Après la tétralogie des Déracinés - saga saluée unanimement, couronnée de plusieurs prix littéraires et vendue à plus de 500 000 exemplaires -
Catherine Bardon reste fidèle à la République dominicaine en retraçant la vie de Flor de Oro, la fille du dictateur Trujillo. Une biographie qui est avant tout un grand roman, tant sa vie fut romanesque !
Flor de Oro est le prénom que choisit Rafael Trujillo Molina, un petit truand devenu militaire, pour sa fille. Ce dernier, colérique, autoritaire, redoutable et redouté, n'ambitionne pas moins que de prendre la direction du pays. Sur l'échiquier de sa soif de pouvoir, sa fille Flor, comme chaque personne de son entourage, n'est qu'un pion.
Très vite, Flor va devoir composer avec l'absence d'un père dont l'ascension militaire et politique est fulgurante. Elle va devoir se contenter de ses rares marques d'affection, quand elle rêve d'un amour inconditionnel. Et vivre avec la peur permanente de le décevoir. Toute sa vie elle cherchera à combler ce vide, à apaiser son chagrin en cherchant l'amour auprès d'hommes qui, pour la grande majorité, ne lui offriront là aussi que des miettes. Il y aura ainsi neuf mariages, dont l'amour de sa vie que restera le grand charmeur Rubirosa, des moments de bonheur comme des parenthèses rares, volés à une existence dirigée de main de fer par un père tyrannique.
Armée des quelques fragments d'archives qu'elle a pu collecter,
Catherine Bardon parvient à nous offrir une reconstitution grandiose et romanesque de la vie incroyable de cette femme au destin malheureux.
Privée de liberté, manipulée par tous les hommes de sa vie, maintenue dans une prison dorée des plus aliénantes, courtisée avant tout pour son nom, son père et sa fortune, Flor de Oro en a vu de toutes les couleurs, et ce jusqu'à sa propre mort en 1978. Son histoire est celle d'une jeune fille brisée, jamais vraiment devenue une femme, ballotée par les sursauts politiques des décennies les plus noires de notre Histoire, de la montée en puissance d'Hitler à la lutte acharnée des Américains contre le communisme.
Flor de Oro a surtout beaucoup souffert d'être la fille du « Jefe ». Espionnée en permanence, elle ne pouvait se permettre de faire un pas sans que celui-ci ne soit relaté à son père. Un carcan dont elle tentera bien de se défaire, mais sans succès. Car, comme l'a montré
Diane Ducret dans ses ouvrages sur « Les
Femmes de dictateurs », ces derniers avaient pour la plupart un rapport très pervers avec leur famille.
Le récit est mené d'une main de maître, maintenant un véritable suspense tout en rejouant sans cesse les mêmes échecs, ceux qui se sont inexorablement enchaînés pour faire de la vie de Flor de Oro un véritable enfer. D'homme en homme, elle cherche à s'oublier, à oublier son père, à se libérer de son joug et de sa toute puissance, à s'affirmer enfin par elle-même et pour elle-même mais c'est peine perdue : le Jefe ou le destin s'arrangent toujours pour la faire revenir danser comme une marionette dans la paume ouverte de son dictateur de père.
Impossible de lâcher sa lecture, de ne pas se sentir touché par son héroïne, Flor de Oro Trujillo. Impossible de rester insensible à sa vie aussi mal menée que malmenée. Dans ce livre richement documenté d'un point de vue historique, on suit le parcours inouï d'une femme condamnée dès la naissance à subir la tyrannie d'un père. La toute-puissance sur les moindres faits et gestes de sa vie d'un dictateur.
En résumé, un roman saisissant, instructif et addictif qui nous fait découvrir - à travers le destin de cette femme - une toute autre part de l'histoire du monde, et l'envers du décor d'une dictature dont nous entendons bien trop peu parler en France
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