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Critiques de Stéphanie Hochet (217)
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Éloge du chat

-"Eloge du chat ?" Vous ... vous avez , heu, un minet très...

-Ah ! non ! c'est un peu court, jeune homme !

On pouvait dire… Oh ! Miaou! … bien des choses en somme…

En variant le ton, – par exemple, te-nez :



Agressif : "Le chat a compris, comme le dit Montaigne, que :

"Chasser sans tuer c'est aimer sans jouir".



Amical : "Quand tu le laisses entrer, il veut soudain sortir ;

Il est toujours du mauvais côté de la porte,

Et dès qu'il est à la maison, l'envie lui prend de se balader. " Cats.



Curieux : " le comble de la liberté est d'être chez soi partout. C'est ce qu'incarne le félin. Guy de Maupassant dans "Sur les chats"



Truculent : "En prenant du poids, le chat change de nature métaphysique : il passe du statut de danseur à celui d'un bouddha imposant et jaloux de son respect."



Tendre : "Lorsque mes doigts caressent à loisir

Ta tête et ton dos élastique

Et que ma main s'enivre de plaisir

de palper ton corps électrique,

Je vois ma femme en esprit. . ‘'Le chat'' dans Les Fleurs du Mal



Pédant : " Quelque chose chez le chat fait de lui un être naturellement dominant. "



Cavalier : "Le gros chat n'est pas n'importe quel gros. Si le gros chien ou l'homme gras nous paraissent sympathiques et nous attendrissent, le chat enveloppé inspire la crainte révérencieuse. "



Emphatique : "Le chat n'a pas peur des paradoxes. Il est un paradoxe, il n'y qu'à regarder son corps."



Lyrique : "Et si cet animal était avant tout un point d'interrogation se promenant sur des coussinets?"



Naïf : "La paresse a un avantage, elle demande peu d'efforts. Garfield"



Respectueux : "Les pattes du chat font oublier son existence ; on n'a jamais entendu dire qu'elles aient fait du bruit par maladresse, où qu'elles aillent. Les chats se déplacent aussi silencieusement que s'ils foulaient l'air ou qu'ils marchaient sur les nuages. Leur pas est doux comme le bruit d'un gong en pierre qu'on frappe dans l'eau doux comme le son d'une harpe chinoise au fond de quelque caverne ! Sosekie



Nez-anmoins, parodiant Pow Wow en un sanglot :

"Moi vouloir être chat

Me frotter contre tes bas

Je me ferai angora

Pour me blottir dans tes bras"



– Voilà ce qu'à peu près, mon cher Cat-simir, vous m'auriez dit

Si vous aviez un peu de lettres et d'esprit, comme un vrai ...

Rat de bibliothèque?
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Pacifique

Loin des clichés, au plus près de l'intime, Stéphanie Hochet s'empare du personnage d'un kamikaze japonais durant la Deuxième guerre mondiale pour transformer ce destin qui semblait tout tracé en un autre parcours de vie, plus surprenant.



Avril 1945, la décisive bataille d'Okinawa fait rage. Isao Kaneda a 21 ans et s'apprête à mourir à bord de son avion qui dispose juste d'assez d'essence pour viser un navire américain. Ce n'est pas un fanatique nationaliste, ce n'est pas un exalté. Juste un jeune homme sensible plein de doutes dont on découvre l'enfance et l'éducation. Issu d'une famille de samouraïs, il a été élevé et conditionné par une grand-mère rigide accrochée aux valeurs japonaises de sacrifice au service de l'empereur. Puis embrigadé dans une école de pilote de chasse.



On ressent toute la pression de la société et du groupe sur les épaules d'Isao. La force aussi de l'éducation lorsque celle-ci s'ouvre à une autre culture, par le biais d'un enseignant qui lui fait découvrir Shakespeare et Marc-Aurèle, et sans doute les clefs d'une réflexion plus personnelle et introspective. L'auteure réussit à nous plonger dans sa tête, dans ses dilemmes face à la mythologie du samouraï qui va jusqu'au bout, sur le sens du sacrifice qu'on exige de lui, alors que le Japon a déjà perdu. Il veut bien mourir pour l'empereur mais à condition que cela soit utile, que des vies civiles soient sauvés, que le Japon gagne la guerre.



Se glisser ainsi dans la peau d'un personnage d'une autre culture et d'une autre époque pourrait se transformer en exercice un peu formel et empesé, mais ici, ce n'est jamais le cas. Stéphanie Hochet construit un court récit totalement épuré, porté par une écriture sobre et travaillée, ce qui lui confère une grande lisibilité et limpidité. Jusqu'à sa dernière partie, surprenante ; elle quitte une approche réaliste pour atteindre une dimension quasi philosophique faisant réfléchir sur la quête de sens de toute une vie.



Très réussi.





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Pacifique

Comme elle est terrifiante et belle à la fois, cette soif de pureté et d'absolue !

Nous sommes en 1944 et dans cette guerre totale qui les oppose, le Japon est en train de perdre pied face aux Etats Unis. Rien ne peut arrêter ce géant de fer qui s'approche inexorablement des terres inviolées du pays du soleil levant.

Isao est un jeune homme qui ne connaît rien de la vie, ou si peu. Cette vie justement, et cette guerre qui fait rage n'est pour lui qu'un décor de théâtre. Il se rêve en samouraï des temps modernes. Il a été éduqué pour cela, pour accepter le sacrifice suprême quand l'Empereur, représentant humain du Ciel sur la terre, l'exigera de lui.

Il va nouer avec fierté le « hachimaki » aux couleurs de son pays autour de son casque d'aviateur et lancera son engin sur le premier cuirassé américain venu. Un sacrifice inutile, il le sait bien ! Comme si les escadrons de vents divins (kamikaze) allaient pouvoir stopper l'avancée irrésistible du géant de fer !

Samouraï des temps modernes, il sera tout prêt de l'être ! En compagnie de l'esprit des grands guerriers des temps anciens, Isao s'apprête à participer à « la dernière bataille de l'humanité avant la fin des temps ».

Mais Isao avait-il le choix ? lui a-t-on laissé le choix ?

C'est tout le parcours de ce jeune homme appelé à disparaître au paroxysme de sa jeunesse qui est décrit avec beaucoup de pudeur et de poésie. Ce jeune homme finira d'ailleurs par trouver la paix et la sérénité dans des circonstances imprévues.

Un très beau livre qui nous parle de cette civilisation fondée sur le devoir et l'honneur ; une civilisation en train d'agoniser sous un déluge de bombes.























