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sur 372 notes
Quand Nelly Arcan s'est suicidée en septembre dernier (réalisant ainsi l'acte qu'elle avait prévu depuis l'âge de 15 ans), personne n'en a parlé en France, pays qui l'avait pourtant célébré dès 2001 avec la publication de « Putain », son premier livre auto-biographique. Ce silence est, il me semble, une grande injustice. Ce livre est à la fois l'autoportrait douloureux de son auteur et le reflet sans concession d'une société qui valorise l'apparence, incite à la « putasserie » et ne considère la femme le plus souvent que comme « femme-vulve ».
Texte très fort, politiquement incorrect, féministe tout en reflétant les contradictions d'une identité féminine non assumée.
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"Je pourrais vous décrire la beauté du monde si je savais la voir, mais je suis trop occupée à mourir". Voilà ce qu'écrivait et nous disait Nelly Arcan, que nous avons regardé sans la voir, trop occupés que nous étions à mater "sa" vie qui nous faisait "bander".
Lorsqu'est sorti - Putain - est né le paradoxe, la schizophrénie qui n'ont cessé d'entourer, d'étouffer l'oeuvre littéraire d'Isabelle Fortier.
Cette Canadienne francophone avait un talent littéraire énorme... qu'elle a juste eu le temps de commencer à nous montrer, et des pulsions suicidaires, une impossibilité à "vivre son mal de vivre"... qui ont eu raison trop tôt (? ) de la femme et de l'écrivaine surdouée.
- Putain - sort donc en 2001 ( Nelly Arcan a envoyé le manuscrit au Seuil... ne s'attendant à rien et n'attendant rien... au bout de 15 jours la maison d'édition parisienne la réveille à 6 heures du matin... on ne fait pas attendre le talent !). Elle est aussitôt en lice pour le Médicis et le Femina ( quelle reconnaissance !)... et la proie des vautours médiatiques, qui ont flairé en bons charognards, le parfum du sulfureux et du scandale.
Or si - Putain - fait référence "au plus vieux métier du monde", que son auteure dit avoir exercé pendant plusieurs années, son livre n'est pas "une putasserie" qui racole des lecteurs... c'est de la Littérature... avec un grand L.
C'est une souffrance impudique mais digne, un pathos étouffant et flamboyant, que nous offre sa plume exceptionnelle à travers des phrases fleuves où elle joue avec les mots et les figures, se joue des mots et des figures comme le ferait un acrobate funambulant d'étoile en étoile, partagé entre une inexorable assomption et l'attrait du vide et de la chute.
On connaît tous la fin de l'histoire et il serait bête et indécent de jouer les Sherlock Freud alors que l'assassin a été identifié.
Je ne me livrerai donc pas à une analyse de supermarché. Je me contenterai de souligner que Nelly avait semé sur son trajet littéraire suffisamment de petits cailloux pour qu'on comprenne que seule la mort pouvait soulager sa souffrance, et que si nous n'avons pas vu les petits cailloux, c'est que nous n'avons pas voulu les voir... parce que ce monde qu'elle détestait était peuplé de trop de "larves".
On commence enfin à vraiment s'intéresser à l'écrivaine. Des lieux de culture ont été baptisés Nelly Arcan. Un Prix littéraire portant son nom a été créé. Un film lui a été consacré.
Naissance d'un mythe ? Cette Princesse déchue, rachetée par la littérature concentre autour de sa vie et de son oeuvre tous les éléments pour qu'il en soit ainsi.
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Je ne vais pas m'étaler longuement sur ce roman autobiographique de Nelly Arcan que j'ai trouvé affreuseument ennuyant et fort mal construit.

