AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
3,88

sur 324 notes

Critiques filtrées sur 3 étoiles  
Sur fond de chouannerie, l'abbé Jéohël de la Croix-Jugan est, quelque part, un précurseur de Jack Torrance dans "Shining" de Stephen King... dans ce livre de 1852.
Cependant, comme c'est un drame du terroir Normand qui se situe sur Blanchelande, près de Neufmesnil, dans le Cotentin, il y a de la lenteur paysanne, comme dans "Regain" de Jean Giono, ou "Les Creux-de-Maisons" d'Ernest Pérochon.
.
L'ensorcelée est Jeanne le Hardouet, une fière Normande, née noble, née de Feuardant. La révolution et la chouannerie étant passées, elle a épousé un Bleu ( un républicain ), mais elle garde la fierté de sa noblesse. Quand elle retrouve un ancien chouan, Jéohël de la Croix-Jugan au visage ravagé par le plomb, elle retrouve l'esprit de la cause royale, et elle passe des heures avec lui chez la vieille Clotte.
.
Jules Amédée Barbey d'Aurevilly, dandy normand de la Manche, doit bien connaître l'église et l'abbaye de Blanchelande qu'il décrit. Son style original, adulé ou méprisé par ses contemporains, est fascinant, malgré les lenteurs et les longueurs qui permettent au lecteur de pénétrer l'atmosphère paysan post-révolutionnaire. J'ignorais que la chouannerie avait atteint mon pays, la Normandie. 10.000 morts y sont recensés. Louis de Frotté était le chef résistant de ce secteur, de 1793 à 1799. Bonaparte a mis fin à la chouannerie.
.
L'histoire de Jéohël et Jeanne est un roman à tiroirs.
-- C'est un roman raconté par un paysan du cru au narrateur ;
-- dans l'histoire s'est créée la légende,
-- due aux incertitudes : suicide ou meurtre, et par qui ?
-- due aux jaseries des commères du lavoir ;
-- due au sort ( ensorcelée ) jeté par le pâtre sur Jeanne ;
-- due à l'épeurement provoqué par le lieu : une rivière, une lande déserte la nuit, avec des lumières dans l'église de Blanchelande isolée, l'appel au meurtre du boucher dans le cimetière contigu, etc... Toute une atmosphère très bien rendue par Barbey.
.
L'appel au meurtre du boucher sur la vieille Cotte est une très belle analyse du démarrage des mouvements de foule, foule qui s'excite sur des mots clés prononcés sans aucune preuve de quoique ce soit... "C'est "Humain, trop humain" ! Ces mouvements de foule m'intriguent, et depuis longtemps, je dois lire "La foule solitaire" de David Riesman.
.
Je précise deux témoignages personnels :
-- le sort existe encore de nos jours. J'ai été victime d'un sorcier vaudou entre 2000 et 2004 pour rester avec la même femme. Je l'ai quittée 30 fois, et à chaque fois, je revenais vers elle.
J'ai assisté à deux cas de possession. Madame Visnelda, dont parle Tobie Nathan, désenvoûteuse, était ma voisine à La Réunion.
-- le revenant que voit le ferronnier à la fin du livre, cela existe : ce sont les esprits. le ferronnier est sans doute une âme blanche qui peut voir les esprits. Ainsi, Jésus apparaît à certaines personnes après sa mort jusqu'à l'ascension.
Pour ceux qui me prennent pour un zinzin, lire les ouvrages de Patricia Darré , Alain Joseph Bellet, ou le nouveau livre qui va sortir de notre ami Christian Boudeweel : )
Commenter  J’apprécie          5314
L'ensorcelée de Barbey d'Aurevilly mêle l'histoire et la fantastique. le récit se situe en Normandie au milieu du XIX e siècle et se base sur la légende de l'abbé de la Croix-Jugan et des sorcelleries des pâtres de la lande.
L'abbé, à la fois prêtre et chouan, tente de se suicider à la fin de la guerre entre les royalistes et les bleus. Sauvée par une vieille femme, il en reste complètement défiguré et banni de l'Eglise.
Jeanne-Madeleine de Feuardent, de lignée noble fut contrainte d'épouser un paysan, le Hardouey avec lequel elle vit heureuse à Blanchelande.
Sa rencontre avec l'abbé défiguré va bouleverser sa vie.
" Qu'est-ce que l'amour ? Et comment et pourquoi naît-il dans les âmes ?"