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Éloge du lapin

"Trèfle de plaisanterie, comme dirait un lapin dans un carré de luzerne." Fernand Raynaud.

Le lapin est un hop-hoptimiste.



Entre Pierre Lapin et Pan-Pan de Bambi, "impossible d'écrire un livre sans être interrompu...



-Quoi de neuf, docteur? Dixit Bugs Bunny.) en train de grignoter une carotte ou "votre bas de porte", comme le souligne l'auteure.



"Des yeux profonds et vifs, une bouille farceuse, un corps arrondi... Et un pompon propre à émouvoir les âmes sensibles."

Le lapin farfalle dans les champs mais ne comptez pas sur lui, pour un rendez-vous car il est souvent en retard . Il est le premier à vous poser un lapin!

Celui d'Alice aux pays des merveilles le reconnaît d'ailleurs:

"Je suis en retard, en retard."



L'auteure parle aussi du livre "La partie de chasse" car

"Tant que les lapins n'auront pas d'historiens, leur histoire sera racontée par des chasseurs" Howard Zinn . Mais, on rêve d'un lapin chasseur avec 2 tomates, 3 carottes et des fines herbes...



Chapeau bas, Stéphanie Hochet (qui fronce du nez, en refusant d'être un Bunny pour Playboy!) pour cet éloge du lapin.

Car "Il faut un lapin et un.e magicien.ne pour sortir un lapin du chapeau." Romain le lapin magicien d'Antoon Krings
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Éloge du chat

Un livre plein de sensualité et d’amour ; un livre qui respire la délicatesse et l’élégance ; un livre sombre et cruel, ou bien lumineux comme un matin ensoleillé ; un livre qui fascine, qui tourmente…

Pas facile de faire l’éloge du chat tant sa personnalité est complexe et chargée de contradictions. Tour à tour câline et dédaigneuse, possessive et charitable, fidèle et versatile, familière et inquiétante, cette petite boule de poils de quelques kilos n’en a pas fini de fasciner l’Homme.

Le chat se prélasse dans son abri sans jamais y être totalement ; il vit à ses côtés, souverain, superbe, altier, tout en ayant d’autres vies inconnues et mystérieuses.

Prince des monte-en-l’air, passe-muraille, acrobate des gouttières et des arbres vénérables, le chat défie les lois de l’équilibre. La terre et le ciel sont ses domaines.

Prince de la nuit, compagnon des « ténébreuses magiciennes », le chat est excessif en tout : dans sa jouissance, dans son sommeil, dans sa férocité, dans son mépris comme dans son amour, dans sa liberté et son indépendance.

Dans les rues de la ville, combien d’affiches placardées sur les murs… Une photo du chat, toujours fier et un regard étrangement absent… Quelques mots : « Mistigri a disparu depuis une semaine. Si vous le retrouvez, téléphonez au 06… » Un chat qui a neuf vies, parti vers un ailleurs que lui seul connaît, laissant celui qui croyait être son maître seul et abandonné.



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Pacifique

Elevé dans le respect des valeurs traditionnelles de l'honneur, de l'obéissance et du sacrifice, Kaneda Isao s'est engagé dans l'aviation militaire japonaise. En 1945, il est désigné volontaire pour une opération suicide contre un navire américain. Tandis qu'approche le jour fatidique de sa fin héroïque, le jeune kamikaze se prend à douter de l'issue de la guerre et de l'utilité de sa mission, qui ne va d'ailleurs pas se dérouler comme prévu…





En nous faisant entrer dans le tête d'un kamikaze japonais au seuil de sa dernière mission, le récit nous plonge dans le Japon de 1945, alors que commence à s'insinuer dans les esprits l'inconcevable idée de la défaite nippone. Déterminées à préserver leur honneur, cette valeur si fondamentale au Japon, l'armée, mais aussi la population toute entière, jettent leurs dernières forces dans le combat, quitte à se saborder s'il le faut, hommes, femmes et enfants, dans une vague collective de suicides qui ne laisserait à l'ennemi qu'un pays vide. Dès lors, la mort devient le leitmotiv des trois quarts du roman, dans une vision extraordinairement légère et poétique, où le kamikaze, « vent divin », paré de la beauté fragile des pétales de cerisier, s'envole vers une félicité toute aérienne.





Loin du nationaliste fanatique, le soldat Kaneda s'avère en fait un très jeune homme terrorisé, que la pression sociale et l'autorité militaire privent de tout choix. Le texte décrit avec la plus grande justesse son combat intérieur, alors qu'il se retrouve coincé entre un devoir poétiquement idéalisé et une réalité bassement terrifiante. J'ai été toutefois moins convaincue par l'inflexion du récit vers une renaissance inespérée de son personnage, au travers d'un éveil spirituel qui lui ouvre l'accès à la sérénité bouddhique. Trop rapide pour convaincre tout à fait, la métamorphose de Kaneda m'a parue un peu trop artificiellement positive, dans une seconde et brève partie dont la fin très abrupte m'a laissée sur ma faim.





Malgré mes interrogations sur sa conclusion, ce joli roman épuré, à l'élégance poétique et au style fluide et soigné, ouvre une perspective intéressante sur la culture japonaise et son rapport à la mort. Une mort qui domine toute l'histoire sans jamais la plomber, dans une prouesse narrative à l'esthétique certaine.


Lien : https://leslecturesdecanneti..
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Éloge voluptueux du chat

« Sybarite de la sieste, Lucullus de la gamelle, toujours prêt à la caresse, le chat est le champion de la délectation. » (P228)



Voici ce que l’on peut lire à l’article Volupté. N’est-ce pas là une superbe définition de nos compagnons félins ? Après le magnifique poème de Baudelaire, le non moins intéressant Dictionnaire amoureux des chats de Frédéric Vitoux, Stéphanie Hochet nous a concocté un sublime hommage qui se veut construit comme un dictionnaire mais qu’on a du mal à lâcher avant la fin. Les articles ont tous un rapport avec l’animal, que ce soit par une expression, un trait de caractère ou une personnalité. Mais qu’est-ce qui le différencie des autres ouvrages ? La verve de l’auteur, son humour, son style et, surtout, ses avis.



J’ai appris un certain nombre de choses dans ce livre et je ne résiste pas à vous en livrer une au passage : vous connaissez ma passion pour la période médiévale. En voyant dans le sommaire que l’on parlait de l’Amour Courtois, vous pouvez imaginer ma joie. Quel rapport avec le chat ?, me demanderez-vous. Le bestiaire de Claude Lachet, intitulé, L’Amour courtois, une anthologie, mentionne toutes les représentations animales. Stéphanie Hochet a découvert qu’il en manquait une… vous avez bien deviné laquelle. Et j’aime tout particulièrement son explication : « Le chat est cette partie de nous qui refuse le joug de l’obligeance » (P21).



