Ayerdhal est de la trempe de ces auteurs qui vous marquent au fer rouge. Sa plume est douée d'une vie propre, destinée à vous toucher en plein coeur, à fourailler dans vos émotions pour en extraire les plus brutes, celles qui sont profondément enfouies, et s'extirpent dans un soulèvement inattendu.
Ayerdhal ne m'a pas étonnée, je savais déjà par ses
Chroniques d'un rêve enclavé qu'il pouvait me remuer, et je m'étais mise en condition, si tant est que l'on puisse se préparer à une nouvelle rossée émotionnelle ^_^
Et pourtant, il m'a encore cueillie à la racine !
Ne lisez surtout pas le synopsis, ne vous conditionnez pas à l'avance ! Vivez le choc en même temps que le héros de cette histoire, lui qui n'était absolument pas préparé à se faire kidnapper du jour au lendemain... C'est de la commotion éprouvée que l'impact recherché viendra. Et ensuite, après le temps des questions sans réponse, arrivera celui de l'âpre réalité révélée. L'absence de choix faisant naître une vérité qui s'imposera à lui, impitoyable et dérangeante. Celle que l'on préférerait refouler par commodité, mais qui exige une rançon pour peu qu'il nous reste un soupçon d'altruisme.
Dans le désert, à l'arrière d'une jeep vrombissante d'une révolte contenue, les questions assoiffent tout autant que l'aridité de l'environnement. C'est
Ayerdhal qui est au volant, ne l'oubliez pas.
Les soubresauts du terrain accidenté ne sont rien comparés à la secousse émotionnelle ressentie lors des haltes, lorsque la poussière retombe et que la misère nous explose en plein visage.
Dans cette étendue de sable abandonnée de tous,
Ayerdhal nous rappelle nos priorités, si jamais le monde de demain devait s'écarter de la bonne piste à suivre.
Aux côtés de ravisseurs employant des méthodes de terroristes humanitaires, qui n'épargnent pas leurs détenus, mais les confrontent à la dure réalité,
Ayerdhal nous ballotte dans les dunes, révélant derrière la fenêtre du quatre-quatre ce que pourrait réserver un avenir laissant une partie du monde à l'abandon.
Un futur où l'ambition spatiale, coûteuse et égocentrique, se ferait au détriment des plus démunis.
Sous son blindage frappé du sceau de "thriller de science-fiction", ce récit embarque tout sur son passage, tant il est prenant et réussi. Et au détour de l'erg traversé, ses roues soulèvent des messages profondément humanistes, comme une tempête de sable laisserait ses grains s'infiltrer dans les petits interstices de nos esprits confinés par le confort et l'indifférence.
Une humanité qui exsude au point de se demander si l'auteur ne mêlait pas sa sueur et son sang à l'encre avec laquelle il écrivait ses romans.
Je réalise véritablement que lire un roman d'
Ayerdhal, c'est comme partir sur une terre rocailleuse en nous délestant en chemin de l'indifférence crasse qui menace de nous coller à la peau. Cette lecture laisse le souvenir d'un baptême de sable asséchant les consciences léthargiques qui oublieraient un peu trop aisément que l'espoir d'une oasis doit appartenir à tous.