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Inspirée par le poème « une charogne » de Charles Baudelaire, Clémentine Beauvais imagine la vie de ce cadavre, non pas en animal comme personnellement je me le suis toujours figuré en lisant ce poème, mais en femme. Elle en fait une personnalité peu commune, de femme forte à un point discutable, rattrapée par la violence de la vie qui finit par lui faire perdre le sens commun.

Ce cadavre parle par-delà la mort, raconte sa vie, ses épreuves, ses choix. Il s'adresse plus particulièrement à Jeanne, Jeanne Duval, la compagne de Baudelaire, à qui le poème est dédié, à Jeanne en tant que femme, qui elle aussi a traversé des épreuves, nombreuses.
L'autrice imagine le fil de pensée de Baudelaire à la création du poème, et le met en dialogue avec le cadavre et avec Jeanne, leur donnant le pouvoir et dépossédant quelque peu le poète.
L'écriture et les images de Clémentine Beauvais sont aussi crues que celles de Baudelaire dans son poème, le destin du personnage aussi noir et lumineux.
Le charme de l'écriture en vers se fait discret mais essentiel.

Clémentine Beauvais parvient à peindre des femmes et à faire deviner la société du XIXème siècle avec un écho troublant à aujourd'hui, faisant ressentir cette lignée du fond des âges, cette condition féminine qui sonne comme une fatalité. Glaçant.
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Décomposée de Clémentine Beauvais

Iconopop

Quelle curieuse lecture !

C'est un récit autour de la Charogne, le célèbre poème de Baudelaire.

Le cadavre git sur un bas-côté, putréfaction, décomposition avancée du corps.

A l'instar de Charles, Jeanne prend la parole.

Elle s'octroie la parole, elle a des choses à dire, de l'imagination à revendre, ses propos perturbent le poète, le fascinent, l'effraient.

Si la fiction prend ses racines dans la légende, on peut alors comprendre combien Jeanne Duval, la maitresse venue des îles peut inspirer le poète, sa muse aussi mystérieuse que redoutable !

Un livre court, presque un exercice de style, un texte polyphonique où Jeanne devient porte-parole des femmes, de toutes les femmes, de ses soeurs, maltraitées, abusées.

Clémentine Beauvais donne à Grâce, une vie, une consistance, des rêves, des espoirs, des illusions, une voix dans la mort.
Le XIXème siècle, la voix d'une femme inaudible, la route sera longue, difficile mais le droit des femmes commence là, à coup d'aiguilles et de meurtrissures…

Le parallèle est intéressant, une variation poétique originale.

🎈« Ta peau brune, fumée, parcourue de baisers

et de frissons,

Fiévreuse et amoureuse, ayant tout oublié

De la charogne au détour d'un sentier.

Simplement tendresse entre les joues des oreillers. »🎈

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Le poème "Une charogne" se trouve dans le recueil Les Fleurs du mal écrit par Charles Baudelaire. Quel lycéen.ne n'a pas hoqueté/ricané de fascination et/ou dégoût devant la description de ce corps de femme en décomposition abandonné le long du chemin. Par lui, les élèves apprennent que la beauté classique n'est pas la seule recevable et que la pourriture peut engendrer le sublime, la preuve par Charles !
Clémentine Beauvais imagine que la muse de Baudelaire, Jeanne Duval raconte la vie de cette femme avant qu'elle soit assassinée, l'inventant tour à tour couturière, prostituée, chirurgienne, avorteuse, meurtrière... Ces situations, extrêmes et plausibles, reflètent la faible marge de manoeuvre laissée aux femmes de sa condition, dans ce XIXe siècle qui traitait avec mépris celles qui troublaient le cadre sociétal par un comportement en dehors de l'ordre établi en sortant un tant soit peu de la place qui leur était assignée : en gros, tenir un ménage, faire des enfants et se taire.
En ressuscitant le corps décomposé, Jeanne Duval s'empare du récit, ce que bien sûr Baudelaire ne peut admettre et c'est bien lui qui aura le dernier mot, en écrivant le macabre poème qui passera à la postérité. Clémentine Beauvais offre ainsi une visibilité aux deux femmes, en redonnant de la dignité au cadavre du poème et à la maîtresse marginalisée du poète.
Les chapitres mêlent narration, poésie et théâtre (il faut lire ce texte à haute voix !), mélangent les calligraphies, allient l'exaltation débridée au réalisme cru ; la lecture ne s'en trouve pas facilitée mais qu'importe, cette fleur du Mal revisitée est un livre réussi qui bouscule.

