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Jacqueline Odin (Traducteur)
EAN : 9782743611460
216 pages
Payot et Rivages (07/11/2003)
3.5/5   9 notes
Résumé :
Un soir des années 1940, dans la maison mise en location par Mrs Lippincote après le décès de son époux, arrive un ménage composé de Julia et de son mari Roddy, de leur jeune fils Oliver et d’une cousine célibataire, Eleanor. La mère, l’enfant et la cousine viennent de quitter Londres pour rejoindre Roddy dans la petite ville campagnarde où son régiment d’aviateurs est basé depuis quelque temps. Julia est femme au foyer, Eleanor enseignante. L’installation se révèl... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
At Mrs Lippincote's
Traduction : Jacqueline Odin


Un premier roman a toujours des maladresses d'enfant accomplissant ses premiers pas, surtout si son auteur maîtrise la nouvelle. le premier roman publié - mais "Chez Mrs Lippincote" est en fait le second roman qu'elle ait rédigé - par Elizabeth Taylor n'échappe pas à la règle. On sent bien que l'Anglaise cherche ses marques et tâtonne un peu entre les multiples fils qu'elle tend sur sa toile pour entreprendre l'un de ces savants tissages dont elle a le secret. Mais, au bout du compte, l'ensemble finit par s'agencer et remporte l'adhésion du lecteur.

Le thème central : toujours les relations entre les êtres, bien sûr, pris dans un petit groupe contraints par la famille, le travail, les vacances ..., à se supporter les uns les autres. Pour habiller tout cela, l'histoire intérieure - mais jamais expressément avouée - d'une jeune femme d'officier qui, pendant le Blitz, rejoint son mari dans la petite ville de province où il a été muté. le couple a un fils, Oliver, de santé apparemment fragile et très attaché à sa mère, femme aimable, cultivée et virevoltante, dont on saisit d'emblée l'anticonformisme inné. En outre, la guerre a eu pour conséquence de leur dépêcher comme voisine à demeure Eleonor, cousine éternellement célibataire du mari - Rodney.

La petite famille recomposée s'est installée dans la petite villa de Mrs Lippincote, une veuve aisée du coin, qui se fait ainsi un peu d'argent. Par deux fois d'ailleurs, on entreverra l'ombre de Mrs Lippincote et celle de son chapeau (qui impressionne beaucoup Oliver, seul témoin de la visite que l'hôtesse vient faire par politesse à une Julia malheureusement absente.) Plus présente, plus inquiétante aussi car elle semble souffrir de troubles de la personnalité, la silhouette de la fille de Miss Lippincote, qui s'introduit la nuit dans la propriété et court droit à la chambre dans la tour, seule pièce toujours fermée à clef sur les instances de la propriétaire, mais qui n'est en fait qu'une sorte de lingerie remplie de toilettes plus ou moins excentriques.

Et puis, il y a le supérieur hiérarchique de Rodney, un colonel bien plus âgé que Julia mais dont on devine qu'il se met peu à peu à ressentir pour elle quelque chose qui ressemble bien à de l'amour. Pour des raisons qu'on mettra tout le roman à comprendre, c'est lui qui se trouve à l'origine de la venue de la jeune femme auprès de son mari.

Tout à la fin du roman, alors que le couple Julia/Rodney semble sur le point d'éclater, un coup de théâtre, plus ou moins créé par une Eleonor en pleine crise de mesquinerie, produit l'effet inverse. Mais non parce que Julia est follement amoureuse de son mari ou en raison de quelque chose du même genre : simplement parce que, plus intelligente et bien plus fine que son époux et sa cousine par alliance, elle était, depuis le début, au courant de la teneur d'un certain billet retrouvé avant le lavage dans les poches de l'une des vestes maritales ... et qu'elle en avait pris son parti.

