Superbe livre qui nous plonge au plus profond de l'Inde et de ses croyances millénaires mettant face à face ceux qui refusent tout changement et s'arque boutent sur les traditions et ceux qui veulent en faire fi pour mener le pays sur la voie de la modernité.
Ramu le plus pauvre de Nandgaon ce pauvre village ne survit que grâce à la charité du patel le chef du village dont il garde le troupeau de chèvres. Ramu n'a rien à lui et on lui refuse le droit de posséder de la terre ou du bétail, il a même été relégué dans une maison en ruine à l'écart du village près de la forêt.
Lakshmi quant à elle a pu aller faire des études à l'université, mais son père ruiné va se suicider, et à 25 ans elle qui est toujours célibataire n'est plus rien dans cette société indienne.
Elle sera contrainte d'accepter un mariage arrangé, mais à son âge (en Inde 25 ans c'est trop vieux pour qu'une fille puisse se marier) et sans dot, seul un homme comme Ramu qui n'a rien à offrir peut accepter l'offre de la marieuse.
Lakshmi arrive donc avec son époux à Nandgaon et elle découvre un village isolé de tout, aucune route n'y mène, il n'y pas d'électricité. le village vit totalement replié sur lui-même comme il a toujours vécu depuis des siècles.
Un jour Ramu découvrira une vache perdue dans la forêt, le patel va l'autoriser à la garder, c'est une Junglee, une vache sauvage qui ne vaut rien, et qui ne vaut en tout cas pas la peine qu'on la fasse entrer dans le troupeau collectif du village. La vie n'en sera pas changée.
Oui mais….. Lakshmi va recevoir la visite de Manoj Mishra, spécialiste de l'insémination artificielle des vaches.
Sans rien dire à son mari et sans demander l'autorisation au chef du village, elle fera inséminer la Junglee.
Lorsque le veau naitra, un veau noir et blanc ne ressemblant en rien aux vaches indiennes, les villageois y verront un don des dieux.
D'autant plus que 2 ans plus tard le miracle va se reproduire et la fille de la Junglee va elle-même avoir un veau et va se mettre à produire des litres et des litres de lait et rendra Ramu et Lakshmi plus riche que le patel lui-même.
Le village va alors se diviser, ceux qui resteront fidèles au patel en souhaitant que rien ne change dans le village, et ceux qui voudront suivre Ramu et Lakshmi dans leur quête de modernité.
Un livre qui nous démontre à quel point les traditions de ces villages isolés de tout perdurent encore aujourd'hui et les paralysent, alors qu'en parallèle une autre partie de l'Inde envoie des satellites sur la Lune….
Commenter  J’apprécie         111
Ramu est réputé comme l'idiot du village de Nandgaon en Inde. Il est protégé par le patel, le chef du village mais vit dans une extrême pauvreté. Sa femme arrive, Lakshmi. Et pas n'importe laquelle ! le mariage a été arrangé, Lakshmi n'a pas eu le choix et elle fait d'abord souffir son mari par son arrogance. Elle vient d'un autre milieu, de la vielle et a fait des études, avant de subir la ruine et la mort de son père. Quand Ramu lui amène une vache bien maigre, elle se moque dans un premier temps. Et pourtant, c'est bien cette vache qui var évolutionner le village. En effet, un jeune scientifique qui vient de suivre une formation d'un an dans un centre d'insémination artificielle et qui a beaucoup d'ambition, va passer dans le village et avec la complicité de Lakshmi et sans dévoiler le secret à quiconque, il insémine la fameuse vache avec un sperme de taureau puissant. La vache qui va naître, bein que très laide, sera bientôt vénérée par tous, donnant bien plus de lait que les autres vaches du troupeau, enrichissant Ramu et son épouse et nourrissant le village. Les villageois se détournent alors de plus en plus de leur patel qui a été longtemps leur sauveur. Une inondation sévère oblige les villageois a prendre la fuite et à recommencer à zéro dans leur ancien village. Ramu et Lakshmi n'abandonnent pas, ayant réussi à sauver leurs bêtes. Les idées de Lakshmi sont écoutées et le village de plus en plus tenté par le modernisme qui pourrait découler de l'argent gagné : routes, lait pour tous, télévision...
On comprend dans le dernier chapitre que le modernisme n'a pourtant pas que du bon, entraînant d'autres fléaux.
Un livre très reposant. On le dévore comme un conte.
Commenter  J’apprécie         30
Ce roman parle de l'Inde reculée et actuelle, à travers une fable longue comme un conte raconté veillée après veillée par Radhikha Jâ au pied d'un arbre neem.
Un village, qui tente de résister aux affres de la modernité sous la houlette ferme et tendre de son chef, découvre les rendements agricoles modernes et la perspective d'enrichissement que cela engendre. Et tout cela grâce à une vache et à toute une suite de hasards.
