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Critiques de Yanick Lahens (145)
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Guillaume et Nathalie

Guillaume a cinquante ans, Nathalie une trentaine, il est sociologue et elle architecte.ils sont tous les deux nés en Haïti mais, elle a quitté le pays pendant de nombreuses années tandis que lui, y a toujours été. De retour au pays Nathalie rencontre guillaume, beaucoup de choses opposent le caractère des personnages. Mais ce qui les rapproche c'est leurs regards qui se sont croisées, l'envie de se connaître l'un l'autre. pour moi la lecture est surprenante, tout une mise en scène , un jeu entre de séduction entre ces deux individus est mis en place. Les personnages sont comme des enfants qui ne savent pas ce qu'ils veulent, ils se refusent l'un l'autre. Dans une société haïtienne où le sexe est un sujet tabou;Yanick Lahens ne réserve pas ses mots et décrit tous les actes sexuelle des personnages, une manière rare d'écrire selon moi, très poétique et où on se laisse facilement emporter. De plus cette belle histoire d'amour se passe dans la ville de Port-Au-Prince la capitale, une ville ou l'on ressent un obscurité et une sorte de tension qui frappe tout le pays. A la veille du tremblement de terre qui bouleversa tout le pays on peut déjà ressentir cette catastrophe à travers l'histoire de Guillaume et Nathalie où il y a beaucoup de changement de situation, au moment ou Nathalie raconte sa triste mésaventure à Guillaume. Je vous invite à lire ce roman et vous laissé emporter par une nouvelle manière d'écrire avec beaucoup de passion comme l'a fait Yanick Lahens. Ce fut une très agréable lecture.
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Guillaume et Nathalie

Troisième livre de Yanick Lahens que je lis, et j’avoue être un peu déçue.

Comme d’habitude ça se passe en Haïti, et on sent l’amour de Yanik Lahens pour son pays.

Ici, elle raconte l’attirance entre Nathalie et Guillaume, qui travaillent sur le même projet.

Lui est sociologue, elle est architecte.

C’est un livre très intime et sensuel.

Deux êtres sans illusions qui se trouvent sans s’être cherchés.

L’auteure est toujours lucide et sans complaisance, mais tendre et bienveillante pour un pays et un peuple qu’elle affectionne particulièrement.

Je ne sais pas pourquoi j’ai moins aimé celui-ci.

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Guillaume et Nathalie

C'est l'histoire d'un désir dont on sait dès le début qu'il sera assouvi, que l'on va voir naître au fil des rencontres entre Guillaume et Nathalie.

Ce qui compte aussi, c'est le lieu et l'environnement dans lesquels se déroule cette histoire.



A la veille du terrible tremblement de terre du 12 janvier 2010, Nathalie et Guillaume font tous deux partie de la classe moyenne noire de la population haïtienne.



C'est que Haïti est la "première république noire" qui "maintenait encore ses rites des colonies", où une noire n'a encore sa place au milieu des mulâtres, des quarterons et des chabins que debout devant les fourneaux.

Un pays où, "puisque tous les pays des Noirs se ressemblent", les experts arrivés de Paris "ne connaissent déjà trop bien Haïti pour s'être acquitté de plusieurs maisons en Afrique."

Un pays où les paysans pauvres venus de leur campagne ont rattrapé la classe moyenne noire, cohabitant ensemble et partageant les mêmes problèmes de voirie et d'eau.

Un pays où il n'y a pas assez de biens et trop de gens



C'est tout cela que nous restitue Yanick Lahens, dans sa langue tantôt âpre, tantôt poétique mais parfois hermétique.

Il me semble qu'une connaissance préalable d'Haïti est nécessaire pour saisir l'ensemble des allusions et des situations.

Il n'empêche que l'on vit de beaux moments et que l'on assiste à des descriptions intenses tout au long de ce court roman.
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Guillaume et Nathalie

Ce roman était une déception. Yanick Lahens présente deux personnages représentants de la classe moyenne en Haïti : un sociologue et une architecte qui vont vivre une histoire torride. Le rapprochement des êtres se fait sensuel et constitue l'essentiel du roman. Le contexte social, les fractures de la société haïtienne, les préjugés raciaux qui perdurent, sont à peine évoqués, tout comme l'état du pays et les impasses politiques, malgré tant de bonnes volontés. Du coup, seules les relations hommes - femmes dans ce pays sont mises en avant.
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L'oiseau Parker dans la nuit et autres nouv..