Toute la subtilité d'Elizabeth Taylor est dans cette fin qui met aussi un terme au séjour du jeune couple et de leur fils chez Mrs Lippincote. Avec le soin unique, minutieux et quasi pointilleux que Taylor apporte à camper cette atmosphère de campagne anglaise submergée par les préoccupations guerrières du temps, ainsi que les personnages qui s'y meuvent, cachant tous ou presque au fond d'eux-mêmes une douleur muette ou une bizarrerie du caractère - comme le pseudo-amoureux gauchiste et éternellement moribond d'Eleonor - cette fin fait oublier les petites maladresses d'exposition et les quelques moments de flottement que l'on perçoit çà et là. ;o)
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Un des premiers romans d'Elizabeth Taylor, une grande dame de la littérature anglaise qui n'a pas le succès qu'elle mériterait.
Si vous trouvez que Flaubert a eu le génie de nous passionner pour des riens et qu'il surclasse Stendhal et de loin. Lisez Elizabeth Taylor, vous ne pourrez qu'aimer.
Si vous aimez les romans où l'auteur ne peut pas s'empêcher de sortir une théière toutes les trois pages pour pouvoir ironiser à son aise sur les personnages, leurs conventions incompréhensibles, leurs petites hypocrisies, que sais-je encore... bref si vous aimez les romans estampillés "so british". Lisez Elizabeth Taylor, l'atmosphère vous sera familière.

Si Flaubert vous déprime et les romans anglais vous ennuient...fuyez. Inutile de lire la suite, ce serait une perte de temps.

Alors le roman. J'imaginais trouver "chez Mrs Lippincote" plus de fraicheur, d'optimisme que dans des romans plus tardifs... il n'en est rien.
A trente ans, Elizabeth Taylor considérait déjà que la vie n'était jamais "si bonne qu'on croit". Même les enfants partagent ce réalisme désabusé, sans pour autant en devenir désespérant. Malgré leurs lâchetés, leurs petitesses, leurs incommunicabilités, les personnages nous intéressent et nous donnent envie de les accompagner jusqu'à la dernière page.
Julia rejoint son époux dans une ville de province durant la 2ème guerre mondiale. Elle est accompagnée d'Oliver son fils et d'Eléonor la cousine de son époux. Tels des coucous, la famille loue et prend possession de la maison de Mrs Lippincote, apparition fantomatique omniprésente qu'on entrevoit à peine.
Dans cet environnement étranger, Julia, Oliver et Eléonor sortent de leurs sentiers battus, font des rencontres ou retrouvent d'anciennes connaissances et se révèlent peu à peu à nous.
Ce pourrait presque être un roman d'apprentissage ou de non apprentissage à la Flaubert sur le mariage. Contrairement à Mme Bovary, Julia est lucide sur sa situation. Elle aime la culture et la "bonne littérature" (les soeurs Brontë notamment), goût qu'elle partage avec son fils et le lieutenant colonel de son mari.
Ce pourrait presque être un roman sur la condition féminine dans les années 40: Julia subit son mariage et Eléonor son célibat. Félicity, la jeune amie d'Oliver, vraie "garçon manqué" intrépide, incarne le futur changement.
Ce pourrait presque être un roman existentialiste: la vacuité de la vie, la maladie et la mort rodent. Elles onnt bien plus de présence que Mr Maffick, pasteur palot et même risible. le communisme, la réforme sociétale pourrait être une solution à la solitude humaine, comme est tenté de le croire Eleonor. Mais, influencés par les incursions de l'auteur dans l'esprit des uns et des autres, nous pouvons en douter.
En fait, c'est un peu tout çà mais pas seulement. Les personnages ne sont pas des archétypes, ils existent avec leur personnalité, dans un contexte donné, dans une époque donnée. Chacun de nous peut y appliquer sa grille de lecture et y trouver ce qu'il veut, comme dans la vie.


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Un livre étrange et plutôt pompeux mais on a tout de même le souhait de connaître la fin.
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Citations et extraits (6) Voir plus Ajouter une citation
[...] ... [Rodney] aurait voulu que le lieutenant-colonel rentre chez lui. Il était grand temps, outre le fait qu'Edwards et certains autres devenaient un peu bruyants et trop confiants. Mrs Fielding, le regard vitreux et accablé, demeurait assise, fascinée par Mrs Mallory, écoutait, comptait les perles, se trompait, écoutait, perdait le fil ... La tête de Roddy, quant à elle, tentait de s'envoler de ses épaules.

