aura raison de son projet. La vie lui deviendra insupportable et la seule issue qu'elle trouvera sera le suicide. Un drame suivi d'un scandale lors des obsèques. «Ma mémoire, pourtant intransigeante et impeccable, a effacé le monologue que j'ai vomi au visage de mon père. Une tante que je connais à peine, sœur de ma mère, m'entraîne alors que je hurle, ça je me le rappelle: "Tu l’as violée, tu l'as tuée."

Mes adieux à ma sœur se sont terminés au sommet de ces marches en pierre.»

Alors, il faut apprendre à vivre avec cette absence. C'est à Lausanne qu'elle va découvrir qu'une autre vie est possible. En nageant dans la Léman, elle découvre son corps. Dans les bras de Charlotte, la grande bourgeoise affranchie, elle va vivre une première expérience sexuelle. Mais c’est avec Marine, l’assistante sociale au grand cœur, qu’elle découvre la mécanique du cœur. Mais alors qu'elle semble avoir trouvé un nouvel équilibre, un nouveau choc, une nouvelle mort va la fragiliser à nouveau.

Sarah Jollien-Fardel réussit avec une écriture classique et limpide, aux mots soigneusement choisis, à dire la souffrance et la violence qui marquent à vie. Elle montre aussi combien il est difficile de se débarrasser d'un tel traumatisme. Emma va essayer, cherche l'appui d'un psy, de ses ami(e)s. Le retour en Valais lui permettra-t-elle de trouver l'apaisement? C'est tout l'enjeu de ce roman impitoyable entièrement construit sur une «destructrice intranquillité».

S’il n’y a rien d’autobiographique dans cette violence familiale, la colère qui porte tout le livre est bien réelle. Sarah Jollien-Fardel, qui a grandi dans un village valaisan, où les hommes et la religion dictaient leur loi. Elle aussi a ressenti le besoin de quitter cette contrée aux traditions pesantes pour vivre à Lausanne. Et comme Emma, elle est aujourd’hui de retour sur ses terres natales. Après avoir tenu plusieurs blogs et tenté sa chance avec son roman auprès de nombreux éditeurs, elle a participé à une rencontre avec Robert Seethaler, qui était accompagné de son éditrice Sabine Wespieser. Deux rencontres qui vont s’avérer déterminantes. Et la belle histoire ne s’arrête pas là, car Sa préférée vient de se voir décerner le Prix du roman FNAC 2022 et reste en lice pour le Goncourt !




Lien : https://collectiondelivres.w..
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