Des textes bouleversants où les thèmes et le style de l’écrivaine, tout en intériorité, force et finesse, résonnent avec un déhanché bluesy ou déchirant.
Lien : https://www.actualitte.com/a..
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La couleur de l'aube

Depuis longtemps, Haïti fascine. Quand la terre tremble, quand l’Etat capitule, lorsque les hommes se battent pour vivre mieux ou pour vivre seulement… Port-au-Prince et ses habitants suscitent l’intérêt jusque dans la richesse de sa littérature. Comme nombre d’auteurs haïtiens autour d’elle, Yanick Lahens puise dans son quotidien la matière dont ses livres sont faits.







« La vie tue d’abord les cœurs purs » . Au départ de l’histoire, un drame. Angélique et Joyeuse découvrent un matin que leur jeune frère Fignolé n’est pas rentré. Leur mère aussi a vu le lit fait. Militant déçu du « Parti des démunis », rêveur et musicien, il est une proie facile pour la rue. Dans un contexte apocalyptique, cette disparition est des plus inquiétantes. Les émeutes sanglantes de la veille, auxquelles il semble avoir participé, laisse présager le pire. En trente courts chapitres, incroyablement fluides et poétiques, vont s’alterner les voix de ces deux sœurs qui nous présentent, chacune à leur manière, un quotidien misérable où règne pourtant en maître le désir de survie.





Portraits. Angélique est une fille-mère de trente ans qui traîne son buste droit du banc de l’Eglise aux couloirs de l’hôpital dans lequel elle travaille. Soucieuse mais contenue, brisée mais droite, elle tente de faire vivre sa petite famille en repoussant tout ce qui pourrait agrémenter son quotidien. Sa sœur cadette, Joyeuse, représente l’engouement, la joie et la vitalité. Elle occupe une place prisée dans un petit magasin luxueux du centre ville. Grâce à son oncle, elle a pu suivre des études qui l’ont aidée à se faire une maigre place dans la société haïtienne. Dévorée par l’ambition, révoltée par son quotidien, elle contient difficilement sa colère et sa rage en toute circonstance. Contrairement à sa sœur, elle rejette toute forme d’autorité, qu’elle soit politique, culturelle ou religieuse et joue du rapport de force qu’elle instaure entre elle et les hommes par sa beauté. Toutes les deux vivent encore sous le toit de leur mère, une vieille femme que le poids des malheurs commence à voûter mais qui résiste à l’âpreté du quotidien.





Pendant la journée, chacun mènera l’enquête à sa manière : Angélique la raisonnable porte plainte auprès du commissariat et se heurte à l’incompétence des fonctionnaires dans un pays en faillite. Joyeuse fouille les affaires de Fignolé et trouve une arme, un papier avec des coordonnées téléphoniques et le nom d’Ismona, l’amoureuse de Fignolé. Mère cherche dans les rites vaudous et l’évocation des esprits les réponses que la réalité lui refuse. Si la mort de Fignolé plane sur chacun d’entre eux, aucun ne renonce à trouver la pénible vérité. Parce que se battre, c’est vivre encore. Et qu’ils n’ont rien d’autre à faire.





Une mosaïque douloureuse. Dans ce second ouvrage de l’écrivaine Yanick Lahens, les personnages n’ont pour seule réalité que les sentiments qui les animent. Mais ceux-ci ont maintes et maintes fois été partagés par les Haïtiens et prennent tout leur sens lorsqu’il s’agit de parler du quotidien de l’île. Dans sa manière de peindre une société en difficulté, où vivent des hommes tantôt vaillants, tantôt vaincus, elle s’inscrit parfaitement dans une longue tradition de littérature afro-caribéenne. Réalistes et éprouvants, ces propos sont riches d’une langue soignée, d’un rythme maîtrisé et d’une orchestration du récit parfaite. Il y a Gabriel, l’enfant innocent déjà devenu le témoin silencieux de la violence du monde dans lequel il vit, Ti-louze, la bonne noire, battue pour n’être que ce qu’elle est, John, le jeune blanc arrogant et prétentieux, porteur de toute la morale occidentale et tout aussi incapable que les autres d’apporter des solutions concrètes aux problèmes quotidiens, Mme Jacques la riche patronne de la boutique dans laquelle travaille Joyeuse, qui illustre parfaitement la classe supérieure méprisable de l’île, Lolo la jeune courtisane intéressée par « l’argent qui ouvre les frontières »…