J’ai vraiment apprécié cet ouvrage, lu avec mon bébé chat sur mes genoux ou dans mes bras, ce qui a apporté à ma lecture une atmosphère encore plus féline. Je le recommande à tous les amoureux de celui qui nous mène depuis des lustres par le bout de la truffe.



Un grand merci à Lili Galipette pour m’avoir fait connaître cette virtuose de la plume qu’est Stéphanie Hochet et un grand merci également à cette dernière pour m’avoir fait parvenir son ouvrage dédicacé.
Lien : https://promenadesculturelle..
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Pacifique

"Îles de ce Japon sanctifié! 

Que votre esprit Yamato

Soit admiré par les étrangers,

Alors - embaumant l’air illuminé par le soleil du matin,

Que la fleur de cerisier s’envole, sauvage et belle!” 

(Motoori Norinaga)



***



Avril 1945, guerre du Pacifique. Alors que sa défaite paraît inéluctable, le Japon multiplie les “attaques spéciales” à l’encontre de la flotte alliée. 



Entendons par là opérations-suicides : durant ce conflit, quelques milliers de soldats seront appelés à devenir des chrysanthèmes flottants (ou Kikushui).



"C'est le nom poétique donné au sacrifice d'un avion et de son pilote sur un navire ennemi."



Qui sont ces hommes prêts à mourir pour servir leur Empereur? Étaient-ils réellement volontaires ou plutôt contraints de l'être? 

 

Dans ce court roman aussi envoûtant que magnétique, Stéphanie Hochet prête sa voix à l'un d'entre eux. 



*



Âgé de vingt et un ans, Kanedo Isao, pilote de l'armée du Grand Japon, vient de recevoir son ordre de mission. Dans deux jours, lui et son escadrille iront s'écraser sur un croiseur de bataille américain.



"Fleur de cerisier bordée de noire, ma fin glorieuse sera l'accomplissement de ma vie."



Élevé dans la pure tradition et plus précisément le respect des valeurs fondamentales véhiculées par le Bushido, il entend se montrer digne du courage dont ont fait preuve ses ancêtres guerriers.



"(...) rien n'équivaut la beauté et la rigueur de ce code qui exige des combattants liés à leur maître loyauté et honneur jusqu'à la mort. "



Tandis qu'approche l'heure de son dernier vol, le jeune kamikaze est assailli de terribles doutes. A l'aune des récents échecs rencontrés par ses frères d'armes et de la faible perspective de victoire, son geste a-t-il encore un sens? Un avenir différent n'est-il pas envisageable ?



Porté par la force de son idéal, il s'élancera toutefois vers son destin, lequel pourrait bien prendre une tournure des plus inattendues…



*



Pacifique revêt à mon sens un double intérêt; à savoir l'exploration d'un pan de la culture nippone mais aussi la revisite d'un chapitre méconnu de l'Histoire écrit tragiquement durant la seconde guerre mondiale. 



Placés au plus proche de l'intimité du personnage, nous sommes invités à découvrir son parcours singulier s'étirant de l'enfance jusqu'au jour fatidique. 



A contre-pied de l'image du fanatique, il incarne une réalité infiniment plus complexe et contrastée nous interrogeant sur la notion de libre-choix et la valeur de l'existence.



L'auteure dépeint avec grande finesse la lutte intérieure auquel se livre Kanedo et met en lumière certains ressorts de la propagande nationaliste. Nous y retrouvons notamment la glorification et l'esthétisation de la mort que le sacrifice rend héroïque mais également l'embrigadement des individus forgés précocement au patriotisme ainsi que les maltraitances subies lors de leur formation militaire. 



Si la richesse et la beauté de sa plume nimbée de poésie rendent la lecture délicieusement immersive, j'avoue émettre néanmoins quelques réserves quant à la fin du récit souffrant selon moi d'un manque de crédibilité. 



Il n'en demeure pas moins que Pacifique est une très jolie découverte dont la thématique ne cessera jamais de me fasciner. 



***



"Nous sommes appelés à devenir des fleurs de cerisier. Le "sakura", fleur symbole du Japon. Elle s'évanouit au printemps et le souffle du vent suffit à l'emporter. Vivre telle une efflorescence printanière serait donc croître et disparaître au paroxysme de la jeunesse. Laissant dans l'air le souvenir de sa beauté éphémère.

Nous deviendrons des végétaux délicats, des corolles époustouflantes sous lesquelles les futurs mariés joignent leurs mains. (...)

Nous deviendrons l'image même de la fragilité qui vit le temps d'un soupir et meurt avec légèreté.

Nous changerons d'état, abandonnant la lourdeur de l'enveloppe humaine pour abriter en nous la sévè végétale, pour nous remplir de leur couleur délicate et voler, voler jusqu'à la désintégration."



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Pacifique

Isao Kaneda est un kamikaze (un Sakura pour les japonais). Il est destiné à mourir pour son pays. Passionné d'aviation depuis son plus jeune âge, il a rejoint Yokaren, une école préparatoire, qui l'a formé au pilotage et au sacrifice de soi. Elevé par sa grand-mère (car premier petit-fils), éduqué par un précepteur, il s'est construit au bushido, le code d'honneur des samouraïs . En ce 29 avril 1945, son devoir est d'aller écraser son avion lesté de bombes sur une cible américaine. Même s'il a peur ; même s'il s'interroge sur la pertinence de cette décision au vu de la défaite qui s'annonce...il n'a pas le choix. C'est une question d'honneur.

Un court récit qui relate avec beaucoup de justesse le psychisme d'un jeune homme aux portes de la mort. Isao est le héros du livre mais c'est le Japon, sa culture, ses traditions, sa civilisation qui est au coeur de l'histoire . le texte est épuré, l'écriture poétique et concise. Un très beau roman.
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L'animal et son biographe

Avec L'animal et son biographe je découvre l'univers de Stéphanie Hochet. Un univers déroutant, riche en symboliques qui se reflète dans sa façon singulière de jouer avec un imaginaire fantasmatique mêlant mythologie animale et recoins obscurs de l'esprit humain.

Ce n'est pas du chamanisme ni du vaudou, l'auteure recourt à l'écriture suggestive pour nous imposer un récit autrement plus inquiétant qui puise dans l'idéologie nazie alors que rien ne le présageait dans la tournée des festivals d'été dans le Sud-ouest à laquelle participe la narratrice écrivaine.

