Avec cette saga, Martin Andersen Nexø signe un roman d'apprentissage dans un style réaliste très classique, comme d'autres l'ont fait au tournant du siècle dernier. On y suit un certain Lasse, émigré suédois vieillissant mais travailleur, qui est prêt à tout pour subvenir aux besoins de son jeune fils, la fameux Pelle du titre. La narration s'attarde principalement à ces deux-là mais aussi sur quelques uns des habitants de Bornholm. La vie est dure dans cet univers, on est loin des romans du terroir et de la glorification du travail de la terre. Et c'est encore pire à la Ferme de Pierre, là où Lasse aboutit.
Cette vie dure est allégée par le grand amour que le vieil homme voue à son fils. « le père Lasse s'attristait de ne plus l'entendre questionner et babiller comme autrefois. » (p. 130). En effet, Pelle grandit. J'ai peut-être manqué quelques indices mais l'âge du garçon n'est pas très clair. Dix ans, peut-être? Et à la fin du roman, quatorze, quinze?
« On n'avait pas idée de grandir et d'user ses vêtements comme ça! Pas moyen de suivre! Ses manches et ses jambes de pantalon étaient vite trop courtes […] » (p. 283)
Pendant que Lasse travaille, Pelle va à l'école, donne des petits coups de main à droite et à gauche. Et, surtout, il observe. Ça donne des indications sur les événements à venir dans les tomes ultérieurs, que je lirai très probablement. En effet, ma lecture de celui-ci, L'enfance, sans parler d'un grand enthousiasme, m'a tout de même interpelé. Malgré le style plutôt ordinaire, je me suis investi dans le sort de ce duo touchant.
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Un joli drame historique dépaysant qui relate les jeunes années du petit Pelle et de son père, misérables immigrés suédois en quête de travail et de fortune dans la campagne danoise de la fin du XIXe siècle.
Les durs travaux des champs et du bétail, les saisons qui scandent le quotidien des hommes de la terre, les rares jours non travaillés que l'on savoure et qui passent trop vite, l'éducation de Pelle à la vie (à la ferme et à l'école), l'amitié et les bagarres d'enfants, les frasques du grand propriétaire terrien qui les embauche, la découverte et l'apprentissage du monde des adultes, tous les ingrédients sont là pour faire de ce roman une belle fresque dans laquelle on perçoit la tendresse de l'auteur à l'égard de ce monde-là mais surtout vis-à-vis de Pelle, son personnage principal.
Ce premier volume d'une saga qui en totalise quatre m'a immédiatement happé. J'ai hâte de découvrir le devenir du jeune Pelle qui quitte le monde paysan et son père, pour aller découvrir le vaste monde.
C'est de la belle littérature populaire sans effets de manche stylistiques (dans une traduction française manifestement soignée), qui offre l'avantage de ne pas s'appesantir sur l'aspect social et historique (ici seulement en toile de fond).
De la même façon, et bien que toute l'action se déroule dans le monde de la paysannerie, l'auteur a eu la sagesse d'éviter la terminologie trop détaillée (ce qui aurait certainement ennuyé le lecteur profane).
Un beau "Bildungsroman" qui décrit un monde désormais disparu.
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Dans les champs, les charrues labouraient toute la journée et donnaient à la terre une couleur sombre. Les feuilles des arbres changeaient de couleur, une pluie froide tombait presque tous les jours. Le poil des bêtes poussait dru et leur couvrait l'échine d'un épais manteau. Pelle souffrait du froid, l'existence toute entière s'assombrissait. Ses vêtements à lui ne devenaient ni plus épais ni plus chauds dans la saison froide ( ... )
Par ces tempêtes d'équinoxe, bien des bouteilles étaient lancées à ceux de la terre ferme. Tout bien considéré, c'était pour cela qu'on apprenait à écrire, pour être capable de faire sa lettre quand l'heure serait venue.