L’auteure. Malgré sa triste réputation de pays pauvre et désorganisé, l’île d’Haïti a une longue tradition littéraire. Elle est riche d’une grande communauté d’auteurs en diaspora, telle que Dany Laferrière ou Louis-Philippe Dalembert, et regorge d’écrivains qui témoignent des réalités de leur île de par le monde. Yanick Lahens appartient à cette catégorie de la population soucieuse de témoigner de son histoire quotidienne, des aspirations déçues de sa jeunesse et de l’incroyable vitalité qu’elle abrite néanmoins. Née en Haïti en 1953, elle a effectué une grande partie de son parcours scolaire en France avant de retourner s’installer à Port-au-Prince où elle a travaillé comme universitaire, conseillère du Ministère de la Culture et écrivain. Comme le disait le poète haïtien René Depestre avant elle, « La littérature haïtienne est « au bouche à bouche avec l’histoire » ; dégager la création littéraire de la vie politique de l’île quel que soit le stade de l’histoire d’Haïti observé, n’est pas chose facile, tant la première se nourrit de la seconde, y trouve souffle et inspiration. Et jusqu’à la dernière page de ce livre, on respire avec eux.
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La couleur de l'aube

L'aube. L'attente d'un nouveau jour, l'attente de ceux qui sont absents…



Au réveil, Angélique, Joyeuse et leur mère constatent que le plus jeune fils a découché. A t-il passé la nuit avec son amie ? Les membres de son groupe de musique ? Ou a t-il était victime des fusillades qu'elles ont entendu dans la nuit. Au cours de la journée, Angélique et Joyeuse s'interrogent sur le sort de leur frère. La peur monte dans une ville en état d'alerte où la menace est présente à chaque coin de rue. Les deux sœurs réagissent différemment à la violence et à l'attente jusqu'au moment où elles retrouvent leur mère le soir et qu'enfin, elles apprendront le sort de leur frère.



L'idée originale de passer d'Angélique à Joyeuse de chapitre en chapitre permet d'appréhender l'absence sous deux points de vue différents. Angélique la sage, la blessée, la vaincue. Joyeuse la sensuelle, la battante. Deux facettes que tout oppose si ce n'est l'amour qui les lie à leur frère dont le sort est incertain. Le livre retrace cette journée d'attente et de recherches. Mais aussi d'apartés sur la vie de cette famille pauvre, des moyens employés pour survivre et pour essayer de sortir du cycle infernal de la misère. Malgré les monologues des deux sœurs, nous en savons peu sur le fond. Cela tient plus de la nouvelle. Les personnages ne sont pas assez approfondis, les faits qui amènent à cette journée d'incertitude, non plus. Tout au moins pour quelqu'un qui ne connait pas la politique haïtienne. Même la date n'est pas connue. Au départ, je pensais aux années 60… jusqu'à l'utilisation intensive du téléphone portable !



En résumé, c'est un lire qui se lit vite mais s'oublie aussi vite. Dommage, il y avait tout à apprendre sur ce petit pays francophone.

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La couleur de l'aube

Yanick Lahens, La couleur de l’aube, chez Sabine Wespeiser.



Il serait tentant de comparer ce récit à une œuvre musicale en trois mouvements : l’inquiétude, la colère, la douleur et la haine. Mieux vaudrait parler de voix : on entend celles des sœurs de Fignolé, étonnées au matin de ne pas trouver leur frère au domicile familial. Chacune garde pour soi ses craintes, ce qui les rassemble est ce silence plein d’appréhensions sur l’absence du frère, si proche affectivement qu’il occupe toutes leurs pensées



Les rôles dans cette famille de Port-au-Prince en Haïti sont bien définis :



« Face à l’irrémédiable et l’infernal (1), nous allions réagir tous les trois de façon différente : Fignolé dans la bravade absolue, dans l’entêtement mettre en distance les séductions qui tendent de faire oublier la cruauté du monde. Joyeuse dans l’affrontement de biais. Et moi dans la soumission au monde tel que Dieu l’avait crée. »



(1) la vie à Haïti dont on sait que l’arbitraire est érigé en système politique.