Après les tongs en bord de plage, on s'engage sur le chemin de l'étrange et l'intérieur des terres où la pratique de la chasse est vivace et un village mystérieusement fasciné par l'aurochs. Dans ce pays de grottes préhistoriques, la trajectoire de la narratrice dévie vers une espèce d'interminable « espace du milieu ». le temps s'écoule lourd comme du plomb, on suit l'écrivaine et sa folle et inexplicable obstination à marcher dans les pas du maire dans un projet ou un labyrinthe_s'il faut absolument placer la référence au mythe du Minotaure_ qui enferme dans une relation proie-prédateur.



C'est le genre de récit dans lequel on progresse à pas de loup, où tremble la raison, l'angoisse n'est pas destinée à entraîner le lecteur sur les voies du surnaturel mais à déchiffrer les pulsions secrètes et les motifs cachés des personnages. L'idée était prometteuse au regard des nombreuses thématiques brassées dans cette histoire.

Mais la construction me laisse un peu dubitative. L'auteure alterne entre une écriture élusive qui refuse d'emplir tout l'espace du récit pour injecter de la tension et un style pesamment didactique qui écrase la narration. Elle ne parvient pas à rattraper ce déséquilibre dans l'évolution des personnages, chacun se voit assigné à son rôle fonctionnel avec la projection sur la silhouette de l'édile de tous les ressorts du virilisme et de la symbolique mythique du pouvoir, un pouvoir autoritaire. Quant à notre narratrice, elle se voit emprisonnée dans le rôle d'une femme passive, faible et inconstante, une femme gouvernée par ses émotions.

Il n'en demeure pas moins un roman iconoclaste, féroce et cruel.
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Un roman anglais

Un livre pioché au hasard dans une boîte à prix réduits peut se révéler une belle trouvaille!



Tout m'a parlé dans ce roman. L'écriture d'abord, précise et subtile, très poétique à certains moments. Et j'ai trouvé intéressant ce décrochage de la narration, a partir du moment où Anna se sent devenir autre, ce passage du "je"à "elle".



J'ai été happée aussi par le thème et l'époque: les dernières années de la première guerre mondiale, en Angleterre, vécues non pas du côté des soldats mais des populations civiles. Anna, engluée dans les codes de la bourgeoisie à laquelle elle appartient, mariée à Edward, pour qui elle n'éprouve plus guère de sentiments. Anna, intellectuelle voulant sans le savoir se libérer du carcan social, désirant reprendre son métier de traductrice,à un moment où les femmes obtiennent enfin le droit de vote( plus tôt qu'en France!)



J'ai surtout aimé le beau personnage de George, le garde d'enfant, recruté par lettre,qu'elle avait d'abord cru être une femme, en se référant à George Eliot. Sa douceur, son côté apaisant vont la libérer pour un moment de ses angoisses de mère , ce que ne voit pas d'un bon oeil son mari jaloux... George qui sait si bien s'occuper de Jack, le petit garçon du couple.Celui qui sera le catalyseur des troubles de chacun.



Les liens qui vont se créer entre les personnages sont décrits avec délicatesse et pudeur. Tout est suggéré, intériorisé, tu. Mais le drame couve, et bouleversera les destins.De façon irrémédiable.



Le monde de l'enfance est rendu avec beaucoup de justesse, ce monde perdu qu'une fois adulte, on ne reconnaît plus, que l'on ne comprend plus. J'ai adhéré complètement à ces remarques concernant le sérieux que les petits enfants mettent dans toutes leurs actions, y compris le jeu. Je l'observe chez mes petites filles.



Les tourments, les contradictions des protagonistes sont passionnants à decrypter, et l'ambiance de cette période de fin de conflit guerrier également. Je trouve que l'auteure a vraiment un don particulier pour nous plonger dans les méandres d'une histoire complexe et émouvante. A découvrir! Et je vais me renseigner sur un essai qu'elle a écrit :"Éloge du chat"...









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Pacifique

Êtes-vous vous prêts à devenir une fleur de cerisier et à accompagner Kaneda dans sa mission suicide ? Parce qu’il faut vous dire que Kaneda est un soldat au service du grand Japon. Il faut vous dire aussi que nous sommes le 27 avril 1945 et que Kaneda est pilote d’un « Zero ».



En digne descendant de samouraï, Kaneda accepte sa mission sans faiblir. En apparence. Car mille interrogations sur le sens du devoir et la finalité de la mort tournent dans son esprit comme celle de ne surtout pas rater sa mission et de mourrir en pleine gloire, en survolant le Pacifique et en s’abattant sur l’ennemi américain.

Mais c’est une autre destinée qui attend notre kamikaze. Une destinée loin des rivages de la guerre.



C’est par une écriture extrêmement simple que Stéphanie Hochet nous fait entrer dans l’intimité de ce jeune kamikaze (vingt-et-un ans), élevé très sévèrement par une grand-mère versée dans les traditions pures et dures des anciens samouraïs.

Une écriture tellement épurée (mais quelquefois marquée par un souffle de poésie), des phrases qui s’enchaînent comme une accumulation, des rencontres qui n’en sont pas et une fin plutôt sommaire font que l’empathie n’arrive jamais et que tout semble lissé et sans consistance, comme un événement survenu par hasard n’ayant pas plus d’importance que les autres.

Quel dommage !

Mais je garderai cependant en mémoire l’évocation de ce Japon si ancré dans ses traditions, son sens du devoir et de l’honneur.



Je remercie Claire qui m’a si gentiment envoyé ce livre-cadeau. Babelio est vraiment un surprenant réseau !

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Pacifique

« Je noue le hachimaki aux couleurs de notre Japon éternel autour de mon casque. J’effectue ce geste avec lenteur et solennité, sans pensées, sans émotions. Le froid dans mes veines, le temps s’est arrêté, je suis une fleur de cerisier poussée par le vent.

Ai-je le choix ? Ai-je eu le choix il y a un mois, quand nous avons été réunis par les officiers au petit matin sur la base aéronautique ? Le soleil se levait, rond et rouge, l’image du drapeau impérial. Ils ont annoncé que notre escadrille se portait volontaire pour devenir les Kikusui, des chrysanthèmes flottants. C’est le nom poétique donné au sacrifice d’un avion et de son pilote sur un navire ennemi. »

D'entrée, le ton est donné.

Stéphanie Hochet, écrivaine spécialiste de Shakespeare, nous ramène dans le Japon impérial de ce printemps 1945, au moment de la bataille d'Okinawa, où pour défendre leur société millénaire, les caciques de Hiro Hito ( l'empereur ) transformaient des jeunes hommes entre seize et vingt-cinq ans en bombes humaines.

