Citations de Ysabelle Lacamp (103)
La lâcheté des hommes serait-elle le seul moyen qu'ils aient trouvé pour préserver leur tranquillité ?
[…]
Tout de même, s’habitue-t-on à ne plus être qu’un
numéro ? Une petite boîte, une allumette tiens, qu'on
empile sur des milliers d'autres petites boîtes, qu'on
aligne à côté de milliers d'autres allumettes : numéro
185 443, mesdames et messieurs ! Et hop, comme ça,
sorti du chapeau ! Si ça vous fiche pas un coup à l'égo !
p.101
Il n’aperçut derrière lui qu’une femme blonde plutôt jolie qui le regardait au loin d’un air totalement égaré en retenant sa jupe qui menaçait de s’envoler… Une Européenne qui sans doute n’avait plus ses esprits…
Rien n’est trop beau pour apaiser la nostalgie de l’époux qui s’en retourne du Continent aux Chimères. Rien n’est trop coûteux pour soigner l’accueil de celui qui s’apprête à retrouver la terre meurtrie de ses Ancêtres.
Dans le fond, partir comme un voleur après cette nuit blanche, où il semblait avoir sucé jusqu’à la moelle les dernières heures qui lui restaient dans la capitale, n’était pas la plus mauvaise façon de faire ses adieux à la France.
– Je ne vous oublierai jamais, lui avait-elle chuchoté.
– Je ne NOUS oublierai jamais, avait-il rétorqué.
… L’hiver a toujours été jaloux des fleurs.
En rentrant dans ma chambre, je m'aperçus alors que si je m'étais laissé enlever ma culotte, ma pudeur m'avait fait oublier d'ôter mes gants. Je pensai à ma mère. les conservait-elle, ses petits gant à la liséré blanc, lorsqu'elle se retrouvait dans es bras de son "Farang"?
Etrange, comme on peut être aveugle lorsque l'on veut pas voir !
L'amour, ça ne se décline pas comme dans les livres. C'est dans l'instant qu'il faut le vivre.
Notre comportement dépend de notre héritage émotionnel autant que du contexte culturel dans lequel nous vivons.
Une jeune fille bien comme il faut, si calme, si studieuse, trop parfaite peut-être.
Moi, je n'avais pas envie de penser qu'il se jouait de moi. Alors, je mettais la tête sous mon aile, et je me taisais en écoutant la mer monter tout bas.
Il avait patiemment attendu que les nuages gorgés de pluie qui passaient dans ses yeux veuillent bien s'en aller plus loin.
J'ai coupé les ponts avec ma famille. Plus rien ne me lie à personne. Ivresse de l'inconnu. Impression de naître pour la seconde fois, de me trouver tout nue devant mon destin comme dans ce drôle de cauchemar que je faisais petite fille.
(p.15)
Soudain tout bascula. Sans montrer plus de résistance, Shu-Meï se laissa envelopper par les bras protecteurs. Dans un élan désespéré, le silence venait de s'abattre sur leurs deux solitudes.
(p.98)
… Songez que je suis une femme libre, que j’aurai d’autres amants, que je ne mérite en aucun cas que vos pensées s’attardent sur moi !
Au Japon, perdre la face devant son Empereur aurait signifié se faire seppuku sans plus tarder afin de laver l’honneur perdu de sa famille et de son pays en se poignardant le ventre. Un long coup sec décoché avec ferveur et dévotion, tandis que le monde, basculant tout autour, reprendrait comme par magie vie et couleurs. Une forme de suicide qui n’existait pas encore en Corée mais dont l’esthétique symbolique le séduisait.
Le parfum d'Eléna. Ses fous rires soyeux, sa démarche d'angora.
Et puis l'éclat de ses yeux : deux myosotis qui rient ce matin au-dessus d'une gerbe de lys.
Un geste qu'elle renouvelle souvent ces derniers temps, "parce que privée d'une présence féminine, cette maison ne voit jamais de fleurs". Vite, ces pauvres mignonnes, les faire tremper dans un vase. Yu-Pok lui a déniché une sorte de potiche chinoise, "une de ces japo-niaiseries", comme elle les appelle, ou encore "l'un de nos petits miroirs d'Orient", tant il est vrai que cette mode orientaliste tourne au fétichisme.
- N'est-il pas curieux de constater à quel point notre Occident s'obstine à recherche son identité à travers votre passé ? fit-elle un jour remarquer à Il-Hwan. Quand vous-même n'espérez trouver un salut que dans notre progrès !
- N'est-il pas curieux de constater à quel point seul l'ancien chez vous a de la valeur ? avait repris Il-Hwan aussi sentencieusement, quand chez nous, il ne devient intéressant que neuf.
Eléna avait ouvert des yeux énormes.
- Comment ça ?
- En prisant la copie plus que le modèle !
- Mais c'est du plus mauvais goût !
- Ne nous comprendrons-nous donc jamais ! avait soupiré Il-Hwan, vexé.
Nous ne sommes plus habitués à souffrir et à crever dans le froid pour un quelconque idéal. La société de consommation a fait de nous des veaux, des pantouflards incapables du moindre effort sur nous-mêmes. On voudrait faire une guerre aseptisée, sans trouver de résistance, sans voir de morts, ni d'atrocités, avec un dîner chaud et une bonne douche à la fin de la journée... Seulement, comme vous avez pu vous en rendre compte, la guerre, c'est pas vraiment ça.