La construction soignée de ce récit autorise pourtant le flottement des personnages, et en particulier d’Angélique, la principale narratrice. Par sa voix, la vie d’Haïti nous parvient dans ses aspects domestiques, et surtout une existence imprévisible : d’un moment à l’autre tout peut basculer de l’espoir à la douleur, de l’attente au deuil. Par sa bouche, l’émotion nous est directement transmise :



« Fignolé, tu me manques comme un membre amputé, comme un enfant mort-né. Rien ne pourra remplacer l’espace dans lequel tu bougeais, marchais, gémissais, parlais et criais ta douleur au monde. Rien ne pourra remplacer ta main dans mes cheveux, tes bras autour de mes épaules. Ta voix qui me disait : « Petite sœur, comme je t’aime. »



Ecouter, Bob Marley, redemption song.

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La couleur de l'aube

Ce beau roman nous introduit dans la vie d'une famille haïtienne. A tour de rôle, les membres de cette famille racontent leur quotidien. La mère, abandonnée depuis longtemps par son homme, adepte du vaudou, est la modératrice du groupe. La fille aînée, Angélique, est comme une petite fourmi, travaillant pour élever son fils et subvenir aux besoins de la famille. La cadette, Joyeuse, obsédée par les hommes, a un caractère plus flamboyant. Le fils, Fignolé (sic !), est un musicien, contestataire et inadapté à la société; au début du roman, on constate qu'il n'a pas rentré chez lui et sa famille craint qu'il ne lui soit arrivé malheur. Il faut dire que, en Haïti, la vie quotidienne est rendue très difficile par la misère, la violence et l'arbitraire des autorités en place. La classe populaire, à la fois malheureuse et pleine d'énergie, survit au jour le jour. Les dieux du vaudou ne sont jamais loin des hommes et surtout des femmes. Ce ne sont pas seulement quelques personnes que nous voyons évoluer dans leur microcosme, mais tout leur environnement. L'auteur rend très bien l'atmosphère particulière qui imprègne la société haïtienne et qui n'existe évidemment pas dans les pays développés. J'ajoute une mention spéciale: j'admire la prose d'Yanick Lahens , qui me semble de toute beauté.
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La couleur de l'aube

Haïti n’a franchement pas La couleur de l’aube, titre de ce court roman. L’aube est juste attendue dans l’espoir de passer à une autre journée, de ne plus entendre les tirs au loin, de savoir. Angélique,mère célibataire de 27 ans travaille à l’hôpital de Port-au-Prince. Elle partage un modeste foyer avec sa mère, sa soeur Joyeuse et son frère Fignolé. Ce dernier n’est pas rentré de la nuit or il cache une arme dans la maison et militait pour le parti des Démunis. Il « traîne aujourd’hui un désespoir qui lui brûle le sang. » . Chronologiquement le roman se situe dans les années 80, Baby Doc vient d’être renversé. L’inquiétude et la peur ne se disent pas au sein de la famille. Yanick Laurens va nous la conter avec la voix d’Angélique à la force des images, des tournures poétiques et du dialecte de là bas. La syntaxe du texte n’est pas facile à lire et vous plonge dans une profusion d’allégories qui m’a perturbée. Les croyances populaires, l’hypocrisie de la religion ne suffisent pas à couvrir la violence de l’homme, l’omniprésence de la mort et de la boue en Haïti. « Dieu, s’il a créé ce monde, je lui souhaite d’être torturé par le remords. » ... j’ai bien entendu votre message Yanick Lahens et je comprends votre révolte. Heureusement, j’ai été tout autant touchée par le profond amour exprimé au sein de cette famille caribéenne et la force incroyable des figures féminines.
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La couleur de l'aube

Dans une Haïti pleine de misère, de sexe, de haine et de révolte, la fille mère bigote et méchante Angélique et son appétissante sœur Joyeuse attendent leur frère Fignolé qui a passé la nuit avec les insurgés.



Je suis peu sensible à ces voix qui ressassent, desquelles sourd une certaine poésie lourde, statique, triste.

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La couleur de l'aube

Ce livre a obtenu en 2009 le tout premier Prix Richelieu, décerné par le Club Richelieu International Europe, à un auteur qui a écrit en français alors que ce n'est pas vraiment sa langue maternelle. Depuis lors, elle a fait son chemin et obtenu le Fémina pour un autre roman en 2014.
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La couleur de l'aube

Une journée dans la vie de deux soeurs et de leur mère. Fignolé, le frère ou le fils n'est pas rentré. Joyeuse et Angélique, les deux soeurs, tour à tour, évoquent le quotidien de leur vie à Port-au-Prince, au milieu de la misère, la violence, l'absence des pères dans une ville impitoyable.

