Ce tome fait suite à
Mighty Thor, tome 2 (épisodes 6 à 12) qu'il faut avoir lu avant. Il comprend les épisodes 13 à 19, initialement parus en 2017, écrits par
Jason Aaron. Il contient également les couvertures originales réalisées par
Russell Dauterman, et les couvertures alternatives réalisées par
Christian Ward,
Mike Deodato junior,
Andrea Sorrentino,
Ryan Sook,
Joe Jusko, et 5 pages de conceptions graphiques de Dauterman.
Épisodes 13 & 14 (dessins et encrage de
Steve Epting, couleurs de Frank Martin) -
Jane Foster est en train de raser les cheveux d'une femme qui vient d'entrer à l'hôpital pour son traitement contre le cancer, en même temps elle repense qu'elle a récemment appris le nom des 10 royaumes et qu'elle sait faire la différence entre les elfes d'Alfheim et les elfes de Svarthalfheim. Au temps présent, Thor se trouve sur Alfheim, proche de Ljosalfgard, la capitale. Elle neutralise une patrouille de 3 elfes d'un coup de marteau. La ligue des royaumes est en marche. Haut dans le ciel à bord de sa voiture volante, Roz Solomon coordonne les membres de la Ligue : Screwbeard, Ud le troll, Sir Ivory Honeyshot, Lady Sif, Angela (Aldrif Odinsdottir), Titanya et Thor. La capitale a été envahie par Malekith et son armée. le Ligue des Royaumes a pour objectif de libérer la reine Featherwine. Mais Malekith a prévu également une super guerrière.
Jason Aaron a commencé à écrire les aventures de Thor en 2012, élargissant petit à petit le périmètre de la série, pour se diriger lentement mais sûrement vers une guerre des Royaumes en final. Ces 2 épisodes racontent donc une bataille dans la guerre à venir des Royaumes. le lecteur n'est pas dupe : il comprend bien qu'ils permettent également à
Russell Dauterman de disposer du temps nécessaire pour réaliser les épisodes suivants. le lecteur voit donc revenir la Ligue des Royaumes : un groupe composé de représentants de plusieurs des 10 Royaumes de la mythologie nordique, auxquels Marvel avait ajouté Heven, le royaume d'origine d'Angela. le scénariste a montré comment le Congrès des Mondes est soumis à sa propre inertie et n'arrive pas à prendre la mesure des actions de Malekith, ne se rendant pas compte que ses préparatifs de conquête à l'échelle des 10 Royaumes sont bien avancés. Il s'agit donc d'une mission, pas tout à fait impossible mais presque, réalisée par une équipe de choc, au cours de laquelle tout ne se passe bien sûr pas comme prévu. En 2 épisodes,
Jason Aaron a beaucoup à faire : rappeler la situation, représenter les 8 membres de la Ligue des Royaumes, présenter les paramètres de la mission, montrer l'équipe en train d'avancer et les escarmouches correspondantes, pour aboutir à la bataille à Ljosalfgard.
Pour ces 2 épisodes, l'histoire bénéficie d'un dessinateur confirmé.
Steve Epting a dessiné la relance de Captain America en 2005 écrite par
Ed Brubaker, avec qui il a également collaboré pour la série indépendante Velvet. Il dessine dans un registre réaliste avec un bon niveau de détails. le lecteur se rend vite compte que l'artiste investit essentiellement du temps dans les personnages et les affrontements, mais très peu dans les décors, 12 pages de l'épisode 14 en étant totalement dépourvues alors que l'affrontement se déroule dans la capitale d'Alfheim. Par contre, les personnages sont tous distincts et il n'y a pas de risque de confondre le nain de Nidavellir avec le troll. Frank Martin réalise une mise en couleurs très nourrie, dans des tons assombris pour rendre compte de l'état de guerre. Cependant il n'arrive pas à masquer le vide des arrière-plans. Au fur et à mesure des affrontements, le lecteur se rend compte que
Steve Epting s'inspire régulièrement de
John Buscema pour les postures de ses personnages, sans tomber dans le plagiat. Les affrontements sont dynamiques, même si les plans de prises de vue restent classiques, se focalisant sur l'avancée dans la mêlée et les coups échangés par des plans assez rapprochés, sans se préoccuper de donner une vision globale du positionnement de la quinzaine de personnages.
Sans aller jusqu'à considérer qu'il s'agit d'un bouche-trou, le lecteur ressort mi-figue mi-raisin de ces 2 épisodes, content d'avoir revue la Ligue des Royaumes, même s'il n'y a pas assez de pages pour que la personnalité de chacun de ses membres puisse s'exprimer, satisfait d'avoir repris pied dans les prémices de la guerre des Royaumes, même s'il s'agit d'une bataille préliminaire.
