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Citations de Sigrid Undset (162)


Ma soeur, tout autre amour n'est qu'un reflet du ciel dans les flaques d'eau d'un chemin boueux. Tu t'y salirassi tu t'y plonges. Mais souviens-toi toujours que c'est un reflet de la lumière de l'autre séjour; alors tu jouiras de sa beauté, mais crains de la détruire en remuant la vase qui est au fond...
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De l'extérieur, de la nuit et de l'obscurité lui parvenaient le chant puissant du fjord et l'écho des vagues qui s'écrasaient contre la côte. La nouveauté de ce qui l'environnait se mêlait, dans sons esprit, au sentiment étrange de son propre corps déformé et aux impressions inconnues qui s'agitaient en elle. Elle voulait penser à ce qui allait venir, à toutes ces petites choses qu'elle tenait dans ses mains et qui habilleraient un être vivant – mais elle ne pouvait. Elle ne pouvait ni se plaindre ni se réjouir – son cœur était étrangement calme. Elle était tranquille, comme l'est toute femme saine, dans l'attente de cet évènement que personne ne saura décrire d'avance, que personne ne saura jamais raconter après – cet évènement qui ne ressemble en rien aux évènements extraordinaires et complexes de tous les jours, qui est étranger aux sentiments diffus et agités du quotidien – cet évènement qui est simple et naturel comme les propres miracles de Notre-Seigneur.
L'enfant vint et s'en alla aussitôt, avant que la mère eût pu saisir et comprendre le miracle, avant que l'enfant eût été associé à la vie quotidienne et à ces innombrables petits soins et soucis de tous les jours. Elle rentra au foyer, les mains vides.
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Le printemps doux et fort du dehors la fit pleurer de chagrin sur toute la détresse qu'elle sentait autour d'elle.
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Puis Leikny ajouta, quand la bourrasque s'apaisa un peu:
- Était-elle plus belle que moi, cette fille de Norvège ?
- Non, dit Ljot sans la regarder, non; la plupart te diraient plus belle.
- Etait-elle plus riche alors ? demanda encore Leikny
- Oh ! je pense que les biens d'équivalent, répondit Ljot de même.
- Mais dans tes pensées elle reste supérieure à moi. Leikny parlait avec humeur. En quoi m'était-elle donc supérieure ?
- En ce qu'elle posait moins de questions que toi peut-être, fit Ljot en riant cette fois.
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On ne peut se rendre compte de ce que l'on doit à son foyer, et en être reconnaissant, que lorsqu'on en est éloigné, car on sait bien qu'on n'en dépendra plus jamais, une fois qu'on a su se rendre indépendant. On ne peut aimer vraiment son foyer auparavant. Comment aimer ce dont on dépend ?
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Au coucher du soleil Christine était assise sur la hauteur au nord des bâtiments de la ferme.
Jamais auparavant elle n'avait vu le ciel aussi rouge et aussi doré. Au-dessus de la pente, juste en face d'elle, il y avait un grand nuage ; il avait la forme d'une aile d'oiseau, avec des incandescences de fer dans la forge, des clartés pareilles à l'ambre jaune. De petits flocons dorés qui ressemblaient à des plumes s'en détachaient et voguaient dans le ciel. Tout à fait en bas, sur le lac, au fond de la vallée, se reflétaient les images du ciel, du nuage et du versant de la montagne. On eût dit que des profondeurs montait la flamme de l'incendie qui embrasait tout ce que Christine apercevait.
L'herbe dans les prairies avait atteint toute sa croissance, et les tiges soyeuses brillaient d'un rouge sombre sous la lumière pourpre qui tombait du ciel. Les épis de seigle avaient poussé et retenaient l'éclat du jour sur leurs jeunes barbes satinées. Les toits des bâtiments de la ferme étaient couverts d'oseille et de renoncules jaunes qui émaillaient le gazon et le soleil épandait sur elles de larges rayons ; les bardeaux noirâtres du toit de l'église avaient un éclat sombre et les pierres claires de la construction une couleur dorée.
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Elle pensa au beau visage de son père, aux grands yeux de sa mère dans son visage ridé, à cette démarche si étonnamment jeune, souple et légère, qu'elle avait gardée si longtemps, encore que sa face eût prématurément vieilli. Ils étaient là sous la pierre et se désagrégeaient comme une maison s'effondre quand les gens sont partis...
Elle pensait à ses chers morts... à leur mine, leur voix, leur sourire, leurs habitudes, leurs gestes... Maintenant qu'ils étaient partis pour l'autre monde, comme il était douloureux de penser à leur apparence ! Comme de penser à sa maison, quand on savait que maintenant elle était vide, que les troncs d'arbres des murs pourrissaient et s'effondraient dans la tourbe.