Est-ce le sort jeté par un berger au retour de l'église? Ou une façon de renouer avec son rang, alors que son amie, la vieille Clotte lui reproche sans cesse sa mésalliance ? Est-ce la troublante beauté défigurée de l'abbé ?
Toujours est-il que Jeanne est ensorcelée.
" C'était magnifique et c'était affreux." " Ce chêne humain, dévasté par les balles à la cime, avait toujours la forte beauté de son tronc."
Malheureusement, encore meurtri par la guerre des chouans, le village se déchaîne rapidement après la mort de Jeanne. Rancunes et légendes sèment le trouble dans l'esprit des foules. L'auteur nous laisse toutefois dans l'incertitude en fin de roman. Suicide ou meurtre, personne ne le saura mais la légende de l'abbé perdurera.
Comme toute oeuvre classique, la lecture est difficile (en tout cas, pour moi). D'une part parce que tout est basé sur l'oralité. le livre commence par la rencontre du narrateur avec un herbager, Maître Tainnebouy. Parcourant la lande en pleine nuit, ils doivent s'arrêter car le cheval de l'herbager commence à boiter. Lorsque résonne la cloche de Blanchelande, Tainnebouy, déjà inquiété par le sort des pâtres, ne peut que raconter l'histoire de Jeanne et de l'abbé. À l'intérieur de ce récit, s'insèrent aussi les "dieries" des paysans.
Vous l'avez compris, la seconde difficulté vient de l'utilisation du patois normand. Heureusement, il y a des notes explicatives en fin de livre.
Je lis très rarement des classiques et j'ai beaucoup aimé retrouver ce style très descriptif. L'auteur décrit les personnages sur plusieurs pages avec force de détails dans l'aspect et le caractère. Les personnages de l'abbé, de Jeanne ou de la Clotte sont sont très évocateurs. Les rencontres, notamment celle de Jeanne à l'église ou celle de la Clotte avec les villageois sont d'une grande force.
J'ai apprécié aussi cette ambiance fantastique où les êtres ne semblent plus maîtres de leurs pensées ou leurs actions, ce mystère qui demeure au-delà du dénouement.
Lien : http://surlaroutedejostein.o..
Commenter  J’apprécie          90
Barbey d'Aurevilly rend à nouveau hommage à la Normandie, avec ses paysans rusés et avides, ses bergers errants un peu sorciers, ses femmes de tête et d'action, mais aussi ses chouans qui ont combattu pour Dieu et le Roi. Les sympathies de l'auteur sont bien visibles. le récit du supplice du prêtre est d'ailleurs assez horrible, même s'il précise que les brutes violentes et cruelles se trouvent dans chaque camp.
C'est ce prêtre qui est le personnage le plus fascinant du récit, pour sa malédiction, pour ses souffrances, mais surtout parce qu'il ne s'exprime pas. On ne connaît pas ses pensées, il nous reste mystérieux : est-il envouté ou maudit ? amoureux ou damné ?
Et c'est cette multiplicité d'interprétations qui est intéressante, puisqu'on peut voir à la fois du fantastique dans le décor tourmenté de la lande normande ou le pouvoir de fascination d'un homme charismatique. le récit cadre où le Narrateur, incarnation de l'Auteur, intervient, n'était cependant pas nécessaire.
Commenter  J’apprécie          80
Jules Amédée Barbey d'Aurevilly (1808-1889) est un écrivain français qui a contribué à animer la vie littéraire française de la seconde moitié du XIXème siècle. Il a été à la fois romancier, nouvelliste, essayiste, poète, critique littéraire, journaliste, dandy et polémiste. Un temps républicain et démocrate, Barbey finit par adhérer à un monarchisme intransigeant, méprisant les évolutions et les valeurs d'un siècle bourgeois. Il revient au catholicisme vers 1846 et se fait le défenseur acharné de l'ultramontanisme et de l'absolutisme. Ses choix idéologiques nourriront une oeuvre littéraire, d'une grande originalité, imprégnée de sa foi catholique et marquée par la question du mal et du péché.
