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EAN : 9781272860226
612 pages
Nabu Press (21/01/2012)
4.75/5   2 notes
Résumé :
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Les gémissements plaintifs d'Albertine de Merris paraissent si ridicules : un château près de Compiègne, une famille estimée, réputée et accueillant toute la haute société parisienne… « Entourée de l'aisance que donnent les habitudes d'une vie où le luxe et le confort ont leurs coudées franches, rassasiée des plaisirs prodigués par la civilisation la plus raffinée, emmitouflée dans la ouate et les fourrures, et traînée par quatre chevaux dont le moindre aurait payé dix paires de boeufs de labour, Mme de Merris arriva par degrés insensibles à se croire la plus malheureuse des femmes. »

Comment concevoir ces malheurs de femme heureuse sous le faible prétexte d'une trop forte indifférence de son mari, le comte de Merris ? Elle s'est mariée trop vite, oui mais comme bien d'autres à son époque. Son malheur est d'autant plus incompréhensible que son mari est absolument irréprochable : affable, joyeux, courtois, il lui laisse une totale liberté, mais trop peut-être ? « Son humeur était toujours aimable ; il ne chicanait jamais Albertine sur aucun de ces sujets qui entretiennent la mésintelligence dans quelques ménages, mais c'était peut-être l'indifférence qui l'inspirait plus que la tendresse ou la bonté » Et comme lui disait Antoinette, sa conseillère et amie intime : « on ne peut pas contenter tout le monde et sa femme ». Il ne pense effectivement qu'à contenter le monde, il ne se passe pas une journée sans l'animation d'une réception, d'un bal, d'une chasse, d'un Opéra… « - il n'y a jamais assez de monde chez lui. Si je l'écoutais, j'inviterais les Champs-Élysées et le bois de Boulogne. »
(…) Mais il est si rond en toutes choses et ses impertinences sont assaisonnées de tant de gaieté qu'on ne saurait se fâcher. »

Et Mme de Merris, bien qu'étant de ce monde et adoptant avec grâce tous les codes pour s'y confondre, ne s'y reconnait pas : « Mme de Merris connaissait à peu près tout le monde, et il n'y avait là personne avec qui elle eût désiré passer un quart d'heure au coin du feu. » elle participe nonchalamment à une chasse à courre qu'elle dédaigne et observe passivement son époux poursuivre galamment une belle femme à travers la forêt qu'il semble préférer à la course au sanglier… Passe encore quelques infidélités tant qu'on respecte les convenances et la discrétion d'usage, mais cette constante indifférence la ronge :

« L'autre jour, nous étions ensemble dans une de ces réunions bruyantes dont quelques chevaux maigres sont le prétexte. Je ne sais pas si c'est bien récréatif ; la mode est d'y paraître. Entre deux courses l'ennui me prend et je propose à M. de Merris un tour de promenade. Jamais tu n'as vu figure plus étonnée que la sienne. Il se récrie : – Moi, à votre bras, ici ? me dit-il , vous voulez donc me compromettre ? » le rire me prit, mais comme j'insistais : Çà, reprit- il, dans quel monde avez vous vu, ma chère amie, qu'un mari offrait publiquement le bras à sa femme ? - Et ce disant , il me saluait de l'air d'un ambassadeur qui prend congé de sa souveraine. »

Elle ne manque pourtant pas de beauté ni d'esprit mais c'est comme si il eût été ringard pour son époux d'aimer ostensiblement sa femme.