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Il n'avait pas pu ; c'était à cela qu'il se raccrochait énergiquement. Au nom du Diable ! Il avait été marié tout jeune, il n'avait pas choisi lui-même, elle était plus âgée que lui ; - il ne l'avait pas désirée ; ce n'était pas d'elle qu'il avait voulu l'apprendre, l'amour. Cela lui donnait chaud de se sentir encore honteux quand il y pensait, qu'elle eût voulu avoir de lui un amour que lui-même n'avait pas voulu obtenir d'elle ; qu'elle lui eût offert tout ce qu'il ne lui avait jamais demandé.
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Christine revint chez elle par le plus beau printemps. Le fleuve se frayait son chemin à travers la ferme et les terres ; à travers les tendres feuilles des taillis d'aunes l'eau courante brillait et scintillait blanche de lueurs argentées. Il semblait que les éclairs de lumière eussent voix et son dans le concert bruissant du fleuve. Lorsque tomba le crépuscule, l'eau sembla couler avec un grondement plus sourd. Nuit et jour le bruit du fleuve emplissait l'air autour de Joerundgard, si bien qu'il semblait à Christine que les murs de troncs d'arbres eux-mêmes vibraient au ton comme la caisse sonore d'un "langleik 1".
De minces filets d'eau brillaient dans les hauteurs, sur les flancs des montagnes qui chaque jour étaient enveloppées d'une brume bleue. La chaleur faisait naître des vapeurs et frémissait au-dessus des terres ; les pousses du blé couvraient presque complètement la terre des champs ; l'herbe des prairies était haute et reluisait comme de la soie quand un souffle de vent passait dessus. Des bois et des collines venaient de douces odeurs et, dès que le soleil s'était couché, une buée forte, fraîche, aigrelette des sucs et des fruits de la terre se répandait. On eût dit que la terre soupirait longuement, apaisée.

1 Ancien instrument à cordes dont on faisait revivre l'usage en Norvège.
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Elle avait été très malheureuse tout au long de l'automne. Elle avait beau se dire à elle-même que Beintein n'avait réussi à rien lui faire ; elle se sentait malgré tout comme souillée.
Rien ne pouvait plus être comme cela avait été auparavant depuis qu'un homme avait osé vouloir sur elle quelque chose de tel. Elle demeurait éveillée pendant les nuits et la honte la brûlait ; elle ne pouvait s'empêcher d'y penser. Elle se rappelait le corps de Bentein contre le sien pendant leur lutte, son haleine brûlante qui puait la bière. Elle ne pouvait fuir l'idée de ce qui aurait pu arriver, et elle se rappelait, dans un frisson de toute sa chair, ce qu'il avait dit, s'il n'y avait pas moyen de tenir la chose secrète, et qu'Arne en serait accusé....
Elle en venait ensuite à penser qu'elle aurait dû tuer Bentein ou le rendre aveugle. C'était le seul soulagement dont elle trouvât à se repaître dans ses rêves de vengeance contre le sombre et ignoble individu qui se trouvait toujours en pensée sur son chemin. Mais ce lui était jamais d'un long secours ; elle passait ses nuits à pleurer à chaudes larmes à côté d'Ulvhild, pour tout ce qui avait été tenté de violence contre elle. Bentein avait tout au moins réussi à briser sa virginité dans son âme.
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La première chose que Laurent avait à faire était de veiller au bon état du signal de Heimbaugen. En ces dures époques troublées, depuis cent ans et plus, les paysans, en certains endroits dominant les vallées, avaient construit sur les montagnes des signaux qui ressemblaient à ceux des rades pour les navires le long des côtes, mais ces signaux de vallées n'étaient point placés sous l'administration de la défense nationale. Les confréries de paysans les tenaient en état, et les membres observaient un roulement pour les entretenir.
