La Mort à Nu. À noter que le titre original, the Chemistry of Death, évoque plutôt la science de la mort, son processus, son mécanisme chimique. Cest dailleurs ce que
Beckett nous explique dès les premières pages. Lauteur le dit dans les remerciements, linfluence qua eu sa visite à la fameuse Ferme des Corps est lessence même du livre. Lhistoire prend un peu son temps à démarrer mais elle fixe en même son lecteur sur les détails de cette vie aux apparences tranquilles, dans ce petit village anglais.
Moi ce que jadore, cest les possibilités quoffre la narration à la première personne, au lecteur. Pourquoi faire dire « Je » au narrateur ? Pour permettre à la personne qui tourne les pages une plus rapide identification au héros. Car nous allons dès le départ pouvoir donner un nom à ce narrateur, Doc Hunter ! Déjà que le démarrage pépère nous permet de déterminer le cadre de vie du Docteur Hunter et de prendre nos /ses repères. Nous nous installons quasiment en même temps que lui. « Je « = « Doc »= « Moi ».
Mais en faisant de lui le conteur de cette histoire, nous avons vraiment limpression de lire un compte rendu, un journal intime de ce quil sest
passé. Nous nous doutons bien que si le narrateur nous raconte ce quil lui est arrivé, cest que nous allons le retouver dans les dernières pages Bien sûr, nous allons alterner les chapitres où laction se focalise sur le Doc avec ceux qui suivent la futur victime, ou dautres personnages. Dans ce cas là, Hunter nest
pas omniscient et cest bien lauteur/narrateur qui raconte ce quil se
passe, en reprenant la troisième personne à laquelle nous sommes plus familiers.
Là où ce genre dexercice devient vraiment un petit régal, cest quand le Doc Hunter, à quelques occasions, prévient son lecteur : Au cours des jours suivants, jen viendrais à considérer cet après-midi comme lun des derniers moments de calme avant la tempête.
Ou encore : Je ne savais
pas encore à quel point je me trompais. Jadore ce genre davertissements quand cest fait avec modération, comme cest le cas ici.
Cest bien écrit, cest vif,
Beckett ne perd
pas de temps à faire des descriptions inutiles, il va droit à lessentiel. Ça ne lempêche
pas dutiliser des ficelles du genre, auxquels nous sommes bien familiarisés, ce qui fait que la plupart des évènements de la fin de lhistoire peuvent être prévisibles mais je nen ferai
pas reproche à lauteur puisquil se plis à lexercice de style du genre. Qui a commis les meurtres, qui va mourir, qui va survivre, quels sont les indices qui nous pendaient au nez, etc. ?
Calmann-Lévy nous a proposé deux nouveaux auteurs à découvrir (
Simon Beckett et
Gillian Flynn), avec deux premiers romans aux pitchs quasi identiques mais avec deux traitements différents : les deux héros sont confrontés à des meurtres atroces commis dans une ville qui est un personnage à part entière. À noter que Flynn et
Beckett sont des journalistes et quils sont familiarisés avec les histoires quils racontent.
Alors que Flynn va plutôt sorienter vers des habitants un peu décalés et qui prêtent à sourire,
Beckett lui nous présente des habitants un peu plus ruraux qui ont lhabitude de se retrouver au rade du coin pour partager un bon demi
Alors le cocktail détonnant alcool+peur de létranger crée une petite tension supplémentaire, un autre courant contraire qui va gêner le héros dans sa quête de vérité. Cette petite ville nest
pas sans me rappeler Castle Rock où un certain Leland Gaunt avait eu loccasion de faire un carnage en y semant la zizanie dans le roman Bazaar de
Stephen King. Bon à Norfolk, nous sommes loin de lexplosion de haine du roman précité mais on peut comparer cette tension palpable qui se cache dans chaque recoin de la ville
Je suis donc ravis davoir eu lopportunité de découvrir le premier roman dun auteur qui va faire parler de lui ces prochaines années.