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Citations de Tobias Wolff (35)


Tobias Wolff
Écrire nous libère de la prison du soi et nous entraîne vers l’aventure suprême, qui nous permet de voir la vie à travers les yeux d’un autre.
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Parfois, comme cette paix qu’il ressentait ne lui semblait pas naturelle, elle éveillait des craintes en lui. La pire d’entre elles était qu’en aimant trop ses enfants, il les mettait en danger, et que d’une certaine manière, il leur faisait courir des risques. Par moments, il avait la certitude qu’un malheur allait s’abattre sur eux. À mesure que les garçons grandirent, cette crainte se fit plus rare, mais elle l’oppressait encore de temps à autre.
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D’une main il s’appuie sur la barrière et de l’autre il se soulage sur les fleurs. Il n’en manque pas une seule, marchant comme ça sur toute l’étendue de la clôture. Quand il a fini, il secoue sa Floride, remonte sa fermeture Éclair et regagne son allée. Il manque de tomber en glissant sur le gravier, mais il se rattrape en poussant un juron, puis il rentre à l’intérieur, claquant la porte à nouveau.
Quand je me retourne, ma femme me regarde attentivement, penchée en avant. Elle hausse les sourcils.
— Il n’a pas recommencé, dit-elle.
Je réponds d’un hochement de tête.
— La petite ou la grosse commission ?
— La petite.
— Encore heureux, dit-elle en se recouchant. Entre le chien et lui, c’est un miracle que tu arrives à faire pousser quoi que ce soit là dehors.
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Puis Hubbard vient se positionner face à la formation, et Lewis voit le masque de protection en métal sur son nez. Oh, Seigneur, se dit-il, ce n’est pas moi qui ai fait cela. Son regard s’attarde sur le masque. Il y avait un homme, à Lawton, qui portait exactement le même parce qu’il n’avait plus de nez, on le lui avait tranché net au cours d’une bagarre quand il était jeune. Sous le masque, il y avait deux orifices, rien d’autre.

Hubbard suit le sergent-chef d’un bout à l’autre des rangs. Lewis croise son regard un instant, puis pose à nouveau les yeux sur le masque. Ça fait mal, se dit-il. Il se rattrapera auprès d’Hubbard. Il deviendra son ami, le meilleur ami qu’Hubbard aura jamais eu. Ils iront jouer au bowling ensemble, et au cinéma, en ville. Le prochain week-end prolongé, ils feront du stop jusqu’à Nag’s Head et ils se lèveront quelques nénettes, là-bas. Le soir, ils descendront à la plage et ils feront la fête. Ils allumeront un feu, ils se soûleront et ils rigoleront bien. Et quand ils seront expédiés à l’autre bout du monde, ils ne se quitteront pas d’une semelle. Ils prendront soin l’un de l’autre, veilleront à ce qu’ils en reviennent, l’un et l’autre, et par la suite, quand ils auront quitté l’armée, ils resteront amis pour toujours.
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[...] ... Eugene était tombé sur Talbot Nevin comme camarade de chambre. La famille de Talbot avait fait don à l'école de la patinoire de hockey Andrew Nevin, ainsi que de la bibliothèque Andrew Nevin ; elle subventionnait aussi le cycle de conférences Andrew Nevin. Le père de Talbot avait terminé à la deuxième place du Grand Prix de Monaco deux ans auparavant, et les magazines people publiaient souvent une photo de lui en compagnie de personnes comme Jill St John, par exemple, avec, pour légende, la déclaration de l'un des deux : "Il y a une grande amitié entre nous, rien de plus." J'avais envie de faire la connaissance de Talbot Nevin.

Alors un jour j'allai les voir dans leur chambre. Eugene ouvrit la porte et me donna une vigoureuse poignée de main.

- "En voilà une surprise !" dit-il. "Tab, je te présente un copain à moi. Il est de l'Oregon. Y a pas plus au nord dans la cambrousse."

Talbot Nevin était assis sur le bord de son lit, en train d'enfiler des lacets d'un blanc immaculé dans les œillets d'une paire de baskets dégoûtantes. Il fit un signe de tête sans me regarder.

- "Le père de Tab a remporté une grande course l'année dernière," poursuivit Eugene.

Ça m'embêtait qu'il me dise cela. Je ne voulais pas que Talbot sache que j'étais au courant de quoi que ce soit à son sujet. Je voulais entrer en contact avec lui en toute innocence, sans qu'il puisse suspecter que je l'appréciais pour autre chose que lui-même.

- "Il ne l'a pas remportée. Il est arrivé deuxième."

