Affliction

AFFLICTION de RUSSELL BANKS
Lawford, New Hampshire, petite ville du nord est des États Unis. Wade creuse des puits à mi temps et fait la police pour l'autre partie de son temps. Il survit mal à son divorce et peine à voir sa fille. Il va péter les plombs, c'est son frère le narrateur. Il raconte, en reconstituant les événements, cette dernière journée, bien sûr, mais en remontant bien plus profond, dans la famille. Un père ultra violent et dominateur, une mère impuissante, 2 frères morts au Vietnam, une soeur dans une secte, et lui, le frère narrateur, qui s'échappe pour éviter le naufrage. Itinéraire d'une destinée tragique dans une ville où le bar et la chasse sont les principales activités, et le maire le principal employeur. Livre terrible, magnifique par bien des aspects et qui décortique ces engrenages implacables, l'amour n'est pas absent mais il ne peut pas lutter contre des pathologies aussi intenses.
Un des plus beaux Banks, profond, dense, qui prend aux tripes et qui fait mal tant on aimerait que Wade trouve les solutions à ses problèmes. La destinée et la répétition des pathologies familiales.

Wade est un homme en colère. Et s'il est en colère, c'est avant tout parce que c'est un homme malheureux, qui a le sentiment que son existence lui échappe. On pourrait même dire qu'il a le sentiment que l'existence en général lui échappe. Il se sent décalé, imagine que les autres connaissent un secret auquel il n'a pas accès, celui du bonheur, de la joie ; celui, tout simplement, de la vie.

Divorcé de Lillian, qu'il a pourtant épousée à deux reprises, il a du mal à gérer ses relations avec Jill, leur fille de dix ans. Ses tentatives pour instaurer entre eux une complicité sont souvent maladroites, et mettent la fillette mal à l'aise.
Empêché par une faiblesse auditive de passer le concours de la police, il doit se contenter d'un poste d'agent de mairie, qu'il cumule avec son emploi de puisatier pour l'entreprise de Gordon LaRivière, personnage important de la petite ville de Lawford, dont il est conseiller municipal.
Déprimé par la médiocrité de sa vie, Wade est en souffrance perpétuelle. Incapable de se forger une carapace solide et durable face aux coups du sort, c'est un être à vif, dont les accès de violence de plus en plus fréquents et l'abus d'alcool laissent présager une descente aux enfers toute proche.

Et c'est en effet bien de cela qu'il s'agit : "Affliction" est le récit de la chute inéluctable de son héros, précipité par ses propres démons dans les affres d'une forme de démence. La progression de cette chute et les mécanismes qui l'engendrent nous sont minutieusement rapportés par Rolfe, le frère cadet de Wade.
Professeur à Boston, Rolfe a fui dès que possible l'immobilisme grisâtre de Lawford et un foyer miné par la férule d'un père alcoolique et violent.
En s'appuyant sur les témoignages de ceux qui ont côtoyé Wade les quelques semaines avant sa disparition -que nous apprenons d'emblée-, il reconstitue les événements qui l'ont précédée. Fort d'une intuition fraternelle née d'une enfance traumatisante commune, qui le convainc d'être le mieux placé pour évaluer l'état d'esprit de Wade durant cette période, il va même plus loin, en décrivant comment son aîné s'est laissé envahir par une idée fixe, et a perdu tout contrôle de soi.

L'ambiance du récit est à l'unisson de la désespérance du héros. Lawford est une bourgade qui n'offre aucune perspective d'avenir, dont les jeunes, à l'image de Rolfe, ne pensent qu'à partir. L'hiver y est long, extrêmement rude, et semble tout recouvrir d'une chape de plomb qui emprisonne les habitants dans un quotidien morne et obscur. Il ne s'y passe jamais rien, hormis l'immuable retour, chaque année, de la chasse aux cerfs, qui peuple la petite ville d'individus balourds et vantards, et de 4X4 aux dimensions ostentatoires.
C'est d'ailleurs un accident de chasse qui constitue le prétexte dont l'âme blessée de Wade s'empare pour le faire basculer peu à peu dans un état de folie ravageuse.

Russell Banks nous offre avec ce roman un texte fort et poignant, la chronique désespérée d'un homme passé à côté du rêve américain, broyé par la malchance, et qui n'a jamais réellement surmonté les traces qu'un mauvais départ dans l'existence a imprimées en lui.