L'auteure nous raconte avec mille détours et figures de style ces trépidantes années de prostitutée à l'hôtel, années noires, lugubres et cauchemardesques, qui ont marquées sa vie à jamais et lui ont fait prendre un tournant radical.
Le problème de ce livre, c'est la construction de l'histoire. Aucun événement ne vient relever le récit, les mots sont balancés à la pelle sans queue ni tête, sans élément connecteurs. Comme dans Belle du seingneur d'Albert Cohen, Nelly Arcan, par cocquetterie ou pour donner un rythme essouflé à ses propos, limite au possible les points finaux censés clores ses phrases. Un genre quelque peu lourd à lire, sans but précis, qui ne m'a pas intéressé plus que ça.

Vous l'aurez compris, je n'ai pas vraiment apprécié le style d'écriture de l'auteure. Mais je souligne l'intimité des propos, les confessions secrètes, souvent pudiques, qui peuvent être choquantes par moment. Pour décrire avec autant de précision les pires moments de sa vie, il faut un profond courage, une clairvoyance à la hauteur des insanités subies. Je respecte le travail effectué, même s'il ne m'a pas touché plus qu'escompté.
Lien : http://addictbooks.skyrock.c..
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"Putain" de l'écrivaine québécoise Nelly Arcan est un roman, un mélange à base d'autofiction, d'autobiographie et de fiction, qui a suscité des réactions passionnées et diverses depuis sa publication en 2001.
C'est un long monologue théâtral, servi par une plume unique et incisive – que j'ai trouvée beaucoup plus subversive et puissante qu'une Virginie Despentes.

Un aperçu brut et saisissant du monde de la prostitution, ici de luxe, donné par ce roman qui en explore des aspects ignorés et dérangeants ; et qui ouvre ainsi des réflexions sur les questions complexes du rapport aux parents, de l'identité, du désir, de l'instrumentalisation du corps, du façonnage de la perception de soi sous l'influence de la société.

Un roman qui laisse une marque dans le paysage littéraire… et qui vous marque.
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J'ai abordé ce livre avec la curiosité de celle qui visite les ruines d'un pays en cherchant à comprendre l'origine de ses ravages. Nelly Arcan, cette jeune prostituée montréalaise, s'est donnée la mort en 2009, à l'âge de 34 ans. Qu'est-ce qui a amené cette étudiante en littérature à ne plus espérer au point de s'enlever la vie ? J'ai tenté de trouver des réponses à travers ce roman, sans tomber dans le piège de la suranalyse des traumatismes qui l'ont habitée, encore moins dans le voyeurisme. Même si ses mots laissent en nous une empreinte de mal être, son univers n'est pas moins complexe que celui qui évolue en chacun de nous.

« Putain » est son premier roman, une autofiction débordante de sentiments noirs résultant de comportements autodestructeurs. Quelques pages à peine suffisent à nous éclairer sur les origines de son mal. Entre une mère, qui passe ses grandes journées à dormir et qu'elle qualifie de « larve » et de « cadavérique », et un père qui chasse les putains, on a vite fait de comprendre que Nelly Arcan n'a pas été entourée de modèles positifs.

Les pages de ce roman m'ont aussi révélé sa hantise des femmes et sa misanthropie. Son besoin de plaire et l'image d'un corps qu'elle craint de voir vieillir. C'est d'ailleurs en alliant les mots « femmes » et « féminité » que l'expression de cette crainte est la plus marquée. Un passage du livre : « Je me suis mise à vieillir à toute allure », m'a rappelé Marguerite Duras qui disait dans « L'amant » : « J'avais à 15 ans le visage de la jouissance et je ne connaissais pas la jouissance. Tout a commencé de cette façon pour moi, par ce visage voyant, exténué… en avance sur le temps… ». Les ressemblances dans leurs écrits sont frappantes. le style est tout autre, Duras ayant une plume incomparable, beaucoup plus fine et subtile, mais leur vécu comporte un nombre infini de similitudes, notamment celle de faire l'expérience de la sexualité à un âge beaucoup trop précoce.