Qui étaient ces jeunes garçons que nous connaissons sous l'appellation de kamikaze(s) ( en français " vent divin "), des fanatiques ou des volontaires contraints ?

C'est cette vérité historique que l'auteure essaie d'approcher dans ce court roman extrêmement bien documenté.

Elle, la littéraire, spécialiste de littérature anglaise, pas plus nippophile que vous et moi, qui n'est jamais allée au Japon, nous donne le change dans un roman qu'aurait pu écrire un autochtone.

L'histoire s'ouvre donc sur ce jeune Isao Kaneda qui s'apprête à bord de son avion Zéro à s'élancer pour une mission, une "attaque spéciale" ( entendez une attaque suicide ), et au nom de l'empereur et du Japon immortel, à devenir un "chrysanthème flottant", " une fleur de cerisier ".

Comme Victor Klemperer l'a fait dans son livre - LTI, la langue du IIIème Reich -, Stéphanie Hochet met en parallèle ce régime fasciste, cruel, inhumain et le vocabulaire antinomique qu'il utilise pour se décrire et nommer les actes qui sont les siens.

Puis c'est le flashback.

La seconde partie dans laquelle l'auteure, ou Isao, se raconte.

Son enfance auprès d'une grand-mère stricte, descendante de samouraïs... avec ses légendes, ses mythes, ses codes, et un jeune précepteur, monsieur Mizu, qui lui enseigne... outre les matières que l'on enseigne au Japon, les humanités classiques et la culture occidentale.

Par obéissance, Isao a donc eu une enfance solitaire entre une grand-mère "gardienne du temple", un précepteur ouvert sur le monde, un petit chat, les livres, la poésie, la rêverie, la pratique ( en privé ) du kendo et les avions dont il ambitionne de devenir un jour un as comme ces héros que sont pour les jeunes pilotes en devenir de sa génération les Sakai Saburö et Iwamoto Tetsuzö... as des as, sortes de samouraïs modernes.

À seize ans, il est rendu à ses parents ; sa grand-mère jugeant qu'elle lui a donné l'éducation susceptible de faire de lui le digne descendant de ses ancêtres, et non un petit bourgeois ramolli et sans envergure comme son gendre qu'elle tient en piètre estime.

Ses études secondaires achevées, il entre au "yokaren"... équivalent de l'aéronavale.

S'ensuit une formation accélérée... et pour cause : le géant américain se fait de plus en plus menaçant.

C'est enfin la désignation pour la mission spéciale.

Isao est partagé entre son devoir, son honneur et celui de sa famille... et le doute d'une mission dont il sait qu'elle ne changera pas le cours d'une guerre... perdue pour son pays.

Deux jours avant de devenir un chrysanthème flottant, notre vent divin commence à ressentir ce que sa grand-mère appelait " les herbes de lâcheté"... d'où d'incessants va et vient entre son lit et les latrines.

Mais il ne se dérobera pas ; entre deux allers retours dans les lieux d'aisance, il pense au "Hagakure" ( "guide pratique et spirituel destiné aux guerriers. Il s'agit d'une compilation des pensées et enseignements de Jōchō Yamamoto, ancien samouraï vassal de Nabeshima Mitsushige.") dans lequel il est dit qu'un samouraï doit toujours posséder de la poudre de riz au cas où il mourrait, et se poudrer avant de mourir... il aurait ce teint de cerisier auquel j'ai déjà fait référence ).

-" Nous sommes appelés à devenir des "fleurs de cerisier".

Le sakura, fleur symbole du Japon. Elle s'épanouit au printemps et le souffle du vent suffit à l'emporter

Vivre telle une efflorescence serait donc croître et disparaître au paroxysme de la jeunesse. Laissant dans l'air le souvenir de sa beauté éphémère.

Le Hagakure rappelle que les samouraïs doivent posséder dans leur besace de la poudre de riz afin qu'en cas de trépas ils puissent veiller à avoir dans la mort le teint du cerisier en fleur.

Nous deviendrons l'image même de la fragilité qui vit le temps d'un soupir et meurt avec légèreté.

Nous changerons d'état, abandonnant la lourdeur de l'enveloppe humaine pour abriter en nous la sève végétale, pour nous remplir de leur couleur délicate et voler, voler jusqu'à la désintégration."

Une confrontation intéressante a lieu dans ces heures cruciales entre Isao et son camarade de chambrée Kosugi.

Le premier, nous commençons à bien le cerner : c'est un jeune homme instruit, rêveur, idéaliste, patriote comme pouvait l'être un garçon de son âge et avec ce type de personnalité à l'époque.

Brave, honnête, fidèle, loyal... mais qui pense et donc doute.

Le second, Kosugi, a à peu près le même âge. Orphelin, "pupile de la nation" dirait-on de lui de nos jours, il doit tout à l'empereur, il doit tout à l'État et à l'armée... qui est devenue sa famille, sa raison de vivre et sa raison de mourir.

Lui n'est pétri que de certitudes.

Il est l'antinomie d'Isao.

Ces deux-là et quelques autres s'envolent à bord de leurs Zéro.

Fataliste, Isao songe :

-" La fin ne m'effraie pas. J'irai vers elle les yeux ouverts, non seulement parce qu'un grand pilote ne les ferme pas au moment d'entrer en collision pour ne pas rater sa cible - contrairement au novice qui perd le contrôle de son appareil par pur réflexe de peur - mais aussi parce que je voudrais voir la forme que prend la mort avant de l'embrasser. Sans doute devient-elle visible dans ces circonstances exceptionnelles. Ses contours ressemblent-ils à quelque chose que je connais ? J'imagine une silhouette étrange et familière à la fois, douée d'une force inquiétante telle une pieuvre ou un fantôme."

Insuffisance de Kérosène, Isao... loin de sa cible est contraint à un atterrissage forcé sur un îlot... peuplé d'hommes et de femmes coupés du monde et du temps, vivant à l'heure d'un Japon de "il était une fois."

Après des clins d'oeil appuyés à Shakespeare, Ovide, Cicéron, Marc Aurèle, Mishima... le parti pris de Stéphanie Hochet s'apparente à la démarche de Keisuke Kinoshita et sa " Ballade de Narayama".

Je vous passe à présent le relais et vous invite à découvrir cette accroche du kamikaze version S. Hochet.

Un livre très bien et très précisément documenté.

Un style sobre, travaillé, précis, juste.

Une narration concise entre la violence du sujet et le surprenant environnement poétique.

