Mes plus anciens souvenirs se rattachent à la Touraine, où mes parents passaient une partie de l’année. De Paris, où nous demeurions l’hiver, je ne me rappelle presque rien. Les enfants n’aiment pas les villes ; ils y vivent trop renfermés et trop réglementés. À la vivacité de leurs instincts il faut, avant tout, la liberté ; à leurs jeux, l’espace et la lumière.
Ces premiers souvenirs, en me revenant à l’esprit, vont d’eux-mêmes se grouper autour de la grande figure de mon père. Avant toute autre chose au monde, je l’aimai, je l’admirai, et c’est à lui que je rapporte, avec la plus vive tendresse, toutes les émotions, toutes les imaginations heureuses de mon heureuse enfance.
Je n’ai jamais pu me figurer rien de plus beau, rien de plus aimable que mon père, et je donnerais beaucoup pour qu’il me fût possible de retracer ici son image telle qu’elle m’apparaît, imposante et charmante, au seuil de ma vie.
Il me faut auparavant dire un mot de la race dont il sortait. L’hérédité du sang, ses effets proches ou éloignés, nous sont trop peu connus encore pour qu’on en puisse parler autrement que par conjectures. Cependant un secret instinct nous avertit qu’il y aurait là beaucoup à chercher ; et, malgré nos préventions contre toute ancienneté, en dépit de nos ostentations démocratiques, il nous plaira toujours de connaître les aïeux de quiconque nous intéresse
Avec Michelle Perrot, Catherine Arditi
Avec le soutien de la Fondation d'entreprise La Poste
Pour évoquer la vie passionnée de George Sand (1804-1876), on a privilégié ses écrits personnels, son autobiographie, Histoire de ma vie (2 volumes, Pléiade, Gallimard,1970-71) et sa prodigieuse Correspondance, plus de 20 000 lettres réunies et publiées par Georges Lubin (26 volumes, Garnier, 1964-1991). Correspondance amoureuse, réduite par les destructions volontaires, mais surtout amicale, familiale, artistique, politique, quotidienne.., qui montre l'étendue, la variété, la qualité du réseau sandien, témoin et acteur d'un 19e siècle épris de progrès. On y croise Musset, Chopin, Delacroix, Marie d'Agoult, Pauline Viardot, Aragon, Louis Blanc, Hugo, Flaubert (cf. Flaubert-Sand, Correspondance, publiée par A. Jacobs, Flammarion, 1981), tant d'autres. On y entend la voix nocturne (elle écrivait la nuit), chaleureuse, tendre, ironique d'une femme libre, affrontée à tous les défis du siècle.
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