Joyeuse aime la vie et travaille comme vendeuse dans une boutique de luxe. Angélique est infirmière et se dévoue corps et âme à ses malades. Elle cherche la rédemption à l'église évangélique, elle a péché : elle a un fils naturel et doit expier. Tout au long de cette interminable journée, les soeurs et la mère vont partir à la recherche de ce frère aimé, mais révolté, en colère, la rage au ventre. Très beau texte, écriture magnifique.
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La couleur de l'aube

Un récit d'une grande force. Une écriture ample et agile, des personnages d'une belle puissance d'âme. Ces 213 pages se boivent avec aisance. Cette lecture donne assurément l'envie de découvrir les autres oeuvres de l'auteur.
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La couleur de l'aube

Sublime. Une écriture d'une immense beauté qui m'a profondément touchée et un récit prenant corps à Haïti d'une immense puissance.

Je vais m'empresser de continuer à découvrir son oeuvre.
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La couleur de l'aube

N°981– Novembre 2015



LA COULEUR DE L'AUBE - Yanick Lahens – Sabine Wespiesser éditeur.



Ce sont deux jeunes femmes, Angélique et Joyeuse qui alternativement s’expriment tout au long de ce texte. Angélique, l’aînée, est sage et soumise, vouée à Dieu et à ses ses malades de l’hôpital, travailleuse et aidante pour sa mère, partage avec son frère et sa sœur une petite maison dans les faubourgs de Port-au-Prince. Joyeuse est tout le contraire, belle et rebelle, sensuelle et sexuelle, gourmande de vie, elle est vendeuse dans une boutique de luxe et attend qu'un homme s’intéresse vraiment à elle et aspire à une vie meilleure malgré la misère et la violence qui font son quotidien. Fignolé, leur frère, qui ne vit que pour la musique, est incapable de s'insérer dans la vie en dehors du parti des Démunis où il milite et qui semble être sa boussole. Il n'est pas rentré de la nuit et l'aube angoisse Angélique qui n'a cessé d'entendre des tirs dans le lointain à cause d'une émeute contre le gouvernement. La mère est vouée au vaudou dans cette famille monoparentale que le géniteur, un homme « rusé et vantard » a quitté depuis longtemps.

Il y a d'autres personnages dans cette vie, le pasteur Jeantilus dont nous parlera Angélique mais aussi John, l'Américain, le journaliste-humanitaire qui a choisi leur famille pour réaliser une œuvre charitable mais qui n'est pas vraiment accepté et qui ne réussit pas dans son entreprise à cause de son arrogante utopie face à un peuple noir qu'il considère comme inférieur. Gabriel, le fils d'Angélique, témoin de tout cela et qu'elle considère comme responsable de sa solitude. Tout en attendant un homme, un mari, elle élève son fils dans la crainte de Dieu, loin de l'exemple de sa parentèle, coincée entre superstition, utopie et légèreté. Pourtant, elle porte cette maternité comme une faute, victime d'un homme disparu, comme pour sa mère avant elle. Fortuné qui, en vrai caméléon, s'adapte aux circonstances au détriment des autres, Ti-Louze, la bonne noire, Mme Jacques qui illustre la classe qui domine l'île...



C'est donc un récit à deux voix d'où sourd une sombre angoisse qui est déclinée à travers ces deux voix de femmes, deux monologues alternatifs. Il s’inscrit dans l’unité de temps d'une seule journée pendant laquelle se déroulera cette enquête familiale de ces trois femmes pour retrouver ce fils et aussi une sorte d'unité d'action qui se décline dans les trahisons politiques, les enlèvements, le chaos, la violence quotidienne d’Haïti vouée à la violence et à la mort mais aussi dans l'appétit de sensualité.



Le style est simple, sensuel, dépouillé, poétique [J'ai même lu certains passages à haute voix pour goûter la musique des mots]. Pour l'auteur l'écriture est une thérapie dans cet univers douloureux qu'est celui de son pays. Elle en porte un témoignage littéraire, émouvant et révélateur de la réalité politique et économique d’Haïti.



