Et non... Ce n'est pas parce qu'on aligne trois phrases ni même des centaines de pages dans un fichier word qu'on sait écrire. C'est
Barbara Abel qui parle ainsi dans
Les fêlures, son dernier roman, et force m'est de constater que je suis d'accord avec elle.
Que dire de cette histoire de deux soeurs dont l'une survit à un suicide simultané avec son compagnon, et l'autre, diététicienne moderne dont le credo est : «Il est important que vous sachiez qu'il n'y a pas de poids idéal »... pratique sa sexualité dans des toilettes de bar ? Rien ne m'a intéressée ni seulement accrochée dans leur trajectoire irréaliste, invraisemblable. Elles ont connu une enfance défectueuse survolée en quelques phrases wikipédiennes, et alors ?
Afin de ne pas accabler l'auteure, je passe rapidement sur les situations ineptes, sur les personnages sculptés à la hache qui profèrent chacun dans leur spécialité des truismes usés jusqu'à la corde comme le flic qui demande de ne pas quitter le territoire, ou la psychologue bavarde comme une pie, se livrant à une enquête policière hors de son champ de compétences. Rien ne tient la route, toutes les situations sont plaquées à la truelle pour justifier un discours dans l'air du temps aux tendances empruntées partout et nulle part.
Le style est consternant sans que l'on puisse incriminer le traducteur. Les mots sont pauvres, déplorables les métaphores, risibles certaines formules comme : « … Martin est venu me parler pour m'expliquer qu'il ne trouvait plus sa place au sein de la société et qu'il souhaitait embrasser une carrière littéraire... ». Embrasser une carrière littéraire, qui cause comme ça dans une phrase aussi torturée ? Avec 2 fois moins de mots, le sens aurait été plus clair. L'emploi abusif de certaines formules comme « il faut savoir que» (si je veux !), ou de mots à la mode : hautement, clairement, absolument, parfois plusieurs fois par page, déclasse
Barbara Abel.
Les fêlures est le genre de roman où l'élégance est raffinée... où pour évoluer dans le milieu de la finance, il faut avoir des nerfs d'acier, sinon tu ne survis pas. Non mais ? Dis-moi pas que c'est pas vrai.
Pour conclure sans être soupçonnée de vouloir déboulonner une auteure très largement encensée, je lui laisse la parole, via ces quelques lignes pompées dans
Les fêlures :
« Franchement. Ce n'est ni fait ni à faire, c'est lourd, c'est vain, c'est sans intérêt. le style est pauvre et ampoulé, la lecture est pénible... ». « Rien ne tient la route, ça manque de structure, c'est d'un ennui sans nom, sans compter qu'on frôle le ridicule à chaque paragraphe. On n'en a rien à faire de rien, ni des motivations du narrateur, ni de ses scrupules, ni de ses incertitudes. Un mec qui passe son temps à se demander s'il doit lâcher son boulot pour écrire, franchement... ». Oui, franchement, tout ça pour ça ?