X-O Manowar, tome 7 : Hero

Ce tome fait suite à X-O Manowar (2017) Volume 6: Agent (épisodes 19 à 22) qu'il n'est pas indispensable d'avoir lu avant. Il contient les épisodes 23 à 26, initialement parus en 2019, écrits par Matt Kindt, dessinés par Tomás Giorello, et mis en couleurs par Diego Rodriguez. L'épisode 26 comprend 3 pages dessinées et encrées par Isaac Goodhart et mises en couleurs par Andrew Dalhouse. Il comprend également les couvertures originales de Kenneth Rocafort, ainsi que les couvertures variantes réalisées par Tomás Giorello, Diego Yapur, Grey Williamson, Michael Manomivibul (*3), Francis Portella (*3), Leo Colapietro, Ryan Bodenheim. Il comprend également 10 planches à l'état de crayonné. Il s'agit du dernier tome écrit par Matt Kindt.

Dans l'espace, 3 robots dotés de conscience (de la race des Class-I Independent Operation Units) sont attaqués par un vaisseau spatial appartenant aux Processeurs, une guilde de mercenaires. 2 d'entre eux sont sauvagement mis à mort par 2 mercenaires qui font exploser leur tête et qui s'emparent de leur corps pour y adjoindre leur vaisseau spatial afin d'en prendre le contrôle. Hesnid et Rawn s'en vont ainsi à la tête du corps robotique de FEN-L, laissant son enfant AN-ISE en vie derrière. Après leur départ, une silhouette féminine dans une armure noire s'approche de AN-ISE. Sur Terre, l'organisation GATE a installé son quartier général dans la base de surveillance de la biosphère (Biosphere Oversight Surveillance). de là, le brigadier général Jamie Capshaw est en contact direct avec un hélicoptère de surveillance. Celui-ci se fait détruire par FEN-L qui échappe aux avions de chasse d'intervention. Capshaw ordonne à son agent de joindre Nelville Alcott pour savoir quelle est la destination du robot.

À Capri en Italie, X-O Manowar est en train de se livrer à une activité d'archéologue, en remontant les restes d'un navire antique du fond de l'océan. Aric de Dacie évoque tout haut l'ironie dans le fait qu'il ramène l'épave d'un vaisseau de son époque d'origine pour pouvoir bénéficier d'un asile au temps présent dans la même région. Il pose une question à Shanhara : il souhaite savoir ce que devient son urine quand il est en armure. Shanhara lui fait une démonstration de ses capacités en montrant qu'elle peut prendre diverses formes d'armure. La nuit tombée, une fois couché, Aric affirme que Shanhara lui fait boire son urine recyclée. L'armure répond qu'elle a été conçue pour être la plus efficiente possible, et ne rien gâcher. Aric s'endort et cauchemarde qu'il se retrouve face à Bat, l'un des mercenaires de la guilde de Processeurs. Il se réveille alors que Hesnid et Rawn (les 2 compagnons d'arme du défunt Bat) sont au pied de son lit, prêts à l'occire.

En entamant ce tome, le lecteur a conscience qu'il s'agit du dernier écrit par Matt Kindt pour ce héros. Il note le titre du volume qui indique l'intention de l'auteur : rendre à Aric de Dacie son statut de héros. Pour les 3 premiers épisodes, il écrit une aventure très ramassée dans le temps, une journée, en mettant en oeuvre des personnages apparus dans les tomes précédant, en particulier les 2 mercenaires survivants, bien décidés à laver leur honneur et rétablir leur réputation en menant à bien leur contrat, à savoir assassiner Aric, contrat qu'ils avaient essayé d'accomplir dans X-O Manowar (2017) Volume 4: Visigoth (épisodes 11 à 14). Il inclut également des robots de la race des Class-I Independent Operation Units, créés par Robert Venditi & Doug Braithwaite dans la série précédente, et que Kindt avait également utilisé dans la série Unity. Il montre également qu'Aric de Dacie est en quelque sorte de retour à la case départ : il s'est établi en Italie, il a renoué avec le dialogue avec Shanhara, et il est plus seul que jamais, étranger dans un monde qui n'est pas le sien. À partir de là, le scénariste passe au règlement de compte en bonne et due forme, avec un affrontement sur 3 épisodes entre X-O Manowar et les 2 mercenaires, utilisant leurs propres armures, ainsi que le corps robotique de FEN-L, et très déterminés à exécuter leur cible, sans tergiverser. Ils sont venus préparés : avec une arme capable de perturber le fonctionnement de Shanhara. Bien sûr, Aric est resté égal à lui-même et il suffit de le pousser dans ses derniers retranchements (ce que ne manquent pas de faire Hesnid et Rawn) pour que son instinct de survie et ses capacités de combattant reprennent le dessus.

