AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Citations sur Aurélien (297)

Aurélien craignit de ne pas danser assez bien pour elle. Il le lui dit. Elle ferma les yeux. Alors, se penchant sur elle, il la vit pour la première fois. Il régnait sur son visage un sourire de sommeil, vague, irréel, suivant une image intérieure. Ce qu'il y avait de heurté, de disparate en elle, s'était fondu, harmonisé. Portée par la mélodie, abandonnée à son danseur, elle avait enfin son vrai visage, sa bouche enfantine, et l'air, comment dire ? d'une douleur heureuse. Aurélien se répéta qu'il n'avait encore jamais vu cette femme qui venait d'apparaître. Il comprit que ce qui la lui avait cachée, c'étaient ses yeux. Quand elle les avait fermés, elle n'avait plus été protégée par rien, elle s'était montrée elle-même. Ils se rouvrirent plus noirs que jamais, plus animaux qu'Aurélien ne s'en souvenait.
Commenter  J’apprécie          270
Qui n'a pas éprouvé ce sentiment étrange de se retrouver en face d'une inconnue à un rendez-vous d'une femme passionnément aimée, dont on était tout entier occupé, mais qu'on connaissait encore à peine ? Il avait suffi d'un changement léger de la coiffure, d'une robe différente, ou de l'atmosphère d'un lieu public pour rendre méconnaissable celle qu'on croyait déjà à jamais fixée dans la mémoire. Qui n'a pas éprouvé ce désappointement ne sait rien du véritable amour.
Commenter  J’apprécie          252
La seule chose qu'il aima d'elle tout de suite, ce fut la voix. Une voix de contralto chaude, profonde, nocturne. Aussi mystérieuse que les yeux de biche sous cette chevelure d'institutrice. Bérénice parlait avec une certaine lenteur. Avec de brusques emballements, vite réprimés qu'accompagnaient des lueurs dans les yeux comme des feux d'onyx. Puis soudain, il semblait, très vite, que la jeune femme eût le sentiment de s'être trahie, les coins de la bouche s'abaissaient, les lèvres devenaient tremblantes, enfin tout cela s'achevait par un sourire, et la phrase commencée s'interrompait, laissant à un geste gauche de la main le soin de terminer une pensée audacieuse, dont tout dans ce maintien s'excusait maintenant. C'est alors qu'on voyait se baisser les paupières mauves, et si fines qu'on craignait vraiment qu'elles ne se déchirassent.
Commenter  J’apprécie          251
La rue est vide et sombre. Elle ne prend vie que plus haut, où les enseignes lumineuses blessent l'ombre. [...]
Une de ces nuits de Paris où on n'a pas envie d'aller se coucher, où toutes les rues ont la lourdeur d'un secret, où les voix des passants sont comme les amorces de mille histoires, et chaque femme a l'air surprise, dans ce que l'ombre ne parvient pas à en dissimuler.
Commenter  J’apprécie          240
«  Le temps d’apprendre à vivre , il est déjà trop tard. »
Commenter  J’apprécie          230
On quitte l'être qu'on aime, ne serait-ce que pour un instant, et on retrouve le monde, le temps qu'il fait, le froid, l'inexplicable diversité, des gens, des objets, cette maison de désolation, cette image de ce que devient un amour.
Commenter  J’apprécie          220
Il y avait un vers de Racine que ça lui remettait dans la tête, un vers qui l'avait hanté pendant la guerre, dans les tranchées, et plus tard démobilisé.

𝐽𝑒 𝑑𝑒𝑚𝑒𝑢𝑟𝑎𝑖 𝑙𝑜𝑛𝑔𝑡𝑒𝑚𝑝𝑠 𝑒𝑟𝑟𝑎𝑛𝑡 𝑑𝑎𝑛𝑠 𝐶𝑒́𝑠𝑎𝑟𝑒́𝑒...

Ça devait être une ville aux voies larges, vide et silencieuse. Une ville frappée d'un malheur. Quelque chose comme une défaite. Désertée. Une ville pour les hommes de trente ans qui n'ont plus le coeur à rien. Une ville de pierre à parcourir la nuit sans croire à l'aube. Aurélien voyait des chiens s'enfuir derrière des colonnes, surpris à dépecer une charogne. Des épées abandonnées, des armures. Les restes d'un combat sans honneur. [...]
La guerre l'avait enlevé à la caserne et le rendait à la vie après ces années interminables dans le provisoire. Et pas plus les dangers que des filles faites pour cela n'avaient vraiment marqué ce coeur. Il n'avait ni aimé ni vécu. Il n'était pas mort, c'était déjà quelque chose, et parfois il regardait ses longs bras maigres, ses jambes d'épervier, son corps jeune, son corps intact, et il frissonnait, rétrospectivement, à l'idée des mutilés, ses camarades, ceux qu'on voyait dans les rues, ceux qui n'y viendraient plus. [...]
Il remettait au lendemain l'heure des décisions.

𝐽𝑒 𝑑𝑒𝑚𝑒𝑢𝑟𝑎𝑖 𝑙𝑜𝑛𝑔𝑡𝑒𝑚𝑝𝑠 𝑒𝑟𝑟𝑎𝑛𝑡 𝑑𝑎𝑛𝑠 𝐶𝑒́𝑠𝑎𝑟𝑒́𝑒...

C'était peut-être le sens de cette réminiscence classique.
Il pensait aux statues qu'il y a sur les places de Césarée : Ces Dianes chasseresses, rien que des Dianes chasseresses à l'air hagard.
Et des mendiants endormis à leurs pieds.

Il n'aimait que les brunes et Bérénice était blonde, d'un blond éteint.
Commenter  J’apprécie          210
Qui a le goût de l’absolu renonce par là au bonheur.
Commenter  J’apprécie          200
Ah, s'il avait pu douter de lui-même, il ne doutait plus de son amour pour Bérénice ! On ne doute pas d'une plaie vive. L'horrible, le casse-tête, c'était ce comportement... Aurélien croyait se calmer, rendre tout plus tolérable, en cherchant à comprendre, en comprenant. Alors il fouillait les ténèbres récentes de ces quelques semaines extraordinaires, de ce qu'il appelait déjà son bonheur, comme si... A quoi cela se réduisait-il pourtant ? A se martyriser la mémoire, à se déchirer le cœur, Leurtillois reconstituait minute à minute cette période déjà close, cette aventure de la brièveté de laquelle il se surprenait toujours émerveillé.
Commenter  J’apprécie          190
Elle était de l'âge qui est au-delà de la jeunesse, et on ne pouvait s'empêcher, quand on se demandait "quel âge a telle ?", de penser qu'elle avait l'âge de l'amour.
Commenter  J’apprécie          170






    Lecteurs (4383) Voir plus



    Quiz Voir plus

    Aragon (difficulté moyenne)

    Aragon a été journaliste dans un de ces journaux. Lequel ?

    Minute
    Le Figaro
    Libération
    L'Humanité

    10 questions
    143 lecteurs ont répondu
    Thème : Louis AragonCréer un quiz sur ce livre

    {* *}