intervention sur le polar ado (quais du polar 2018)
Je ne me considère pas en fugue. Je n'ai pas quitté ma famille pour faire n'importe quoi, fumer des joints ou boire jour et nuit. Je suis partie pour exister selon mon idée, pour...tester mes principes de vie.
- Plus jamais ! Supporter que les garçons nous manquent de respect alors qu'ils passent leur vie à jurer sur la tête d'une seule femme, leur mère !
Après les rires moqueurs que ma réflexion déclenche, Eloa conclut l'air rebelle :
- Etre fière d'être une femme. Devenir forte pour se faire respecter, c'est la solution.
Depuis que nous vivons dans l'aéroport, je ne me souviens pas de la veille. Et je n'invente pas d'histoires pour le lendemain. Les avions du soir emportent mes histoires avec eux. Et ceux du matin m'en apportent de nouvelles.
Car, dans la plupart des familles, une mère se doit d'être là, tout le temps, partout, omniprésente : ménagère entourée de ses robots perfectionnés, courbée au jardin ou toujours à s'activer dans la société comme à la maison, pour le bonheur de tous et surtout de son mari et des enfants !
Dans ce paisible tableau, il y a de quoi nous oublier, nous les jeunes du Limousin. On ne fait pas parler de nous comme ceux des cités. Pourtant, on se morfond tout autant. On n'a plus de possibles. Moins d'ouvertures. Les conneries sont les mêmes. Petits ou gros trafics là-bas comme ici. Mais nous, les perdus de la campagne du centre de la France, nous n'intéressons personne. Y a même pas un bar sympa pour que journalistes et cameramans de la télévision de délassent, alors ils ne viennent pas. C'est beaucoup plus simple. (p 88-89)
Les enfants naissent pour pousser et s'en aller, pas pour servir de garde-fou.
- Vive le 1er mai ! et je beugle à mon tour : Tous ensemble, tous ensemble !!!
Mon amie est davantage en accord avec la nature qu'avec l'agitation des êtres. Moi je veux les deux. Laisser couler le vent sur ma peau et construire une nouvelle société en partage avec les humains.
Mes jambes gigotent, en pensée, je cours encore sur les chemins de branches jetées sur le sol détrempé. Mon souffle grimpe aux cimes des arbres. Depuis que je suis ici, j'ai besoin d'être toujours en activité et le repos m'ennuie. (...) Dormir ici est du temps perdu. C'est impossible. Trop intense d'être là. Tant d'étoiles aux nues quand le brouillard se déchire.
Partout, il y a des bons et des mauvais.