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4,05

sur 781 notes
C'est une femme qui fuit. Elle fuit la vie de sa mère qui se répète. Elle fuit pour pouvoir être libre, libre d'exister par elle-même, libre de peindre, libre d'écrire.

Au travers du parcours de sa grand-mère, Anaïs Barbeau-Lavalette nous fait partager l'atmosphère créatrice des cercles artistiques avant-gardistes du Montréal d'après-guerre. Suzanne Méloche s'y adonne à l'écriture "automatiste" pour laquelle elle sera reconnue 30 ans plus tard.

Un roman au rythme effréné, bâti de phrases courtes, comme une course, pour reconstruire l'histoire familiale dans la liberté ... de vivre ensemble.
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J'ai beaucoup apprécié ce roman. le rythme est soutenu grâce à des chapitres très courts, et pourtant l'histoire retrace une vie. La vie de la grand-mère de l'autrice qui a choisi de se séparer de ses enfants afin de vivre sa vie en toute liberté. Et pourtant elle les aime ses enfants, et elle ressent le manque à chaque instant. Et pourtant elle n'attrape jamais la perche qui lui est tendue par sa fille quand elle la retrouve. Et pourtant cette fille ne la lâchera jamais la perche, et continuera vaille que vaille à donner des nouvelles.
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Prix des libraires du Québec 2016 / Prix France-Québec / Grand prix du livre de Montréal
Ceci est une histoire vraie.
Anaïs Barbeau-Lavalette est la petite-fille de Suzanne Meloche (1926-2009). Anaïs ne connait rien de cette grand-mère sinon qu'elle a abandonné ses enfants et qu'ainsi Mousse sa maman, vit avec un trou dans le ventre et la peur d'être encore abandonnée. A peine si la petite-fille et la grand-mère se sont croisées deux ou trois fois, donc pas eu le temps de la connaître quand elle meurt.
A son décès « Ma mère s'accroche aux murs. C'est Hiroshima dans son ventre. Elle deviendra peut-être normale. Une femme, avec une mère enterrée. »
C'est cette pensée qui nourrit la petite-fille devenue femme de trente ans. Cela en dit long, sur les cicatrices laissées et transmises.
Lorsqu'il a fallu déménager l'appartement de Suzanne, Anaïs emporte des livres bouddhistes, des journaux, des poèmes, des photos et autres documents. Ceux-là ont été un début de piste pour connaître cette femme qui avait fui.
Pour en savoir plus, il lui a fallu avoir recours à une détective.
« Il fallait que tu meures pour que je commence à m'intéresser à toi.
Pour que de fantôme, tu deviennes femme. Je ne t'aime pas encore.
Mais attends-moi j'arrive. »
Le lecteur découvre cette histoire comme si l'auteur était assise devant une grande malle et qu'elle en sortait des photos en noir et blanc. Ses chapitres sont courts, comme des tableaux, qui feraient divaguer nos pensées, car la force de cette narration est que le lecteur n'est pas laissé à l'extérieur. Lui aussi veut percer le mystère de ces documents.
Claudia et Achille, les parents de Suzanne vivent à Ottawa avec leurs six enfants. 1930 c'est la crise, le père professeur perd son emploi. le gouvernement préconise pour endiguer les causes de celle-ci, de renforcer l'ordre moral et le retour à l'esprit chrétien. La pénurie s'installe, le rationnement aussi.
Une vie de privations entrecoupée de messes et de confessions à l'église. Avec l'arrivée d'Hitler au pouvoir, la famille s'agrandit d'un septième enfant, un garçon. La petite Suzanne observe, enrage et grandit sous le précepte principal d'Achille qui est ; « Apprends à bien parler et tu ne seras jamais complètement pauvre. » C'est ce que fait Suzanne, elle est curieuse et avide de savoir, bonne élève, elle fait son premier voyage pour se présenter à un concours d'éloquence. Concours gagné, une première soirée de liberté et la rencontre d'un groupe d'amis qui ne vivent pas comme elle.
Retour à la maison, mais le coeur et l'esprit sont restés à Montréal. Une correspondance s'établit, d'autres lectures se font et les idées fusent. Lorsqu'elle reçoit la lettre du collège qui l'accepte pour qu'elle y finisse ses études, c'est sans se retourner qu'elle franchit le seuil de la maison familiale.
Elle va s'intégrer à ce groupe les « Automatistes ». Elle y rencontre Marcel Barbeau « Il a une présence précise. En tout terrien. Rien d'évanescent. Il est violemment ancré, et pourtant reste insaisissable, profondément secret. »
Va commencer une vie de bohème, ils se marient en 1948, en 1949 Suzanne a 23 ans va être maman pour la première fois d'une petite Manon dite Mousse et deux ans plus tard d'un petit François.