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Ils restèrent longtemps assis en haut du coteau, à regarder le paysage. Le forêt printanière ondulait au gré des collines; les sapins aspiraient le soleil, et les aiguilles si souvent imprégnées par la neige de l'hiver, avaient un reflet jaune et fané. L'air était si pur que chaque arbre feuillu dans les vallons éloignés se dessinait en silhouette d'un gris argenté, et si calme que chaque fois que le vent agitait les sapins, on l'entendait passer avec un bourdonnement de cloches d'un vallon à l'autre. Au loin, sur le flanc des coteaux, le drapeau rouge et bleu se déploya sur une butte, et, à la surface de l'eau azurée qui s'étendait en bas, coururent de longs frissons moirés couleur d'acier. Et, à mesure que les nuages légers à reflets humides se déplaçaient sur le clair ciel d'été, de grandes ombres couvraient tantôt un coteau, tantôt un autre. (p134)
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La nuit était claire et froide; le ciel était vert et jaune comme le vin du Rhin, et les montagnes couvertes de forêts se profilaient en masses noires, dentelées par les cimes des sapins; par-ci par-là, un arbre solitaire dessinait les lacis de ses rameaux sur le ciel clair. Torkild marchait au fond du ravin, remontant le long du ruisseau vers sa source, et, quand il se frayait un passage à travers les buissons, le feuillage, nouvellement éclos, lui frappait la figure, le mouillant et le grisant d'une fort odeur de sève. L'air était froid et saturé d'une humidité où flottaient la faible fumée des brûlis, la senteur de la terre et du renouveau ; cela prénétrait ses vêtements et venait couler sur sa peau, comme un bain purificateur et salutaire. (p68)
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Mais les femmes de mauvaise vie venaient au devant de lui dans une attitude hardie et provocante ; elle l'avait vu rempli de curiosité comme un chat : on l'eut dit enveloppé d'une légère insouciance libertine, comme d'un nuage de poussière.
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Sa figure de pleine lune ressemblait tout à fait au cul d'un petit enfant, la main vous démangeait de la claquer !
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Sa lutte, allait-elle la voir se terminer maintenant, ainsi ? Avait-elle engendré une nichée de jeunes rapaces, qui s’impatientaient dans le nid qu’elle leur avait préparé, n’attendant que le moment où leurs ailes seraient capables de les porter au-delà des montagnes bleues de l’horizon ? Et leur père – leur père battait des mains et riait « Volez, volez mes jeunes éperviers ! »
En s’envolant, ils arracheraient et emporteraient des lambeaux saignant du cœur de leur mère et ils n’en sauraient rien. Elle resterait seule, et toutes les fibres qui jadis l’avaient attachée à ce vieux foyer qui était le sien, elle les avaient arrachés elle-même dans le passé...
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On entendait mugir le taureau étrange quelque part, au loin. Partout ailleurs, le silence était si grand qu'il faisait mal. Seuls l'interrompaient le bruit de la rivière au bas du clos, le gazouillement du ruisseau sur le versant et un frémissement sourd qui courait dans le bois, une sorte d'inquiétude parmi les sapins, qui grandissait, s'apaisait, disparaissait pour reparaître.
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Au fond de la vallée, les ombres plus épaisses faisaient déjà régner le crépuscule sur les terres brunes et nues ; cependant l'air de cette soirée de printemps paraissait saturé de lumière. Les premières étoiles scintillaient, humides et blanches, dans le ciel, là où le vert glauque du couchant se fondait peu à peu avec le bleu sombre de la nuit.
Mais au dessus de la ligne noire des montagnes, de l'autre côté de la vallée, trainait encore un liséré de lumière jaune dont le reflet éclairait la paroi de rocher escarpée qui surplombait la route. Et tout en haut, ce même reflet faisait briller les crêtes neigeuses et étinceler les glaciers, d'où jaillissaient des ruisseaux qui bruissaient sur le versant. L'air tout entier frémissait de leur chant. En bas, le grondement puissant du fleuve leur servait d'accompagnement. Puis il y avait le gazouillis des oiseaux s'élevant de tous les bosquets, de tous les taillis, de tous les coins du bois.
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jamais jusque-là il n'avait pensé au physique de sa mère. Il y avait des jours et des années qu'il avait commencé à comparer son père aux autres hommes - son père était le plus beau, celui qui avait le plus l'allure d'un chef. Sa mère était la mère qui mettait au monde de nouveaux enfants ; ceux-ci grandissaient en passant des mains des femmes à la vie, à la société, aux luttes, à l'amitié du groupe fraternel ; sa mère avait les mains ouvertes et toujours prêtes à donner ; sa mère connaissait tous les remèdes ; sa mère était à la ferme comme le feu sur le foyer, elle portait la vie du foyer comme les terres de Husaby portaient les récoltes annuelles ; la vie et la chaleur avait son odeur. L'enfant n'avait jamais songé à la comparer à d'autres femmes…
Brusquement, ce soir, cela lui sautait aux yeux : sa mère était une fière et belle femme.
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Elle croyait se voir elle-même, à une très longue distance, toute petite dans l'éloignement du temps et de l'espace, inondée de la clarté du soleil qui se glissait par le trou à fumée dans leur vieille maison à foyer, la maison d'hiver de son enfance. Ses parents se tenaient un peu en retrait, dans l'ombre ; ils prenaient les dimensions fantastiques qu'ils avaient à ses yeux quand elle était petite, et ils lui souriaient comme elle savait à présent que l'on sourit lorsque arrive un petit enfant qui chasse vos lourds et pénibles pensers.
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