Pour conclure, je dirai qu'outre la fascination pour ce thème et l'excellente mise en mots et en récit de l'auteure, deux éléments ont retenu mon attention.

Le premier c'est la volonté (?) de l'écrivaine à conserver à son héros une sorte de virginité. Isao n'est jamais mêlé à la promiscuité. Enfant, il n'a aucun contact avec les autres enfants... si ce n'est avec un chat ( cherchez la symbolique ), il aperçoit une belle fillette... qu'il ne verra qu'une fois et dont il fera l'héroïne de ses rêves. Au lycée... c'est un étudiant "à part"... Sur l'île, il sera fasciné par la beauté d'une jeune femme... dont il se détachera de lui-même : - " je n'ai plus de désir pour elle. J'approche un peu chaque jour du satori."

Et cerise sur le gâteau impérial... son avion n'aura jamais atteint la cible désignée pour sa mission : il n'aura même pas approché la mort...

Le second concerne le titre... dont le sens est multiple.

Pacifique peut en effet être pris dans son acception géographique mais aussi être une référence au pacifisme...

À vous de décider.

Une très bonne lecture.
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Pacifique

Voilà un livre surprenant. Je n'y ai pas trouvé ce que j'étais venu chercher, mais ce que j'ai trouvé était agréable.



Baigné des codes japonisant de Pair de l'Empire (de R.E. Feist et J. Wurts), j'ai voulu rester dans cette atmosphère mais selon une perspective plus historique. Cette atmosphère est présente dans Pacifique, mais il n'y a pas que cela.

Ce livre est surtout très introspectif. 1945. Kaneda nous confie ses pensées, ses désirs, ses actes. Il s'apprête à partir pour sa dernière mission, sa mission suicide de kamikaze. Il est si honoré, si fier… mais aussi effrayé.

Kaneda se raconte à travers des flashbacks qui nous permettent de cerner sa personnalité. Éduqué par sa grand-mère héritière d'une famille de samouraïs, il mixe le code bushido et le théâtre nô avec la culture occidentale, surtout Shakespeare. Se développe chez lui une espère de dualité. D'abord une surface nationaliste, agrippant à plein bras et à plein coeur le rêve d'un Japon protecteur de l'Asie face à l'exploitation occidentale. Il s'agit d'une guerre de libération. Comme tout son peuple, il applaudit à l'annonce de l'attaque de Pearl Harbor. C'est décidé, il sera aviateur.

Et, tapi, se trouve le jardin secret d'un homme resté très fleur bleue, nourrissant une adoration pour la pièce Roméo et Juliette, et osant douter, sinon de l'honneur, de la valeur pragmatique du sacrifice de sa vie pour le Japon et pour l'Empereur.

Les deux facettes s'emparent de Kaneda à tour de rôle, générant un conflit interne qu'il se doit de dissimuler dans ce Japon où femmes et enfants sont prêts à sauter d'une falaise plutôt que de se laisser prendre par les Américains.



La troisième partie surprend par la direction où elle emmène notre anti-héros. Y règne un retour vers une certaine sérénité, mais aussi la découverte que toute médaille cache un côté obscur. Le récit de cette découverte aurait beaucoup plu à Ursula le Guin qui a toujours voulu faire entrer ce concept dans le crâne de ses lecteurs.

Une lecture régénérante et reposante malgré l'atmosphère de guerre. Quelque chose de zen, de bouddhiste, qui calme l'esprit. Un roman assurément historique aussi.



Bref une bonne pioche.

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Pacifique

Ce qui m'intéresse dans cet excellent roman, outre le processus de formation d'un jeune kamikaze c'est le rapport entre la mort et le satori. Outre également le fait que l'auteure réussit à merveille l'écriture d'une intrigue et d'une atmosphère toutes japonaises. Ce jeune homme, conditionné par l'esprit du samouraï, par sa grand-mère, ne rêve que de s'affirmer en offrant sa vie à l'empereur et à son pays. On ressent d'ailleurs à ce propos l'influence de Mishima. Il rêve sa mort. Il ne pense qu'à ça pendant les 3/4 du roman. Et c'est à la fin, qu'il atteindra l’Éveil bouddhiste, cet esprit libéré de toute contingence, que l'on nomme satori. C'est un peu comme s'il était mort et réincarné.

Je vous laisse découvrir cette petite merveille.
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Éloge du chat

Le chat est entré dans nos maisons depuis des siècles, mais il n’est pas vraiment domestiqué. « Le chat n’a pas peur des paradoxes. Il est un paradoxe, il n’y qu’à regarder son corps. » (p. 25) Attention, vous qui logez un chat, vous hébergez un fauve à demi-sauvage qui ne tolère votre présence et ne vous laisse la peau sauve que parce que vous le nourrissez. Si possible à heures fixes. « Quelque chose chez le chat fait de lui un être naturellement dominant. » (p. 28)



Le chat règne sur nos cœurs d’humain en mal de beauté et de pouvoir. « Le félin nous apprend que la vraie flexibilité est une qualité triomphante qui lui permet d’être par ailleurs paresseux, jouisseur, voluptueux… » (p. 34) Mais si nous aimons le chat, c’est aussi, simplement, irrémédiablement, parce qu’il a conquis nos cœurs et qu’à sa manière si particulière, il nous aime. « Nous le gardons près de nous pour le bonheur qu’il nous donne. Pour l’amour. Le chat est amour. » (p. 92)



Stéphanie Hochet parle avec tendresse de ce fauve apprivoisé qu’est le chat. Son texte est un hommage aux textes qui ont célébré le greffier et aux films qui ont immortalisé Rominagrobis. Le chat est une icône de mode qui griffe les clichés et balaie les conventions d’un coup de queue rageur, mais distingué. Le texte de Stéphanie Hochet est fin et intelligent, comme un chat.



J’ai lu cette courte réflexion féline le sourire aux lèvres. À chaque situation, je voyais ma minette, mon adorable Bowie que j’aime tant, qui souvent m’exaspère, mais toujours m’attendrit et me chavire. Ma minette est belle. Elle est gracieuse. Elle est aussi rondouillarde, mais elle est sublime. « Le gros chat n’est pas n’importe quel gros. Si le gros chien ou l’homme gras nous paraissent sympathiques et nous attendrissent, le chat enveloppé inspire la crainte révérencieuse. » (p. 67) Si je croyais à la réincarnation, je prierais pour revenir sous la forme d’un chat.

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Pacifique

Ce sont les critiques de BazaR et d’Eric76 qui m’ont donné envie de lire ce livre. Stéphanie Hochet est une auteure que je découvre et j’ai vraiment été séduite par son écriture que j’ai trouvée limpide et soyeuse.



