D'une certaine manière, le titre du nouveau roman de
Kangni Alem est fashion. Il répond aux trends, aux tendances du moment qui veulent que les frontières entre le bien et le mal soient définitivement abrogées, difficilement définissables. On ne parle pas de nuances de gris. Dans cet état d'esprit des temps nouveaux et postmodernes, la fiction célèbre l'assassin, le criminel. Les émissions reviennent sur les grands faits divers, les plus grands meurtres sont en deuxième partie de soirée sur les principales chaines quand elles ne sont pas en prime time sur les chaines secondaires de la TNT. Dexter a des millions de fans. La série Blacklist a célébré les exploits d'un tueur implacable qui pourtant, a un coeur d'ange. Nous fabriquons des tueurs dont demain, après leur exécution, les médias tenteront de reconstruire la mémoire.
Naturellement, ce titre me renvoie à tout ce contexte qui forge la plupart des sociétés occidentales. Je
disserte toutefois. J'introduis. Parce qu'en fait, depuis la sortie de son précédent roman,
Esclaves,
Kangni Alem m'avait donné une information : il travaillait sur le thème de la peine de mort. J'ai donc abordé ce roman avec cette approche, tout en vous avouant que ce titre m'a un peu surpris. L'assassin ici à les mêmes initiales que
Kangni Alem. K.A. Chose drôle et troublante. Puisqu'il m'arrive d'échanger avec le romancier togolais et de le voir signer ses pertinentes réflexions de ce fameux K.A. Koffi Adjata a décapité un imam alcoolique et froidement assassiné une femme qui passait par là, au moment de son forfait. le forfait a eu lieu en 1978. le jeune homme fut exécuté dans la foulée par la justice de son pays.
Parole d'avocat
C'est
Apollinaire, son avocat de l'époque qui revient sur cette affaire et qui nous la narre. le grand avocat de Ti-Brava, ce pays imaginaire qui ressemble tant au Togo de
Kangni Alem.
Apollinaire a rarement connu l'échec dans sa carrière professionnelle. Aussi quand, il range ses dossiers au crépuscule d'une carrière bien remplie, au moment où, avant de jouir d'une retraite méritée, il refait le film de sa vie professionnelle, cet homme désabusé, cynique, diabétique, sans attache affective réelle, cet homme disais-je a le sentiment d'avoir loupé quelque chose, d'avoir ignoré des éléments de l'enquête sur le crime de Koffi Adjata, en particulier les perches tendues par le pasteur Hightower. Cette narration est construite comme une sorte d'enquête policière où
Apollinaire va remonter le fil du temps et essayer de comprendre l'histoire de K.A. et saisir
la légende de l'assassin.