Pourquoi ne suis-je donc pas arrivée à aller au bout de cette lecture ? le style est lourd, un immense cri de détresse sans points ni ponctuations. S'ajoute au style un ton vulgaire qui m'a vraiment déplu. N'allez pas croire que je pense nécessaire d'exprimer son mal de vivre dans le but d'obtenir des distinctions de l'Académie française. Je crois seulement que, pour demeurer authentique face à son vécu, il ne soit pas nécessaire de communiquer avec une telle disgrâce. Un minimum de pudeur ajoute sans doute une meilleure crédibilité aux yeux du lecteur. C'est un avis personnel, bien sûr... J'en arrive maintenant à ce qui m'a vraiment percutée : la paradoxalité de son discours. Nelly Arcan aborde dans ses ouvrages des thèmes tels que l'influence de l'image chez la femme, la marchandisation du corps et le suicide. Elle dénonce haut et fort le commerce de la prostitution qu'elle refuse pourtant de quitter. Pour toute réponse, elle dira que « c'est peut-être à cause d'une tendance naturelle que j'ai à me dévêtir et à m'étendre à toute heure ». J'ai franchement été agacée de l'entendre parler de l'image corporelle de la femme, affirmant que les femmes ne se sentent le besoin d'exister qu'à travers le regard des hommes. J'ai beaucoup de difficulté à comprendre que, même avec une conscience aussi aiguë des raisons qui poussent les femmes à devenir des esclaves de leur image (époque axée sur l'image et la minceur), elle n'ait pas réussi à s'en affranchir elle-même. Son roman est à mes yeux un tissu de provocations qu'elle alimente à travers une allure hyper-sexualisée et des propos uniquement centrés sur le sexe. J'ai le sentiment d'avoir perdu mon temps alors qu'une tonne de romans croulent sous mes pieds…

Lien : http://www.lamarreedesmots.c..
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Il y a longtemps que je voulais découvrir l'oeuvre de Nelly Arcan. J'ai des souvenirs d'elle sur les plateaux télé alors que j'étais adolescente. Ses cheveux blond platine, sa plastique impeccable, le sexisme des hommes et la jalousie des femmes autour.

Dans « Putain » l'autrice et narratrice raconte son expérience d'escort. Entre deux clients, dans sa maison close à Montréal, elle revient sur son enfance et se souvient de son père, coureur de jupons, dévot à l'extrême, et de sa mère qu'elle traite de « larve » et de « cadavre ».

Dans l'univers très sombre de Nelly Arcan, les femmes sont soient des « larves », dans l'attente passive de faire bander les hommes, soit des prostituées s'adonnant à la « putasserie » comme elle ou bien des "Schtroumpfettes", les plus jeunes d'entre elles.

Dans l'univers très sombres de Nelly Arcan, les hommes sont excités par leur propre fille ou bien par d'autres femmes que la leur, des putes qui ont l'âge de leur fille. D'ailleurs, Nelly craint de voir un jour débarquer son père dans sa chambre et elle fantasme sur la venue de son psychanalyste, les deux hommes qu'elle ne pourra jamais avoir.

Cette lecture est éprouvante car il n'y a aucune lueur d'espoir, aucune étincelle. La jeune fille subit, traîne son mal-être existentiel et sa vision du monde tronquée. Jamais elle exhorte à se rebeller, à lutter contre le patriarcat. Pourtant ce témoignage rend largement compte de la domination des hommes sur les femmes. Point de sororité, mais de la compétition, voire de la misogynie.

Heureusement, il y a les mots et ce flot de phrases entêtant, comme un cri, qui ne nous laissent à peine respirer. Ce texte à la ponctuation chahutée ressasse jusqu'au dernières lignes, nous répète les motifs obsédants de Nelly Arcan. La mort, l'inceste et la folie planent.

Tour à tour Isabelle Fortier, Nelly Arcan ou Cynthia, à vouloir se réinventer et se protéger derrière des noms d'emprunt, ne se serait-elle pas dissoute dans ses multiples identités ?