Elle se met un peu de côté pour s'occuper de promouvoir les oeuvres de son mari. Et dans leur groupe, dirigé par Paul-Emile Borduas, il lui faudrait faire profil bas. Elle ose critiquer ce qui est écrit sur des tracts et se voit évincée de la signature du manifeste Refus Global, ce qui aura pour conséquence de reléguer son oeuvre au second plan : « les femmes ne durent qu'au fait d'avoir signé le Refus global d'être reconnues comme automatistes et, conséquemment, de passer à l'histoire ».
Elle écrit, elle peint mais elle s'occupe des enfants seules, Marcel vit sa vie de créateur. Dans ce groupe d'avant-gardistes, le rôle des femmes reste le même, celui de ménagère et de mère. Suzanne rêvait d'autre chose, d'une vie artiste partagée et non de cette vie de seconde zone. Une photo d'avril 1952 montre un couple avec ses deux enfants, un cliché de la famille idéale, une Suzanne souriante tenant sa petite fille sur les genoux et souriant à son jeune fils.
1ER août 1952, elle prend le bus et quitte sa famille, abandonne ses deux enfants.
Une nouvelle fois, elle part sans se retourner.
Son amie Marcelle l'héberge et par sa légèreté, va aider Suzanne à empoigner la vie et la faire sienne. Elle enseigne le dessin au fusain. Marcel assume son rôle de père en cumulant les boulots pour payer la garderie. Mais tout a une fin et il faut trouver une solution. Suzanne fait appel à ses belles-soeurs : « Tu raccroches. Tu t'accroches. Tu te choisis. » En effet ses dernières ne prennent que Mousse et laissent le petit François.
Celui-ci sera adopté par un couple dont le mari est embaumeur.
Elle conservera le nom de Barbeau car le divorce est illégal au Québec.
Suzanne convainc Marcel de renoncer à ses droits parentaux pour que les deux enfants soient adoptables. Il le fait et part pour New-York.
Avec Peter elle part en Gaspésie et devient postière. Un an plus tard retour à Montréal, le temps de prendre un bateau pour Bruxelles. Puis faute d'y trouver du travail, c'est Londres la patrie de Peter. Ses parents sont ravis de rencontrer Suzanne, mais celle-ci se réfugie à la National Gallery. Elle étudie les oeuvres qui y sont, Peter l'y retrouve et l'encourage à reprendre les pinceaux. Elle peindra son Pont Mirabeau.
En 1956 Suzanne est enceinte, elle a trente ans et il faut trouver de l'argent pour « une faiseuse d'anges ».
1958, arrivée à New-York, séjour à Harlem avec Selena. Prise de conscience de la ségrégation et des exactions du KKK.
1961 le fameux voyage en autocar jusqu'en Alabama. Elle fait partie du premier groupe de manifestants qui luttent pour dénoncer cet étiquetage humain : « White only » « Colored only ». D'autres manifestants vont arriver et la prison déborde d'humains. Victoire le 22 septembre 1961, le gouvernement Kennedy ordonne la libération de tous les manifestants et déclare illégale l'utilisation des signes ségrégationnistes.
A la suite de quoi Suzanne va devenir secrétaire d'une association militante à Greenwich, elle a 40 ans. Elle rencontre Gary, 22 ans SDF fracassé par la guerre du Vietnam. C'est avec lui qu'elle fera son retour à Ottawa pour les obsèques de Claudia, sa mère. C'est l'été, elle revoit sa famille.
Mousse a grandi auprès de ses tantes, mais François a fui sa famille adoptive, car la femme qui lui a servi de mère est morte, et le remariage du père est une catastrophe pour cet enfant qui est le souffre-douleur de sa belle-mère. Il fuit les autres et lui-même. Lui aussi est en quête.
1981 signe le retour définitif de Suzanne à son point de départ Ottawa. Elle y restera jusqu'à sa mort.
Un magnifique portrait de femme, dans son contexte.
Un apaisement dans le fait d'avoir retrouver la femme Suzanne Meloche-Barbeau.
Pourquoi es-tu partie ? Une question à laquelle Suzanne refusera toujours de répondre.
Ce livre est une quête longue, douloureuse mais aussi lumineuse. Essayer de comprendre est le premier pas sur la route du non-jugement. Qui sommes-nous pour juger les autres ? Que faisons-nous de notre vie ?
Une seule certitude les actes des uns a des conséquences sur la vie des autres et cela va de génération en génération.
Pour Suzanne et les autres cette définition de la liberté sonne juste :
« La liberté est un privilège borné de frontières dont les transgressions nous régentent immanquablement à récolter l'effet boomerang. » Mofaddel Abderrahim
©Chantal Lafon-Litteratum Amor 18 décembre 2017.