L'Ensorcelée ou La Messe de la Croix-Jugan est un roman datant de 1854. Roman historique, fantastique et passionnel. Roman historique car sa toile de fond est la Chouannerie, cette guerre civile qui opposa Républicains et Royalistes dans l'ouest de la France, de la Bretagne à la Normandie, lors de la Révolution française, entre 1792 et 1800. Roman légèrement fantastique parce que dans toutes les provinces françaises, récits et légendes locales en font mention, ici il s'agira d'un berger jeteur de sorts. Enfin roman passionnel, quand l'amour mène à la folie, la mort n'est jamais loin.
Dans le Cotentin, près de Coutances. A la tombée de la nuit, le narrateur, très certainement Barbey d'Aurevilly, traverse la lande de Lessay à la sinistre réputation, en compagnie de maître Tainnebouy, herbager et fermier qui connait bien les lieux. Quand au coeur de la nuit, une cloche lugubre retentit, le fermier en donne la sinistre explication à son compagnon et le récit de débuter réellement.
J'en résume très brièvement les grandes lignes : l'abbé Jéhoël de la Croix-Jugan s'était engagé avec les Chouans mais après une terrible bataille perdue, croyant sa cause perdue, il tente de se suicider en se tirant une balle de fusil dans le visage mais il survit et en conservera d'horribles blessures à la face.
Quelques années plus tard, l'ancien moine réapparait et sa personnalité étrange intrigue Jeanne le Hardouey. Fille d'un notable ayant perdu sa fortune, elle a épousé par devoir Thomas le Hardouey un nouveau riche. Attirée irrésistiblement par le prêtre, elle lui sert de messager pour contacter les rebelles Chouans par amour. Un amour non partagé qui la poussera à recourir à la sorcellerie pour s'attirer en vain ses bonnes grâces. le drame entre piste, la belle est retrouvée noyée dans un lavoir et l'abbé est assassiné en pleine messe pendant la consécration le jour de Pâques ! Depuis, selon des témoins, le prêtre célèbrerait toutes les nuits cette messe inachevée à jamais et la cloche qui tinte en serait le signal…
Un bon roman pour se replonger dans ces textes anciens avec leurs qualités et leurs défauts (pour un lecteur d'aujourd'hui). de l'action, du mystère, on peut frémir si on se pousse un peu, et toujours ce décalage temporel nous permettant de comparer les ressorts psychologiques entre hier et maintenant. Roman très Normand comme le voulait l'auteur, termes du patois local ou tournures de phrases nous immergent dans le bocage. Inutile d'aller loin pour trouver de l'exotisme !
Commenter  J’apprécie          60
Ce livre m'a énormément plu au début, au milieu aussi ...la fin fut un peu laborieuse.
En ce début de XIXe siècle, le narrateur se rend en Normandie. A la nuit tombée, dans le brouillard sur la lande déserte, il finit par rencontrer un homme, Maître Tainnebouy, avec qui il est content de faire un bout de chemin, les routes étant peu sûres. Ils vont tranquillement dans la lande de Lessay dans le Cotentin, botte à botte, chacun sur leur cheval jusqu'à ce que la jument grise se blesse. Commence alors dans la lande déserte une promenade étrange et fantastique où les deux hommes entendent alors neuf coups étranges. Maître Tainnebouy commence à raconter une histoire elle aussi très étrange.
L'histoire que raconte Maître Tainnebouy remonte à une dizaine d'années peut-être un peu plus ....c'est l'histoire de Jeanne, qui en l'an VI après la révolution française, rencontre un homme, l'abbé de la Croix de Jugan. A moitié roturière par sa mère et à moitié noble par son père, Jeanne est (mal) mariée à un homme de mauvaise réputation (il a racheté à bas prix les biens des exilés de la Révolution).
L'abbé de la Croix Jugan est quant à lui un ancien Chouan : Il est défiguré.... mais l'attirance qu'elle ressent pour lui est très forte.
Alors l'auteur nous raconte la lente déchéance de cette ensorcelée. Clotilde, une vieille femme essaie de lui venir en aide. Entre l'indifférence du curé tout à son idéal de Chaouan, un mari jaloux, Jeanne-Madelaine se débat contre la passion, se faisant manipuler par ce curé mystérieux.

