🐎 « C'est si troublant d'être amoureux, on est dans un tel état d'excitation, euphorique un jour, désespéré le suivant, on se traîne dans les fossés au bord de la route, on vomit un peu de sang, oui. On rince ses yeux bleus et on expose l'infection au monde : Vous avez vu. On se fiche des claques, puis on serre ses bras autour de sa poitrine, pour se consoler, on bâille, on referme ses lèvres sur un épi de maïs, on le croque à pleines dents, on prend un chaton dans ses bras, on regarde le soleil se coucher en plissant les yeux à l'horizon, au revoir. »
(P.76)
🐎 Björn a quinze ans quand il tombe amoureux de son professeur d'équitation. Son coeur et son corps se retrouvent sous l'emprise d'un sentiment inconnu jusqu'alors, un raz-de-marée le submerge, fait de passion et de douleur, d'amour et de haine, d'abandon total et de désir intense. Commence alors une sorte de crispation, un conflit intérieur qui donne naissance à une ambivalence quasi maladive, incontrôlable, infernale : incapable de le dompter, son corps doit souffrir. Il y a le sang, les blessures, les écorchures : il faut rendre physique ce mal qui le ronge. La laideur de ses pulsions, la soif de sexe, le besoin d'avoir mal, le langage cru le conduisent à une soumission totale, animale. Bjorn devient chose, objet du désir de l'autre, pantin manipulable à l'envi.
🐎 Et puis il y a la lumière, la transcendance, la beauté d'un amour pur, l'abnégation totale, l'ascèse vers une soif d'absolu. La disgrâce se transforme, la souffrance est une lutte contre lui-même, contre cet homme, contre le monde ; jaillit alors la somptuosité d'un combat effréné, l'intellectualisation des peurs et des doutes.
🐎 Écrit en 2011, traduit en français l'an passé, ce roman est une oeuvre d'art insaisissable, tantôt révulsante, tantôt sublime. L'auteur expose la noirceur des élans du corps, de ses pulsions animales, toute sa bestialité et la confronte aux besoins d'absolu, à la beauté de l'Amour, a la nécessité d'une transcendance, d'une élévation de l'âme. Il m'est impossible de vous le conseiller, tout comme je ne pourrais vous me déconseiller. L'auteur défait les règles de narration, il invente un style qui lui est propre. Il me semble que c'est ce vers quoi la littérature doit tendre : une perpétuelle réinvention.
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Bien, bien, bien...
Je referme tout juste le roman de Bjørn Rasmussen et je suis bien en difficulté pour vous en faire un retour clair et objectif.
Tout d'abord le thème même du roman ne peut pas laisser indifférent: la relation "amoureuse" entre un ado de 15 ans et un moniteur d'équitation de 20 ans son aîné. Attention! Je mets bien des guillemets à "amoureuse", d'autant plus que cette relation va s'avérer violente et toxique.
Ensuite le style de la narration. Chaotique. Sans règles d'écriture. Avec des phrases parfois inachevées. Passant d'un style narratif à un autre (du "je" au "Bjørn" sans réelle logique), de l'hyper réalisme à la poésie.
Enfin le vocabulaire choisi. Cru. Violent. Il donne vie à des scènes parfois difficilement supportables car trop réelles, sales, dérangeantes. Tout pour me déplaire à vrai dire!
Alors tout cela mis bout à bout, j'aurais envie de dire que j'ai détesté ma lecture. Et pourtant... ce n'est pas le cas. Lorsque j'ai commencé à me mettre à la place du protagoniste, Bjørn donc, j'ai eu la sensation que l'auteur exprimait exactement l'urgence, la folie, la violence vécues par le jeune homme. La plume est trash et dérangeante comme le sont ses pensées, son vécu. L'auteur semble avoir fait le choix de happer le lecteur dans une toile, un piège, emplis de salissures et de magma suintant.
Ça fait son effet, en ce sens c'est parfaitement réussi.
Je ressors donc de cette lecture totalement désorientée et dans l'incapacité d'exprimer clairement mon ressenti, hormis le dégoût et le questionnement. Ce livre ressemble à une expérience. A vous de voir si vous souhaitez la mener ou pas...
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Voilà un OLNI (Objet Littéraire Non Identifié) étrange et bienvenu. le livre est court et le style très rythmé, ce qui rend l'ouvrage facile à lire. le style est aussi très particulier et très personnel, il est probable qu'il ne plaise pas à tout le monde mais en tout cas il est original. Contrairement à ce que dit la 4e de couverture ou les résumés sur les sites littéraires, il ne s'agit pas de la description d'une relation sado-masochiste, qui est très secondaire, mais plutôt de l'histoire de la détestation de son corps de la part de quelqu'un qui se sent homme et femme et qui n'a accès à aucune référence pour pouvoir l'accepter. le roman est cru, violent, dur, et n'est donc pas à mettre dans toutes les mains. Lecture avant tout destinée aux amoureux des livres.
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Il lance la jument au galop dans les chaumes, une écume abondante se forme aux commissures de ses lèvres, et voilà le bruissement de l'océan, les crêtes des vagues qui se recroquevillent avec un long bruit de succion et déferlent sur la plage. Il établit son campement au creux d'une dune, la jument broute distraitement le seigle de mer, en liberté, guettant le moindre signe de sa part. A la nuit tombée, il chevauche nu dans les vagues. Quand la jument se met à nager, il s'accroche fermement à sa crinière et se couche sur son dos. Elle projette les genoux en avant à un rythme puissant et régulier, le clair de lune, la phosphorescence, les particules lumineuses autour de sa robe.
Bjørn suce les bites comme un dieu, Bjørn peut prendre dans sa bouche une verge de vingt-deux centimètres, l'enfoncer jusqu'à la garde et quand même se servir de sa langue sur deux testicules gonflés, une langue de chat qui lèche deux pigeons tout juste sortis de l'œuf jusqu'à ce qu'ils soient bien propres, la gorge de Bjørn est une grotte tiède et gourmande, Bjørn avale le sperme comme si c'était le lait et le miel de la Terre promise.
Cette image : ma mère au milieu de la cour, son regard halluciné, sa bouche entrouverte, ses lèvres tremblantes. Les grands animaux morts dans ses bras ; le poulain avorté, les poulets décapités, le chien, les chiens. Les pattes, les organes débordant de son sein, plumes, poils, sang.
Pupilla signifie "petite poupée" et le nom fait référence à l'image diminuée que l'on a de soi à la surface de la cornée, lorsqu'on regarde quelqu'un dans les yeux.