Après la lecture de « Bain de lune »- Prix Fémina 2014 (La Feuille Volante n°855) qui m'avait bien plu, j'ai lu ce roman comme une fenêtre sur la culture haïtienne, la religion chrétienne d'Angélique, fortement teintée de superstition noire et le vaudou et ses rites de sa mère, mais aussi sur son quotidien fait de misère et de violences du clan Duvalier. J'y ai lu la beauté et la sensualité des femmes caribéennes, la déliquescence d'une société en train de mourir entre la violence, la drogue et la mort.



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La couleur de l'aube

« Au cœur des ténèbres… »



par Issa Asgarally



"La couleur de l’aube", Yanick Lahens, Editions Sabine Wespieser, Prix RFO du Livre 2009.



C’est l’un des plus beaux romans qu’il m’est arrivé de lire cette année. Je l’ai découvert en tant que membre du jury du Prix RFO du Livre 2009. Et je ne me suis pas trompé sur ses qualités.« La couleur de l’aube » de Yanick Lahens a remporté le Prix avec six voix sur huit.



Deux sœurs, Angélique et Joyeuse, cherchent leur jeune frère, Fignolé, qui n’est pas rentré. Elles sont inquiètes, car toute la nuit le crépitement de la mitraille s’est fait entendre. Au fil de la journée et de leur enquête, elles dessinent de la ville de Port-au-Prince, capitale d’Haïti, une géographie apocalyptique. Toute l’histoire de l’île y défile, de « Papa Doc » Duvalier à nos jours, en passant pas « Bébé Doc » et le Prophète-Président : « Port-au-Prince, poste avancé du désespoir. Il y a toute la malfaisance secrète inscrite dans ses murs depuis deux siècles. La descente aux enfers de la ville a commencé depuis trop longtemps pour que je me plaigne. »



C’est Angélique qui découvre l’absence de Fignolé. Infirmière dans un hôpital qui manque de tout, elle se réfugie dans la prière avec obstination : « Comment ne pas prier Dieu dans cette île où le Diable a la partie belle et doit se frotter les mains. » Mère-célibataire, victime jadis de la trahison d’un homme « rusé et vantard », elle élève son fils dans « la crainte de Dieu ».



Joyeuse est tout à fait différente de sa sœur. Grande, pulpeuse, sûre d’elle et « sexuelle », c’est la fureur de vivre, l’insoumission, la révolte. Elle avoue qu’elle a soupesé les divinités illégitimes, vaudou de leur mère et le dieu respectable, chrétien d’Angélique, et qu’elle est restée sur sa faim : « J’ai choisi la lumière, le vent et le feu. Dussent-ils m’aveugler. Dussé-je y laisser ma peau. »



Sur le plan formel, le roman est une alternance de deux récits à la première personne, celui d’Angélique et celui de Joyeuse. Fignolé et les autres personnages sont donc vus à travers un double regard. Sans oublier le regard croisé des deux sœurs, l’une sur l’autre.



Les personnages sont denses, inoubliables. Fignolé, habité de musique et de poésie, est un militant déçu du Parti des démunis, dont le leader a trahi! La Mère, en écoutant chaque matin les voix à la radio épeler les malheurs de l’île, déclare qu’elle est déjà morte même si son corps n’exhale pas encore une odeur de cadavre. John, journaliste américain, suit Fignolé sur les barricades et gagne sa vie, comme le dit Joyeuse, à aimer les pauvres ! Maître Fortuné, vrai caméléon, a l’art de « prendre la couleur du pouvoir du jour et teindre sa langue et son cerveau »…



L’écriture de Yanick Lahens est économe, finement ciselée, magnifique. Je pourrais citer la plupart des phrases du roman pour l’illustrer. A commencer par la première : « J’ai devancé l’aurore et j’ai ouvert la porte sur la nuit. ». Ou encore celle-ci : « Dans cette île, dans cette ville, il faut être une pierre. Je suis une pierre. » Mais l’un des extraits les plus percutants est bien la description que fait Joyeuse d’une banlieue de Port-au-Prince : « A côté des chiens et des porcs, surgissent souvent des silhouettes sinistres. Le dos voûté, elles se mélangent aux bêtes. Quand elles ne leur disputent pas des restes, elles fouinent furtivement à leurs côtés dans la puanteur et la pourriture des immondices. Je me suis souvent penchée, les paupières à demi fermées, la main sur le front pour mieux voir et me convaincre que ces créatures-là n’étaient ni des chiens, ni des porcs mais des chrétiens vivants comme vous et moi, hommes, femmes, enfants, vieillards qui n’ont d’autre choix que de se lever, de vivre, de manger, et de faire là des enfants et leurs besoins. Des centaines de milliers d’êtres venus en ville comme au Paradis et qui n’y ont trouvé que cet enfer à ciel ouvert. Dieu, s’il a créé ce monde, je lui souhaite d’être torturé par le remords. »



