Imaginez un instant... Vous êtes un homme...
Ça y est, me direz-vous, c'est une manie après son précédent billet, ça lui recommence, il radote même, il n'a pas eu les cadeaux de Noël qu'il espérait, il n'a pas eu son compte de chocolat, il n'a pas eu son compte de... [qqqqqqqqqqqqzzzzzzzzzzz – ici censure déclenchée automatiquement par le modérateur de Babelio, particulièrement actif en ce jour de Noël, donc de grandes écoutes par les enfants]. Oui c'est vrai nos enfants fréquentent insidieusement Babelio, non pas pour s'enrichir comme nous sur le plan culturel, - oui oui c'est bien pour cela que nous sommes là, n'est-ce pas ? mais pour nous surveiller, monter un dossier à charge, nous pousser plus tard vers l'ehpad, signe là Papa, tu as vu tout ce que tu as raconté comme bêtises durant quinze ans sur les réseaux sociaux... ?
Donc, vous êtes un homme, mais pas n'importe quel homme. Non, vous êtes un sculpteur écolo exilé dans le Cantal, devenu berger...
Je ne sais pas vous, mais moi j'ai toujours rêvé d'être un sculpteur écolo et berger, restant en Bretagne, faut pas pousser quand même...
Oui, je sais, il y a un côté un peu cliché dans cette image, mais pas tout à fait... Enfin, soyons clair, vous seriez écolo et vous auriez envie d'élever au grand air des chèvres dans une sorte de grand retour à la terre et au grand air, est-ce que ça vous viendrait à l'idée de vous exiler en Picardie, non mais oh ! eh ! hein ! bon !?
Vous avez connu une première histoire en couple. Puis une seconde histoire d'amour... Vous vivez seul dans une ferme avec vos chèvres depuis votre rupture avec celle dont l'amitié vous est restée précieuse : Carole. Bon, entre nous, votre généreuse amie Carole parfois continue d'égayer vos moments de solitude par une petite gâterie autre que du chocolat, histoire que vous ne perdiez pas le moral, - elle aussi du reste, mais elle vous dit également qu'il est temps de reprendre du poil de la bête, non de Zeus !
D'un côté, vous aspirez à parcourir une sorte de chemin spirituel selon les préceptes d'un certain
Lao Tseu.
De l'autre, votre appétit érotique semble encore intact, grâce d'ailleurs à Carole, - je vous jure que l'amitié a du bon dans les moments difficiles et solitaires, vous brûlez de rencontrer l'âme soeur d'autant plus que votre meilleure amie vous y pousse enfin.
Aussi votre amie Carole vous encourage-t-elle à vous inscrire sur un de ces fameux sites de rencontres amoureuses...
Voilà le décor bucolique planté, ça vous va ?
Le reste, je ne maîtrise plus, vous non plus.
Un soir, vous allumez l'ordinateur et alors c'est le doigt dans l'engrenage...
Un nouvel homme naît, qui a pour avatar Pygmalion. Vous devenez Pygmalion...
Et les premiers contacts adviennent, quelques unes ont même pour pseudos les doux noms de certaines de vos chèvres...
Puisque nous partageons la joie d'être ici sur un réseau social, - mais oui Babelio est bien un réseau social qu'on le veuille ou non, et que tout ceci restera entre nous ce soir, autant nous avouer ici nos petits travers... N'avez-vous jamais été tenté de décrire dans votre profil le meilleur de vous-même ? Allons, allons... C'est ce à quoi succombe forcément notre Pygmalion de charme et de choc en désespoir d'amour...
Décrire le meilleur de nous-même...
Vous arriverait-il par exemple de vous décrire ainsi sur votre page profil de Babelio : homme inculte, amateur de pétanque au camping, pétoman de charme, lecteur de Télé 7 jours, du Chasseur français ? Vous arriverait-il de déposer dans votre île déserte des livres comme Mes secrets naturels pour guérir et réussir de
Rika Zaraï, ou bien encore le vélo de papa de
Raymond Poulidor ? Même si ces faits sont vrais, - et je vous assure que je ne porte aucun jugement ici, - ayant pratiqué moi-même la pétanque et le camping dans une autre vie et je m'arrêterai là pour la suite de la description car je tiens à ma réputation sur ce noble site qu'est Babelio -, tout de même ce n'est pas très glamour, avouons-le...
Mais revenons à notre récit... Jusqu'au jour où, jusqu'au jour où notre narrateur décide de créer un autre profil, celui d'une certaine Galatée, son double féminin... Et alors là, les amis...
La chute m'a scotché.
J'ai adoré ce petit roman sans prétention, mais bourré d'ironie, facétieux, cruel, irrévérencieux et jubilatoire à charge contre les réseaux sociaux et la modernité de notre société, mais terriblement touchant aussi... sur une certaine forme de solitude qui peut nous parler et parfois nous étreindre...
Dans cette comédie pastorale et digitale, j'ai découvert un auteur que je ne connaissais pas,
Amit Weisberger, né à Jérusalem. Je lis sur son profil qu'il a l'air de ressembler de très près au personnage de son livre, mais surtout, un détail m'arrête : il oeuvre pour la paix entre Israël et la Palestine.
En ce jour de Noël, il me semblait important de le souligner.
Lu dans le cadre du prix du roman Cezam 2024.