Le Japon, 1945.



Kanedo Isao a été choisi pour devenir un « chrysanthème volant » autrement dit un kamikaze. C’est pour lui un honneur de se sacrifier pour l’Empire.



À quelques jours de ne plus voir le soleil se coucher, il se penche sur sa vie. Il nous fait part de ses réflexions et de ses doutes. Il accepte de mourir pour son pays mais il espère que ce sera utile à quelque chose.



Le jour venu, il décolle avec ses camarades mais une panne le fait atterrir sur une petite île. À ce moment, l’histoire bascule… j’avoue ne pas avoir compris où m’emmenait l’auteure ni la fin.



On parle toujours des deux bombes atomiques, j’ai moins souvent entendu parler du bombardement de Tokyo du 9 mars 1945. D’après ce que j’ai lu, il a été plus meurtrier que Nagasaki. C’est terrifiant.



Ce livre donne une toute autre image des kamikazes. Sur le sujet, j’ai repéré le livre « Kamikazes » de Constance Sereni et Pierre-François Souyri . Il est dispo à la bibliothèque du coin, je l’emprunterai lors de mon prochain passage.

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Éloge du lapin



Usagi, le lapin du kamikaze dans Pacifique (1) a certainement ouvert la voie à cet éloge du lapin de Stéphanie Hochet. On la connaissait ailurophile, mais pas seulement !





L’auteure, s’étant nourrie d’une ample bibliographie indiquée en fin de l’essai, glisse en ouverture trois citations dont la première de Howard Zinn fait mouche : « Tant que les lapins n’auront pas d’historiens, l’histoire sera racontée par les chasseurs. »



Stéphanie Hochet se fait donc la porte-parole des oreillards .Elle avoue avoir été déconcertée par les réactions des personnes à qui elle dévoilait le thème de ce livre. Mais ayant un Jeannot comme colocataire , elle a su s’intéresser à ses congénères et s’interroge sur le mépris dont ils sont entourés.

Elle explique comment elle en est venue à adopter un lapin… Il y a eu le regretté Ragondin qui l’avait fascinée et conquise , semblable à une «  pelote de laine grise ». Elle a été bouleversée par le poème que son ami écrivain Jérôme Attal, lui a dédié dans un but lénifiant.

Puis elle a libéré Pilepoil de ses conditions peu enviables de huis clos. Une compagnie salutaire qui s’est avérée « un bain de jouvence », confie-t-elle tout en soulignant la différence entre lapin et lièvre. L’animal chassé est devenu domestique comme on le retrouve représenté sur des vases grecs. L’autrice retrace l’origine du petit fouisseur passé d’abord par la péninsule Ibérique, l’Italie, le pourtour méditerranéen.



Un détour par le Musée Cluny permet de débusquer les lapins blancs présents dans les différents tableaux de La Dame à la licorne, animal destiné aux nobles entre le VIII ème et XIII ème siècle, période où seul le seigneur avait le droit de chasser, mais les dames de sa cour pouvaient tester leur adresse en tirant à l’arc sur les lapins. La pureté virginale est évoquée avec un tableau du Titien .



On les retrouve pour Pâques, apportant les chocolats ( tradition germanique).

Rejoignons le musée de Vienne qui conserve la célèbre aquarelle Le lièvre de Dürer. Un tableau qui questionne l’écrivaine ou encore celui d’Ajaccio qui possède des natures mortes du flamand David de Coninck, mettant en scène des léporidés que Stéphanie Hochet décrit avec minutie.



La littérature fait également la part belle à ce mammifère. Souvenez-vous de vos livres jeunesse, du lapin blanc d’Alice de Lewis Caroll.

L’écrivaine nous incite à lire Watership Down de Richard Adams, qu’elle considère comme « une épopée à la gloire des Jeannots », qui « donne à voir l’intelligence de la communauté des oreillards », «  une communauté hiérarchisée rappelant la société humaine ».

Elle décrypte d’ailleurs ce roman de manière remarquable. A nous de découvrir son «  idiome lapinesque ».



Simultanément, elle distille, non seulement des références littéraires (Maurice Genevoix, Giono, La Fontaine., Lanzmann...) mais aussi cinématographiques ( Roger Rabbit), ou relatives à des dessins animés. On croise Luce Lapin ,journaliste engagée dans la défense des êtres vivants à poils ou à plumes. Des pistes à explorer pour le lecteur curieux.



Vous serez peut-être étonnés de cet engouement au Japon pour « les cafés à lapins », comme on connaît en France celui pour «  les bars à chats ». Quoi de plus délicieux que de caresser «  ces mignonnes boules de poils » ! Pas étonnant que tout jeune Japonais sait «  qu’un léporidé  vit sur la lune»  et que «  la créature lunaire fabrique des mochis » à déguster pour la fête de la pleine lune, «  Tsukimi ». Deux villes japonaises( Tottori et Nagoya) livrent un culte fétichiste à l’animal.

Les lolitas nippones arborent «  les accessoires à son effigie » ! Se complaisent-elles dans le monde de l’enfance ? Faut-il y voir un malaise, la peur d’entrer sur le marché du travail ?

Ces oreillards ont largement investi « la mythologie japonaise ».Ils sont même devenus l’attraction d’une petite île japonaise ( Okunoshima) où les voitures sont interdites pour le bonheur des touristes pour qui « il est si rare d’être la cible d’un gang de yakuza (2) herbivores à fourrure » !



Si «  en Occident, les lapins sont représentés comme des êtres craintifs, insolents et rapides », au pays du Soleil Levant , ils incarnent les « voyous ou les combattants ».

Ces léporidés sont entourés d’une connotation érotique, «  sont assimilés aux symboles lunaires et sont perçus comme l’image de la joie de vivre ».

Par ailleurs très fertiles, les conins (3) sont associés à la sexualité, il suffit de regarder le logo de Playboy ou de convoquer des expressions comme « un chaud lapin ».

Il est souligné dans des livres leur « tempérament pour la cabriole, la fréquence de leurs accouplements », ce qui a forgé le mot : «lapinisme » pour des humains.



«  Les Grecs, eux, les ont associés à Artémis, déesse de la chasse, et aux quatre coins du monde, ils sont assimilés aux symboles lunaires ».

Les Anglais, qui ont milité pour la cause animale dès le XVIII ème siècle, ne sont pas en reste , surtout à l’approche de Noël, avec le célèbre Peter Rabbit de Beatrix Potter qui se décline en maints objets.