Je suis toujours sensible à la fin d’un roman, ou plutôt à ce qui se passe après la fin ! Je ne peux pas être mieux servi que par « La couleur de l’aube » ! L’un des événements les plus importants du roman se passe après le mot « Fin ». En effet, Joyeuse, qui mène l’enquête jusqu’au bout, découvre enfin les faits entourant la disparition de Fignolé et décide de réagir. En utilisant le revolver qu’elle trouve parmi les affaires de son frère. Mais cela est annoncé subtilement à la fin de son récit : « Je pense à l’autre. Au traître. A la robe moulante que je mettrai ce jour-là. A mes talons aiguilles. Au rouge carmin dont je dessinerai mes lèvres et à cette chose que je dissimulerai dans mon sac. ». Réussira-t-elle? Au lecteur de l’imaginer, de poursuivre le roman…



L’aube, dont il est question dans le titre du roman, n’est finalement pas celle du début, mais l’aube de « ce jour-là » : « J’entends Angélique qui se réveille. La nuit craque de tous les côtés. L’aurore est déjà là. »



Lisez et relisez « La couleur de l’aube ». Pour voir comment Yanick Lahens, qui vit en Haïti, construit l’allégorie d’un pays où la monstruosité voudrait se faire loi, mais où, à chaque page, éclate la volonté de vivre.





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La couleur de l'aube

Huit ans après sa parution, La couleur de l’aube est réédité en poche, et c’est une excellente initiative.

Une grande humanité se dégage de ce roman.

Que Yanick Lahens décrit bien son pays ! Dès les premières pages on est pris dans un tourbillon de couleurs, de senteurs, de violence, au milieu d’une population sans espoir, démunie et désorganisée Pour se faire l’écho de son peuple, elle utilise deux sœurs inquiètes de la disparition de leur jeune frère, Fignolé, qui mène sa vie « à fleur de mal ».

Angélique, l’ainée, fait partie des vaincus, des résignés.

Joyeuse, la cadette est tournée vers la vie, la joie, la rébellion.

Leur mère les protège tous trois d’un amour inconditionnel et bienveillant.

Misère, incertitude, violence et peur sont le quotidien des personnages. Paradoxalement, à tous les rêves déçus se mêle la joie de vivre.

L’écriture est poétique et envoutante. Il y a, chez Yanick Lahens comme chez Dany Laferrière, un amour et une désespérance de leur pays qui sont traduits par une écriture forte et poétique. Les lire, c’est s’éprendre d’Haïti, c’est ressentir une compréhension et une compassion sincère pour les haïtiens.

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La couleur de l'aube

Je ne saurais trop quoi dire face à ce roman d'une auteure haïtienne que je ne connaissais pas avant que je me mette à chercher un certain mot dans un titre pour valider un challenge sur notre Ronde des livres.

Certes c'est un roman à la sensibilité certaine mais ce ne fut pas la mienne, je suis restée hermétique face à cette écriture pour laquelle je n'ai pas trouvé de défauts mais qui ne m'a fait aucun effet à la lecture.

Je suis sûre que je suis passée à côté de quelque chose de fort, les personnages n'étaient pourtant pas inexistants, les soeurs bien différentes de par leurs portraits et en constante inquiétude face à leur frère qui n'était pas rentré à la maison... Des descriptions correctes aussi mais il m'a manqué ce petit quelque chose qui a fait que je n'ai pas accroché à l'histoire en elle même.

Bon, j'aurais tenté mais les choix ne sont pas toujours une réussite.
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La couleur de l'aube

Joyeuse est une pulpeuse gamine de 23 ans qui « a une foi inébranlable dans son rouge à lèvres, ses seins et ses fesses ».