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J'ai été désorientée par le style. Au début, j'ai aimé. Mais à la longue c'est fatiguant.
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Anaïs Barbeau-Lavalette nous livre dans La femme qui fuit le récit poignant du destin hors norme de Suzanne Meloche (Barbeau), mère, artiste, militante (et grand-mère de l'auteur) qui, par révolte contre son époque ou par besoin criant d'exister, abandonne ses enfants pour poursuivre son destin.
Grâce à cette plume d'influence cinématographique, ce roman-biographie d'une grande sensibilité sait non seulement donner chair à des artistes marquants de l'histoire du Québec à l'aube de la Révolution tranquille, mais aussi de rendre presque palpables des lieux et des événements par des mises en scène où tout est si minutieusement dépeint, que le lecteur, parfois bien malgré lui, se retrouve en situation de voyeurisme.
La précision descriptive et émotive des événements personnels, familiaux et sociaux rend éloquent l'indicible. Lorsqu'elle décrit le piano de sa mère, c'est la vie de cette femme qui nous est dévoilée, lorsqu'elle décrit les discussions de salons entre artistes du mouvement automatiste, c'est tout le bouillonnement du milieu artistique et le contexte politico-social de Montréal des années 1940 qui nous apparait comme si nous y participions.
C'est un roman personnel qui nous enseigne sur un pan de l'histoire des femmes artistes au Québec. Mieux, l'auteur nous plonge dans cette réalité.
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L'histoire glaçante de Suzanne Meloche, l'une des instigatrices du Refus global. Glaçante, parce que cette femme aura deux enfants avec Marcel Barbeau et qu'elle les abandonnera rapidement, incapable d'assumer son rôle de mère.


Sa petite-fille, auteure du livre, tracera un portrait sans concession de sa grand-mère, dont elle essaie de cerner la psychologie. On y découvre une femme qui fuit ses sentiments profonds, centrée sur elle-même, qui erre dans la vie sans jamais rien accomplir. le récit est haché, concis, les phrases sont courtes, l'auteur tutoie sa grand-mère et utilise le présent narratif.


Un livre original et troublant.
Lien : https://andreracicot.ca/lect..
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Anaïs Barbeau-Lavalette a choisi de revenir sur la vie de sa grand-mère Suzanne Méloche née en 1926 à Ottawa.
Une femme qui a fait un choix peu commun, celui d'abandonner ses enfants pour vivre une vie où la liberté est reine.