J'avoue avoir un peu décroché à la fin : fatigue ou alors manque d'intérêt suite à la disparition de notre ensorcelée, qui elle m'a beaucoup intéressée ?

En conclusion : une lecture exigeante, un français à la fois relevé et des passages avec des mots de patois normand, un arrière plan historique intéressant..... Et quels portraits de personnages.....
Commenter  J’apprécie          30
Déjà, pour commencer, il est clair que si je n'avais pas eu à lire ce livre dans le cadre de mes études, je ne me serais jamais intéressée à ce roman. Pourtant, j'ai passé un bon moment.
Comme souvent avec les livres d'écoles, on a qu'une hâte le terminer mais une fois terminée, je me suis rendue compte qu'il m'avait plu et qu'il n'était en fin de compte, pas si mal.

Tout d'abord, il est question d'un narrateur (dont on ne connaît pas le nom) qui souhaite se rendre à la Lande de Lessay. Louis de Tainnebouy, qu'il va rencontrer accepte de lui montrer le chemin et part avec lui, sur leurs chevals. Ils vont se retrouver coincé dans un bois et là, les cloches vont sonner. Louis de Tainnebouy va alors conter l'histoire de Jeanne et de l'Abbé de la Croix-Jugan. Une terrible histoire car Jeanne va tomber amoureuse de l'Abbé. Puis, nous sommes aussi en pleine guerre des chouans.. donc au passage : multiples tortures, meurtres avec aussi une part de superstitions.

Il va, par la suite, se passer deux faits marquants qui rend la lecture plus palpitante. On y retrouve une part de mystère comme dans un roman policier. Je ne vous en dis pas plus pour ne pas vous cacher l'effet de surprise. Un indice : le premier titre pour ce livre avait été "La messe de l'Abbé de la Croix-Jugan". Que va t'il se passer pendant une certaine messe ?

En bref, malgré quelques passages qui ne sont pas simples, c'est un roman intéressant qui ne vous fait pas passer un moment désagréable.
Commenter  J’apprécie          20
Dans le cadre d'une lecture commune j'ai pu enfin sauter le pas et découvrir l'Ensorcelée de Barbey d'Aurevilly qui attisait ma curiosité depuis longtemps!

J'ai adoré la plume et le style de Barney d'Aurevilly qui donnent vie et corps à une atmosphère dont les Landes en sont l'âme. Telle une funambule, j'ai évolué dans une brume où le réalisme côtoyait le fantastique. Je rejoins ceux qui l'associent au roman gothique.

Pourtant j'ai un bémol, c'est l'histoire même. Si la langue est riche, je n'ai pas toujours saisi pourquoi l'auteur qui pourtant nous conte l'histoire de Jeanne le Hardouey, a mis plus l'accent sur sa confidente la Clotte, alors que c'est son histoire à elle, son coup de foudre qui nourrit la trame. Elle qui tombe plus que sous le charme de l'abbé De La Croix - Jugan, un ancien Chouan qui dans la chair de son visage, garda les cicatrices horribles laissées par cette période. Alors que Jeanne prise au piège d'une mésalliance avec un acquéreur de biens nationaux, s'éveille plus qu'à de nouveau sentiments, touche également du doigt le milieu de sa naissance. En effet,tout comme l'abbé, elle est issue de la noblesse.

Or la Clotte de la lignée des catins de la noblesse sera celle dont on pourra le mieux saisir sa personnalité en ayant accès à ses pensées et ses souvenirs, y compris ce qui c'était passé pour elle à presque chaque étape de l'histoire alors que pour les 3 personnages principaux ( Jeanne, son mari et l'abbé ), nous étions bien souvent spectateurs de la scène qui se jouait pour eux...

Un procédé qui hélas ne m'a pas permise de m'attacher à chacun d'entre eux et même qui m'a gardé en périphérie de l'histoire alors que certaines scènes de la trame de par leur force ont pu me harponner de l'intérieur....

Avec elles, je m'attendais avec de telles scènes et avec une telle atmosphère, à rencontrer plus de densité plus de matières au niveau des personnages qui en étaient les piliers comme un contre poids à cette atmosphère vaporeuse exprimée par le paysage, par les superstitions, par les pâtres jeteurs de sorts qui écument les Landes. Hélas Jeanne le Hardouey et son mari, malgré leur passion respective me sont restés étrangers comme les motivations de l'abbé De La Croix - Jugan. Un peu comme entre eux puisque aucun des trois ne connaîtra vraiment l'autre.

Une chose est sûre, l'Ensorcelée de Barbey d'Aurevilly ne m'a pas laissé insensible... Elle m'a laissée sur ma faim. Je dirais même que l'histoire m'a fait toucher deux extrêmes dans mes ressentis, m'éloignant de la corde du funambule qui pourtant avait symboliser ce juste milieu où tout était en nuance...
Commenter  J’apprécie          00


Lecteurs (833) Voir plus



Quiz Voir plus

Les titres des œuvres de Jules Barbey d'Aurevilly

Quel est le titre correct ?

Les Ensorcelés
Les Diaboliques
Les Maléfiques
Les Démoniaques

10 questions
46 lecteurs ont répondu
Thème : Jules Barbey d'AurevillyCréer un quiz sur ce livre

{* *}