A écouter, le super podcast « Putain de Nelly Arcan : pourquoi on la redécouvre enfin quatorze ans après sa mort ? » avec Ovidie, qui nous éclaire sur sa vie et ses écrits autobiographiques et nous invite à la relire.

Un texte court mais très dense, émotionnellement difficile.
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Un texte brut, bien plus que les mémoires d'une étudiante qui se fait escort-girl, il éclaire tragiquement des questions féministes.

Quelle est donc la nature de cette toute-puissance offerte par un corps féminin jeune désiré ardemment par les hommes, et qui pourtant tourne à la coercition sexuelle pour les femmes ?

Un piège se referme alors : la jeune femme désirable sera soit "coincée" si elle se tient à l'écart des jeux de séduction sexuelle, soit "allumeuse" si elle se dérobe avant la fin, soir une "pute" si elle donne ce qui est attendu. Que chacune choisisse sa voie, amen.

On comprend donc bien comment l'on peut choisir de se faire putain (de luxe) par jusqu'au-boutisme, pour explorer le paroxysme de cette relation névrosée de domination jusqu'à s'en détruire.
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Ne cherchez pas l'intrigue ni le dénouement car ce récit n'est pas un roman. C'est un regard terriblement lucide et dur sur la vie et le rôle de la femme dans la société. Ces femmes jetées en pâture aux mâles qui exigent de la jeunesse et de la beauté afin de satisfaire leurs besoins sexuels. C'est l'introspection d'une jeune femme teintée de ses névroses. Un texte profond et dérangeant qui ne m'a pas laissé indifférente, bien au contraire. le style d'écriture n'est pas facile, les phrases sont interminables et le texte comporte beaucoup trop de répétitions.
Lien : http://gustavelechat.wordpre..
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Ce récit auto-fictif ressasse les heures de travail d'une escorte girl, le défilé des clients, le dégoût de soi, mêlé aux souvenirs d'enfance entre père absent et mère dépressive. Étudiante, la narratrice délaisse rapidement les salles de cours pour les chambres d'hôtel dans le but avoué de gagner toujours plus d'argent. Elle décrit avec une lucidité glaçante le cercle vicieux de la jeunesse, de la beauté, du sexe, de l'argent pour rester la plus belle, satisfaire le client, etc. Loin de l'autrice l'idée d'en faire un récit érotique. Ses longues phrases obsessionnelles disent le dégoût de l'autre, du client, le dégoût du père, le dégoût de la vieillesse, tout autant que le dégoût de soi. Elles disent la manière dont l'étau se resserre autour d'un environnement social de plus en plus restreint. Putain est un récit angoissant, une spirale oppressante, dressant le portrait hyper-lucide de l'envers de nos sociétés.
Nelly Arcan s'est suicidée en 2009 à l'âge de 34 ans. Son récit se fait l'écho sidérant d'un certain type d'exploitation féminine physique et psychologique. En ce sens, il vaut le détour.
Nelly Arcan a par ailleurs fait l'objet de plusieurs publications, notamment scientifiques : "Nelly Arcan : de l'autre côté du miroir" de Marguerite Paulin , "De Marie de L'Incarnation à Nelly Arcan: Se dire, se faire par l'écriture intime" de Patricia Smart , et "Nelly Arcan, Trajectoires Fulgurantes" d'Isabelle Boisclair .
Lien : https://www.babelio.com/list..
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Ce roman est un peu étrange tant il fait écho à la destinée de l'auteure.
On ressent tout son mal-être et ça nous met mal à l'aise quand on sait qu'elle en est arrivée au suicide. Son père qu'elle cherche tant bien que mal à travers ses clients, sa mère qu'elle traite comme une moins que rien. Son rôle de schtroumpfette qui doit se taper tout le village pour être toujours la plus désirable des putains. On lit une sorte de testament avec des phrases de plusieurs pages.
Vraiment étrange comme lecture que j'ai mis du temps à parcourir tant elle me fut pénible mais magnifiquement bien écrite.
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