Lu dans le cadre des 68 premières fois, ce livre voyage auprès des lecteurs/lectrices engagé.e.s dans l'aventure
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WoW. Déjà je tiens à préciser que je n'ai jamais lu le poème original (le pourrai-je maintenant?) et donc même en lisant le résumé, je ne savais pas trop dans quoi j'allais me lancer. Et c'est sûr que je ne m'attendais pas à ça. D'abord un livre que j'ai eu du mal à lire. Un livre qui parle d'inceste, de viol, de violence faite aux femmes, de vengeance, d'avortement, de mort, de meurtre… et le tout en étant assez graphique (surtout dans la description de la décomposition du corps).
Un texte fort, poignant et violent qui ne passe pas par Quatre Chemins. Les vérités sont dites, l'histoire est écrite, la condition des femmes est évoquée.
Un texte qui prend au tripes et dont l'écriture magnifique ne vous laissera pas de marbre
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La Charogne de Charles Baudelaire est un de mes poèmes préférés depuis ma première lecture à 10 ans. J'avais été frappée par l'image dérangeante de cette carcasse en décomposition, “son ventre plein d'exhalaisons” et par la violence des mots de Baudelaire à sa Muse (Jeanne Duval).
Quand j'ai appris que l'autrice des Petites Reines s'en était inspirée pour tisser Décomposée, j'ai acheté ce livre. Je ne l'ai plus lâché jusqu'à la dernière page. Et je l'ai relu une 2ème fois car le texte me hantait.

Clémentine Beauvais nous offre ici un magnifique texte en vers libres d'une inventivité audacieuse, par ses jeux de formes, sa profusion de genres (tour à tour poème, dialogues théâtraux, monologues, théâtre antique avec son choeur de femmes, jeux de langues…). L'autrice joue avec la forme et les mots d'une manière très intelligente et nous propose un texte qui fait autant appel à nos sens et à nos émotions qu'à notre intellect.

“Tandis que sur mon corps se compose un poème”
La Charogne, c'est Grâce, une femme du XIXème siècle qui essaie de survivre dans un monde dur avec les femmes. Au rythme de la chair en décomposition, l'autrice recompose son histoire. Par ses jeux de langage, elle la coud, la tricote, au fil des souvenirs de Grâce qui peu à peu se décomposent eux aussi. Clémentine donne une voix à Grâce et à Jeanne Duval, la muse de Baudelaire, et à travers elles, ce sont les voix des Femmes qui se font entendre. les Voix de “ses soeurs”.

Décomposée c'est une histoire de corps, de violence, de lutte et de vengeance. Mais c'est aussi une histoire d'amour, de famille, de sororité. Une histoire de Femmes et d'émancipation. C'est un texte puissant, humain, touchant, révoltant, vibrant, cru, sarcastique, bouleversant...

Ce texte a été un énorme coup de coeur, une claque tant par le style que par la forme. J'ai vibré, frissonné, été émue, j'ai eu des papillons dans le ventre devant la beauté de certains vers... Je me suis remise à lire de la poésie depuis.

Juste une dernière remarque, je voulais revenir sur le choix du prénom “Grâce”. Il a évoqué chez moi tellement de choses tout au long de ma lecture. Déjà par le rappel des 3 Grâces, les déesses de la beauté et de la créativité dans l'Antiquité grecque. Grâce devient elle-même la Muse de Baudelaire, lui inspirant au détour du chemin un poème, mais elle est aussi celle de Clémentine.
“une Grâce” c'est aussi ce que l'héroïne accorde aux femmes désespérées qui viennent la voir pour les “libérer”.
Mais “grâce”, c'est surtout le cri de douleur des femmes battues, violentées, meurtries par les hommes et par ce siècle dur.
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Quand j'ai su que Clémentine Beauvais avait publiée un nouveau livre, en vers libres, je ne pouvais pas résister.