Pour clore la série, Matt Kindt retrouve l'artiste avec qui il l'a lancée : Tomás Giorello. Il est visible que le scénariste a conçu des scènes spectaculaires pour que l'artiste puisse faire preuve de ses talents. Il est tout aussi visible que Tomás Giorello a disposé du temps nécessaire pour peaufiner ses planches, quitte à ce que 3 planches du dernier épisode soient dessinées par un autre. le lecteur reste effectivement bouche bée devant les dessins en pleine page : Hesnid et Rawn raccordant les flexibles de leur vaisseau spatial à ceux du corps de FEN-L, X-O Manowar surgissant de l'eau en portant l'épave du bateau en bois sur ses épaules, AN-ISE émergeant de l'océan, ou encore X-O Manowar contemplant la Terre depuis l'espace. le dessinateur fait preuve d'un vrai sens du spectaculaire, créant des visions qui restent à l'esprit du lecteur. Il investit également du temps pour rendre chaque lieu spécifique et mémorable : l'espace discrètement rehaussé par une teinte verte appliquée par Diego Rodriguez, la baie de Capri, le château Castello Barbarossa, ou encore la plage de Capri. Comme il est de coutume dans les comics de superhéros, Giorello ne dessine qu'épisodiquement les décors, mais quand ils sont présents, ils valent le coup d'oeil.

D'un autre côté, l'histoire privilégie l'action et les combats, ce qui justifie que les décors soient les parents pauvres. En outre, Diego Rodriguez sait habiller les fonds de case avec les couleurs et les effets spéciaux pour donner l'impression d'un arrière-plan et établir une continuité visuelle d'une case à l'autre. le lecteur note en particulier sa capacité à rendre compte de la texture de l'eau de l'océan, de la verdure de la végétation, des aspérités de la roche. Dès la séquence d'ouverture dans l'espace, le lecteur peut constater que Tomás Giorello s'est investi dans la conception des prises de vue, et l'enchaînement des déplacements et des coups portés pour chaque combat. Les 2 mercenaires profitent pleinement de la liberté de déplacement dans les 3 dimensions offertes par le vide de l'espace. Lorsque se déroule l'affrontement entre Aric contre les 2 mercenaires, le lecteur ressent le fait qu'il y a des décombres alentours et que les combattants doivent se déplacer en fonction du relief du terrain. Alors que le combat dure, l'artiste sait montrer les coups portés, les blessures, la sauvagerie agressive. Il n'y a que le coup d'épée porté par un mercenaire dans le flanc droit d'Aric qui semble trop profond pour qu'Aric ne reste pas étendu au sol. du coup, même un lecteur blasé se laisse emporter par la force de conviction de la narration visuelle, absorbé par le suspense du déroulement de la bataille et par sa férocité. Lors du dernier épisode, il apprécie la majesté de la séquence dans l'espace au-dessus de la Terre, ainsi que le survol de quelques monuments célèbres quand X-O Manowar se rend à Bangkok.

Le lecteur peut se dire que Matt Kindt ne s'est pas trop forcé pour cette dernière aventure, en montrant que Daric de Dacie continue de devoir affronter les conséquences de ses nombreuses batailles, même celles s'étant déroulées sur une planète aussi éloignée que Gorin. D'un autre côté, il ne boude pas son plaisir au spectacle de l'affrontement entre X-O Manowar et ces 2 mercenaires tenaces et compétents. Il entame alors le dernier épisode qui fait office d'épilogue ou de conclusion. Dans les cellules de texte, le lecteur découvre les pensées d'Aric de Dacie, son crédo quant à sa situation présente. Il commence par indiquer que sa façon de penser a évolué, qu'il a appris à mettre les choses en perspective. Plus précisément, il a appris à voir tout ce qui a été accompli, par tous les êtres humains, l'histoire écrite par l'humanité. Il conçoit maintenant L Histoire comme une collaboration, l'univers comme un environnement qui existait avant lui et qui existera après lui, construit par tous ceux qui l'ont précédé. Sa volonté est d'ajouter à cette histoire. le lecteur se rend compte que cette façon de voir les choses est ce qui fait d'Aric un héros, comme l'annonce le titre de ce dernier tome. Il peut aussi se rendre compte que Matt Kindt joue sur le double sens du mot histoire : à la fois celle de l'humanité, mais aussi celles que lui écrit en tant qu'auteur. du coup, le crédo d'Aric peut aussi se lire comme celui de l'auteur.

En entamant ce tome, le lecteur sait qu'il arrive à la fin d'un cycle. Matt Kindt a écrit 27 épisodes de la série, soit une saison assez étoffée. Il a bénéficié tout du long de dessinateurs de bon niveau. Certains chapitres étaient plus réussis que d'autres. Tout du long l'intention de l'auteur était de favoriser l'aventure et l'action. Quand il a su introduire un peu de réflexion, les chapitres ont été mémorables, sinon ils étaient au moins divertissants. Il finit sur un chapitre d'affrontement spectaculaire, complété par une conclusion en forme de credo pour le personnage et pour lui-même en tant qu'auteur, émouvante et humble.