Talbot jeta ses baskets par terre et, pour la première fois, il leva le regard vers moi. Il avait des yeux bleu porcelaine sous des cils et des sourcils si clairs qu'on les voyait à peine. Ses cheveux aussi étaient blond-blanc, raides et ternes sur son front. On aurait dit que son visage avait été moulé, comme celui d'une poupée, délicat et souffreteux.

- "Quel genre de course ?" demandai-je.

- "Un Grand Prix," dit-il en enlevant ses chaussures. ... [...]
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Moi non plus, je n’ai pas de pitié pour elle, mais je n’en ai jamais eu. Elle s’adresse à son bébé en braillant, et je m’excuse, mais je ne vais quand même pas m’en faire pour quelqu’un qui traite un enfant comme ça. Elle lui hurle des choses du genre : “Je croyais t’avoir dit de rester dans ta chambre !” À un enfant qui ne sait même pas encore parler.

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My first stepfather used to say that what I didn't know would fill a book. Well, here it is.
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I have been corrected on some points, most of chronology. Also my mother thinks that a dog I describe as ugly was actually quite handsome. I've allowed some of these points to stand, because this is a book of memory, and memory has its own story to tell.
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- Tu veux bien nous dire quelque chose en tibétain ?
- Qu'est-ce que vous aimeriez entendre?
- Dis : "La vache a sauté par-dessus la lune".
Elle m'observa, un sourire aux lèvres, et quand j'eus terminé, elle regarda les autres passagers en secouant la tête.
- C'était joli. On aurait cru de la musique. Dis quelque chose d'autre.
- Quoi?
- Ce que tu veux.
Ils se penchèrent vers moi. La pluie obscurcit les vitres subitement. Le chauffeur s'était endormi et ronflait doucement, bercé par le balancement du bus. A l'extérieur, un éclair jaune pâle teinta la lumière boueuse et le tonnerre gronda au loin. La dame assise près de moi s'adossa à son siège et ferma les yeux,et tous les autres en firent autant, tandis que je chantais pour eux dans ce qui était certainement une langue sacrée du fond des âges.
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Celui-ci lui faisait penser à un cheval. Il avait un visage allongé et des yeux marron, couleur de boue, et quand il riait, sa lèvre supérieure se retroussait sur sa gencive et découvrait ses dents.
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Si le gratte-papier l’avait nettoyé au poker, ou si quelqu’un de sa famille était tombé malade, s’il avait été vraiment dans le besoin, il aurait pu emprunter de l’argent ou aller voir le commandant de la compagnie. Il y avait une cagnotte spéciale pour des choses comme ça. Quand la femme du sergent responsable du mess avait disparu, il avait emprunté plus de cent dollars pour rentrer chez lui et partir à sa recherche. C’était le sergent chargé de l’approvisionnement qui nous l’avait raconté. D’après lui, le sergent du mess n’avait jamais remboursé l’argent, probablement parce qu’il n’avait pas retrouvé sa femme. De toute façon, même s’il avait été fauché, il n’en serait pas mort, Lewis, avec des vêtements fournis gratuitement, un toit au-dessus de la tête et trois repas par jour.
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Si comme l'avait dit Talleyrand, la loyauté est affaire de dates, la droiture morale est souvent affaire de secondes.
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Et quelle ironie : ce garçon ambitieux, qui s'évertue à monter dans l'échelle sociale, se voit obligé de descendre à la cave apprendre la sagesse qu'on enseigne pas dans l'usine de snobs au dessus.
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« Une école préparatoire en mars, c’est comme un bateau en plein marasme. » Notre professeur d’histoire dit cela, tandis que nous attendions que la cloche sonne la fin du cours. Il était debout à la fenêtre et donnait de petits coups de bague sur la vitre, d’un air rêveur et absent destiné à nous laisser croire qu’il avait oublié notre présence. Nous étions supposés en conclure que quand nous n’étions pas là, il changeait, devenait un homme intéressant, un homme spirituel et profond, qui improvisait des bons mots et possédait une vision poétique de la vie. » Un journaliste publie la notice nécrologique qu’un homme qui est toujours en vie, un soldat qui ne s’est pas porté volontaire apprend la mort de son meilleur ami, deux camarades de classe ambitionnent de construire un avion, un enseignant trop entreprenant se fait agresser par un mari jaloux, un critique littéraire se retrouve face à des braqueurs de banque masqués et armés, un soldat en mission au Vietnam apprend la mort de sa mère, comprend qu’il s’agit d’une erreur et profite de la situation, une jeune femme se rend chez son frère pour lui tenir la main après un chagrin d’amour…
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De plus en plus, j'avais l'impression de fuir une difficulté nécéssaire, de croître en intelligence et en assurance sans croître par ailleurs, d'être une fois de plus à la dérive.
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C'était agréable d'être seule. Vraiment seule, sans personne autour de vous pour vous laisser croire que votre vie était associée à la sienne. Ce n'était jamais vrai. Même ensemble, les gens étaient aussi solitaires que des vaches dans un champ qui regardent toutes dans différentes directions.
- Migraine
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[...] ... Je remarquai Eugene avant de faire véritablement sa connaissance. Il était impossible de ne pas le remarquer. Au moment où notre train quittait New York, Eugene, qui passait d'un autre wagon à celui où j'étais assis, réussit à rester coincé dans la porte, entre ses deux énormes valises. Je l'observai se débattre pour essayer de se libérer, fasciné par le chapeau qu'il avait sur la tête, un chapeau tyrolien vert avec des plumes sur le côté. Je me demandai s'il comptait atténuer le ridicule de sa situation en souriant dans toutes les directions comme il faisait. Quelque chose finit par céder et il se retrouva propulsé dans le couloir. J'espérais qu'il ne viendrait pas s'installer près de moi, mais c'est ce qu'il fit.