-
Épisodes 15 à 19 (dessins et encrage de
Russell Dauterman, et
Valerio Schiti pour 9 pages de l'épisode 19, couleurs de
Matthew Wilson) - Heimdall se tient sur Bifrost, toujours omni-vigilant. Pourtant il arrive que ses yeux omnipotents puissent ciller. Un ennemi en profite pour s'approcher jusqu'à se tenir devant lui sans qu'il ait perçu son approche : Kallark, Majestor Gladiator. Dans les halls résidentiels d'Asgard,
Jane Foster, sénatrice représentante de la Terre au Congrès des Mondes reçoit la visite de Cul Borson qui lui indique que ses absences répétées lors des séances vont entraîner sa révocation, et qu'il a déjà un remplaçant tout prêt : Sinthea Shmidt. Il donne à
Jane Foster jusqu'à la fin de la semaine pour se guérir de son cancer. Aux portes d'Asgard, la bataille continue de faire rage et Gladiator a pris le dessus. Il explique à Cul Borson, aux Warriors Three (Hildegarde, Fandral et Hogun) que l'empire Shi'ar est venu pour conquérir Asgard. Effectivement la flotte spatiale se lance à l'attaque, et les supersoldats de la Garde Impériale se jettent dans la mêlée, accompagnés par Kid Gladiator (Kubark) et Warbird (Ava'Dara Naganandini).
Même si la situation des prémices de la guerre des Royaumes est évoquée, ces 5 épisodes emmènent le lecteur dans une autre direction.
Jason Aaron continue de prendre son temps, ou de profiter de son succès sur la série pour explorer des territoires différents. Il parvient également à consacrer de la place pour faire exister
Jane Foster qui n'est pas réduite à une simple porteuse de marteau. La page d'introduction évoque son état de santé. Cul Borson la provoque sur son cancer, sans aucune sollicitude, comptant bien profiter de son état de faiblesse pour l'évincer du Congrès des Royaumes. Non seulement elle lui tient tête, mais en plus elle tient tête à une entité autrement redoutable dans le dernier épisode. En y repensant, le lecteur se dit également que sa personnalité ne s'exprime pas seulement dans sa manière d'affronter les épreuves du Défi des Dieux, expliquées une par une par Shadrak dieu des Jonquilles et de la Documentation, il s'exprime également dans sa façon de concevoir sa stratégie privilégiant le travail en équipe, plutôt que de foncer dans le tas toute seule en ne comptant que sur sa force. le lecteur ne peut qu'admirer cette femme qui réussit à remplir son rôle de Thor, mais aussi le faire à sa manière sans rien sacrifier à ses idéaux.
Russel Dauterman est donc de retour pour 4 épisodes et demi, et
Jason Aaron semble lui avoir conçu une intrigue spécifiquement pour mettre en valeur ses points forts. Il surprend son lecteur en faisant intervenir 2 entités invoquées depuis des décennies par les Shi'ar dans l'univers partagé Marvel, mais rarement vues : K'ythri & Sharra. le lecteur peut ressentir que le scénariste s'amuse bien, à la fois avec la nature des épreuves pour départager qui est le meilleur dieu entre Sharra & K'ythri et Thor, mais aussi le mutant au caractère pas facile appelé à la rescousse rappelant la série Wolverine & the X-Men, et la manière dont
Jane Foster remet la force Phénix à sa place. Dès la première page composée de 6 cases de la largeur de la page, le lecteur retrouve avec grand plaisir les dessins de
Russell Dauterman : sa manière de choisir les détails qu'il incorpore dans ses dessins (le costume minutieusement représenté d'Heimdall), la manière de composer ses prises de vue (le travelling avant sur les yeux d'Heimdall, alterné avec la vue de l'univers devant lui), et la complémentarité avec
les couleurs de
Matthew Wilson. Ce dernier choisit les effets spéciaux chromatiques avec soin et discernement : le vert fluo pour Bifrost, le violet qui accompagne l'arrivée des croiseurs Shi'ar, la luminescence des silhouettes de Sharra & K'ythri, la brume des nuages, la transparence de l'eau autour de l'atoll, le feu lumineux de la Force Phénix. de son côté,
Russell Dauterman assure le spectacle : la frêle
Jane Foster fortement amaigrie par la maladie face à Cul Borson viril et sûr de lui, la spectaculaire arrivée de l'armada des Shi'ar au-dessus d'Asgard, l'éloquence de Volstagg pour une mesure dilatoire en forme de discours homérique et empli de dérision devant le Congrès des Royaumes, le tsunami créé par Sharra & K'ythri,les drakkars d'Asgard dans l'espace, la manifestation de la Force Phénix, et tant d'autres comme l'apparition de Toothgnasher. le lecteur se rend compte qu'il en oublie de s'offusquer des arrière-plans délaissés, à la fois par une mise en couleurs très consistante, à la fois par la qualité du spectacle.
Peut-être un peu déçu que le scénariste ne poursuive pas l'intrigue de la guerre des Royaumes, le lecteur change bien vite d'avis avec une aventure spectaculaire et haute en couleurs, avec un ton humoristique léger et un beau portrait de femme, sans oublier des personnages secondaires très savoureux, et une narration visuelle élégante et appropriée.