- "Boire ne nous intéresse pas," répliqua le lieutenant-colonel avec un égotisme magnifique. Julia fit pivoter son verre vide sur ses genoux. "Nous avons une conversation intime." Mais Roddy n'eut pas l'intelligence de s'en aller. Il ne lui venait jamais à l'esprit que sa présence pouvait parfois être indésirable.

- "J'essayais de découvrir quelque chose," dit le lieutenant-colonel, non parce qu'il s'était adouci envers Roddy mais parce qu'il savait exprimer de manière détournée ce qu'il ne pouvait dire carrément. "Votre femme me paraît mystérieuse. J'espérais découvrir le secret, ou un indice." Il regardait Julia tout en parlant.

- "Nous n'essayons pas de percer les secrets de Julia," déclara Roddy. "C'est elle qui essaie de percer les nôtres."

Pour la première fois, le lieutenant-colonel la vit affectée, contrariée. Ses mains tremblèrent sur ses genoux et se raidirent contre le pied du verre ; une marque rouge apparut sur sa joue comme si Roddy l'avait giflée. Pour atténuer sa fureur muette, Mallory s'abaissa à plaisanter. "Oh, ma chère, dites-moi quel est mon vice caché, selon vous.

- L'opium, sans aucun doute," parvint-elle à répondre d'un ton léger. ... [...]
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[...] ... Oliver Davenant ne se contentait pas de lire les livres. Il les humait, en aspirait des bouffées, s'emplissait les yeux de leur caractère et la tête, de la musique de leurs mots. Une émanation du livre lui-même le pénétrait jusqu'à la moëlle des os, comme s'il absorbait un soleil intense. Les pages avaient une personnalité. Il était de ces gens qui ne supportent pas la présence d'un livre terrifiant la nuit dans leur chambre. Quand il faisait beau, il le plaçait sur le rebord extérieur et fermait la fenêtre. Julia trouvait souvent un livre posé sur son paillasson.

En outre, il tombait amoureux au fil de ses lectures. Il y avait d'abord eu l'image d'Alice se haussant sur la pointe des pieds pour serrer la mains de Humpty Dumpty ; ensuite la petite Fatima dessinée par Arthur Rackham, son doux visage mat, les pièces autour de son front, son pantalon bouffant et son manteau brodé. Son visage d'enfant brillait d'excitation alors qu'elle introduisait la clef dans la serrure. "Non !" lui avait-il crié un jour à haute voix, souffrant le martyre.

A Londres, il se rendait tous les samedis matins à la bibliothèque municipale afin de contempler une image de Lorna Doone. Certaines fois, elle n'y était pas, et il repartait en se demandant qui l'avait empruntée, quel genre de maison l'accueillait ce week-end-là. Le dernier samedi avant le déménagement, il était allé lui dire au revoir, mais le livre n'était pas en rayon : il s'était donc assis à une table pour attendre son retour. Juste avant la fermeture de midi, il s'était approché de l'étagère, avait embrassé les deux livres qui encadreraient sa Lorna lorsqu'elle reviendrait et, après ce message d'adieu, il était rentré chez lui, en retard pour le déjeuner, le coeur vide. ... [...]
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A contempler la brutalité, on s'y habitue. C'est un moyen de protéger notre raison, de mettre une armure sur nos nerfs. si j'imaginais réellement ce que je suis en train de faire, je serais paralysée. C'est la première étape vers la perpétration d'atrocités contre des humains. Au début, vous éprouvez une répulsion nerveuse, ensuite vous acceptez, puis vous comptez dessus pour l'exaltation, et enfin pour le plaisir et l'extase. Alors vous êtes fichu, bon à exécuter. En fait, vous êtes fichu dès le milieu de l'échelle. Je suis sur le barreau du bas.
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Ils exécraient l'idée de faire de ce dernier jour un évènement, l'une de ces "dernières fois" auxquelles les adultes, dans leur sentimentalité, sont incapables de résister.
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A porter trop de fardeaux, on devient soi-même un fardeau.
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