J'ai aimé le style de l'auteur, direct pour ne pas dire brut qui fait toute l'originalité du roman. Un style que j'ai apprécié et pourtant je me demande si ce n'est pas aussi la conséquence de la froideur que j'ai ressenti en faisant défiler les pages.
J'ai l'impression d'être en décalage avec la plupart des avis, mais je n'ai pas réussi à être touchée et émue par le destin de cette femme…

Bref, je suis passée à côté de cette lecture.
Lien : https://orlaneandbooks.wordp..
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Le poids de la liberté

Entre invention et réalité, voici le récit d'une femme libre, dévastée par ses fulgurances, enchaînée à ses absents. Elle s'appelle Suzanne ; à dix-huit ans, promise à un « bel avenir », elle quitte Ottawa, sa ville natale et aussi sa famille : sa mère au coeur asséché par tant de grossesses et aux doigts qui ne savent plus jouer Chopin, son père Achille qui arrache les pissenlits, alors qu' hier encore il enseignait, tous ses frères et soeurs. A Montréal, elle rencontre des jeunes trublions, enflammés, torrentiels qui se racontent de mille manières, avec un pinceau, un crayon, un morceau de vieille toile, une scène improvisée, ou bien juste une ribambelle de mots jaillis spontanément qui brisent les cadenas et les habitudes… Comme une fleur qui se déplie Suzanne y apprend l'art, la poésie, les vieux livres, la démesure et aussi l'amour, l'amitié, la couleur dans tous ses replis ; elle y apprend surtout la venue d' un petit être tout neuf envolé de son ventre : Mousse, sa fille, sa farandole, son astre. Très vite vient s'ajouter un fils à son petit monde désinvolte et feutré : François. Et puis Suzanne s'éparpille, s'essouffle, s'enfuit, et abandonne ses enfants, son mari, toutes les promesses qu'elle s'était faites. A présent, vidée, délestée, elle court et erre en funambule et musèle tous ses souvenirs qui la rongent et l'émiettent. Au gré de ses rencontres, elle trimballe sa valise de musées en jardins publics, de chambres glauques en appartements spacieux, d'Amérique en Europe, d'ateliers en villes éventrées, de bus brinquebalants en hôpitaux fatigués … et peu à peu sa jeunesse s'enfuit. Vieille et recroquevillée, elle a quatre-vingt trois ans quand elle s'éteint en glissant sur le sol de sa salle de bains.
La poésie qui sait s'insinuer derrière les lignes raconte bien mieux que les mots pesés et ciselés, les morsures du coeur, les larmes qui ruissellent de sel et de drame, les étincelles de l'art qui brillent dans la poussière.
Beaucoup d'amour, beaucoup d'irrévérences, beaucoup de larmes, plein d'art… un énorme bouquet tout en arabesques et en poésie.
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Dans La femme qui fuit d'Anaïs Barbeau-Lavalette, la place occupée par les époques et les lieux sont inextricablement liés à la compréhension du personnage principal du roman, soit la grand-mère de la narratrice, Suzanne Meloche. En effet, le personnage évolue au gré des époques et des lieux qui jalonnent sa vie (Ottawa, Montréal et New York, entre autres). Débutant par la crise économique de 1929, l'auteur y décrit avec sensibilité le bidonville, le Hole, de la région d'Ottawa, la pauvreté et l'empreinte que cela laisse sur le personnage. Puis, nous sommes transportés au temps des automatistes et du Refus global à Montréal. Nous découvrons l'implication du personnage dans le milieu littéraire et artistique de l'époque. L'auteur décrit, à travers l'importance de la langue, l'ambiance et les rencontres du personnage (Borduas, Riopelle, Gauvreau), la ville de Montréal dans l'après-guerre. C'est également à cette époque que Suzanne Meloche se marie avec Marcel Barbeau et donne naissance à deux enfants. La pauvreté et le souvenir de sa mère, morte de l'intérieur, lui insuffleront la nécessité de se choisir et de quitter une vie de famille qui l'étouffe et étouffe l'artiste en elle. Son désir de liberté ne sera jamais assouvi, car le poids de la culpabilité semble avoir rongé les contours de sa vie et, du coup, cette même liberté tant convoitée. L'oeuvre d'Anaïs Barbeau-Lavalette est vibrante, et grâce à son écriture, douce et implacable, nous redécouvrons des lieux et des époques, et à travers eux, le portrait d'une femme tourmentée.
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Une écriture stylistique percutante; des phrases courtes, vives et fracassantes qui font monter l'émotion au fil de la lecture ...
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