Antoinette réprimante comme elle peut l'indigne comportement du comte mais ce dernier l'ignore… Albertine n'a plus qu'à oublier son sort et penser à autre chose :
« Ce sont de ces petites misères qui arrivent aux plus honnêtes femmes de Paris ; le tout est de ne pas s'en apercevoir. » dit Antoinette.
« -Et le moyen ?
-On ferme les yeux. »

Mais plutôt que de fermer ses yeux, elle ouvre son coeur à un brave colonel, M de Brévans, chasseur d'Afrique, motivée par la vacuité de sa vie :
« Que nous reste-t-il à nous qui avons parfois une éducation raffinée ? L'équilibre est rompu entre cette éducation et l'existence qui nous est faite. Aucun aliment pour le coeur, aucun pour l'esprit. Il faut cependant remplir la journée, et la semaine, et le mois ! Comment faire ? Par quel travail ? La lecture qui nous est conseillée est une excitation perfide ; la musique, une amie qui nous laisse plus troublée après des consolations d'un instant. Ne va pas croire que je me range sous les drapeaux des faiseurs de réforme ; non , je ne veux être ni général d'armée, ni président de cour d'assises ; mais le monde des sentiments n'est-il pas le seul qui nous soit ouvert, et faut-il s'étonner si quelques-unes s'y réfugient avec une ardeur qui les dévore ? Je ne vois dans les salons que des compagnes de plaisirs qui n'ont pour unique fonction que le soin d'être belles à souhait et parées à ravir. Heureuses celles qui trouvent leur satisfaction dans ce vide ! »

Au moment où se forme cette nouvelle passion, le comte de Merris est atteint d'une maladie grave qui met ses jours en danger mais est sauvé grâce aux soins dévoués d'Albertine.
Une révolution s'opère alors en lui ; il se résout à changer de genre de vie, réforme sa maison, paie ses dettes, met ordre à ses dépenses ; bref, il finit par faire à sa femme une confession complète en lui demandant son pardon et en lui jurant de ne vivre que pour elle.
Albertine, en présence de cette noble franchise, est écrasée par le poids de sa faute, et ne sait quel parti prendre.
Mais son bon génie, Antoinette, vient à son aide et la décide à rompre immédiatement avec M. de Brévans.
A ce moment cruel, la comtesse reconnait avec douleur que le colonel n'est qu'un ambitieux, un égoïste, un coeur sec indigne de son amour.

Tout s'achève par une violente succession de drames d'une forte intensité émotionnelle : son époux est foudroyé par une épidémie, son amoureux d'enfance, Jacques de Cerclaux se hâte de reprendre ses droits sur le coeur de la veuve qu'il n'a jamais oublié et précipite un duel pour une raison puérile contre M. de Brévans et évince brutalement un concurrent.

Albertine qui se sentait mourir d'oisiveté, d'ennui et d'un peu de dépit, meurt désormais au sens littéral après ces drames et batailles menées pour elle :

« Tout ce sang répandu, c'est moi qui l'ai versé… Il pèse sur mon coeur, m''étouffe ; il crie contre moi… A présent, comprenez-vous pourquoi la fièvre me dévore ?... Ah ! Je vous aime, Dieu le sait ! Mais une ombre me poursuit... Il y a des heures où il me semble qu'un cadavre se dresse entre nous »

Je suis un peu déçu…Cette toile blanche qui attendait d'être peinte par de nouvelles couleurs qu'auraient pu offrir sa seconde vie de veuve, libérée et déniaisée par l'expérience, se trouve subitement brûlée, éteinte, et Albertine décède un peu bêtement, ce qui est un peu déconcertant pour le lecteur mais en fait une fin classique et pratique pour l'auteur.

Du reste, c'est une belle peinture du « grand monde » aristocratique de l'époque, traitée d'un point de vue exclusivement féminin et par deux femmes d'esprit : d'un côté Albertine, qui manque un peu de fermeté de caractère mais est loin de ressembler aux sottes pleurnichardes d'autres romans de moeurs dans le genre ; et de l'autre Antoinette, qui, sous une apparence frivole et nonchalante, cache un grand fond de sagesse. Elle a déjà parcouru la route douloureuse d'Albertine et donne à son amie les meilleurs conseils dans une conversation enjouée, pétillante d'esprit et de grâce.

Il manque peut-être un peu d'agressivité ou d'ironie dédaigneuse à l'auteur pour décrire ce monde qui, même dans ses faiblesses ou ses lâchetés, présente toujours, sous sa plume élégante, des teintes douces et flatteuses.
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