C'est une belle métaphore, pleine de sagesse, sans jugements. Certains reprochent le style enfantin du récit. En ce qui me concerne cela ne m'a pas dérangé. Peut-être faut-il plutôt y voir une note d'oralité voulue par l'auteur ? Mme Radhika Jâ, cela fait donc de vous une magnifique conteuse, et il fut doux de vous "écouter" en vous lisant soir après soir.
Commenter  J’apprécie         50
A Nandgaon, la visite de l’étranger poussiéreux sur sa motocyclette fut vite oubliée. En moins de quinze jours, il fut réduit à l’état d’épouvantail, juste bon à effrayer les enfants désobéissants. Le village oublia même pourquoi il était venu. Ce n’était ni fortuit ni choisi. Nandgaon s’était coupé du monde. Avant d’arriver au village, la route avait bifurqué, abandonnant le sentier sur lequel Manoj s’était égaré. Cet isolement avait garanti la paix et une certaine harmonie : toute ingérence extérieure était considérée comme une menace.
En revanche, le mariage de Lakhsmi avait été bien plus commenté, et pendant bien plus longtemps. Tout d’abord, les villageois s’étaient émerveillés de la façon dont Ramu, l’idiot du village, avait réussi à se dégotter une épouse belle et intelligente. Quand ils apprirent qu’elle avait même fait des études supérieures, ils en restèrent stupéfaits et quelques peu apitoyés. Pourquoi, se demandèrent-ils, une telle femme avait consenti à épouser ce béta ? Mais quand ils surent que le père de Lakshmi s’était donné la mort, ils cessèrent de l’inviter, de peur d’être contaminés par sa malchance. Même les femmes les plus pauvres prirent leurs distances.
Les bestiaux étaient presqu'en tous liés entre eux, car leur patel prêtait généreusement à tous les villageois les rejetons mâles de Nandini, chaque fois qu'une vache était en chaleur. À travers eux, le village entier était inextricablement uni. Mais ces animaux, Lakshmi ne tarda pas à le comprendre, n'étaient que la représentation physique de quelque chose de beaucoup plus fort qui unissait ces gens et rendait ce village très différent de celui d'où elle venait et de tous ceux qu'elle avait connus. C'était l'amour qui liait les villageois à leur bétail et, puisque ces bovins se rattachaient tous au patel et à chacun de leurs congénères, c'était comme si tout Nandgaon n'avait qu'un seul cœur, et que ce cœur, c'était le troupeau.
Chaque jour la vache partait avec le troupeau.
Le matin, la petite Deux-Jambes aux douces mains venait à la grange au toit de chaume où habitait la vache, ouvrait la porte et l’emmenait rejoindre ses compagnes. Alors, dans un nuage de poussière, dans l’unique ruelle du village, la bête suivait le tintement des clochettes et le clopinement des sabots, rassurée d’être parmi celles qui lui ressemblaient, tandis que la Deux-Jambes guidait le troupeau et le conduisait au pré. Il n’y avait ni arrêts impromptus ni redémarrages précipités. La vache se contentait de suivre les autres, attirée par l’odeur d’herbe fraîche qui lui chatouillait les naseaux.
Un jour, elle ramènerait la route à Nand gaon, se promit-elle. Et ce serait une bonne leçon pour le patel et ses pimbêches de brus ! Dans sa tête, la vision était claire : un village complètement transformé, avec eau courante, éclairage public, télévision, école digne de ce nom, banque et centre médical : tout ce qu'on trouvai à Khandwa ! Pas un instant elle n'avait regretté l'ancien village, comme la majorité des autres. Une fois la route reconstrutie, l'autobus pourrait commencer à les desservir et à amener des ventre affamés, avec de l'argent plein les poches.
Dès son premier jour, Kami, la génisse de Ramu fut une énigme pour tous, sauf pour les enfants. Pour eux, elle fut une source de terreur exquise. Subhash, qui du haut de ses sept ans, se prenait pour un expert en bovins, sous prétexte que chaque jour il conduisait aux champs le troupeau de son père, ne cessait de s'extasier devant Kami :
- Tu vois ses yeux tous roses ? C'est des yeux de rakshasis !
- Quelles rakshasis ? questionna ingénument le petit Mani, du haut de ses cinq ans.
- Les rakshasis des forêts !
- Comment tu sais à quoi ça ressemble les rakshasis des forêts ? T'en as déjà vu en vrai ?
- Comment ça, « en vrai » ? bien sûr que oui ! Elles sont noires et blanches, avec des grandes dents et des yeux roses. Et la taille d'un jambolan. En plus, elles mangent les gens.
- Mais t'y vas jamais, dans la forêt ! contre-attaque Mani.
- Et comment, que j'y vais dans la forêt !
- Quand ça ?
- La nuit, quand les minus comme toi, ils dorment.
- J'suis pas un minus !