Le verdict est sans appel : l’utopie se meurt, mais en même temps, les fronts de résistance se multiplient dans les nouvelles organisations de la société civile, occasionnant des fissures dans le clan des prédateurs.
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On n’absorbe pas la parole lue comme la parole entendue ; la première investit comme nulle autre la conscience de celui qui activement la reçoit, qui a fait l’effort de la chercher, a pris le temps de l’interpréter, a décidé de la retenir dans sa mémoire. Enfin, ce qui lie l’auteur au lecteur est si merveilleusement mystérieux… (…) Enfin, aucun médium intellectuel n’est plus puissant que le livre pour faire rempart à l’un des poisons les plus redoutables de la déconstruction civilisationnelle : l’éphémère.
Lorsque, en mars 2017, le Programme alimentaire mondial ne parvient à recueillir que 270 millions d’euros des 4 milliards réclamés auprès des pays riches pour endiguer la famine qui frappe 24 millions de personnes dans cinq pays d’Afrique dévastés par la guerre, que dire, que faire ?
Lorsque, dans le sillage de son président François Hollande, l’État français tout à la fois pleure les souffrances des civils au Yémen et vend à l’Arabie saoudite, pour 18 milliards d’euros, des armes qui servent à massacrer lesdits civils, que dire, que faire ? Lorsque les toutes-puissantes multinationales des pays développés, qui déjà échappent à tout contrôle inter voire intra étatiques, parviennent à dissuader le Conseil des droits de l’homme – troisième plus importante instance onusienne, qui veille à l’application des cinquante et un droits humains, civils, politiques, économiques, sociaux et culturels inscrits dans la déclaration universelle de 1948 – d’instaurer de nouvelles normes de droit international et de durcir la judiciarisation des entreprises coupables, que dire, que faire ?
L’entrisme, parfaitement accepté, des fonds souverains qataris dans le sport, les médias, les entreprises français, en est une autre démonstration. Ce funeste spectacle illustre toute l’hypocrisie de cette diplomatie internationale totalement inféodée aux intérêts mercantiles et, à ce titre, capable de taire les pires atrocités. Dans ces conditions, avoir confié à une monarque représentant l’un des pays les moins respectueux des droits humains la responsabilité, si grande, de conduire un Agenda 2030 destiné à lutter contre les tragédies humaines est absolument ubuesque. C’est, là encore, la confirmation de l’extraordinaire pouvoir, de l’extraordinaire violence, de l’extraordinaire immoralité que porte le capitalisme.
L’étude lexicale des discours des capitalistes est révélatrice de dérives pathologiques. « Combat », « guerre », « conquête », « victoire », « domination », « suprématie »…, voilà ce qui compose leur vocabulaire … Ces éléments de langage et de communication bellicistes convoquent les pires instincts de la nature humaine, qu’ils détournent et manipulent pour combattre, asservir, détruire. Tout concurrent est adversaire, tout compétiteur est un rival et un obstacle qu’il faut « neutraliser. » Et « l’efficacité » du système capitaliste résulte en grande partie de cette machination rhétorique et comportementale.
Entretien chez Thinkerview :
Jean Ziegler : Pourquoi faut-il détruire le capitalisme ?