Il se mit à parler pratiquement à l'instant où il s'assit et il ne s'arrêta que lorsque nous arrivâmes à Wallingford. Est-ce que j'allais à Choate ? Quelle coïncidence, lui aussi. En première année ? Lui aussi. Je venais d'où ? De l'Oregon ? Sans déconner ? Un coin perdu au fin fond de la cambrousse, hein ? Lui, il venait de l'Indiana - de Gary, dans l'Indiana. Comme dans la chanson, je connaissais la chanson, hein ? Je la connaissais, mais il me la chanta quand même, jusqu'au bout, y compris le dernier couplet, plutôt gênant. Il y avait d'autres gars dans notre wagon et ils n'arrêtaient pas de nous regarder, j'aurais aimé qu'il la ferme.

Est-ce que je faisais de la natation ? Dommage, c'était un sport intéressant, je devrais m'y mettre. L'année précédente, il avait battu un record en nage libre, dans le championnat du Middle West. C'était quoi, ma matière préférée ? Lui, il pensait avoir un petit faible pour les maths, mais il était très bon partout. Il m'offrit une cigarette, que je refusai.

- "Faudrait que j'arrête," dit-il. "Sinon, je vais y laisser ma peau." ... [...]
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Je suis un homme honnête, un homme responsable, peut-être même ce que d’aucuns appelleraient un brave homme – j’espère en être un. Mais je suis aussi un homme prudent, qui tient à son confort et qui y regarde à deux fois avant de prendre des risques. Mes voisins m’apprécient parce qu’ils savent que je ne transformerai jamais ma pelouse en champ de marijuana, qu’ils ne risquent pas de trouver ma femme en larmes sur le pas de leur porte à 3 heures du matin, et que je n’attends pas d’eux qu’ils deviennent mes amis. Globalement, je suis satisfait de ma vie. Quand je me projette dans le futur, ce que je vois ressemble beaucoup au présent, et je n’en demande pas plus.
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Je crus que son regard était braqué sur moi, bien que cela fût impossible en raison de la lampe qui l’aveuglait. Ses joues étaient humides. Le désarroi se lisait sur son visage. Un visage comme je n’en avais jamais vraiment vu auparavant, empreint d’humiliation et de peur, un visage que je n’ai jamais cessé de revoir depuis ce jour. C’était le visage qu’affichaient les Vietnamiens lorsque nous les questionnions, lorsque nous entrions dans leurs maisons pour les fouiller et parfois les brûler. Le visage qui est devenu celui de mon frère, au fil des vicissitudes de sa vie.
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Toutes les réunions couverture ne se ressemblaient pas. Certaines étaient plus brutales que d’autres. J’avais entendu dire que des types s’étaient fait battre pour des raisons stupides, comme écouter de la musique classique sur leur radio. Mais cette fois, c’était différent. On avait un voleur dans la compagnie.
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Un extrait de poème (avec un indice) pour trouver l'auteur.

Où vont tous ces enfants dont pas un seul ne rit ? Ces doux êtres pensifs que la fièvre maigrit ? Ces filles de huit ans qu'on voit cheminer seules ? Ils s'en vont travailler quinze heures sous des meules ; Ils vont, de l'aube au soir, faire éternellement Dans la même prison le même mouvement. Accroupis sous les dents d'une machine sombre, Monstre hideux qui mâche on ne sait quoi dans l'ombre, Innocents dans un bagne, anges dans un enfer, Ils travaillent. Tout est d'airain, tout est de fer. Indice : Esmeralda

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