Que dire ? Cet ouvrage est éblouissant, enchanteur, et vertueux. Clémentine Beauvais est une déesse de l'écriture, elle manie les mots avec une telle intelligence.
Je n'ai qu'une recommandation à faire à tous les amoureux de la lecture, allez vous procurer ce bijou dès maintenant si ce n'est pas encore fait.
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Texte magnifique, éblouissant inspiré du poème de Baudelaire "une charogne". L'auteur invente la vie de cette charogne retrouvée "au détour d'un sentier" . Elle invente la vie de cette femme prénommée Grâce qui sera couturière d'abord et qui par son habileté va recoudre des femmes battues. Elle deviendra ensuite faiseuse d'anges toujours pour aider ces femmes. Ce texte explique pourquoi et comment elle deviendra charogne "ce beau matin d'été si doux au détour d'un sentier".
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Fini de lire "Décomposée" de Clémentine Beauvais, un très court roman en vers libres qui extrapole la vie de la femme évoquée dans "La charogne" de Charles Baudelaire.
Une composition audacieuse, originale, amusante, engagée. Un livre encore très réussi de l'auteure qui m'épate à chaque fois par son talent.
Un livre qui se situe entre roman et poème
Seul bémol, c'est un peu court pour un roman.
Une jolie découverte.
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Quand j'étais au lycée, j'étais une caricature : celle de la fille en section littéraire ! Les vêtements achetés aux puces, les doc martens élimées, le long manteau informe, les cheveux longs, assise devant le lycée à fumer des clopes en parlant philo, histoire et littérature avec mes amis… toujours un livre dans mon sac (ça par contre ça n'a pas changé !), je lisais et relisais mes textes et auteurs préférés. Il y avait Antigone d'Anouilh, Des souris et des hommes de Steinbeck, les Ethiopiques de Senghor et bien sûr Les fleurs du mal de Baudelaire. Si j'avais une passion particulière pour le Spleen (Quand le ciel bas et lourd pèse comme un couvercle/Sur l'esprit gémissant en proie aux longs ennuis,/Et que de l'horizon embrassant tout le cercle/II nous verse un jour noir plus triste que les nuits (…) oui, j'étais vraiment joyeuse comme ado…), La charogne est également de ceux qui m'ont particulièrement marquée.

Clémentine Beauvais a probablement été aussi bouleversée que moi par ce poème, pour s'en inspirer dans ce roman/poème en vers libres fascinant. Elle donne la parole à Grâce, qui avant d'être une charogne abandonnée dans un fossé, a été une fille, une soeur, une amante, une femme. Une fille née dans une famille pauvre, une soeur qui a protégé ses cadettes, une amante qui a aimé follement, une femme qui à l'aide de ses aiguilles a aidé d'autres femmes dans une situation délicate… Ce n'est pas seulement l'histoire de Grace, c'est l'histoire de toutes ces femmes, soumises à la violence ou au bon vouloir des hommes, ces femmes qui ne pouvaient être que pute ou épouse.

Clémentine Beauvais a pris le risque de s'emparer d'un poème d'un des grands noms de la littérature, mais la prise de risque en valait la peine, car elle nous offre un texte intense et bouleversant.
Lien : http://tantquilyauradeslivre..
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Comme un exercice style, Clémentine Beauvais nous livre son interprétation de la charogne de Charles Beaudelaire.
Avant d'être réduite à un corps en décomposition, lascif sous les regards des passants ; qui était cette femme abandonnée là ? Quelles furent les réactions du poète et de sa muse à la vue de ce cadavre ? Quelle destinée tragique fut la sienne pour se terminer ainsi ?
Autant de questions que l'autrice se pose dans ce court roman ? Long poème ? Un entre deux, comme ce destin de femme à la fois : prostituée, chirurgienne, médecin ou tueuse en série.
Autant de facettes qui répondent à un seul mal : la violence des hommes.
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