L’autrice ,très engagée pour le bien-être animal,végétarienne, enrichit nos connaissances sur les lagomorphes, les léporidés, décline le mot lapin en diverses langues ( rabbit,bunny, usagi) , passe même par le grec et le latin pour l’étymologie…et le réhabilite, mais rappelle aux enfants que ce ne sont pas des peluches vivantes. Elle livre un plaidoyer convaincant afin de cesser de « reléguer le lapin à un animal de seconde zone ».

Elle déplore ce fléau de la myxomatose qui a décimé Jeannot ,«  la canaille aux longues oreilles »  et «  souhaite revoir les garennes dans nos campagnes ».







Par cet essai, Stéphanie Hochet nous prouve que cette bestiole n’est pas si « insignifiante », qu’elle a d’ailleurs inspiré maints auteurs et cinéastes. Elle nous offre une bibliographie conséquente , et alléchante ! Elle a réussi à nous faire remarquer des lapins partout, même dans la mode. Qui va craquer pour un vrai lapin( « dont la frimousse répond aux critères du kawaii, mignon » ) ou pour un T.shirt , voire des chaussettes à l’effigie d’un bunny, à Noël ?





(1) Pacifique de Stéphanie Hochet, éditions Rivages.

Grand prix littéraire de l’Aéro-Club de France , automne 2021.

(2) Yakuza : membre d’un groupe de crime organisé.

(3 conin ou connin : lapin en vieux français. Terme que l’on retrouve chez Apollinaire.



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Pacifique

Une jolie surprise que ce texte et cette auteure que je lis pour la première fois…grâce à une camarade-libraire [Librairie Caractères / Issy-Les-Moulineaux ] Ayant rédigé un commentaire personnalisé et enthousiaste, en bandeau, cela m’a confirmé mon intérêt premier... Les traditions, usages japonais m’intéressant toujours, je me suis décidée à découvrir cette auteure, ayant déjà plus d’une dizaine de textes à son actif, sur les sujets les plus divers…



A travers la parole du narrateur, un tout jeune homme, kamikaze, ayant été admis au corps de chasse en octobre 1944, après deux ans de formation au Yokaren (école préparatoire de pilotage pour adolescents ) Stéphanie Hochet narre à travers le parcours de ce tout jeune homme l’esprit, les traditions japonaises ancestrales, dont l’allégeance absolue au Dieu sur la Terre, que représente l’Empereur.

Eduqué à l’ancienne par une grand-mère, d’origine noble, avec des ancêtres samouraïs dont elle éprouve une fierté immense…notre narrateur vit à l’écart des autres enfants, surprotégé (ayant une santé vacillante), il part dans son monde à lui, entretenu par son aïeule par les récits guerriers, et les seules sorties encouragées par la grand-mère : assister aux représentations du Théâtre nô…Comme il est l’aîné et le premier fils, tout le futur prestige de la famille repose sur ses frêles épaules…La grand-mère trouverait merveilleux que son petit-fils meurt en guerrier pour son Empereur !

Heureusement, il est passionné par l’aviation… et intégrer enfin un groupe de jeunes gens de son âge va le sortir de sa bulle et lui faire connaître la vie en collectivité…

« Je dois beaucoup à ma grand-mère. C'est elle qui m'a élevé de mes quatre à mes seize ans. (...)

J'ai adoré le Japon ancestral, ses rites, ses éloges de l'ombre et des beautés zen. (...)

Enfant, je résidais dans une maison, seul avec cette vieille dame qui m'a longtemps semblé étrangère. Sa culture et son austérité m'ont formé comme un tuteur redresse un arbrisseau. Je ne vivais pas dans mon époque. Plongé dans l'opéra et ses actes héroïques, je rêvais d'aventures mettant en scène le sacrifice du plus vaillant. «



Il sera admis à l’école de Chasse… puis choisi pour une opération Kamikaze… Je m’arrêterai là dans la divulgation de l’histoire… des imprévus surviendront sur son parcours, qui alimenteront ses doutes, ses interrogations sur son éducation, sur l’histoire de son pays natal, son histoire, le bouddhisme…, les différentes positions philosophiques, etc.



De nombreux sujets de réflexion et de questionnements jalonnent ce roman bref mais dense dans sa narration, dont un et pas des moindres : le conditionnement des individus à des règles, des usages, traditions immuables ( ayant parfois en elles une férocité inouïe..) , la nécessité, un jour, de remettre en cause, de désobéir , de partir, de prendre de la distance..!!

« Quand l'autorité exige de vous ce qui vous répugne, il va de soi qu'on obéit. C'est d'ailleurs ce que j'ai fait en rejoignant l'armée. Je n'ai jamais remis en question la cruauté de nos formateurs. (...) Habitué à ne jamais contester la violence de la hiérarchie, j'ai accepté des règles terribles, il suffisait qu'elles soient des règles. Je suis donc mal placé pour juger Izumi.” (p. 135)



Un roman très apprécié pour son style, ainsi que pour la force du récit des plus épurés, qui aborde des interrogations universelles…sans omettre les détails précieux nous plongeant loin ,dans l’état d’esprit japonais… Merci à la libraire- camarade,Françoise, d’avoir mis en avant ce roman d’une très belle teneur !

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Un roman anglais

"Un roman anglais " nous plonge dans la tourmente en 1917,celle qui frappe une société, un pays, des valeurs et celle qui est à l'œuvre dans la vie d'Anna, traductrice, mére du petit Jack, épouse d'Edward, le "minutieux horloger", très fier de ses connaissances .

Anna est une femme de lettres cultivée qui cite Voltaire, Hugo, Proust........Elle livre un combat intérieur entre son rôle d'épouse et de femme, entre son métier et l'amour d'un enfant dont elle ne sait pas et ne veut pas s'occuper.

C'est George le garde d'enfant , délicat, maternel qui parvient à calmer les accès de violence d'Anna, à l'écoute , malgré sa santé fragile, d'où la jalousie d'Edward.........

La plume de Stéphanie Hochet, distanciée et sensible nous livre un beau portrait de femme, emprisonnée dans son statut de femme de l'époque, corsetée dans ses sentiments, pourtant avide de liberté.......

Anna nous livre son ressenti, ses émotions, ses pensées les plus secrètes en un long monologue intérieur.

Dans un monde en pleine mutation, une période de transition, ce beau roman, suggestif ,âpre, pudique et tourmenté à la fois ,porte des interrogations sur les thèmes les plus intimes.

Anna est une femme qui se cherche.

L'auteur nous restitue avec subtilité les incertitudes, les atermoiements qui régnaient en Angleterre en cette période trouble.

Je précise que je ne connais pas l'auteur.



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