Angélique, sa sœur ainée, est « la sage, la mère sacrifiée, la fille soumise, la sœur exemplaire » dévouée à ses malades à l’hôpital. Et leur Mère préfère ne pas s’acheter des vêtements ou de la nourriture plutôt que de ne pas honorer sa grande famille de Dieux africains.



Récit à deux voix – les deux sœurs - , « La couleur de l’aube » concentre, chacune avec sa tonalité, l’angoisse quotidienne qui sourd dans la ville de Port-au-Prince. A elles deux, Angélique et Joyeuse forment les deux faces d’une même réalité. A deux voix, elles dessinent un portrait de Fignolé, leur frère qui n’est pas rentré de la nuit. Fignolé qui n’a « jamais accepté d’être embrigadé par aucun dogme, aucun uniforme, aucune doctrine. « Fignolé qui se trouve incapable de s’inscrire dans la vie. Fignolé qui traîne aujourd’hui un désespoir qui lui brûle le sang. Et Fignolé que personne n’a vu depuis la veille.



Elles ont juste une journée. Une journée pour enquêter et essayer de retrouver une trace de leur frère musicien, enragé contre le parti des Démunis, qui s’est retourné contre ses supporters.



Joyeuse, qui travaille comme vendeuse dans une boutique de luxe, est dans l’attente : « D’un homme. Un seul. Un homme ordinaire. Un homme, vœu de mes jours. Envie de mes nuits. Un homme qui mange ma vie. Un homme tapi dans la longueur de mes hanches. Un homme dont l’absence descend en pente douce jusqu’au haut de nos cuisses. » Sensuelle, elle pense qu’elle a des « fesses à emballer tous les trottoirs ». Elle n’a pas le temps, elle avale la vie par les deux bouts, mais pour la première fois elle a vraiment peur pour son frère.



Angélique, pendant ce temps s’abstrait dans la religion et fréquente notamment les Pentecôtistes, sous la férule du célère Pasteur Jeantilus qui harangue les foules et fait chanter ses ouailles. Au cours du récit elle lèvera le voile sur la naissance de Gabriel, son fils, dans un moment d’abandon.



Et leur mère qui, quelques mois après la naissance de Fignolé, retrouva sa condition de femme sans être obligée de vivre avec un homme au quotidien est celle qui tient l’édifice de la famille à bout de bras. « Mère eut un mari, beaucoup d’amants, mais aucun homme ne la posséda. Il ne lui apprirent pas grand-chose hormis certains gestes au lit. Ne lui donnèrent rien à part quelques dollars. Mère n’est pas femme à acheter la paix d’une maison en vendant son âme. »



Il y a aussi John, l’Américain humanitaire, qui a choisi la famille de Fignolé pour faire son œuvre charitable, « Venu se défaire de son ennui de gosse de riche en semant la pagaille chez les pauvres qu’il admire comme d’étranges animaux debout sur deux pattes. « John, dont Angélique dit que : « c’est tellement facile d’être gentil et bon et d’inventer des histoires de livres et de cinéma. John a un avenir. Nous n’en avons pas. Il y a des gens riches. D’autres pauvres. Nous serons toujours pauvres. John toujours riche. John n’est pas des nôtres et ne le sera jamais. »



Concentré sur une seule journée qui commence tôt le matin et va s’achever très tard dans la nuit, les trois femmes tentent d’occulter l’angoisse qui monte au fur et à mesure de la journée. Pourtant dès le matin à la radio, elles ont entendu qu’une émeute a eu lieu la veille au soir contre le gouvernement en place …



Et puis il y a surtout Port-au-Prince. Haïti vit la violence quotidienne à l’image de cette scène que vit Joyeuse où « un étudiant, blessé à mort m’a fixée de ses yeux révulsés. Celui qui l’a tué était debout, en face de moi. En guenilles, ensauvagé jusqu’à la moelle, il avait à peine seize ans : sans passé, sans avenir, sans parenté, une nature à nu, une plaie frottée à sang. »





Un style précis, condensé, qui évoque celui de William Faulkner à qui Yannick Lahens a consacré un essai. Une écriture sensuelle, sensible, poétique qui vous enveloppe comme une mélopée envoutante. Un récit poignant, vécu en « vingt quatre heures chrono », où l’auteur réussit le tour de force de ne jamais s’apitoyer sur le sort de ses personnages, qui courent tous pourtant tout droit vers le désastre.


Lien : https://www.biblioblog.fr/po..
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