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Affliction est un roman très noir qui se passe en Nouvelle-Angleterre, région située au nord-est des Etats-Unis, la plus ancienne région de l'Union sur le plan historique, non loin du Canada. C'est là que l'auteur est né, dans le Massachusetts. Une de ces régions où l'hiver, très rigoureux, s'installe pour de longs mois dans un paysage somptueux de collines, de forêts et de lacs et engloutit tout sous un épais manteau de neige. Lawford est une toute petite ville, isolée par la neige de tout centre urbain un tant soit peu important. Cette permanence du froid et de la neige fait ressortir l'ambiance glauque du lieu décrit comme « le trou-du-cul du monde ».
alcoolique, destructeur, empêtré dans une vie de misère.
Un enfant que sa mère n'a pas su protéger et qui commence sa vie d'adulte chargé d'un immense fardeau héréditaire et social. Il a hérité d'une violence qui l'a marqué à jamais.
Comment ne pas reproduire cette violence ? Dans un monde lui-même violent !
Ses deux frères aînés avaient cru pouvoir fuir ce milieu et… s'étaient engagés dans la guerre du Vietnam. Ils n'en étaient pas revenus. Wade avait tenté l'expérience, mais n'avait été retenu que pour un poste protégé en Corée, l'Etat ne pouvant se permettre de sacrifier plus de deux membres d'une même famille.
Ce thème de la fuite et des illusions qu'elle traîne à sa suite est d'ailleurs un thème récurrent dans le roman. On essaie d'échapper à un destin difficile ou à un lieu inhospitalier, mais au fond que gagne-t-on au change ?

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Formidable roman un de mes livres préférés .. Oui c est noir très noir même comme en opposition avec tout ce blanc de la neige omniprésente ... La neige virginale et la noirceur des humains qui vivent la.... .sinistre description d un bled du nord des États Unis ou l alcool et la chasse aux cerfs sont les seules distractions Peut être est il difficile de s identifier si l on n est pas soi même tombé dans sa vie ??il est certain que si pour vous ça baigne depuis toujours vous ne verrez dans Wade que un couillon pleurnichard et nombriliste... Ce n est qu homme qui se débat contre la fatalité et la '' loose ''. Sera t il capable de devenir ce que tout américain est sensé être, un '' winner ''?? On est pas dans un film de Walt Disney, peu de chances pour que cela arrive.. Lisez ce livre exceptionnel et vous saurez si Wade trouve la solution

Mélange de polar et de thriller psychologique, je trouve le scénario un peu trop extrême, et cela dessert à mon sens le propos qui consiste à décrire une Amérique dévastée, aux enjeux humains pitoyables, avec une famille détruite et une figure d'homme en crise. le style n'est pas particulièrement mémorable.

Roman en fait très ambitieux, et qui affiche son ambition : celle de faire comprendre le parcours qui conduit un homme ordinaire, moyen, -votre frère, puisque c'est le frère de Wade, Role, qui a mené l'enquête et reconstitue l'histoire- , un parcours qui conduit à un double meurtre et à une disparition. Un parcours qui doit finir par paraître exemplaire, inscrit en quelque sorte jusque dans le paysage gelé du mont Parker dans le nord des USA. Il savait qu'au fond de son coeur existait de l'amour – un amour pour Jill aussi cohérent et pur que l'algèbre ; peut-être aussi de l'amour pour Margie ; et pour maman, cette pauvre maman qui maintenant était morte et à jamais loin de lui ; et malgré tout de l'amour pour Lilian:de l'amour pour les femmes – mais il avait beau essayer dans tous les sens, il n'arrivait pas à organiser sa vie de manière à faire fond sur cet amour. Les sentiments troubles qui l'empêchent de devenir l'homme bon qu'il est au fond sont principalement le ressentiment, la haine vis à vis d'un père monstrueux. (Histoire de plus en plus banale dans la littérature contemporaine!) On retrouve avec plaisir la minutie des descriptions tant physiques que psychologiques de Russell Banks. On partage l'« affliction » suggérée par le titre. D'autant que l'auteur prend son temps de façon démesurée. D'où malgré tout cette question : peut-on lire seulement pour s'affliger ?

Un peu de trop de descriptions à mon goût mais une histoire formidable qui nous démontre, une fois de plus, jusqu'ou la violence familiale peut mener. Très bien écrit . A lire.

Evocation du lien fraternel, effrondement d'un frère par rapport à l'autre, émoiuvant.

Un qui a tout gâché à cause de on enfance